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LE SEMINAIRE DE VANNES

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Après l'évêché de Vannes, après le chapitre de la cathédrale, vient naturellement le séminaire du diocèse : ainsi se complète la trilogie des grands établissements du clergé séculier. Pour avoir une connaissance complète du séminaire, il faut, comme pour les autres établissements, l'étudier dans le passé et dans le présent. 

Séminaire de Vannes

 

I. SEMINAIRE PRIMITIF.

La formation intellectuelle et morale des élèves du sanctuaire a été, dans tous les siècles, la grande préoccupation de l'Eglise. Les moyens et les méthodes ont pu varier dans la suite des âges, mais le but est resté constamment le même : l'instruction et la sanctification des ministres sacrés, pour arriver à l'instruction et à la sanctification des fidèles.

A Vannes, comme dans les autres diocèses de France, le premier séminaire fut la maison de l’évêque. Au Vème siècle, lors de l’érection du siège épiscopal, tous les membres du clergé de la ville, prêtres, diacres et clercs inférieurs, vivaient en commun avec l’évêque, et partageaient leur temps entre les offices de l’église cathédrale et l’étude de la science sacrée. 

L’évêque était le supérieur naturel de cette école ecclésiastique et en cas d’absence, il était remplacé par l’archidiacre ; un des prêtres de la communauté était spécialement chargé de l’enseignement, et portait le titre de scolastique ou d’écolâtre, ou de maître d’école ; il pouvait avoir des aides, car le cours des études comprenait la grammaire, l'Ecriture sainte, la théologie, le droit et l’histoire (Thomassin. — Discipl. II. 30.)

Outre l’école épiscopale de Vannes, il y eut aussi une école monastique à l’abbaye de Rhuys, pour la formation des jeunes religieux, et au besoin pour l’instruction des clercs séculiers. Ainsi l’on voit, au VIIème siècle, saint Gobrien, futur évêque de Vannes, se rendre à Rhuys , pour  y étudier la théologie et l'Ecriture sainte sous la direction d’un religieux qui les enseignait alors avec un grand éclat (Act. S. Gobrien).

Les aspirants au sacerdoce qui ne pouvaient se faire entretenir ni dans la ville épiscopale, ni dans un monastère, et spécialement les clercs de la campagne, étudiaient en particulier sous la direction d’un prêtre de leur paroisse ; et lorsqu’ils voulaient recevoir les ordres sacrés, ils étaient obligés de venir passer quelque temps à l’école épiscopale, pour compléter leur instruction et subir des examens.

Voici, en effet, comment s’exprime le concile provincial de Tours, en 813, dans son 12ème canon : « Le prêtre ne doit pas être ordonné avant l’âge légitime, c’est-à-dire avant sa 30ème année ; avant de se présenter à l’ordination, il devra séjourner à l’évêché, pour y apprendre son office, jusqu’à ce qu’on puisse se rendre compte de sa vie et de ses moeurs, et c’est alors seulement qu’il pourra être promu au sacerdoce, s’il en est trouvé digne » (Labbe VII. 1262).

Trois ans après, en 816, le concile national d’Aix-la-Chapelle fait les recommandations suivantes au canon 135 : « Les évêques, gouverneurs des églises, doivent veiller attentivement à ce que les enfants et les jeunes gens qui sont nourris et instruits dans la communauté des chanoines, et sous la surveillance épiscopale, soient tellement façonnés à la discipline ecclésiastique qu’ils puissent traverser sans péché cet âge dangereux et porté au mal… C’est pourquoi il faut confier ces jeunes gens à un confrère ancien et éprouvé, quand même ils seraient instruits par un autre …, afin qu’ils servent utilement l'Eglise, et qu’ils puissent se rendre dignes d’être admis plus tard aux ordres ecclésiastiques » (Labbe. VII. 1400).

Bientôt les pirates normands vinrent infester nos côtes ; ils furent écrasés à Questembert en 888 par Alain Ier, comte de Vannes. Ils revinrent à la charge en très grand nombre en 919, et cette fois ils promenèrent le fer et le feu depuis la Vilaine jusqu’au Blavet la ville de Vannes fut prise, la cathédrale brûlée et le chapitre dispersé. Après une occupation de 18 ans, ils furent enfin définitivement expulsés en 937 par Alain II, surnommé Barbetorte.

Aussitôt après, l’évêque rétablit le chapitre et l’école ecclésiastique ; deux établissements de première nécessité, l’un pour servir la cathédrale, l’autre pour fournir des prêtres aux paroisses.

Un siècle plus tard, en 1078, le pape Grégoire VII, dans un concile tenu à Rome, insista sur la nécessité d’avoir partout des écoles ecclésiastiques près des cathédrales ; les maîtres étaient ordinairement des chanoines. A Vannes, on trouve en 1116 un certain Abraham, maître de l’école ecclésiastique ; ce personnage vivait encore en 1132 et était chanoine de la cathédrale (Pr. Saint-Martin).

En 1179, le troisième concile général de Latran renouvela l’obligation, pour chaque église cathédrale, de doter un maître pour instruire gratuitement les clercs et les écoliers pauvres. La même obligation fut étendue aux monastères qui avaient eu précédemment une dotation à cet effet (Labbe X. 1518).

A Vannes la loi était toujours fidèlement observée, et l’on rencontre, en 1190, Yves, maître des écoles de la ville. A cette époque, les prêtres des paroisses rurales enseignaient les éléments de la grammaire aux enfants de leur voisinage, puis ils choisissaient parmi eux les sujets les plus capables pour leur enseigner le latin, et s’ils remarquaient en eux des signés de vocation à l’état ecclésiastique, ils les initiaient à la théologie, ou les envoyaient étudier près du scolastique de la cathédrale. Les leçons étant gratuites, il ne restait à fournir que la pension.

Déjà s’était établie une distinction entre le scolastique et le précepteur ou maître d’école. Le premier s’était réservé l’enseignement de la théologie aux jeunes clercs et l’examen des ordinands ; il faisait aussi des leçons de théologie ou d'Ecriture sainte aux chanoines et des sermons au peuple. Le second était spécialement chargé des enfants, auxquels il apprenait la lecture, l’écriture, la numération et même le latin. Le premier avait été élevé par Innocent III au rang de dignitaire dans l’église cathédrale. Le second pouvait être chanoine, mais il ne l’était pas toujours ; souvent il n’était qu’un simple maître d’école rétribué par le chapitre.

En 1215, au quatrième concile général de Latran, le même pape Innocent III renouvela l’obligation d’avoir dans chaque église cathédrale un maître d’école, chargé de l’enseignement de la grammaire, et voulut de plus qu’il y eût dans chaque église métropolitaine un théologal proprement dit, chargé de l’enseignement de la théologie : il n’étendit pas cette obligation aux cathédrales, le scolastique y suppléait provisoirement. Les Jeunes gens, pourvus de ressources suffisantes et désireux de compléter leur instruction, pouvaient aller étudier auprès du théologal métropolitain, et encore mieux auprès de l’université régionale. L’université de Paris jetait alors un vif éclat, et les grades qu’elle conférait étaient si appréciés qu’ils donnaient accès aux bénéfices les plus importants. Les élèves pauvres restaient forcément au pays et se contentaient de remplir des fonctions subalternes.

A Vannes, on trouve, en 1219, un chanoine nommé Palmier ou Palmarius, « maître des écoles de la ville » (Lanvaux).  Nouvelle preuve que la loi de l'Eglise était toujours observée dans notre cité. Le titre de « maître des écoles » prouve aussi qu’il ÿ avait alors plusieurs lieux de réunion pour l’instruction des élèves. Ce maître était à la nomination collective de l’évêque et du chapitre, conformément à la décision du IVème concile de Latran.

On trouve aussi en 1280 le chanoine Derian comme scolastique et non comme précepteur : les deux fonctions étaient toujours séparées.

Au XIXème siècle, la situation resta la même. Le chapitre donnait au précepteur, « chargé d’enseigner la jeunesse de Vannes en la langue latine », qu’il fût chanoine ou non, un traitement fixe, qu’on appelait « prébende préceptorale ». Le 24 janvier 1328 (V.. S.) Jean Le Parisi, évêque de Vannes, trouvant ce traitement insuffisant, y ajouta une partie des dimes de Saint-Avé. Cette portion, fixée quelque temps après au chiffre de 60 perrées de seigle, et estimée valoir alors 15 livres monnaie, à raison de 5 sous par perrée, valait au début du XXème siècle environ 1,200 francs. La prébende préceptorale valait autant, sinon davantage.

Quant au scolastique, il continuait à Vannes son enseignement théologique ; mais les universités et les collèges, en se multipliant, lui enlevaient des élèves et diminuaient ainsi son importance. Outre l’université de Paris et les divers collèges de la Capitale, les étudiants occidentaux eurent en 1302 l’université d’Orléans, en 1398 celle d’Angers, en 1431 celle de Poitiers, et en 1460 celle de Nantes.

Pendant ce temps les. scolastiques de Vannes furent : - Jean Berthou, mentionné en 1323 ; Olivier Le Séneschal, cité en 1329 ; Pierre de Talenhoet, mentionné en 1350 ; Guillaume Maurice, rencontré en 1379 ; Guillaume Huguet, cité en 1388 et 1398 ; Richard de Penmorvan, mentionné en 1417 et 1420. Après une lacune considérable : Yves du. Quirissec, de 1487 à 1523.

Il nous reste de ce dernier une formule pour la nomination d’un maître d’école, qui prouve que tous les instituteurs étaient alors clercs, et qu’ils dépendaient du scolastique, comme ils dépendent aujourd’hui de l’inspecteur d’académie. Voici la traduction ile cette pièce intéressante : « Yves du Quirissec, scolastique de l’église de Vannes, à tous ceux qui auront connaissance des présentes lettres, salut dans le Seigneur, et foi absolue dans leur contenu. Sachez que, pleinement informé de la science littéraire, de l’honnêteté de la vie et moeurs, et des autres louables mérites d’honorable homme, maître N..., clerc du diocèse de Vannes, nous le députons, le créons et l’instituons présentement au gouvernement et à la conduite des écoles, dans la paroisse de N..., de ce diocèse, en se faisant aider d’un adjoint pour le chant ;  Nous lui confions, par la teneur des présentes, et pour un an, à partir de la date de ces lettres, le soin, le gouvernement et l’administration des dites écoles, avec tous les honneurs, charges, privilèges, libertés et émoluments y attachés par le droit et la coutume ; et nous défendons à que ce soit, de quelque état, grade ou condition qu’il soit ; sous peine de soixante livres d’amende ; à employer en œuvres pies, de s’ingérer ou de s’immiscer en dehors dudit maitre, de quelque manière que ce soit, dans l’exercice de cette fonction, à l’avenir, ou d’empêcher le dit N..., par un moyen quelconque, de gouverner et de diriger les dites écoles. En foi de quoi, nous avons ordonné de dresser nos présentes lettres, et d’y mettre notre petit cachet, à défaut de notre grand sceau, le dit maître ayant juré entre nos mains de se bien et fidèlement conduire dans le gouvernement de ces écoles. Donné et fait le... jour... mois et an » (Recueil de formules).

Yves du Quirissec, scolastique, eut pour successeurs Bertrand de Quifistre en 1524 ; Guy de Quifistre en 1530 ; Guillaume Drouillart en 1537, jusqu’en 1555. 

Du temps de ce dernier fuit décidée une importante modification. Les scolastiques, devenus moins nécessaires depuis d’établissement des Universités et des collèges, ne faisaient plus que de rares leçons de théologie ou d'Ecriture sainte au  chapitre et de rares sermons au peuple. Mais le protestantisme ayant contesté les vérités de la foi et préconisé l'Usage de l'Ecriture sainte, on sentit la nécessité de fortifier l’instruction religieuse sur tous les articles attaqués. C’est pourquoi différents conciles particuliers, sans toucher aux droits ni aux devoirs du scolastique, prescrivirent d’établir à côté de lui un théologal, chargé de faire, deux ou trois fois par semaine, en public et à la cathédrale, des leçons de théologie ou d'Ecriture sainte.

Le concile de Trente, par son décret du 17 juin 1546, étendit cette mesure à toutes les églises cathédrales, et prescrivit d’attribuer au théologal le premier canonicat vacant ou une autre prébende suffisante. (Sess. IV. Ref.).

En France le, gouvernement civil prit à coeur cette nouvelle érection ; ussi tous les parlements du royaume réclamèrent-ils l’établissement de chanoines théologaux. Le parlement de Bretagne, séant à Vannes, le 3 septembre 1549, sur la remontrance du procureur général, invita chaque évêque de la province à conférer le premier canonicat vacant de la cathédrale à un docteur ou à un bachelier, en théologie, avec mission d’annoncer la parole de Dieu et d’interpréter l'Ecriture sainte tous les dimanches à l’église cathédrale.

Les grades universitaires n’étaient pas requis par le concile de Trente, mais le Saint-Siège les désirait. Le nombre et l’heure des conférences étaient remis à la discrétion de l’évêque. L’arrêt du parlement fut signifié au chapitre de Vannes, le 22 août 1550, pendant la vacance du siège, et l’érection demandée eut lieu l’année suivante. Toutefois l’exercice de cette charge ne commença qu’en 1562, quand les protestants voulurent s’établir à Vannes. Le premier titulaire fut Olivier de France, docteur en théologie de l’université de Nantes et gardien des Cordeliers de Vannes ; il fut pourvu en 1566 du canonicat vacant par la mort de François de la Couldraye, et obtint une dispense du Saint-Siège pour conserver ce bénéfice séculier. Après lui, tous ses successeurs furent des prêtres séculiers.

Pendant ce temps les précepteurs ou régents des écoliers de Vannes continuaient leur modeste et utile existence. Ils étaient toujours prêtres, ou au moins tonsurés : c’était une condition indispensable pour posséder un bénéfice ecclésiastique, tel qu’était la prébende préceptorale.

En 1569 et 1571, Jean Hervé remplissait les fonctions de précepteur ou régent de la jeunesse de la ville de Vannes. Il eut pour successeur Jean de Vendôme, maître ès-arts de l’université de Paris, qui recevait 120 livres par an pour son salaire.

C’est sur ces entrefaites que fut fondé le collège de Vannes, prélude de l’établissement du Séminaire.

 

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II. COLLEGE.

Dés le 15 juillet 1563, le concile général de Trente, dans sa XXIIIème session, avait porté le décret suivant : « Toutes les églises cathédrales et métropolitaines sont tenues de nourrir et d’instruire dans la religion et la discipline ecclésiastique, suivant la mesure de leurs ressources et l’étendue du diocèse, un certain nombre d’enfants de la cité du diocèse où de la province, et de les avoir dans un Collège, situé auprès de l’église ou dans un autre lieu convenable, choisi par l'évêque.

On recevra dans ce collège les enfants âgés d’au moins douze ans, nés d'un légitime mariage, sachant lire et écrire convenablement, et dont le caractère et les dispositions donneront l’espoir d’en faire des ministres de l'Eglise. Le concile, veut qu’on choisisse spécialement les enfants des pauvres, mais il n'exclut pas les enfants des riches, pourvu qu’ils paient leur pension et qu’ils aient le désir de servir Dieu et l'Eglise.

