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Julien-Jean LE MARÉCHAL, prêtre guillotiné à Rennes
en exécution de la loi des 29-30 vendémiaire an II.

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Julien-Jean LE MARÉCHAL et les Demoiselles Marie-Madeleine et Marie-Anne DU FRESNE DE RENAC, ses receleuses.

92. — Julien-Jean LE MARECHAL naquit à Vieuviel, dans le canton actuel de Pleine-Fougères, le 24 avril 1765, de Julien et de Jacquemine Le François et fut baptisé le jour même. Nous le trouvons tonsuré et minoré à Rennes le 24 décembre 1786, sous-diacre le 22 mars 1788 et diacre dans la même ville le 20 décembre de cette même année. Enfin, il reçut la prêtrise à Dol le 16 décembre 1789, en vertu d’un dimissoire de son évêque Mgr de Girac.

Nommé vicaire à Ossé presque aussitôt son ordination, il fut au bout d’un an de ministère mis en demeure de s’assermenter. Il s’y refusa et figure, à la date du 27 mars 1791, parmi les ecclésiastiques, fonctionnaires publics du district de Vitré, qui n’ont pas juré fidélité à la Constitution.

En exécution de l’arrêté du département d’Ille-et-Vilaine du 16 juin 1791, qui le chassait de ses fonctions, M. Le Maréchal dut, en qualité de vicaire insermenté, abandonner la paroisse d’Ossé. Il s’en vint alors résider à Vieuviel où il resta trois semaines, puis il s’en alla habiter à Saint-Laurent près Rennes, chez une famille Prioul dent il était parent. Il y toucha pour la dernière fois 175 livres de pension le 30 janvier 1792, pour un trimestre échu depuis le 8 octobre précédent.

A la suite de l’arrêté pris le 14 avril 1792 par le Conseil général d’Ille-et-Vilaine, l’abbé Le Maréchal se fit inscrire le 10 mai suivant comme habitant Rennes, à l’auberge « A la Fleur de Lys », puis chez les demoiselles Morin, rue Derval. Renfermé à Saint-Melaine le 14 août 1792, ainsi que tous les prêtres réunis au préalable dans cette ville, le vicaire d’Ossé fut avec eux déporté d’office à Jersey par Saint-Malo le 14 septembre suivant.

93. — M. Le Maréchal ne demeura que deux mois en cette île : son zèle le rappelait, en Bretagne. Au prix d’innombrables dangers, il réussit à débarquer sur les côtes de Saint-Coulomb.

D’après les propres déclarations de l’ecclésiastique en question, il vint de là directement à Rennes et ne mit que trois jours à franchir la distance qui le séparait de cette ville, où ce prêtre devait avoir certainement des amis et connaissances. On ne peut douter qu’il ne s’employa utilement à Rennes et aux environs. Un certain nombre de certificats d’actes de baptêmes et de mariages, trouvés sur lui lors de son arrestation, en sont une preuve irréfutable.

94. — En 1794, deux sœurs, Marie-Madeline, née à Rennes le 6 juin 1753, et Marie-Anne-Catherine Dufresne de Renac, née à Rennes le 26 juillet 1756, habitaient ensemble l’hôtel de Bonnefonds, situé à Rennes dans la rue actuelle de Belair, au bas de la Motte. N’ayant point contracté mariage, elles avaient vu leur père et leurs deux frères émigrer en 1791, mais elles avaient préféré rester en Bretagne et elles vivaient à Rennes d'une façon fort simple, uniquement occupées de bonnes œuvres.

Un jour que Mme Bruté se promenait du côté de leur hôtel, l’une des demoiselles de Renac lui fit signe d’approcher : « Madame Bruté, lui dit-elle, voudriez-vous avoir la messe aujourd’hui ? » — A cette époque, c’était un privilège inestimable d’assister au saint sacrifice dont les catholiques étaient privés depuis si longtemps. La persécution venait même de devenir encore plus sévère par la publication d’un décret qui punissait de mort, dans les vingt-quatre heures de leur arrestation, ceux qui donnaient refuge à un prêtre et le prêtre lui-même.

« D’après ces motifs, ma mère — ajoute Mgr Bruté — crut devoir ne pas se rendre à l’invitation des dames de Renac, et elle les engagea vivement prendre plus de précautions, leur disant qu’elles devaient s’estimer trop heureuses si elles pouvaient sauver la vie du prêtre et la leur ». Celui qu’elles cachaient dans leur hôtel n’était autre que l’abbé Julien Le Maréchal, qu’elles recelaient depuis six mois dans un grenier, où elles avaient pratiqué une cache.