L’évêque partagera ces enfants en autant de classes qu’il jugera à propos, en tenant compte de leur nombre, de leur âge et de leurs progrès dans la discipline ecclésiastique ; il en appliquera une partie au service des églises ; lorsqu’il le trouvera convenable, et gardera les autres au collège, pour continuer leur instruction ; il remplacera par de nouveaux sujets ceux qui seront partis, de manière que ce collège soit une pépinière ou un séminaire perpétuel de ministres de Dieu. Afin qu’ils soient plus facilement façonnés à la discipline ecclésiastique, les élèves auront de suite la tonsure et la soutane ; ils apprendront la grammaire, le chant, le comput ecclésiastique et les autres arts utiles ; ils apprendront aussi l'Ecriture sainte, les livres ecclésiastiques, les homélies des Pères, la manière d’administrer les sacrements, et surtout la façon d’entendre les confessions, et les formes des cérémonies.  L’évêque veillera à ce qu'ils assistent tous les jours au sacrifice de la messe, qu’ils se confessent au moins tous les mois, qu’ils communient suivant l’avis de leur confesseur, et qu’aux jours de fêtes ils servent à la cathédrale et aux autres églises de la ville ... ».

Ce décret du concile embrassait ce qu’on appelle aujourd’hui le petit séminaire et le grand séminaire. Ces deux établissements sont depuis longtemps séparés, mais au XVIème siècle on les supposait réunis dans un seul et même lieu sous le nom de collège.

Ce décret du concile ayant été accepté par l'Etat, il fallut songer à le mettre à exécution, dans la mesure du possible. A Vannes, on commença par un collège d’élèves externes, avec le concours simultané du clergé et de la communauté de la ville.

Dès le 10 janvier 1574, Jean Briçon, sieur du Péh, en Elven, et Anne des Portes, dame des Prés, sa compagne, donnèrent à la ville de Vannes, pour y fonder un collège, un emplacement de maison, situé au nord de la place du Marché, et contenant 123 verges, à la charge de prières quotidiennes pour les donateurs. Les travaux de construction furent immédiatement commencés sur ce terrain.

Le 21 juin 1577, René d'Aradon, sgr. de Kerdréan, Quinipily, etc., ratifia le don qu’il avait précédemment fait à la ville, d'une maison et jardin attenant au terrain ci-dessus, et mit comme condition d’avoir aussi des prières pour lui et ses défunts.

Le 9 décembre 1579, l’évêque Louis de la Baye érigea canoniquement ce collège en établissement ecclésiastique, pour cinq classes, et lui donna, à cause de ce caractère religieux, les dîmes de Saint-Avé et de Quistinic. Le chapitre, de son côté, lui attribua la prébende préceptorale, donnée jusque-là au régent des écoliers de Vannes. La ville enfin fournit le surplus des traitements.

Le collège fut mis sous l’invocation de Saint Yves, et confié un principal et cinq régents, et administré par deux économes, l’un chanoine, l’autre laïc.

Le premier principal fut Jean de Vendôme, l’ancien précepteur de Vannes, qui mourut vers la fin du siècle. Félix Migguéus, son successeur, mentionné en 1606, décéda en 1616. Jean Le Grand recueillit sa succession, et la laissa à Jean Durand, qui fut retraité en 1630.

La communauté de la Ville avait le droit de choisir les régents du collège, mais ce choix était souvent difficile et embarrassant. Pour dégager sa responsabilité, et avoir constamment une pépinière de professeurs à son service, elle résolut de s'adresser aux Jésuites, comme le prouve la délibération suivante : « Le lundy 7e jour de may 1629, en l’assemblée de la communauté de Vennes... Mgr le duc de Brissac a remonstré qu’ayant appris que cy-devant la d. communauté auroit arresté par diverses fois d’establir les PP. Jésuites pour le gouvernement du collège d’icelle, et n’ayant arresté l’exécution que jusques à ce que Mgr l’évesque de cette ville auroit donné son consentement à leur établissement, lequel sieur évesgne l’ayant consenty, il a cru debvoir procurer ce bien à la d.  ville, recognoissant qu’outre la piété qui en sera plus grande, il en adviendra beaucoup de bien et utilité, tant en la d. ville et pays environnant qu’en toute la province. Sur quoy la d. communauté a déclaré consentir l’establissement des d. PP. Jésuites au collège du fauxbourg de cette ville, avecques le gouvernement entier d’iceluy, et de tout le revenu y annexé, pour en jouir cy-après ainsi que la ville et esconomes d’iceluy ont droit et accoustumé de faire  ». Et de plus ont arresté que le revenu du d. collège sera accru de la somme de 500 livres, qui seront pris sur les deniers d’octroy de la d. communauté, tant qu’il plaira au roy de leur donner, sans qu’ils soient obligés à aultre garant ; les quels 500 livres seront payées jusques à ce que les d.  PP. Jésuites ayent un revenu de 2.000 livres. Et à raison qu’il est requis faire beaucoup de frais pour les bastimans nécessaires à l’establissement des d. Pères, ont consenty leur estre mis en main la somme de 18,000 livres, payable en six ans, à 3,000 livres par an, sur la mesme nature de deniers d’octroy. Et pour l’ameublement des d. PP. Jésuites, leur ont accordé estre pris sur les mesmes deniers, la première année de leur établissement, la somme de 2,000 livres. Et sur ce qu’il a plu à Mgr (de Brissac) allant à Rennes de proposer les susdites questions aux PP. Jésuites, la d. communauté le supplye avoir agréable cette peine et ce soign qu’ils recognoistront par très humbles services aux occasions qu’il luy plaira leur commander ».

Les lettres patentes de Louis XIII pour l’établissement des Jésuites au collège de Vannes, furent données à Lyon au mois d’août 1630 et enregistrées au parlement le 11 septembre suivant. Dès lors les Jésuites purent prendre possession à la rentrée des classes, et le 14 octobre 1630, la communauté de la ville ratifia l’accord fait avec le principal du collège et ses régents, pour les indemniser de leur départ. 

L’évêque Sébastien de Rosmadec, qui avait accepté, comme on l’a vu, l’introduction des Jésuites au collège de Vannes, renouvela, le 3 octobre 1631, sous le bon plaisir du pape, le don des dîmes de Saint-Avé et de Quistinic à l’établissement scolaire, en réservant, suivant le droit, une portion congrue aux recteurs de ces paroisses.

De leur côté, les Jésuites firent plusieurs acquisitions d’immeubles, afin de pouvoir s’agrandir. Ainsi, dès 1632, ils acquirent les maisons Le Roux et Dolbeau, donnant sur la place du Marché et possédant chacune un jardin derrière. Ils achetèrent ensuite plusieurs maisons et jardins au nord du collège et vers la Boucherie, soit pour augmenter les cours de récréation, soit pour bâtir de nouveaux logements. 

Le roi Louis XIII voulut aussi contribuer au bien du collège par un don vraiment royal ; c’est te qu’atteste la lettre suivante : «  Louis, par la grâce de Dieu roy de France et de Navarre, à tous présens et advenir, salut. Scavoir faisons que voulans gratifier et favorablement traiter nos chers et bien amez les Pères Jésuites du collège de Vennes, en considération du grand soing qu’ils apportent à l’instruction de la jeunesse, tant en la vertu et piété que en bonnes lettres, leur témoigner que nous en avens receu de la satisfaction et du contentement, pour ces causes, et afin de les obliger à continuer. Nous avons ausd. Pères Jésuites, de nos certaine science, grace spécialle, plaine puissance et authorité royalle, fait et faisons don, par ces présentes signées de nostre main, du parc appelé Lestrénic, fermé de murailles, contenant 70 ou 80 journaux de terre, où il y avoit autrefois du bois et quelques maisons, tenant d’un bout à la chapelle de Saint-Laurens, d’autre bout aux terres qui appartiennent au sieur de Coetbrun, aboutissant d’un costé sur la mer et d’autre au chemin qui conduit de lad. ville de Vennes en celle de Nantes, à Nous appartenant à cause de nostre duché de Bretaigne, sans aucune chose retenir ny réserver du dit parc ; Pour en jouir par lesd. Pères Jésuites du collège de Vennes, et leurs successeurs, comme de leur chose propre, vray et loyal acquest, sans qu’ils en puissent estre dépossédés en vertu d’édits de réunion à notre domaine, vente ou revente d’iceluy, ny autrement, en quelque sorte et manière que ce soit, en ayant dès à présent comme pour lors excepté et réservé, exceptons et réservons. le d. parc de Lestrénic ; et affin que soubs prétexte de nos ordonnances ils ne puissent, comme gens de main-morte, estre troublés en la possession, et jouissance du d. parc, de nostre mesme grace, puissance et authorité que dessus, l’avons, comme chose à Dieu dédiée, amorty et amortissons, sans que, pour raison du d.. amortissement, les d. Pères Jésuites soient tenus nous payer aucuns droits de francs-fiefs, nouveaux acquests, finances ny indemnités, dont nous leur avons pareillement fait et faisons don ; à la charge toutefois que s’il y avoit dans le d. parc quelques terres qui relevassent d’autres que de nous, les d. Pères Jésuites seroint tenus d’indemniser ceux de qui elles relèveront. Sy donnons en mandement, etc...  Donné. à Saint-Germain , au mois d’octobre, l’an de grâce 1634, et de nostre regne le 25 » (Signé) : Louis. Enregistré au parlement le 28 février 1635 » (Collège Vannes. D.).

Plus tard, Louis XIV ayant été informé qu’en dehors du parc de Lestrénic il y avait environ six journaux de terre dépendant de la propriété, et non mentionnés clans la concession de son père, les donna généreusement au collège par lettres patentes du mois de novembre 1658.

Placé sous la direction des Jésuites, le collège de Vannes allait bientôt recevoir de nombreuses améliorations. Jusqu’alors il n’y avait eu que cinq classes, savoir, la cinquième, la quatrième, la troisième, la seconde et la rhétorique. Il n’y avait ni philosophie, ni théologie, ni Ecriture sainte, comme l’avait demandé le concile général de Trente. Il est vrai que pour combler cette lacune, on avait la ressource des universités de Nantes, d'Angers, d’Orléans, de Paris, etc, . On en usait largement, et on est étonné du nombre considérable de docteurs en théologie qu’on rencontre dans l’ancien clergé. 

Mais ces études étaient dispendieuses, et beaucoup d’ecclésiastiques étaient obligés de rester chez eux, pour étudier en leur particulier, sous la direction de quelque maître expérimenté. Pour favoriser les étudiants sans fortune, Mgr Jacques Martin, évêque de Vannes, avait donné à son diocèse en 1622 une rente de 1.500 livres, afin d’aider à l’entretien de quinze ecclésiastiques à l’université de Paris.

Pour continuer dans cette voie et rendre plus accessible encore l’enseignement supérieur, la ville de Vannes accepta, en 1637, la fondation d’une chaire de philosophie et d’une chaire de théologie morale ou des cas de conscience au collège Saint-Yves. La première de ces deux chaires ne fut dotée que plus tard, mais la seconde le fut immédiatement par Mgr Sébastien de Rosmadec, et ce prélat laissa par testament une rente de 200 livres, pour continuer cet enseignement. Le mouvement était commencé, il allait continuer.

Quant aux édifices, ils étaient encore bien pauvres, ainsi que le constate le procès-verbal suivant : « Claude de Francheville, escuyer, conseiller du roy, sénéchal et premier magistrat du siège présidial de Vennes, scavoir faisons que ce jour, 3 de septembre 1660, sur le réquisitoire des RR. PP. Jésuites, nous sommes, en présence du sieur procureur du roy, descendu en la maison du collège où les artisans ayant mesuré la chapelle (le long de la rue), nous ont fait voir qu’elle contient seulement en sa longueur 60 pieds, en sa largeur 20 pieds ; et en sa hauteur de muraille, Vers la court du d. collège, sous couverture 13 pieds ; à laquelle muraille et costière vers la d. court sont trois estançons ou estages, qui appuyent la d. muraille, sans lesquels elle seroit tombée, estant fendue et couleuvrée en plusieurs endroits, la cheute de laquelle, qui pourroit arriver inopinément, apperteroit de grands dommages à l’édifice. D’ailleurs cette chapelle est mal située et trop petite, si bien qu'aux jours de dimanches et festes, quantité de personnes ne peuvent y avoir place ny entrée. Nous ont aussy fait voir que la classe première du d. collège contient de longueur 19 pieds intérieurement, et de largeur 14 ; les murailles de laquelle par le dedans ne sont de hauteur que de 12 pieds, le surplus sous couverture étant de vieille terrasse. Nous ont aussy fait voir que la classe quatriesme du d. collège contient 20 pieds en carré, et 12 pieds de hauteur sous couverture, le devant de laquelle classe est d’une claye de bois, garnie de vieille terrasse, laquelle menace ruine. En la cinquième classe ils nous ont fait voir qu’elle contient 24 pieds de longueur, 15 de largeur et 12 de hauteur sous couverture ; toutes les murailles de laquelle sont presque de nulle valeur, et ne peuvent subsister longtemps en l’estat qu’elles sont » (Collège D).

Tout cela devait disparaître. On allait commencer, à l’est de la cour, la grande chapelle, qui existe encore au début du XXème siècle, et qui ne fut terminée que 24 ans plus tard. — On allait entreprendre les bâtiments situés au nord de la cour, destinés aux classes des élèves et au logement des maîtres. — On allait enfin commencer, vers l’ouest, un grand bâtiment, destiné dans la pensée des fondateurs à servir de grand séminaire : c’est cette entreprise qu’il s’agit maintenant de raconter, en laissant le collège au second plan.  

 

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III. SEMINAIRE.

Le concile de Trente, comme on l’a vu, demandait, sous le nom de collège, ce qu’on appelle aujourd’hui un petit et un grand séminaires : il voulait des élèves internes, se destinant à la vie ecclésiastique, et formés dans la retraite à leur sublime mission.

Le collège de Vannes, tel qu’il était constitué, donnait l’instruction secondaire à tous les élèves qui se présentaient, qu’ils eussent en vue la carrière ecclésiastique ou une autre.  Il avait été longtemps sans avoir des classes de philosophie ni de théologie ; il ne pouvait guère enseigner les cérémonies de l'Eglise, ni l’administration des sacrements ; enfin il n’avait pas de logement à offrir aux ordinands pour leur formation aux vertus de leur état.

Cette lacune préoccupait surtout le P. Jean Rigoleuc, de la Compagnie de Jésus. Il en fit part à M. Eudo de Kerlivio, qui lui offrit aussitôt ses biens et sa personne même pour l’exécution de son plan. Le projet du séminaire, concerté entre ces deux serviteurs de Dieu, fut soumis dès 1653 au P. Annat, provincial, et au R. P. Nickel, général, puis à l’évêque de Vannes, Charles de Rosmadec, qui tous l’approuvèrent. 

M. de Kerlivio acheta un grand jardin, situé à l’ouest du collège, pour y fonder le séminaire, et fit affecter la terre de la Ville-Déné, située en Monterrein et payée par lui, pour servir à la dotation partielle de l’établissement.

Les bâtiments furent commencés en 1657, et surveillés soigneusement par le P. Rigoleuc, jusqu’au moment de sa mort, arrivée le 27 février 1658. M. de Kerlivio, qui jusqu’alors était resté dans l’ombre, tout en fournissant l’argent nécessaire, dut prendre la direction des travaux, qui durèrent encore environ deux ans, en y comprenant l’ameublement des chambres.