95. — Malheureusement ses pieuses hôtesses manquaient peut-être un peu de prudence et leur maison fut dénoncée aux autorités révolutionnaires, ainsi qu’en témoigne la pièce suivante, datée du 9 août 1794 (22 thermidor an II) :

« Le Comité de surveillance de Rennes, sur communication à lui donnée par un particulier, qu’il existe à Rennes différents individus ennemis de la chose publique, entre autres plusieurs prêtres réfractaires, au ci-devant hôtel de Renac, chez les habitants de cette maison, prenant ces indications en grande consideration arrête que son président convoquera tous ses membres pour ce soir neuf heures, afin que, de conserve, il soit pris les mesures nécessaires pour arrêter ces ennemis du bien public » (Fonds du Comité de surveillance de Rennes, aux Arch. d'I.-et-V.) [Note : Suivant une tradition, la cache de M. Le Maréchal aurait été découverte par un couvreur, nommé Vaillant, qui s’empressa de le dénoncer pour gagner la prime promise].

Alléchés par l’annonce d’une chasse aux prêtres réfractaires, les membres du Comité ne faillirent pas au rendez-vous. L’expédition fut vite décidée. Après s’être adjoint le fin limier qu’était André Valleray, l’on se mit en marche dans la nuit, accompagné d’un détachement de la compagnie des grenadiers du 3ème bataillon de la garde nationale de Rennes.

Voici intégralement reproduit le procès-verbal de l’arrestation de l’abbé Maréchal ainsi que des demoiselles qui lui donnaient asile. On y verra que les recherches furent fort laborieuses et faillirent même demeurer infructueuses, puisque ce ne fut qu’aux sept heures du matin que l’on parvint à découvrir l’ecclésiastique que l’on traquait. Qu’on lise plutôt :

« En vertu de notre arrêté du 22 thermidor an II (9 août 1794), nous nous sommes transporté chez le citoyen Guignet, rue de Paris, près la Motte, au ci-devant hôtel de Bretagne (sic), et nous, en compagnie du citoyen Valleray et de plusieurs grenadiers de la garde nationale de Rennes, nous avons sommé le citoyen Guignet de nous faire l’ouverture de ses appartements et de toutes ses fermetures. Ce qu’il a déféré sur le champ, et après une vérification scrupuleuse dans tout son jardin, nous n’avons rien trouvé de suspect ; puis dans la même maison, qui était occupée par les citoiens (sic) dont l’une se nomme Marie-Madeleine du Fresne de Renac et l'autre Marie-Anne du Fresne de Renac, toutes deux sœurs, et ayant frappé à la porte et soupçonnant qu’il pouvait s’y trouver des prêtres réfractaires, tel qu'il nous était dénoncé, la porte nous étant ouverte par Marie-Madeleine de Renac, nous avons fait les perquisitions pendant plus de quatre heures. Ayant trouvé une petite boîte de fer blanc dans qui il se trouva des hosties et plusieurs pains à chant, nous avons redoublé nos perquisitions et, sur les sept heures et demie du matin, derrière un lit et derrière une cloison de terrasse, et après l’avoir enfoncée à coups de hache, il s’est trouvé le nommé Maréchal Jean, prêtre réfractaire, et avec lui tous les ustensiles de son métier ».

Furent saisis avec M. Le Maréchal trois procès-verbaux d'actes de baptêmes établis à Rennes à la date des 17 août et 9 décembre 1793, pour des enfants nés à Rennes.

En plus, dix procès-verbaux de célébration de mariages établis à Rennes, pour des paroissiens d’Ossé, de Châteaubourg, de Domagné et de Saint-Jean de Rennes, espacés du 21 mai 1793 au 12 janvier 1794.

96. — Les révolutionnaires étaient parvenus à leurs fins. Ils s’en allèrent joyeux. Le gibier saisi constituait une proie assurée pour la guillotine. Quant au malheureux prêtre qu’ils emmenaient avec eux, il était littéralement consterné : non seulement lui-même se savait perdu, mais il entraînait dans sa perte les personnes généreuses qui l’avaient recueilli. L’émotion qu’il ressentit fut trop violente pour ses forces physiques et, tout le jour de son arrestation, il fut privé, de son propre aveu, de la conscience de ses actes et de ses paroles, tant et si bien que ce ne fut que le lendemain, c’est-à-dire le 11 août, qu’on put lui faire subir son premier interrogatoire devant les membres du Comité révolutionnaire de Rennes. On l’a publié ailleurs.

M. Le Maréchal y reconnut sans hésiter sa qualité de prêtre réfractaire rentré en France malgré les décrets. Il évita par ailleurs, dans ses réponses, de compromettre personne en dehors des demoiselles de Renac et de leurs domestiques, avec lesquels il ne pouvait nier avoir eu de fréquents rapports. Quant aux demoiselles de Renac, interrogées la veille, leurs réponses, surtout celles de Marie-Anne, sont tout simplement admirables de prudence, de force et d’énergie et rappellent ce qu’il y a de plus beau chez les martyrs de la primitive église.