Voici les lettres patentes données par le roi en 1660 : « Louis (XIV), par la grâce de Dieu, roy de France et de Navarre, à tous présens et à venir, salut. Le principal soin que Nous devons avoir de notre royaume estant celuy de la religion, dont les ecclésiastiques sont les ministres, nous avons, à l’exemple du feu roy Louis XIII, notre très honoré seigneur et père, approuvé et même jugé nécessaire qu’il y eût dans les provinces de notre royaume des Collèges où les pauvres clercs pussent recevoir les impressions de la piété et les instructions nécessaires pour parvenir aux ordres sacrés de prêtrise, et particulièrement dans la Basse-Bretagne, où il se trouve un grand nombre de pauvres escoliers, qui aspirent aux d. ordres sacrés, et n’ont pas le moyen de se faire élever et instruire aux devoirs et fonctions d’une si sainte vocation. Ce qui a meu plusieurs personnes dévotes et zélées au service de Dieu d’entreprendre de faire élever et instruire un bon nombre des d. clercs, et, à cet effet, de faire bastir tin grand édifice pour les loger, joignant le collège des Pères de la Compagnie de Jésus, establi en nostre ville de Vannes, lesquels, à la prière des fondateurs de cet établissement et par une charité qui leur est ordinaire prendront la charge et le soin du collège des d. clercs, pour la subsistance duquel les d. fondateurs feront fonds et assiette de rentes et revenus à ce convenables et nécessaires, et Nous ont les d. Pères Jésuites du d. collège fait supplier d’agréer le d. établissement, et d’amortir les terres et héritages qui leur ont été et seront à l’advenir donnés pour une oeuvre si sainte et si louable, jusqu’à la somme de trois mille livres de rente. A ces causes, inclinant favorablement à cette demande, Nous avons, par ces présentes signées de nostre main, agréé, authorisé et permis, agréons, authorisons et permettons aux d. Pères Jésuites l’érection et l’établissement du d. collège des pauvres clercs qui aspirent aux saints ordres, pour avoir la charge et le soin de leur instruction et la direction entière ; et pour favoriser davantage la piété et le zèle des fondateurs, Nous avons de nostre même grâce spéciale, pleine puissance et authorité royale, amorti par ces présentes et amortissons, comme dédiés à Dieu les terres et héritages qui ensuivent, scavoir, une terre noble nommée la Ville-Déné, située en la paroisse de Monterrein de Ploërmel, de cinq à six cents livres de rente, sans justice, sans dixmes ni fief, sauf une parcelle de fief de trente sols de rente, s’étendant ès landes Briand et vallée Gourel, mouvante de notre domaine de Ploërmel, tenue noblement à foy, hommage et rachat; de plus, les autres terres et héritages qui seront donnés aux d. Pères Jésuites, pour l’établissement et subsistance du d. collège et clercs, jusqu’à la d. somme de 3.000 livres de rente en fonds ... Sy donnons en mandement.. Donné à Paris, au mois d’octobre, l’an de grâce 1660, et de notre renne le 18e. Signé : Louis. » (Collège D).

La maison destinée à servir de séminaire ou de collège des clercs, a été décrite par M. de Kerlivio lui-même. «  Elle se compose, dit-il, de deux corps de logis, de trois étages chacun. Il y a 60 chambres, et dans chacune un lit, une table, une chaise, un prie-Dieu, un crucifix et des images pieuses. Il y a de plus un grand réfectoire, une grande salle, une cour, un jardin, et sous le toit d’un des logis une chapelle ».

Tout étant ainsi préparé, Mgr Charles de Rosmadec, au synode diocésain de 1660, fit part au clergé de la création du séminaire des clercs. Mais les recteurs du diocèse, habitués à voir les étudiants ecclésiastiques vivre séparément en ville, et non renfermés dans une maison commune, rebutés peut-être aussi par les souscriptions qu’on leur demandait, en témoignèrent leur mécontentement et blâmèrent vivement M. de Kerlivio et les Jésuites. Le Chapitre, de son côté, fit opposition à l’enregistrement des lettres patentes de Louis XIV pour l’érection du séminaire de Vannes.

Arrêté par cette opposition inattendue, l’évêque crut devoir renoncer, au moins provisoirement, à l’établissement d’un séminaire.

M. de Kerlivio, déçu dans son oeuvre principale, eut l’idée de la remplacer par l’oeuvre des Retraites pour les hommes, soit ecclésiastiques, soit laïcs. Le P. Huby eut la même pensée, et l’évêque, à qui elle fut soumise ; la reçut avec joie, et publia quelque temps après une lettre pastorale pour inviter ses diocésains à venir y faire des retraites spirituelles. L’oeuvre s’est maintenue dans cette maison et a duré jusqu’à la révolution française.

M. de Kerlivio, malgré son échec, ne renonça pas à son projet de séminaire. Il en fit ressortir les avantages et la nécessité pour la formation des jeunes clercs, et finit par gagner la majorité du clergé. Pour ménager la susceptibilité de ceux qui ne voulaient ni le voisinage ni le gouvernement des Jésuites au séminaire, il se proposa d’acquérir comme emplacement le manoir et les dépendances de Coessial, près de l’église de Notre-Dame du Mené.

Voici la copie de l’acte d’acquisition : « Le 30ème jour d’octobre 1665, avant midy, devant nous, notaires royaux, ont comparu en personne Messire Julien Gibon, chevalier, seigneur du Grisso, du Couédic, de Kerisoet, du Pargo etc., procureur du roy au présidial de Vennes, et Dme Anne de Kerboutier, sa femme, d’une part ; et les sieurs gens du clergé du diocèse de Vennes, assemblés dans la salle synodale du château épiscopal, représentés ès personnes de nobles et discrets Messires Louis Eudo, grand vicaire de Mgr de Vennes, présidant à la d. assemblée, René Gouault, archidiacre, Jacques Sesbouez, trésorier, Claude Kermasson, chanoine, Guy du Garouet, recteur de Saint-Patern, Jacques de Kermadec, recteur de Crach, etc., d’autre part ;

Entre lesquels a été fait le présent contract, par lequel les d. seigneur et dame du Grisso ont, pour eux et leurs successeurs, vendu, vendent et transportent aux d. sieurs du clergé la maison noble de Cossial (Plan A), cour close au devant et petit logement, le jardin au derrière de la d. maison (B), et autre petit jardin au bout et plus bas (C), appartenant au d. seigneur du Grisso des successions de ses père et mère, et une prée (D), joignant le d. jardin, la rue du Mené et le jardin du presbytère du Mené, la d. prée acquise de Janne Le Corno, et chargée d’une rente censive de huit livres monnoye au chapitre de Vennes ; Pour les d. sieurs gens du clergé en jouir tout ainsy qu’ont fait les d. seigneur et dame du Grisso, les tenir et relever du fief et jurisdiction des Régaires de Vennes, à devoir d’obéissance, foy, hommage, suite de cour et moulin, et d’acquitter toutes rentes seigneuriales et autres devoirs seigneuriaux y deubs, et , toutes autres rentes, si aucunes se trouvent estre deubs ;

Et est le d. acquest pour y bâtir et faire un séminaire pour le d. clergé et diocèse de Vennes à perpétuité, à laquelle fin et dés à présent de condition expresse les d. sieurs du clergé pourront, quoique non appropriés, faire telles démolitions, réparations et changements en la d. maison, jardin et prée qu’ils verront pour l’établissement du d. séminaire ; et prée qu’ils verront pour l’établissement du d. séminaire ; 

Et a esté la d. vente faite et accordée entre parties pour la somme de sept mille livres, payables par les d. sieurs du clergé aux d. seigneur et dame du Grisso dans six ans prochains venants, avec intérêts de 437 livres 10 sols par an ; et pourront payer le capital en deux payements de 3.500 livres chacun, à proportion desquels les intérêts diminueront ;

Et dans la vente ne sont compris la chapelle prohibitive, les armes en pierre et vitre, qui sont de gueulle à trois gerbes d’or, avec alliances, que les d. seigneur et dame du Grisso ont dans l’église parrochiale de N.-D. du Mené, à cause de la d. maison de Coessial, et se les réservent expressément et à l’avenir, demeurant annexés au Grisso ;

Et néanmoins est accordé qu’en cas que le d. clergé auroit besoin de la chapelle, qui est du costé de l’évangile et du choeur de la d. église du Mené, pour la démolir, y faire sacristie, ou s’en servir à autre chose pour l’usage du séminaire, et de faire quelque changement à la d. église, les d. seigneur et dame du Grisso consentent que la d. chapelle soit démolye, parce que les d. sieurs du clergé promettent de faire remettre les d. armes en pierre et verre, tombes et enfeuz...

Fait et passé au d. château épiscopal de Vennes, où les parties se sont assemblées, au rapport du Clerc, notaire royal, et sous les signes des sieurs du clergé, seigneur et dame du Grisso, et les nôtres, les d. jour et an » (Evêché G. 146. Copie papier).

Le même jour, 30 octobre 1665, l’évêque de Vannes, comme seigneur féodal, fit la remise des droits de mutation qui lui étaient dus sur les immeubles achetés.

Le 4 novembre suivant, eut lieu la prise de possession de la maison de Coessial et dépendances. On en profita pour dresser un procès-verbal de visite de l’église de N.-D., qui était alors située le long de la rue du Mené et orientée vers l’est.

« Nous nous sommes transportés dans la d. église, et avons veu dans la maîtresse vitre, au dessus du grand autel, trois écussons, les deux premiers de gueulle, à trois gerbes d’or, qui sont les armes du d. seigneur du Grisso, et le troisième écusson en losange, parti de Gibon et de Fresnay ; vis-à-vis le bout du grand autel, du costé de l’évangile, il y a une chapelle dédiée à Notre-Dame, appartenant au d. seigneur du Grisso, séparée du choeur par une grande arcade, en laquelle chapelle il y a plusieurs écussons, savoir, dans la vitre du pignon, en la pointe du premier soufflet, un écusson de gueulle à trois gerbes d’or, et plus bas un autre écusson d’alliances, écartelé au 1er de Fresnay, au 2e de Carné, au 3e de Trécesson, au 4e de Lantivy, et sur le tout de Gibon ; en la pointe du second soufflet de la d. vitre, un autre écusson en losange, parti de Gibon et de Fresnay ; autres écussons semblables, taillés en pierre, sous les statues des deux côtés de l’autel, à la retombée de la voute et à la clef du lambris. — En la dite église, du costé de l’évangile, avons veu une autre chapelle, dédiée à saint Armel, appartenante au d. seigneur du Grisso, en laquelle est un autel, et au pignon de la d. chapelle un tombeau en arcade, et au dessus de l’arcade un écusson en relief sur tuffeau de trois gerbes. Et à tout ce que devant a esté présent noble et discret Messire Louis Eudo, grand vicaire de Mgr de Viennes... » (Evêché G. 146).

Conformément à la coutume, l’acte d’acquisition de Coessial fut publié par trois dimanches consécutifs à la porte de l’église de N.-D. du Mené, en français et en breton, et aucune réclamation ne s’étant produite, le clergé du diocèse fut reconnu légalement approprié le 20 avril 1667. 

Les travaux, pour la construction du nouveau séminaire, commencèrent aussitôt. La maison à trois étages devait être encadrée de deux pavillons légèrement saillants, comme on les voit encore aujourd’hui. La direction de l’ouvrage fut confiée au vertueux prêtre, Jean de l'Ile, qui avait conquis l’estime et la confiance de tout le monde.

Pendant les travaux arrivèrent les lettres patentes du roi, du mois de septembre 1669, autorisant l’établissement du séminaire à Coessial, et la levée de 12,000 livres sur le clergé diocésain pour l’entretien de la maison, amortissant six journaux de terre, et permettant d’avoir jusqu’à 4,000 livres de rente foncière. Ces lettres furent enregistrées au parlement dès le 7 décembre suivant.

On commença presque aussitôt à fonder des bourses. Le 30 août 1670, M. Bertrand de la Chesnaye, recteur de Belz, donna une rente de 200 livres, pour aider à la pension de deux clercs ; le 11 septembre suivant, Charles de Rosmadec, prieur de Saint-Cado et d'Ambon, légua une rente de 300 livres pour l’entretien de deux autres étudiants. 

On venait de faire la toiture du séminaire et de commencer les travaux à l’intérieur, quand, en 1672, survint un nouvel orage : M Eudo de Kerlivio fut disgracié par le nouvel évêque, Mgr de Vautorté, et privé de ses charges. L’entreprise fut immédiatement suspendue ; les annuités du prix d’acquisition cessèrent d’être payées, et l’on fut sur le point d’abandonner le tout au vendeur. M. de Kerlivio soutint seul l’entreprise ; il trouva moyen de payer ce qui était dû, et de conserver ainsi au clergé le fonds et le bâtiment. 

En attendant des jours meilleurs, il proposa à Mlle de Francheville, en 1674, de prendre le séminaire à loyer pendant cinq ans, pour son oeuvre des retraites des femmes, à condition de le laisser en état d’être habité, au moment de la sortie. La proposition fut acceptée.

Au mois de janvier 1677, M. de Kerlivio fut rétabli dans sa charge de vicaire général : il en profita pour ramener doucement l’évêque et les prêtres opposants à l’idée d’ouvrir le séminaire. En 1679, au départ de sa locataire, il le fit meubler en partie à ses dépens. Au mois de mars 1680, il obtint de nouvelles lettres patentes confirmant l’existence du séminaire et permettant de lever, tous les ans, sur le clergé, une somme de 1.200 livres, pour le traitement de trois di recteurs.

Il choisit lui-même les prêtres qui devaient conduire l’établissement, et en dressa le règlement avec eux. Enfin, la veille de la Pentecôte de l’an 1680, il y fit entrer les ordinands, et le lendemain, il y chanta la messe avec une sensible consolation, heureux de voir terminée la principale de ses oeuvres.

 

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IV. ADMINISTRATION.

Le concile de Trente (XXIII. 18) a établi trois commissions distinctes pour l’administration du séminaire. Ses décrets sont obligatoires, sous peine de désobéissance, l'Eglise n’admettant pas de prescription contre ce concile.

La première commission, composée de l’évêque et de deux chanoines anciens, choisis par le prélat, est chargée de l’administration spirituelle , c’est-à-dire du règlement du séminaire, de l’admission des élèves, de la punition des coupables du choix des livres, de la visite du personnel, du choix du supérieur et des professeurs, et aussi de leur renvoi. L’évêque, sous peine de péché, est obligé de consulter ses deux assesseurs sur ces diverses matières ; mais après les avoir consultés, il n’est pas obligé de suivre toujours leur avis, parce que les deux assesseurs n’ont que voix consultative et l’évêque seul a voix décisive : mais la consultation est toujours de rigueur, sous peine de nullité des actes. 

La seconde commission, composée de quatre membres, savoir : de deux chanoines, élus l’un par l’évêque, l’autre par le chapitre, et de deux prêtres, élus l’un par le prélat, l’autre par le clergé de la ville, est chargée, sous la présidence de l’évêque, de l’administration temporelle, c’est-à-dire de fixer le taux de la pension, de recevoir les rentes, les dons et les legs, de provoquer l’union des bénéfices au séminaire, et d’autoriser les dépenses. Le chapitre et le clergé diocésain sont intéressés à la bonne administration financière du séminaire, attendu qu’ils sont appelés à l’aider pécuniairement, et c’est pour cela que leurs députés interviennent dans la 2ème commission. 