97. — On avait incarcéré Marie-Anne de Renac et l’abbé Le Maréchal à la Porte Saint-Michel, en recommandant de les tenir au secret; quant à Madeline et aux domestiques, les époux Jean et Angélique Langlois, c’est à la Tour Le Bat qu’on les mit tout d’abord. On ne réunit ensemble les deux sœurs à la Porte Saint-Michel, dite alors Porte Marat, que le 12 août, sur l’ordre des juges du Tribunal criminel.

C’est ce même jour que les prévenus comparurent successivement devant le citoyen Nouail, l’un des juges de ce tribunal. L’abbé Le Maréchal réitéra ses déclarations concernant sa qualité de prêtre réfractaire, déporté et rentré en France. Il refusa de donner les noms des premières personnes qui l’avaient caché à Rennes à son retour d’exil et garda le silence lorsqu’on lui présenta les preuves écrites qu’il avait fait du ministère aux environs de Rennes. A la fin de son interrogatoire, on lui présenta une boite contenant des hosties consacrées et trois ampoules renfermant les saintes huiles. M. Le Maréchal reconnut le tout pour lui appartenir. Nous insistons sur ce point, parce qu’il est vraisemblable que ces objets sacrés étaient demeurés parmi les pièces à conviction devant le juge, lorsque Marie-Anne de Renac fut amenée à son tour devant le magistrat. Ses réponses alors ne démentirent en rien la fermeté de son attitude devant le Comité révolutionnaire. Cette fois encore, le juge en fut pour ses frais, ainsi qu’on pourra s’en convaincre en se reportant au procès-verbal de son interrogatoire qui a été reproduit ailleurs. Marie-Madeline, sa sœur, eut aussi une attitude fort digne. Elle hésita seulement dans une de ses réponses, dans le but de sauver la vie à son domestique.

C’est à la fin de l’interrogatoire des deux sœurs qu’il faut placer l’épisode plusieurs fois reproduit.

« Ces pieuses personnes apercevant sur la table du Tribunal des pièces à conviction, les saintes hosties saisies chez elles, se jetèrent à genoux, adorant Notre-Seigneur livré aux mains des impies, et demandant avec larmes qu’on permît à M. Le Maréchal de les leur donner, mais on leur refusa cette dernière consolation du divin Viatique et, malgré les protestations du prêtre, les saintes Espèces furent profanées ».

98. — Le 26 thermidor (13 août), le Tribunal criminel d’Ille-et-Vilaine condamna à la peine de mort « Julien-Jean Le Maréchal, prêtre réfractaire, ex-vicaire de la commune d’Ossé, convaincu d’avoir été légalement déporté (comme insermenté) et d’être rentré sur le territoire de la République au mépris des lois. — Marie-Anne-Catherine du Fresne et Marie-Magdelaine du Fresne, dites de Renac, sœurs, ex-nobles, convaincues d’avoir sciemment recélé chez elle ledit prêtre ».

Le même jour les trois victimes furent conduites au supplice; le bon abbé Le Maréchal exhorta ses pieuses compagnes lorsqu’elles montèrent sur l’échafaud dressé sur la place du Palais, puis lui-même gagna à son tour la sinistre plate-forme et subit le martyre avec une admirable piété. En même temps, suivant la teneur du jugement, on brûla au pied de l'échafaud les hosties consacrées ainsi que les saintes huiles saisies chez les demoiselles de Renac et qualifiées dans le libellé de la condamnation de « hochets du fanatisme », car telle était la mentalité des Jacobins révolutionnaires et leur haine anti-religieuse.

L’histoire des demoiselles de Renac est demeurée toujours vivante parmi les pieux fidèles de la ville de Rennes, et nous ne croyons pas trop nous avancer en écrivant qu’à leur glorieux trépas, ainsi qu’à celui du prêtre auquel elles donnaient asile, s’ajoute tout naturellement dans la bouche de ceux qui en parlent l’épithète de « martyrs ». Des membres de leur famille, (qui gardent avec vénération de nombreuses pièces de leur mobilier), ainsi que des parents de M. Le Maréchal, conservent encore maintenant cette même conviction.

BIBLIOGRAPHIE. — Tresvaux du Fraval, Histoire de la Persécution, etc., op. cit., t. II, p. 106-107. — Bruté de Rémur, Souvenirs de la Persécution révolutionnaire à Rennes. (Revue de Bretagne et Vendée, t. IX, p. 54.) — Guillotin de Corson, Les Confesseurs de la Foi, etc., op. cit., p. 57-60. — (Anonyme) : Rennes et l'Hôtel d'Armaillé pendant la Révolution, in-8°, Saint-Brieuc, 1857 ; ouvrage rédigé d’après des souvenirs confus et rempli de légendes. — Abbé Lemasson, Les Actes des prêtres insermentés de l’archidiocèse de Rennes, etc., p. 137-154 renferment les pièces officielles de ce procès.

(Dossier n° 267 des actes du tribunal criminel d’Ille-et-Vilaine, série B, Parlement, conservé aux archives d'Ille-et-Vilaine).

(Articles du Procès de l'Ordinaire des Martyrs Bretons).

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