La troisième commission, composée de deux chanoines élus par le chapitre, et de deux prêtres élus par le clergé de la ville, est chargée, sous la présidence de l’évêque, d’assister à la reddition annuelle des comptes du séminaire. Dès lors que le clergé est appelé à contribuer aux dépenses de l'établissement, il est juste qu'il en connaisse les comptes.

Ces décrets du concile de Trente furent-ils observés, lors de l’ouverture du séminaire de Vannes en 1680 ? - On n’en a pas la preuve directe et positive, parce que les règlements primitifs, préparés par M. Eudo de Kerlivio, sont perdus. Mais tout porte à croire qu’on s’y soumit, car d’un côté, M. de Kerlivio était trop fidèle observateur des lois de l'Eglise pour les violer dans un point si capital, et d’un autre côté, le chapitre et le clergé diocésain, qui se réunissaient tous les ans en synode, et qui fournissaient des subsides à l’établissement, n’auraient pas laissé fouler aux pieds leurs droits, et auraient pu, en cas de refus, couper les vivres, en supprimant leur concours pécuniaire.

Malgré l’ouverture du séminaire, les cours de théologie continuèrent à se faire au collège, et les séminaristes s’y rendaient tous les jours. La chaire de théologie morale y avait été fondée en 1637 et dotée ensuite par Mgr Sébastien de Rosmadec d'une rente annuelle de 200 livres. La chaire de théologie dogmatique était encore à créer et à doter définitivement. C’est pourquoi, le 14 septembre 1685, « la communauté de la ville de Vennes,.. sentant la nécessité d’établir à son collège deux régents de théologie, pour le bien et utilité de cette ville et de cet évesché, un chacun étant obligé d’envoyer leurs enfants étudier dans d’autres provinces, ce qui leur est extrêmement à charge, à cause des grands frais, résolut d’y pourvoir avec le soin et la prudence ordinaires, et arrêta, sous le bon plaisir de Sa Majesté, de donner aux PP. Jésuites du collège de Vennes la somme de mille livres par an, pour deux professeurs de théologie, qui enseigneraient chaque jour, l’un le matin, l’autre le soir, à la charge aux dits PP. Jésuites de fournir une classe propre et commode polir cet effet ».

Cette délibération fut confirmée par lettres patentes du roi, données à Versailles au mois de janvier 1686, et enregistrées au parlement le 19 juillet suivant, et à la Chambre des comptes le 9 août.

Pour doter le séminaire, Mgr François d'Argouges, évêque nommé de Vannes, négocia l’union du prieuré du Hézo, et provoqua la rédaction de l’acte qui suit : « Le 6ème jour d’aoust 1689, devant nous nottaires royaux... ont comparu en leurs personnes vénérable et discret Messire Guillaume Blanchet, docteur de Paris, supérieur du Séminaire de Vennes, et Messire Joseph Le Cam, directeur du d. Séminaire, faisans tant pour eux que pour leurs successeurs,..  et Rév. Père Dom Nicolas Hougatz, religieux bénédictin de la congrégation de Saint-Maur, prieur de l’abbaye de Saint-Gildas de Rhuys et y demeurant, faisant pour lui et les religieux de la d. abbaye, au moyen de leur procuration spéciale, datée du 5 de ce mois. Lesquels sont convenus de ce qui suit, à savoir, que l’union advenante du prieuré de Saint-Vincent du Hézo, dépendant de la d. abbaye de Saint-Gildas de Rhuys, situé en la paroisse de Surzur au diocèse de Vennes, à la maison du d. Séminaire de Vennes , les d. religieux auront et jouiront toujours à l’avenir de tout et tel droit de jurisdiction sur les vassaux qui dépendent du d. prieuré qu’ils ont et jouissent présentement ; et aussy pour dédommager les d. religieux des droits et prétentions qu’ils pouraient avoir sur le d. prieuré, à raison de l’acte d’échange du duc Geoffroy de l’an 1001, apparu et retenu par le d. P. prieur, les d. sieurs Blanchet et Le Cam ont promis et se sont obligez, promettent et s’obligent, tant pour eux que pour leurs successeurs, à jamais à l’avenir, ou du moins aussi longtemps que le d. prieuré demeurera uni au d. Séminaire, de payer aux d. religieux de l’abbaye de Saint-Gildas, par chacun an, à perpétuité, un tonneau de seigle (10 perrées), mesure de Vennes, parce que la d. rente ne courera et ne sera deue que du jour de l’extinction de la pension de mille livres, réservée par le sieur abbé de Fortia, dernier prieur du d. prieuré du Hézo … ; promettent en outre les d. sieurs directeurs du d. Séminaire de payer et acquitter à l’avenir la taxe de contribution imposée sur la d. abbaye, pour le d. (prieuré), jusques à la concurrence de seize livres seulement, parce que en cas qu’elle soit de plus grande somme, les d. religieux seront obligez de payer l’excédant.. Signé : Fr. Nicolas Hougatz, humble prieur de Saint-Gildas de Rhuys. — Blanchet, supérieur du séminaire. — Joseph Le Cam, ptre, directeur du séminaire. — René Rio, notaire royal. — Allano, notaire royal (reg) » (Saint-Gildas H).

Ce contrat reçut le consentement du prieur du Hézo le 21 août 1689, celui du chapitre de la cathédrale le 22 août, et celui de l’abbé commendataire de Saint-Gildas le 6 novembre suivant. L’enquête de commodo et incommodo ayant eu lieu, le promoteur donna un avis favorable le 29 décembre, et dès le 31 de ce mois l’évêque nommé donna provisoirement une sentence d’union. Le séminaire prit possession du Hézo le 13 janvier 1690, obtint des lettres patentes du roi au mois de janvier 1691, et fut enfin confirmé dans sa possession le 17 juillet 1693 par Mgr d’Argouges après son sacre. On voit par ce petit aperçu que déjà, sous le grand roi, les formalités étaient assez compliquées pour acquérir les biens ecclésiastiques. 

M. Guillaume Blanchet, premier supérieur du séminaire, fut pourvu par l’évêque, le 14 juillet 1697, d’un canonicat à la cathédrale. Malade, il résigna entre les mains de l'Ordinaire le 21 septembre 1699 et mourut peu après. M. Joseph Le Cam ou Le Camp recueillit sa succession au séminaire, puis son canonicat à la cathédrale. 

Ces changements rapides dans la direction du séminaire et la nécessité d’avoir un personnel stable et une conduite uniforme portèrent l’évêque à confier le séminaire à une congrégation religieuse, comme le collège lui-même était confié aux Jésuites. Il choisit les enfants de saint Vincent de Paul, appelés officiellement Prêtres de la Mission, et vulgairement Lazaristes, à cause de leur maison mère de Saint-Lazare à Paris.

Voici son ordonnance à ce sujet : « François d'Argouges, par la permission divine et par la grâce du Saint-Siège apostolique, évesque de Vannes, conseiller du roy en ses conseils etc.., à tous ceux qui ces présentes lettres verront, salut et bénédiction en Nostre-Seigneur Jésus-Christ. L’expérience nous ayant fait cognoistre le fruit que l'Eglise reçoit de l’establissement des séminaires, et les conciles, les édits et déclarations du roy nous engageant par des exhortations sérieuses à nous y appliquer avec soin, Nous n’aurions pu, sans blesser nostre religion, ne pas travailler par cette voye à la sanctification de nostre clergé ; et bien que les prestres à qui nous avons confié la conduite de nostre séminaire en nostre ville épiscopale soient pourveus d’expérience, de science, de zèle, de piété, et de toutes les qualités requises et nécessaires pour élever et instruire les ecclésiastiques dans toutes les fonctions et exercices de leur profession, néantmoins ayant recognu que le dit séminaire ne pourroit solidement subsister, ny la direction d’iceluy estre de durée qu’en estant uni à une congrégation d’ecclésiastiques, capables d’en prendre à perpétuité la conduite, et désirant rendre le dit establissement permanent. A ces causes, estant bien informé de la piété et capacité pour instruire les ecclésiastiques et expérience au fait de la conduite et du régime des séminaires qu’ont les prestres de la congrégation de la Mission, qui gouvernent avec fruit et bénédiction plusieurs séminaires dans le royaume, et en particulier dans quatre éveschez de la province de Bretagne, Nous avons commis et establi, commettons et establissons par ces présentes les prestres de la dite congrégation de la Mission directeurs de nostre dit séminaire, tant pour le spirituel que pour le temporel, aux conditions cy-dessous spécifiées, à sçavoir.

1° Que les dits prestres de la congrégation de la Mission seront tenus et obligés de fournir et entretenir à perpétuité quatre prestres dans le dit séminaire ; l’un des quels en sera directeur, deux feront la leçon de théologie, et le quatrième aura soin de l’économie et enseignera le chant et les cérémonies, tous de la qualité requise pour se bien acquitter des dites fonctions ; Seront encore tenus les d. prestres de la Mission de fournir et entretenir trois de leurs frères pour leur service et (celui) des séminaristes :

2° Le tout moyennant 2.100 livres de revenu annuel, qu’ils prendront sur les plus clairs deniers du revenu du dit Séminaire, qui doit estre remis entre les mains du dit directeur : Et à l’esgard du surplus du dit revenu, s’il y en a, sera tenu le dit directeur de l’employer, par nos ordres, soit pour les nouveaux bâtimens, réparation et entretien de la maison, achat de meubles, payement des dettes du dit séminaire s’il est endetté, soit aussi pour aider à payer les pensions des pauvres ecclésiastiques de nostre diocèse, que nous admettrons en nostre séminaire, et pour les autres besoins du dit Séminaire ; le tout ainsi qu’il sera jugé à propos par nous et par nos successeurs, à l’exception des dites 2.100 livres destinées à leur entretien, dont ils ne rendront aucun compte :

3° Seront tous les dits prestres soumis à nostre jurisdiction et de nos successeurs, en tout ce qui concerne la conduite de nostre dit séminaire, l’administration des sacrements, les missions lorsqu’ils en pourront faire, et généralement en toutes les choses qui peuvent regarder le prochain ; et quant au reste ils dépendront de leur supérieur général, selon les bulles, statuts et règlements de la congrégation, laquelle autrement ne pouroit subsister à perpétuité :

4° Et pour leur habitation et des séminaristes, à l’effet cy-dessus, Nous leur avons donné, ceddé et transporté, et par ces présentes donnons, ceddons et transportons (la jouissance de) la maison appartenant au dit séminaire, en l’estat où elle est, avec toutes ses appartenances et dépendances, et tous ses meubles, tant pour eux que pour les séminaristes, et en cas que les d. meubles qui sont à présent dans le d. séminaire ne soient pas suffisants pour les d. prestres et séminaristes il en sera achapté aux dépens du dit revenu du séminaire, qui pourront rester après que le directeur aura pris les 300 livres destinez pour l’entretien de chaque missionnaire dans le d. séminaire : (300 x 7 = 2.100) :

Et affin que les d. prestres de la congrégation de la Mission puissent vaquer librement à l’instruction des ecclésiastiques et au salut du peuple de nostre diocèse par l’exercice des fonctions propres à leur institut, Nous leur avons donné et donnons pouvoir par ces présentes de faire les d. fonctions, à condition néantmoins qu’ils seront immédiatement soumis à nous et à nos successeurs, comme il a esté imprimé cy-dessus.

En foy de quoy nous avons signé ces présentes, fait contresigner par nostre secrétaire commis en celle partie, et à icelles fait opposer le sceau de nos armes. Donné à Paris, où nous nous sommes trouvé pour les affaires de nostre église, le 17e jour de janvier 1701. François d'ARGOUGES, Ev. de Vannes. Par mandement de mon dit Seigneur : P. Guymarho » (Saint-Gildas. H. — Copie de 1717).

Voici maintenant le texte de l’acceptation du supérieur général des Lazaristes : « Nous Nicolas Perron, supérieur général de la congrégation de la Mission, recevons avec tout le respect et toute la reconnaissance qu’il nous est possible la grâce que Monseigneur l’illustrissime et révérendissime évesque de Vannes a faite à nostre petite congrégation , par le présent acte d’establissernent et promettons d’observer et accomplir les conditions portées par iceluy. En foy de quoy nous avons signé la présente de nostre main et fait contresigner par le secrétaire de nostre congrégation et sceller de nostre sceau. PERRON , sup. gén. — Durand, secr. » (Saint-Gildas, Ibid.).

En conséquence de ces lettres, les Lazaristes prirent possession du séminaire de Vannes en 1701. Pierre Rhodes en fut le premier supérieur, et eut à sa disposition trois prêtres et trois frères de sa congrégation : il occupa cette charge durant quarante ans.

 

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V. DOTATION.

Le premier acte de la dotation du séminaire avait été l’union du prieuré du Hézo, consentie le 6 août 1689. Cette union n’était pas sans charges : outre les messes à célébrer, il y avait une pension viagère de mille livres à payer au dernier prieur, et après sa mort une rente annuelle de dix perrées de seigle à fournir à l’abbaye de Saint-Gildas de Rhuys. 

Pour augmenter ce revenu, et le porter 3,000 livres, au moyen de l’union d’autres bénéfices, l’évêque avait l’autorisation du concile de Trente ; il sollicita de plus celle du roi, et obtint en 1702 les lettres patentes qui suivent : « Louis (XIV), par la grâce de Dieu, roy de France et de Navarre, à tous présens et à venir salut ». Nostre amé et féal conseiller en nos conseils, le sieur François d'Argouges, évesque de Vannes, nous ayant fait remonstrer que l’expérience luy ayant fait cognoistre le fruit que l’Eglise reçoit de l’establissement des séminaires....  (Reproduction sommaire de la lettre épiscopale du 17 janvier 1701, et de l’acceptation du supérieur général de la Mission, voir ci-dessus) ; le dit séminaire n’étant pourvu que d’un très petit revenu, le d. sieur évesque Nous auroit requis que, conformément à nos édits et déclarations, il nous plust luy permettre de pourvoir à la dotation et subsistance du dit séminaire par union de bénéfices et assignation de pensions, jusqu’à la concurrence de trois mille livres de rente ; Désirant favorablement traiter le d. sieur évesque, le d. séminaire et les d. prestres de la Mission, après avoir fait examiner en nostre Conseil nos lettres patentes du mois de septembre 1669 par les quelles nous avons permis l’establissement et dotation du d. séminaire, et le susdit acte d'establissement des prestres de la congrégation de la Mission dans le d. séminaire de Vannes du 17 janvier 1701, toutes et chacune les clauses et conditions d’iceluy, le tout cy attaché sous le contrescel de nostre chancellerie, et qu’en iceluy il ne s’est rien trouvé de contraire à nos droits ny aux privilèges de l’Eglise gallicane ; De nostre grâce spéciale, pleine puissance et authorité royale, avons agréé, approuvé et confirmé, et par ces présentes signées de nostre main, agréons, approuvons et confirmons l’establissement du d. séminaire et des d. prestres de la Mission en iceluy , pour en avoir à perpétuité la direction spirituelle et temporelle, sous l’authorité du d. sieur évesque et de ses successeurs, aux charges, clauses et conditions portées par le d. acte d’establissement du 17 janvier 1701, que Nous voulons estre exécuté selon sa forme et teneur ; et pour faciliter davantage la fondation et dotation du d. séminaire, permettons au d. sieur évesque de Vannes d’employer et se servir de tous les moyens portés et permis par les conciles et par les ordonnances du royaume, en la forme et manière qui luy semblera la plus propre et commode, selon la nécessité et condition des lieux, par union de bénéfices et assignation de pensions, jusqu’à la mesme somme de trois mille livres de revenu annuel ; A la condition que les obligations des d. bénéfices unis seront acquittées et les charges payées par le d. séminaire, et aussy que la levée des impositions diminuera à mesure et à proportion qu’il y aura des bénéfices unis, et qu’elle cessera aussitôt que des unions et annexes de bénéfices qui pouront estre faites au d. séminaire, il y en aura pour la somme de trois mille livres par chacun an, dont le d. séminaire soit en possession et jouissance actuelle, à condition néantmoins que les d. impositions ne pouront estre faites sur les cures, ny autres bénéfices qui auront charge d’âmes, ny sur les bénéfices qui n’excéderont pas la somme de 500 livres de revenu ; Voulons aussy que le d. séminaire et les d. prestres de la Mission puissent accepter et occuper toutes sortes de legs, donations, fondations, acquérir, tenir et posséder toutes sortes de fonds, droits, héritages et rentes, pour leur demeurer à perpétuité acquis et unis , sans néantmoins qu’ils puissent prétendre autre amortissement, en vertu des présentes, que celuy de leur église et de leurs bastimens, jardin et enclos du d. séminaire, que nous avons amortis et amortissons par ces présentes, pour en jouir par eux, sans qu’ils y puissent estre troublés, comme estant en main morte et dédiez à Dieu et à son Eglise, ny que pour raison de ce ils soient tenuz de nous payer ny à nos successeurs roys aucune finance ny indemnité, de laquelle, à quelque somme qu’elle se puisse monter, nous leur avons fait don, sans préjudice toutefois des indemnités ou droits, si aucuns se trouvent deus aux seigneurs particuliers, des quels les d. église, bastimens, jardin et enclos pouroient estre mouvans ; Voulons en outre que led. séminaire et les d. prestres de la Mission jouissent de tous les privilèges, franchises et immunités dont jouissent les autres séminaires et communautés ecclésiastiques de nostre royaume : le tout non obstant tous édits, déclarations, ordonnances, loix, coutumes, règlements, arrests et autres choses à ce contraires, auxquels et aux dérogations des dérogations nous avons à cet égard dérogé et dérogeons par ces présentes. Sy donnons en mandement, etc... Donné à Versailles, au mois de mars, l’an de grâce 1702, et de nostre regne le 59e. Signé : Louis. Par le roy : Colbert. Enregistré au parlement le 8 février 1703 » (Saint-Gildas. H. — Copie).

Les prêtres de la Mission, une fois installés au séminaire, purent se rendre compte de l’état de la maison et de l’état du diocèse, et pour entrer dans les vues de l’évêque et du roi, ils sollicitèrent l’union au séminaire des bénéfices simples du Vincin en Ploeren et des Saints en Grandchamp, pendant que le chapitre de la cathédrale renonçait au patronage de la paroisse de Notre-Dame du Mené. En conséquence Mgr d'Argouges signa, le dernier jour de 1706, l’ordonnance suivante : « François d'Argouges, par la permission de Dieu et par la grâce du Saint-Siège apostolique, évêque de Vannes, conseiller du roy en ses conseils ... Veu par nous les lettres patentes du roy, données au mois de septembre 1669, par les quelles Sa Majesté permet d’establir un séminaire dans le diocèse de Vannes, et pour en faciliter davantage l’établissement, fondation et dotation, d’employer tous les moyens permis et portés par les conciles et par les ordonnances, et d’y unir un ou plusieurs bénéfices simples jusqu’à la concurrence de 4.000 livres de revenu annuel ; Veu la démission faite de la paroisse de Notre-Dame du Mené par le sieur Foyneau, dernier titulaire, du 9 juillet dernier ; Une requête à nous présentée par les vénérables chanoines et gens du chapitre de notre église cathédrale, par laquelle ils requièrent la distraction de la d. paroisse de N.-D. du Mené de la souchantrerie de leur église et son union à notre d. séminaire, la d. requête du 23 e du d. mois de juillet ; La requête à nous présentée par les supérieur et prestres de la congrégation de la Mission, directeurs de notre séminaire de Vannes, à fin d’extinction des titres des prieurés des Saints, situé dans la paroisse de Grandchamp, et du Vincin dans celle de Ploeren, dans notre diocèse, pour les unir, avec la d.  cure et paroisse de N.-D. du Mené, et les fruits et revenus qui en dépendent, à notre d. séminaire ; Veu etc... etc... Toutes les d. pièces et procédures bien considérées et diligemment examinées ; ensemble les deux arrests des Conseil d'Etat et Conseil privé du roy, des 22 juillet et 11 décembre 1686 ; Et le Saint Nom de Dieu préalablement invoqué ; Nous avons ordonné et ordonnons, pour l’avantage de notre clergé et de notre chapitre, pour l’utilité publique et celle de notre séminaire, que la d. cure et paroisse de Notre-Dame du Mené, avec les fruits, revenus, droits, raisons, actions, circonstances et dépendances soit désunie et distraite de la souchantrerie de notre église cathédrale de St-Pierre de Vannes ; que les titres des d. prieurés des Saints et du Vincin, qui sont à notre libre collation, soient supprimés à perpétuité, et que la d. cure et paroisse de N.-D. du Mené, avec ses fruits et revenus, droits, raisons et actions, circonstances et dépendances, et les fruits et revenus des d. prieurés soient unis et incorporés à perpétuité à la maison du séminaire et établissement des d. prestres de la congrégation de la Mission du d. Vannes ; Néanmoins les titulaires des d. prieurés des Saints et du Vincin jouiront des d. fruits et revenus pendant leur vie seulement, acquittans toutes les charges deubs sur iceux pendant la d. jouissance ; et la d. paroisse sera desservie par celuy des d. prestres ou leurs successeurs, approuvé pour prêcher et confesser dans notre diocèse, et qui sera choisi et proposé par le supérieur de la communauté des d. prestres de la congrégation de la Mission sans qu’il soit besoin de nous ou de nos successeurs aucune collation ou lettre particulière de regendo ; à condition néanmoins que les d. prestres du séminaire, pour mieux s’acquitter des fonctions de la d. cure entretiendront dans le séminaire un cinquième prestre de leur congrégation, s’ils n’aiment mieux avoir un sous-curé ; et qu’ils payeront tous les ans à notre d. cathédrale pour le souchantre un dédommagement de la somme de 200 livres, quitte et nette de toutes charges quelconques, exprimées ou non, à commencer de ce jour, en forme de pension, payable de trois mois en trois mois ; Outre lequel dédommagement, nous avons aussy accordé et octroyé à perpétuité au chapitre de notre d. église cathédrale la liberté de présenter à la cure de Plaudren, lorsqu’elle viendra à vaquer, pour la distraction de la paroisse. du Mené d’avec la souchantrerie de notre église cathédrale, et le droit que les d. sieurs du chapitre avoient de présenter à la d. cure de N.-D. du Mené en la personne de leur souchantre ; Les d. supérieur et prestres de la congrégation de la Mission, directeurs de notre séminaire, pourront se libérer de la d. somme de 200 livres ; du consentement de notre chapitre et du d. souchantre, en donnant pour eux un fonds produisant la d. somme de 200 livres de vive rente, quitte et nette de toutes charges, comme devant ; et à condition encore que les d. prestres du séminaire conserveront, tant aux paroissiens qu’au sieur Olivier Gibon du Grisso, les droits légitimes dans la d. paroisse, sauf notre droit et celuy d'autruy, et qu’ils acquitteront les autres charges, tant de la d. cure que des d. prieurés, à commencer du jour qu’ils entreront en jouissance. Donné à Vannes, en notre palais épiscopal, sous notre signe, le sceau de nos armes, et le contre-signe de notre secrétaire ordinaire, le 31 décembre 1706. Fr. d'Argouges, évêque de Vannes. Par Mgr D. J. Colomb, secr. » (Arch. dép. G. Papier).

Le séminaire prit possession de N.-D. du Mené, du Vincin et des Saints les 11 et 13 janvier 1707. Un mot sur chacun de ces bénéfices.

1° La paroisse de N.-D. du Mené formait un des faubourgs de la ville vers le nord. Elle comprenait les rues actuelles de l’Abattoir, du Moulin, de la Boucherie, de la Coutume, une partie de la rue du Mené et toute la rue de Notre-Dame ou de l’Hôtel-de-Ville, avec deux impasses d’un côté et le palais épiscopal de l’autre. A partir de 1707, le supérieur du séminaire fut le recteur-né de la paroisse, et il eut un lazariste pour remplir les fonctions de curé ou de vicaire : situation qui se maintint jusqu’en 1791.

2° Le bénéfice du Vincin, appelé prieuré par erreur, puisqu’il ne dépendait d’aucune abbaye, était en réalité une chapellenie importante. Le chapelain devait une messe basse tous les dimanches et à quelques fêtes de la Vierge. Le bénéfice comprenait une chapelle, une maison, un grand jardin, une métairie et des dépendances considérables. Le dernier titulaire, Jacques Bizien du Léziart, céda son droit de jouissance pour une pension viagère de 150 livres, réduite plus tard à 125. Cette propriété devint un lieu de promenade pour les séminaristes.

3° Le bénéfice des Saints en Grandchamp paraît avoir été à l’origine une petite collégiale de prêtres séculiers, car un acte de l’abbaye de Lanvaux, de l’an 1200 environ, les qualifie de «  chanoines ». Plus tard, ce bénéfice passa à l’abbaye de Saint-Gildas de Rhuys, et fut pour cette raison traité de prieuré ; il finit par tomber en commende et fut possédé de nouveau par des prêtres séculiers. Il avait une belle chapelle, un pourpris et quatre tenues dans le village, et de plus une tenue à l’Ermitage en Plaudren..Les obligations étaient d’une messe tous les vendredis dans la chapelle des Saints. Le dernier prieur, Pierre de Chalons, chanoine, renonça le 25 décembre 1707 à la jouissance et aux charges de ce bénéfice, moyennant une rente viagère et nette de 100 livres.

La dotation ainsi constituée, le séminaire continua sa tranquille existence sous la direction des Lazaristes. En 1713, le personnel de la congrégation comprenait MM. Pierre Rhodes, supérieur, Louis Courtat, Jean Fray, Joseph Lanoë ; Raymond Dupupe, et trois frères.

Mgr d’Argouges, qui avait tant fait pour le séminaire, ne l’oublia pas dans son testament du 15 janvier 1716. « Nous donnons, dit-il, et léguons au séminaire des prestres de Vannes la somme de 12,000 livres, pour la d. somme estre mise en fonds, et le revenu et la rente qui en proviendront estre employés, tous les ans à perpétuité, à nourrir et entretenir gratuitement dans le d. séminaire autant d’ecclésiastiques du diocèse de Vannes que la d. rente et le d. revenu le pourront permettre ; les quels ecclésiastiques seront choisis et désignés par mes seigneurs les évêques de Vannes, entre ceux qui se destineront aux ordres sacrés et qui ne seront pas en état de payer la pension au d. séminaire. Et en cas que la d. rente et le d. revenu ne fussent pas employés tous les ans pour la subsistance des d. ecclésiastiques dans le séminaire, nous les donnons et léguons, moitié à l’hôpital général, moitié à l’hôtel-Dieu de la ville de Vannes, notre dessein étant qu’ils tournent toujours au profit des pauvres, de quelque manière que ce soit, sans qu’ils puissent jamais estre divertis à aucun autre usage. Nous donnons et léguons aux prestres et à la maison de notre d. séminaire notre ornement pontifical en broderie, avec tous les accompagnements, consistant en une chasuble et une chape, rouges et blanches, à deux envers, une pareille chasuble et une pareille chape, à deux envers, vertes et violettes, et une troisième chasuble de tabis noire brodée, avec nos mitres » (Présidial. B. 626). 

 

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VI. PROCES.

« Qui possède procède ». Ce proverbe allait se réaliser sans tarder pour le séminaire de Vannes.

L’abbaye de Saint-Gildas de Rhuys lui avait cédé, le 6 août 1689, comme on l’a vu, le prieuré du Hézo en Surzur, en se réservant seulement une rente de dix perrées de seigle et la juridiction féodale sur les sujets du prieuré. L’arrangement avait été loyalement accepté de part et d’autre, et pendant 25 ans il ne donna lieu à aucun conflit.

En 1715, sur la requête du procureur fiscal, le sénéchal de la juridiction de l’abbaye, accompagné de ses officiers et d’un religieux du monastère, se rendit au Hézo, le 22 janvier, fête de saint Vincent, patron de la chapelle. Là, pour affirmer son droit de juridiction et empêcher toute prescription contraire, il se fit apporter une soute par le dernier marié du quartier, et la remit au R. P. Georges Botherel, qui la jeta au peuple, tout prêt à s’en disputer la possession.

Le 15 mars suivant, le même sénéchal, accompagné comme la première fois, revint au Hézo et fit « battre le tambour et sommer les habitants sujets et vassaux, tant du bourg du Hézo que des villages circonvoisins, de se présenter pour planter et mettre en place un poteau, sur lequel étaient attachés quatre écussons, armoyés des armes de la seigneurie, qui sont six hermines, sçavoir 3 en haut, 2 au milieu et 1 au bas, avec la couronne de marquis, et aux deux côtés une crosse et une mitre, le tout peint sur du fer blanc, attaché avec des clous aux quatre côtés du dit poteau, lequel il fit lever et mettre entre le cimetière et la croix en présence de Messire Gabriel Guégan, chapelain, Pierre Thomas, Jean le Luhern, etc., à tous les quels il déclara que le d. poteau étoit à leur charge et garde, et que s’il était arraché et les armes biffées, ils en répondraient en leurs propres et privés noms, et qu’il seroit procédé à l’extraordinaire. Et afin que personne ne prétendit cause d’ignorance du procès-verbal de plantation, il ordonna d’en afficher une copie à la porte de l’église, et d’en signifier une autre à Messieurs du séminaire de Vannes, comme principaux d’entre tous les vassaux du dit Hézo »  (Saint-Gildas. H).

Toutes ces démarches étaient parfaitement naturelles et légitimes aux yeux des moines de Saint-Gildas, qui avaient eu la juridiction féodale sur le Hézo, et qui l’avaient formellement réservée lors de la cession du 6 août 1689. 

Mais les Lazaristes n’en jugèrent pas ainsi. — En remontant à l’origine du fief, ils trouvèrent que la concession faite par le duc Geoffroi I : en 1001 était un acte apocryphe. — C’était vrai ; mais les moines auraient pu répondre que si l'acte d’échange ne remontait pas à l’an 1001, il datait au moins du duc Jean I, vers 1247, et que leur juridiction avait toujours sa source dans une concession ducale.

Les Lazaristes affirmèrent ensuite que le prieuré du Hézo était un fief distinct, et séparé de celui de Prorozat ou de Saint-Armel ; que les prieurs du Hézo avaient jadis droit de basse et moyenne justice sur tous leurs sujets ; qu’ils avaient une cour, avec sénéchal, procureur et greffier ; et que leur négligence avait permis aux religieux de Saint-Gildas de les supplanter depuis 1630 environ ; et qu’enfin la haute justice du lieu appartenait au duc, puis au roi, représenté par son sénéchal de Vannes. Il en résultait que la réserve faite en 1689 était nulle, parce qu’elle était le résultat d’une usurpation.

A ce premier grief vint s’en joindre un autre. « Les demandeurs (Lazaristes) se plaignent en second lieu de ce que les religieux ont usurpé une partie des marais du village de la Villeneuve, pour la construction de leurs nouvelles salines. Les domaines du prieuré du Hézo et de l’abbaye de Rhuys sont séparés par un estier ou canal, dans lequel l’eau de la mer reste, lorsque la mer est retirée, et par un grand chemin qui conduit du village de la Villeneuve aux murs du grand parc du Duc : tels sont les termes des dénombrements. Or les religieux ont fait, il y a plusieurs années, des salines dans leur frairie du Prorozat, du costé de la mer. Ils en ont commencé de nouvelles à la fin de 1714 ; mais comme le terrain leur manquait pour faire des réservoirs, ils ont pris la partie de l’estier ou canal qui venoit aboutir sur le grand chemin ; ils se sont encore accommodez d’une partie des marais qui estoient au delà de ce canal. C’est sur ce terrain, dépendant du prieuré, qu’ils ont construit en 1715 le bassin ou réservoir qui reçoit les eaux de la mer nécessaires pour ces salines ; en sorte que présentement (1717), ce réservoir change les anciennes limites et les interrompt. Le canal n’aboutit plus sur le chemin, parce qu’il en est séparé par ce réservoir, comme le justifie le procès-verbal que les religieux ont fait faire de l’estat de ces salines, depuis l’instance » (Saint-Gildas H. — Imprimé).

L’affaire, ainsi engagée, fut portée devant le parlement de Bretagne par les religieux de Rhuys, et devant le grand Conseil du roi par les Lazaristes. Voici l’arrêt de ce grand Conseil en 1718 : « Louis (XV), par la grâce de Dieu, roy de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes lettres verront, salut. Sçavoir faisons comme par arrest ce jourd'huy donné en nostre grand-Conseil, entre nos bien amez prestres de la congrégation de la Mission, supérieur et directeurs du séminaire de Vannes... et les religieux prieur et couvent de Saint-Gildas de Rhuys .., au sujet d'un poteau aux armes de l’abbaye, planté devant l’église du prieuré du Hézo, et de salines établies récemment au dit lieu .... Vu l’acte d’union du prieuré du Hézo au séminaire du 6 août 1689,... les divers aveux rendus à la Chambre des Comptes,... les écritures et production des dites parties.... Nostre dit Conseil, faisant droit sur les instances de complainte.

1° En ce qui touche le plantement du poteau en question : en conséquence de la possession dans laquelle les d. prestres de la Mission, supérieur et directeurs du séminaire de Vannes, auquel le prieuré du Hézo est uni, sont de la directe seigneurie sur tous les hommes et vassaux du d. prieuré, et de ne relever que de Nous, à cause de nostre jurisdiction de Vannes, en la quelle notre d. Conseil les a réintégrés, a condamné et condamne les d. religieux prieur et couvent de St-Gildas-de-Rhuys de faire arracher et démolir le dit poteau dans huitaine du jour de la signification qui sera faite du présent arrest, sinon et à faute de ce faire, et le temps passé, en vertu du présent arrest, et sans qu’il en soit besoin d’autre, a permis et permet au procureur général de le faire arracher et enlever aux frais des d. religieux prieur et couvent du d. Saint-Gildas ; enjoint à son substitut au présidial de Vannes d’y tenir la main, et d’en certifier notre d. Conseil dans un mois ; en ce qui concerne la possession du terrain, où le d. poteau est planté, ordonne que les d. parties contesteront plus amplement dans trois mois ; 

2° En ce qui touche les marais, nouvellement convertis en salines, ensemble le réservoir ou bassin d’icelles, avant faire droit, a ordonné et ordonne que par devant le sénéchal d'Auray, parties intéressées présentes ou icelles dûment appellées, procès verbal sera dressé de l’état des lieux en contestation ; comme aussi par un expert juré, dont les parties conviendront par devant le d. Commissaire, plan, figure et description sera faite des marais, salines et pâturages, ensemble du réservoir ou bassin d’icelles, sur lequel plan seront marqués exactement l’ancien état des lieux avant la construction des nouvelles salines et du réservoir ou bassin, ensemble les terrains y aboutissans, les dénominations et changemens d'iceux, tant anciens que modernes ; ... pour estre par notre d. Conseil ordonné ce qu’il appartiendra ; 

Condamne les d. religieux de Rhuys en la moitié des dépens, l’autre moitié réservée. Donné en notre d. Conseil, à Paris, le 31e jour de mars, l’an de grâce 1718, et de notre règne le 3e. Par le roy, à la relation des gens de son grand Conseil (Ibid.) Signé : Soufflot ».

D’un autre côté, le parlement de Bretagne, ignorant peut-être l’arrêt du grand Conseil, ou voulant peut-être aussi réagir contre les envahissements du dit Conseil, donna, le 30 juin 1718, un arrêt favorable aux religieux de Saint-Gildas. Munis de cette pièce, ceux-ci obtinrent par surprise des lettres patentes du roi, du mois d’août 1718, leur permettant de rétablir des fourches patibulaires et d’exercer leur justice « dans la frairie de Saint-Armel, au lieu du Hézo ». Il est bon de remarquer que « le lieu du Hézo » n’est point en la frairie de Saint-Armel, et qu’il y a là probablement une confusion volontaire. Quoi qu’il en soit, les moines de Rhuys ne firent pas valoir, alors les décisions obtenues à leur profit et les réservèrent pour plus tard. 

Pendant ce temps, le sénéchal d'Auray visitait les lieux constestés, faisait dresser un plan détaillé des salines, rédigeait son procès-verbal, et envoyait le tout au grand Conseil. à Paris. Enfin en 1723 intervint l’arrêt suivant : « Louis :(XV), par la grâce de Dieu, roy de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes lettres verront, salut. Vu le plan, figuré et description des parties des terres dépendantes du Hézo et de l’abbaye de Saint-Gildas, les d.  plans faits en exécution de l’arrêt interlocutoire du 31 mars 1718 et signez par les sieurs P. Rhodes, D. G. Botherel, V. Boutouillic, commissaire, etc... Procès-verbal fait devant le sénéchal d'Auray, contenant les contestations et réquisitions des parties ; Vu tout ce que par les d. parties a été écrit et produit par devers notre Conseil. Icelui notre d. grand Conseil, faisant droit sur la d. instance, ayant égard aux demandes des prêtres de la Mission, sans s'arrester à celles des religieux prieur et couvent de Saint-Gildas, dont ils sont déboutez ; En ce gui touche le terrain, où estoit planté le poteau, dont il est question, a maintenu et gardé, maintient et garde les d.  prêtres du séminaire de Vannes dans la possession et jouissance où ils étaient du d. terrain ; Et en ce qui touche les d. marais, convertis en salines, ensemble le réservoir ou bassin d’icelles, a ordonné et ordonne que les d. prêtres du séminaire de Vannes seront réintégrés dans la possession où ils étoient, tant par eux que par leurs hommes, de la d. partie des marais du côté du village de la Villeneuve, en deça du d. estier, en ce qui est compris dans le d. réservoir ou bassin ; Ce faisant, condamne les d. religieux prieur et couvent de Saint-Gildas à remettre icelle partie des d. marais et l’estier dans l’état où ils étoient avant le trouble ; et sur le surplus des demandes et requestes des d. parties, a mis et met icelles parties hors de cour et du procès, et condamne les d. religieux prieur et couvent de Saint-Gildas aux dépens, même ceux réservez par l'arrest du 31 mars 1718. Donné en notre d. Conseil à Paris, le 20e jour de mars, l’an de grâce 1723, et de notre règne le 8e. Par le roy, à la relation des gens de son grand Conseil (Ibid.) - Signé : Verduc »

M. Rhodes, supérieur du séminaire, triomphait sur toute la ligne. Mais s’il était attentif à défendre ses droits réels ou présumés, il. oubliait parfois ses obligations. C’est ainsi qu’il négligea pendant une dizaine d’années de payer au chapitre la rente de 200 livres due au sous-chantre, et que le présidial dut le condamner en 1736 à payer la somme de. 2,000 livres pour tout l’arriéré. C’est ainsi encore qu’à la suite du procès du Hézo, il cessa de payer à Saint-Gildas le tonneau de seigle stipulé dans l’acte de cession ; mais son successeur, plus équitable que lui, rétablit cette redevance. 

L’affaire du Hézo fut suivie d’une paix, qui dura 13 ans.  Tout paraissait oublié, quand la guerre reprit subitement. En 1736, le séminaire de Vannes ayant été dans la nécessité de faire assigner au présidial plusieurs vassaux du Hézo, pour les obliger à rendre aveu de leurs biens et à payer les rentes et devoirs dus à leur prieuré, le sieur Désalleurs, procureur fiscal de la juridiction de Saint-Gildas, intervint dans la cause. Persuadé que l’abbaye avait, de temps immémorial, la haute, moyenne et basse justice sur le prieuré du Hézo, il demanda le retrait de barre, le 7 février 1737, et conclut à ce que le séminaire fût débouté des assignations données au présidial de Vannes. 

Le supérieur du séminaire, pour toute réponse, lui opposa l’arrêt du 31 mars 1718. Alors, ce procureur fiscal exhiba l’arrêt du parlement de Bretagne du 30 juin 1718, et les lettres du roi du mois d’août suivant, restées cachées jusqu’à ce moment. Ces lettres patentes furent considérées par les Lazaristes comme obtenues par surprise et dénoncées au Conseil du roi. Le supérieur général des bénédictins de Saint-Maur, et celui des prêtres de la Mission déploraient amèrement ces luttes, et faisaient leur possible pour les calmer.

Enfin, le 30 décembre 1740, fut prononcé l’arrêt suivant : « ... Le roy étant en son Conseil a ordonné et ordonne que les lettres patentes obtenues au mois d’août 1718 par les abbé prieur, religieux et couvent de l’abbaye de St-Gildas-de-Rhuys, en Bretagne, portant rétablissement des fourches patibulaires dans l’étendue de la juridiction de la d. abbaye, ne pourront avoir lieu pour le Hézo, énoncé dans les dites lettres comme membre dépendant de la d. abbaye ; laquelle frairie du Hézo, mouvante de Sa Majesté, sera et demeurera de la seigneurie directe des missionnaires de Vannes, suivant et ainsi qu’il a été réglé et jugé par les arrêts du grand Conseil du 31 mars 1718 et 20 mars 1723. ».

L’abbé commendataire de Saint-Gildas, qui était alors Jean-Joseph de Villeneuve, ayant perdu tout espoir sur la haute justice attribuée au roi, réclama la justice moyenne et basse ; mais un arrêt du 18 septembre 1742 vint lui enlever cette dernière illusion. « Notre grand Conseil, dit le roi, faisant droit sur le tout, Nous a maintenu et gardé, maintient et garde dans le droit de moyenne et basse justice sur les vassaux et dans toute l’étendue du prieuré du Hézo ; a pareillement maintenu et gardé les officiers de la sénéchaussée et siège présidial de Vannes dans l’exercice de tous actes de justice dans l’étendre du d. prieuré du Hézo ; fait défense au d. de Villeneuve, abbé, aux religieux de Saint-Gildas, à leurs officiers et à tous autres de troubler les d. officiers de la sénéchaussée de Vannes dans leurs fonctions ... »

En résumé la juridiction haute, moyenne et basse était devenue la part du roi ou du présidial ; les plaideurs n’avaient plus que ... la coquille de l’huître.

 

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VII. EGLISE.

L’ancienne église de Notre-Dame du Mené, comme on l’a déjà dit, était parallèle à la rue du même nom et orientée vers l’est. Elle avait au nord le cimetière de la paroisse et à l’est le presbytère et le jardin. Elle avait la forme d’une croix latine, avec deux chapelles, dédiées l’une à saint Crépin et l’autre à saint Eloy, sans compter les deux chapelles de Notre-Dame et de Saint-Michel, appartenant aux Gibon du Grisso. 

En 1716, cette église tombait de vétusté. C’est pourquoi Mgr d'Argouges inséra cette clause dans son testament : « Nous donnons et léguons la somme de 10.000 livres, pour contribuer à bâtir une nouvelle église paroissiale à Notre-Dame du Mené, celle d’aujourd’hui ne pouvant plus subsister et étant dans un péril imminent de ruine et de chute ; parce que néanmoins la d. église sera bâtie en tel lieu, place et situation, et de telle forme et manière que le supérieur de notre séminaire le commandera avec M. Delourme, architecte, qui en dressera le dessin et l’exécution. 

Au mois de mai 1717, une muraille fut élevée au milieu de l’église, pour la consolider ; mais dès l’année suivante, le porche tomba ; le choeur et les chapelles menaçaient d’en faire autant ; comme on redoutait la perte du beau retable, avec ses quatre colonnes de marbre, qui surmontait le maître-autel, on résolut, en décembre 1718, d’abattre le tout. Le 24 juin 1719, Olivier Gibon, comme prééminencier dans l’église, donna son consentement à la démolition. 

Le nouvel édifice, construit à l’est du cimetière et sur l’emplacement du jardin et du presbytère, fut commencé en 1720, et absorba bientôt le legs de Mgr d'Argouges. Mgr Fagon, arrivé à Vannes la même année, se chargea de la suite de l’entreprise, comme supérieur majeur du séminaire et principal paroissien de Notre-Dame du Mené. L’église nouvelle, tournée vers le nord-ouest, était perpendiculaire au séminaire ; le choeur allongé pour recevoir facilement les clercs ; le transept à pans coupés avait d’un côté l’autel de la Vierge et de l’autre celui de saint Vincent de Paul ; la nef, de même largeur que le choeur, était séparée des chapelles latérales par des piliers et des arcades. En avant il y avait un perron très élevé et une petite place triangulaire. Le clocher, situé à l’angle sud-ouest, n’a jamais été terminé ; la chapelle du transept ; du même côté, fut affectée à la famille de Gibon, et leur enfeu y fut rétabli. (Reg. du Mené). Enfin, après dix-neuf ans de travaux, l’église fut bénite, le 30 août 1739, par M. Armand, prêtre de la Mission, chargé des fonctions de curé ou de vicaire de la paroisse. 

M. Pierre Rhodes, qui était alors supérieur du séminaire et recteur du Mené, était très âgé. Il fut remplacé dans son double emploi par M. Patrice Jonneaux en 1742, par M. Le Bail en 1749, par M. Le Pourvandier en 1763, par M. Le Bail pour la seconde fois en 1777 et enfin par M. Jean-Mathurin Le Gal en 1783. 

Le renvoi des Jésuites du collège de Vannes, en 1762, eut son contre-coup au séminaire. Les chaires de théologie dogmatique et morale ne furent plus occupées, et les jeunes clercs n’eurent plus que les cours professés dans leur maison. Les professeurs furent sans doute astreints, comme ceux du collège lui-même, à enseigner les quatre articles de la déclaration de 1682, relatifs à l’omnipotence du roi et à l’abaissement du pape. Le parlement tenait à ces articles autant ou plus qu’aux articles du Symbole, les imposait partout où il pouvait, et les décorait du nom trompeur de libertés de l'Eglise gallicane. 

Les gallicans et leurs alliés, les jansénistes et les philosophes, travaillaient depuis longtemps à la ruine de la société civile et de l'Eglise en France. Leurs efforts aboutirent enfin à la Révolution de 1789 et années suivantes. Leur première opération fut de confisquer les biens de l'Eglise, la seconde de rédiger une Constitution civile du clergé qui bouleversait la discipline et créait le schisme officiel. Avant d’être dépouillé, le séminaire dut fournir, comme tous les autres établissements religieux, un état de ses biens.  Voici le tableau sommaire donné par le supérieur en 1790.

I. Revenus. 

Rente sur le clergé du diocèse de Vannes : 1.200 livres. 

Rente payée par l'évêque, pour un 3ème professeur : 500 livres. 

Revenu du séminaire, pavillon et pré : 522 livres. 

Ferme du prieuré du Hézo et accessoires : 2.647 livres 14 sols. 

Salines neuves du Hézo, 107 oeillets : 530 livres.

Produit de la paroisse de N-D. du Mené : 194 livres 13 sols.

Revenu de la chapellenie du Vincin : 396 livres.

Revenu du prieuré et des tenues des Saints : 796 livres.

Constitut de 8.000 livres sur le Clergé de France : 320 livres.

Constitut de 6.000 livres sur les Etats de Bretagne : 300 livres.

Constitut de 6.000 livres sur la maison de Saint-Lazare : 267 livres.

Rente sur les Tailles : 60 livres 14 sols

Total  7.734 livres 1 sol

 

II. Charges. 

Pension de sept missionnaires, à 300 livres chacun : 2.100 livres.

Rente à l’abbaye de Saint-Gildas sur le Hézo : 150 livres.

Pension du chapelain du Hézo : 300 livres.

Fondations de N.-D. du Mené à desservir : 363 livres 2 sols.

Pensions fondées pour les clercs du séminaire : 1.000 livres.

Rente au sous-chantre du chapitre, sur N.-D : 200 livres.

Rentes à payer pour des missions fondées : 125 livres 3 sols 4 deniers.

Messes fondées des prieurés et autres : 721 livres.

Réparation annuelle des immeubles : 1.876 livres 10 sols 5 deniers.

Blanchissage et luminaire communs : 283 livres.

Décimes de la maison : 601 livres 14 sols.

Total : 7.720 livres 9 sols 9 deniers.

Reste net : 13 livres 10 sols 3 deniers. 

 

III. Mobilier. 

111 lits garnis. — 97 petites tables. — 152 chaises. — 158 draps à la lingerie. — 621 serviettes. — 63 nappes, etc... 

A la bibliothèque 4.070 volumes de divers formats. 

A la sacristie, calices d’argent, ornements de diverses couleurs, aubes, amicts et linges d’autel. 

Au réfectoire, couverts et vaisselles d’argent, pesant 12 marcs ; assiettes et accessoires d’étain, pesant 866 livres.  A Vannes, 23 février 1790. Le Gal, sup. du Sém. et rect. de N.-D. du Mené » (Archives départementales, L.777).

 

Le personnel de la maison comprenait alors : 

Jean-Mathurin Le Gal, de Rochefort, 44 ans, supérieur ; 

Pierre-René Rogue, de Vannes, 30 ans , professeur de théologie ; 

Joseph Rouillon, de Rupt, 33 ans, professeur de théologie ; 

Jean-Baptiste Robin, de Bascou , 30 ans, professeur d'Ecriture sainte ; 

Vincent Mainguet, de Redon, frère, 21 ans, à la procure ; 

Joachim Boursin, de Cagnicourt, 42 ans, frère, à la cuisine ; 

Joseph Crognard, de Valenciennes, 40 ans, frère, à la dépense.  

Quant au serment à la Constitution civile, du clergé, M. Le Gal promit, le 14 février 1791, de le prêter, mais éclairé par M. Rogue sur ses conséquences, il le refusa définitivement ; tous ses professeurs le refusèrent comme lui.  L’église de N.-D. du Mené fut fermée le 30 avril suivant. Les directeurs du séminaire restèrent encore dans la maison jusqu’à la fin de l’année ; mais dès le 25 janvier 1792, ils furent jetés sur le pavé à huit heures du soir : les révolutionnaires se croyaient dispensés de toute convenance et de toute humanité. 

Peu après, en septembre, M. Le Gal se déporta en Espagne, laissant à M. Rogue le soin de veiller sur les fidèles de Notre-Dame du Mené, et de leur administrer les sacrements de l'Eglise. 

La vente des biens du séminaire était déjà commencée. Le 20 avril 1791, la maison dite le pavillon Gambert, située rue du Mené, et son verger, furent adjugés au sieur Dupré pour la somme de 1.850 livres ; le pré situé derrière ce pavillon fut vendu, le 20 mai suivant, au sieur Pério, pour 6.400 livres ; la campagne du Vincin, avec la chapelle, le jardin et la métairie, fut adjugée, le 28 septembre de la même année, à M. Le Corgne, pour 24.000 livres. Le prieuré des Saints, avec ses . dépendances, fut réservé pour plus tard. 

Le séminaire ne fut pas aliéné, parce que l’évêque constitutionnel pouvait en avoir besoin. Effectivement, M. Le Masle nomma, pour supérieur de la maison, l’un de ses vicaires, M. Jean Pontchier, ex-lazariste, qui prêta serment le dimanche, 6 mai 1792. Aussitôt les administrateurs composant le directoire du département décidèrent qu’il serait logé au séminaire, qu’il aurait un traitement de 600 livres par an, et qu’on donnerait pareille somme aux directeurs qui lui seraient adjoints. 

Le receveur des domaines nationaux à Vannes, qui avait géré jusque-là la maison et les jardins du séminaire, voulut exiger un prix de fermage du nouveau supérieur ; mais le directoire du département, réuni le 8 juin 1792, « considérant que la maison du séminaire et ses dépendances n’ont pas cessé d’avoir une destination particulière, à l'usage des directeurs de cet établissement et de leurs élèves, malgré qu’il eût été pendant quelque temps inhabité.., » fit défense au receveur de rien exiger. — Ce séminaire constitutionel a pu réunir peut-être quelques élèves, mais son existence fut éphémère.

Les prêtres assermentés, choyés par les autorités civiles en 1792, menacés en 1793, furent à leur tour persécutés en 1794. Le 1er avril de cette année, l’église cathédrale de Saint-Pierre fut retirée à l’évêque constitutionnel, pour servir au culte de la Raison, et l’intrus se réfugia dans l’église de Notre-Dame du Mené. Il y fit transférer les reliques de saint Vincent-Ferrier et d’autres ossements saints, renfermés dans des châsses en bois, l’argent ayant été confisqué par l'Etat.

Quelques jours après, M. Le Masle et plusieurs de ses prêtres ayant refusé de livrer leurs lettres d’ordination, furent traités de suspects, et comme tels enfermés au Petit-Couvent. Le culte constitutionnel fut ainsi suspendu depuis le 20 avril, jour de Pâques, jusqu’au 1er février de l’année suivante. Le séminaire fut fermé et le supérieur congédié. 

La mort de Robespierre, le 20 juillet 1794, mit fin au régime de la Terreur. La Convention sembla bientôt pencher vers la modération ; ses représentants dans le Morbihan rendirent, le 5 novembre de cette année, la liberté aux administrateurs détenus au Petit-Couvent depuis un an, ainsi qu’aux hommes et aux femmes enfermés comme suspects ; mais les ecclésiastiques n’eurent pas la même faveur. 

Au mois de janvier 1795, le tribunal criminel du Morbihan, qui siégeait à Lorient et qui avait fait guillotiner quinze prêtres, fut ramené à Vannes, et installé dans les bâtiments du séminaire. Le 27 du même mois, la Convention ordonna la mise en liberté des religieuses détenues ; les prêtres constitutionnels furent aussi relâchés vers le même temps et purent reprendre l’exercice de leur culte ; les prêtres catholiques, détenus à Vannes et à Josselin, ne furent libérés que vers le 1er avril. 

Cependant la Chouannerie luttait contre la République ; les émigrés descendaient à Carnac le 27 juin 1795, s’enfermaient dans ,la presqu’île de Quiberon et s’y faisaient écraser par Hoche le 21 juillet suivant. Les malheureux prisonniers, jugés par des commissions militaires, étaient impitoyablement fusillés à Quiberon, à Auray et à Vannes. 

La Convention, avant de se séparer, renouvela la persécution : l’église cathédrale fut convertie en magasin ; l’église de Notre-Dame du Mené fut mise, par arrêté de l’administration centrale du 16 octobre 1795, à la disposition de l’inspecteur des vivres, « pour loger les bestiaux de la République ». Les prêtres furent de nouveau poursuivis, traqués, emprisonnés et livrés au tribunal criminel.

Ce tribunal, composé des citoyens Chesnel, président, Fabre, Le lueur, Le Blanc et Mancel, juges, Lucas, accusateur public, et Nayl, commissaire du pouvoir exécutif, eut à juger, le 31 décembre 1795, M. Yves Le Manour, âgé de 48 ans, natif de Remungol et prêtre à Languidic. Il lui fit l’application des lois de proscription, et le condamna immédiatement à la peine de mort, sans aucun sursis ; l’exécution eut lieu sur la place du Marché, devant le collège. 

C’est la seule condamnation capitale, prononcée contre un prêtre dans l’ancien séminaire de Vannes. Au mois de février 1796, le tribunal criminel fut transféré dans l’ancienne maison de la Retraite des femmes, et le premier prêtre qu’il y eut à juger fut M. Rogue, ancien professeur au séminaire et vicaire à N.-D. du Mené. 

Ce bon prêtre venait d’administrer un malade, la nuit de Noël, lorsqu’il fut reconnu et arrêté par un homme à qui il avait fait du bien. Après deux mois de captivité, il fut traduit, le 3 mars 1796, devant le tribunal criminel, qui le condamna à mort, comme prêtre réfractaire. Le lieu où siégeait le tribunal était l’ancienne chapelle de la Retraite, où M. Rogue avait souvent confessé. Après avoir entendu prononcer son arrêt ; il se jeta à genoux, et dit à haute voix : « Je vous rends grâces, ô mon Dieu, de ce que vous me jugez digne de mourir aujourd’hui pour la foi, et d’entendre prononcer ma sentence dans un lieu où si souvent j’ai annoncé votre parole et exercé les fonctions d’un ministère auguste ..».

Pendant la nuit, il écrivit deux lettres, l’une à sa mère, l’autre à ses confrères persécutés, et convertit par sa résignation le sergent qui le gardait. Le lendemain, 4 mars, il fut conduit sur la place du Marché, et reçut le coup de la mort en prononçant ces paroles : In manus tuas, Domine, commendo spiritum meum. La vénération qu’on avait pour lui était si grande, qu’on vit plusieurs personnes s’approcher de l’échafaud et tremper dans son sang des linges que l’on distribua ensuite comme des reliques. Depuis, la piété des fidèles lui a dressé un monument dans le cimetière.  

En même temps que lui, fut condamné et exécuté M. Alain Robin, vicaire à Inzinzac, âgé de 39 ans. Quelques jours après furent également jugés et guillotinés MM. Julien Le Bècre, vicaire à Pontivy, Laurent Le Floch, prêtre à Cléguer, Jean Hémery, prêtre à Saint-Servant, et Pierre Le Verger, prêtre à Lanouée. 

Quand les personnes étaient ainsi traitées, les biens ne pouvaient être épargnés. Les dernières propriétés du séminaire situées aux Saints, en Grandchamp, furent à leur tour mises en vente. La chapelle, le pourpris et une tenue furent adjugés, le 16 mars 1798, à Charles Poussin, juge, pour 24.244 livres, en assignats dépréciés. Les trois autres tenues furent cédées à M. Goujon, notaire, le 1er mai 1798, pour 40.465 livres. Enfin, la tenue de l'Ermitage en Plaudren (Locqueltas) fut vendue, le 18 avril 1798, au sieur Mahéo, édificier, pour 13.451 livres. 

Pendant ce temps, la maison du séminaire servait de caserne à l’artillerie. Les soldats nivelaient le cimetière du Mené et le terrain vague situé vers l’ouest, et y établissaient leur parc. La maison eut beaucoup à souffrir du séjour des militaires, comme on le verra dans la suite.

 

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VIII. RETABLISSEMENT

Après dix ans de bouleversements, le Concordat du 15 juillet 1801, ou 26 messidor an IX, vint faire luire l’aurore d’une ère nouvelle. L’article.11 de ce traité bilatéral porte ce qui suit : « Les évêques pourront avoir un Chapitre dans leur cathédrale, et un Séminaire dans leur diocèse, sans que le gouvernement s’oblige à les doter ». Ce texte est clair ; il laisse aux évêques la liberté d’avoir un séminaire, et cette liberté est sans restriction de la part de l’autorité civile. Mais le premier Consul ne l’entendait pas ainsi. En faisant voter les articles du Concordat, le 8 avril 1802 (18 germinal an X), il y ajouta frauduleusement des Articles dits organiques, qui n’avaient pas été convenus, et qui furent aussitôt désavoués par le légat Caprara et par le pape. 

En voici le texte pour les séminaires : 

« Article 23. Les évêques seront chargés de l’organisation de leurs séminaires, et les règlements de cette organisation seront soumis à l’approbation du premier Consul. 

Article 24. Ceux qui seront choisis pour l’enseignement dans les séminaires souscriront la Déclaration faite par le clergé de France en 1682 (et condamnée par le pape) ; ils se soumettront à y enseigner la doctrine qui y est contenue, et les évêques adresseront une expédition en forme de cette soumission au conseiller d'Etat, chargé de toutes les affaires concernant les cultes (ingérence tyrannique). 

Article 25. Les évêques enverront, toutes les années, à ce conseiller d'Etat le nom des personnes qui étudieront dans les séminaires et qui se destineront à l’état ecclésiastique ».

De son côté, le cardinal Caprara, légat du pape, donna, le 10 avril 1802, à chaque évêque de France ses instructions pour l’établissement et l’organisation de son séminaire. « Le premier évêque de Vannes aura soin d’établir un séminaire dans sa ville épiscopale, et de lui donner des règles pour l’étude des sciences . et le développement de la piété et de la discipline, suivant l’utilité du diocèse et les circonstances du temps, en se conformant aux décrets du concile de Trente et aux saints canons » (Instr.). 

Qu’a fait à cet égard Mgr de Pancemont, le premier évêque après le Concordat, spécialement délégué par le légat ? Il a érigé et ouvert un séminaire à Vannes : c’était son droit et son devoir. — Qu’a-t-il fait pour obéir aux prescriptions du concile de Trente, relativement à l’administration spirituelle et temporelle du séminaire ? — Rien. Et cette omission, commune à beaucoup d’autres évêques français, a donné l’occasion au gouvernement d’imposer en 1813 un règlement anticanonique. 

Cette lacune capitale constatée, voici le règlement accessoire dressé par l’évêque et soumis au gouvernement, en vertu des Articles organiques : 

« 1° Le cours de l’éducation et des études ecclésiastiques ne durera que deux ans. 

2° L’année du séminaire est de 300 jours, et divisée en deux parties égales, séparées par un mois de vacance. 

3° Dans le cours de ces deux années, l’un des professeurs enseignera le dogme, l’autre la morale, et le troisième le nouveau Testament et l’histoire ecclésiastique.

4° Le séminaire sera gouverné par un supérieur et trois directeurs. 

5° Le supérieur aura chaque année pour honoraire 1200 francs et chaque directeur 600 francs. 

6° La pension de chaque séminariste est fixée à 400 francs par an.

7° Le supérieur rend, chaque année, le 1er octobre, compte de la recette et de la dépense à Mgr l’évêque.

8° A la fin de chaque quartier, les élèves subissent un examen. sur les matières qui leur ont été expliquées. 

9° Tous les dimanches et les fêtes gardées, ils assisteront à tout l’office de la cathédrale, et s’acquitteront des fonctions qui leur seront désignées. 

10° Trois fois par semaine, on leur fera une instruction sur les fonctions ecclésiastiques.

11° Chaque semaine ils auront un jour de congé ...

Ordre de la journée : A 5 h. le réveil, — à 5 h. 1/2 la prière, — à 6 h. l’étude, — à 7 h. la messe, puis le déjeuner et l’étude, — à 9 h. la classe, — à 10 h. 1/2 l’étude, — à 11 h. 1/2 explication du nouveau Testament, ou histoire ecclésiastique.

A midi le dîner, suivi de la récréation, — à 1 h. 1/2 le chant ou les cérémonies, — à 2 h. 1/4 l’étude .,. — à 3 h. 1/2 la classe, — à 5 h. l’étude, — à 6 h. 1/2 la lecture de piété, — à 7 h. le souper, puis la récréation, — à 8 h. 1/2 la prière du soir, — à 9 h. le coucher » (Archives de l'Evêché). 

Quant aux bâtiments du séminaire, voici l’arrêté du gouvernement du 19 prairial an XI (8. juin 1803) :  

« Le gouvernement de la République, sur le rapport du Ministre des finances, arrête : 

Art. 1. Le préfet du département du Morbihan est autorisé à mettre les bâtiments de l’ancien séminaire de la ville de Vannes à la disposition de Mgr. l’évêque, pour être rendus à leur première destination. 

Art. 2. Le Ministre des finances est chargé de l’exécution du présent arrêté. 

Le premier Consul : Bonaparte.

Par le premier Consul : Le Secrétaire d'Etat : H. B. MARET. — Le Ministre des finances : GAUDIN »

Le premier supérieur du, séminaire fut M. Jean-Mathurin Le Gal, qui avait gouverné la maison avant la Révolution, et qui était alors vicaire général de l’évêque. C’était un ancien Lazariste, mais sa congrégation ne pouvant pas lui fournir de sujets, il dut accepter pour professeurs des prêtres du diocèse. 

C’est seulement en 1804 que recommencèrent les cours au séminaire. 

Le 30 septembre 1807, parut un décret impérial, établissant des bourses et des demi-bourses dans tous les séminaires diocésains à partir du 1er janvier suivant. La bourse était de 400 francs par an et la demi-bourse de 200 francs. Le séminaire de Vannes eut pour sa part 10 bourses et 20 demi-bourses, c’est-à-dire un total de 8,000 francs. 

Ces faveurs étaient chèrement payées par l’assujettissement forcé aux Articles organiques. Voici une lettre des vicaires capitulaires de Vannes adressée le 29 décembre 1807 au Ministre des Cultes, qui en dit long à cet égard.  

« Monseigneur, dans vos lettres du 17 et du 22 du présent, vous nous demandez plusieurs. choses sur lesquelles nous présumions que vous étiez instruit. En effet, le gouvernement ayant rendu l’ancien séminaire à sa première destination, le 19 prairial an XI, on en commença aussitôt les réparations, et en thermidor an XII (juillet-août 1804) on y commença les exercices, qui ont été continués jusqu’à ce jour.

Depuis ce temps le supérieur du séminaire a remis exactement, deux fois chaque année, les noms des personnes qui étudiaient dans le séminaire et qui se préparaient à l’état ecclésiastique, à feu Mgr de Pancemont, qui les faisait passer à Votre Excellence, et elle a daigné y répondre, en permettant de les ordonner.

Depuis la vacance du siège, nous nous sommes deux fois adressés à Votre Excellence pour, le même objet, et tout récemment nous lui avons envoyé la liste de ceux que nous proposons à la nomination des pensions et demi-pensions gratuites, et dans sa lettre du 22 Votre Excellence nous en accuse réception, et veut bien l’approuver : ainsi l’article 25 de la loi du 18 germinal an X est exécuté. 

Quant à l’article 24, ceux qui sont chargés de l’enseignement, dans le séminaire, se sont fait un devoir d’enseigner la Déclaration faite par le clergé de France en 1682, et nous Vous adressons une expédition de leur soumission : l’article 24 de la loi précipitée est donc accompli. 

Quant à l’article 23, feu M. de Pancemont a dû soumettre à l’approbation du gouvernement le règlement du séminaire, organisé dès le mois de septembre 1803, et nous savons qu’il a plusieurs fois écrit au gouvernement sur cet objet. Comme il . peut se faire que cette pièce soit égarée dans les bureaux, nous vous en faisons un nouvel envoi, et nous supplions Votre Excellence de présenter cette organisation à l’approbation de Sa Majesté. Ainsi les trois articles, dont vous demandez l’exécution, sont remplis, et les obstacles à la nomination des pensions et des demi-pensions gratuites sont levés.

Quant à l’état des ressources et des charges, des recettes et des dépenses, que vous demandez, il ne nous est pas possible de vous le donner comme nous le désirerions. M. de Pancemont a fait son administration comme il lui a plu.  Nous n’avions pas le droit de lui en demander compte, et nous n’avons pas le pouvoir de le rendre. Ce que nous pouvons vous dire de plus clair . regarde le séminaire, et ce qui s’est passé depuis que nous avons l’administration du diocèse. Suivant le premier compte, arrêté le 1er octobre 1804, la dépense excédait la recette de 2,911 livres 19 sous 9 deniers. Suivant le second, arrêté le 1er octobre 1805, la dépense excédait la recette de 3.748 livres 18 sous 9 deniers. — Suivant le troisième, arrêté le 1er octobre 1806, la dépense excédait la recette de 3,166 livres 19 sous 6 deniers. Ainsi, jusqu’à la mort de M. de Pancemont, la dépense excédait la recette. 

Pour remplir ce déficit, MM. les vicaires généraux ont généreusement appliqué au soulagement du séminaire une grande partie du casuel, qui pouvait être à leur disposition : et par ce moyen, suivant le dernier compte, arrêté le 1er octobre 1807, la recette excède la dépense de 1,229 livres 3 sous 1 denier, qui ont été laissés entre les mains du supérieur pour être employés au besoin du séminaire. 

Les revenus dudit séminaire sont : 1° la pension des séminaristes fixée à 400 livres ; — 2° les quêtes faites dans les églises, les premiers dimanches de chaque mois : elles ont monté l’année dernière à 3,996 livres ; — 3° le produit des saintes huiles et des pierres sacrées, qui ont valu cette année 704 livres 10 sous ; — 4° les dons gratuits, portés cette année à 600 livres ; — 5° les oblations de Sainte-Anne, depuis le 15 mars, ont produit au séminaire 5,266 livres — 6° les dispenses depuis la même époque ont valu 2,029 livres. 

Les charges du séminaire sont : 1° l’honoraire du supérieur 1.200 livres ; — 2° l’honoraire des trois directeurs 1.800 livres ; — 3° le déficit sur les pensions, qui s’est élevé l’année dernière jusqu’à 6.647 livres 16 sous ; — plusieurs des élèves ne pouvant rien payer, ou ne pouvant payer qu’une partie, on est obligé de leur donner pension plus ou moins gratuite. 

Quand les bâtiments du séminaire furent rendus à leur première destination, ils étaient dans un délabrement épouvantable.  Une partie était tombée, et il a fallu la relever.  Tout, depuis le sol jusqu’à la couverture, était en souffrance, et il a fallu le réparer, y mettre des portes et des fenêtres, acheter ensuite les meubles nécessaires. Tout est fait ; ainsi les réparations coûteront moins de dépenses, mais cet objet d’ici à quelques années sera toujours considérable. Les 8,000 liv.  que Sa Majesté a la bonté de nous accorder, non seulement nous faciliteront la bonne oeuvre, mais nous donneront les moyens de la mieux faire.

Voilà, Monseigneur, ce que nous pouvons dans ce moment vous dire de plus clair et de plus précis. Nous osons espérer que Votre Excellence voudra bien s’en contenter, jusqu’à ce que M. de Bausset, nommé à l’évêché de Vannes, vous rende compte de la manière dont il aura cru devoir tout arranger. Daignez, Monseigneur, recevoir avec bonté l’hommage de notre respect. ALLAIN. - LE GAL. - GRIGNON. - COQUEREL, Vic. gén. 

P. S. — Nous n’avons connaissance d’aucun don gratuit fait à des ecclésiastiques. — Feu M. de Coetcanton a légué sa bibliothèque au séminaire ; nous avons demandé l’autorisation du gouvernement, que nous n’avons pas encore reçue. — Il n’a été ordonné aucune aumône pour le jubilé, ni pour le rachat de l’abstinence du carême » (Archives de l'évêché).

Le séminaire avait alors 69 élèves, d’après une lettre du supérieur à Mgr de Bausset. L’église de Notre-Dame du Mené avait été affectée à son usage particulier, l’ancienne paroisse n’ayant pas été rétablie ; le sanctuaire venait d’être garni de stalles et de boiseries finement sculptées, provenant de Prières : l’acquéreur dé l’abbaye les avait cédées à M. Le Gal, en échange de planches, dont il avait besoin. 

On a vu ci-dessus qu’un certain nombre d’évêques avaient négligé d’établir les commissions exigées par le concile de Trente pour l’administration des séminaires. L’empereur, en examinant les règlements soumis à son approbation, s’aperçut bientôt de cette lacune, et il résolut d’y suppléer lui-même à sa façon, sans tenir compte des règles de l'Eglise. En conséquence, le 6 novembre 1813, à la veille de sa chute, il signa un décret, dont voici les principaux articles, concernant les séminaires.  

« Art. 62. Il sera formé, pour l’administration des biens du séminaire de chaque diocèse, un bureau composé de l’un des vicaires généraux, qui présidera en l’absence de l’évêque, du directeur et de l’économe du séminaire, et d’un quatrième membre remplissant les fonctions de trésorier, qui sera nommé par le ministre des cultes, sur l’avis de l’évêque et du préfet. Il n’y aura aucune rétribution attachée aux fonctions de trésorier.

Art. 63. Le secrétaire de l’évêché sera en même temps secrétaire de ce bureau.

Art. 64. Le bureau d’administration du séminaire principal aura en même temps l’administration des autres écoles ecclésiastiques du diocèse. 

Art. 65. Il y aura aussi, pour le dépôt des titres, papiers et renseignements, des comptes, des registres, des sommiers, des inventaires,.. une caisse ou armoire à trois clefs, qui seront entre les mains des trois membres du bureau. 

Art. 79. Le trésorier et l’économe de chaque séminaire rendront au mois de janvier leur compte en recette et en dépense... 

Art. 80. Les comptes seront visés par l’évêque, qui les transmettra au ministre des cultes ; et si aucun motif ne s’oppose à l’approbation, le ministre les renverra à l’évêque, qui les arrêtera définitivement et en donnera décharge »

Tel est le régime anti-canonique inventé par Napoléon Ier, conservé par tous les gouvernements suivants, et que les évêques sont forcés de subir.

 

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IX. BIENS.

Sous l'Empire, le séminaire de Vannes avait pour ressources, comme on l’a vu : les pensions des élèves, les quêtes faites dans les paroisses et les dons des bienfaiteurs, et à partir de 1808, les bourses de l'Etat. Il n’avait pas de biens-fonds. 

Sous la Restauration, où le gouvernement était plus large, M. Le Gal fit plusieurs acquisitions d’immeubles en son nom privé. C’est ainsi, qu’il racheta, le 12 octobre 1817, la belle propriété du Vincin, pour 18.000 francs, et qu’il la céda au séminaire pour le même prix, le 22 juin 1818 : ce qui fut approuvé par une ordonnance royale du 9 septembre suivant. 

C’est de même qu’il acheta, à diverses dates, quelques maisons à Vannes, des fonds de tenues aux Saints, à Penmeil, à Rocbihan, à Mériadec, à Kernantelin, une métairie à Penvins en Sarzeau, et une autre à Kernoel en l'Ile d'Arz, et qu’il céda le tout au séminaire, le 3 octobre 1828, à la charge d’acquitter un bon nombre de messes ; ce qui fut ratifié par une ordonnance royale du 24 novembre suivant. 

Enfin le supérieur en mourant, le 5 septembre 1831, légua au séminaire ses biens meubles et immeubles, qui provenaient presque tous de dons particuliers ; mais ses héritiers naturels réclamèrent vivement, et une ordonnance royale du 9 juin 1833 réduisit le legs à 20.000 francs. Une bienfaitrice eut ainsi le chagrin de voir passer à la famille une prairie qu’elle avait donnée au supérieur pour le séminaire. 

On se souvient que la famille Gibon du Grisso avait des prééminences, des chapelles et un enfeu dans l’ancienne église de N.-D. du Mené et qu’on lui avait cédé dans la nouvelle église l’usage de la chapelle Saint-Vincent de Paul, dans le transept du côté de l’évangile, avec le droit de sépulture. Or la Révolution avait passé par là et avait fait disparaître tous les souvenirs. 

Pour relier le présent au passé, M. Hyacinthe de Gibon donna au séminaire, le 29 janvier 1822, une rente perpétuelle de 40 francs par an, sur la propriété de Coetlagat, pour avoir dans l’église du Mené une messe annuelle le 4 mai, et rétablir une ancienne épitaphe de 1740, conçue en ces termes, avec l’écusson de la famille : « Cy git haut et puissant seigneur Messire Olivier Gibon, chevalier, seigneur du Grisso, de Couédic, du Pargo, de Lesvellec, Coetlagat, Quérisouet, Queralbau, Lohac, Coetec, Gibon et autres lieux, en son vivant major de l’arrière ban de la noblesse de l’évêché de Vannes, capitaine général des gardes-côtes d'Auray et Quiberon, seigneur fondateur de cette église, décédé en son château du Pargo le 21 mai 1740. Et cy gisent aussi plusieurs hauts et puissants seigneurs de la maison de Gibon, des anciens comtes de Porhoet, et de temps immémorial seigneurs de cette église, décédés jusqu’à ce jour 4 mai 1789. — Priez Dieu pour eux » (Archives départementales, V).

La dalle en marbre portant cette inscription fut scellée dans le mur, du bas côté, proche la chapelle de Saint-Vincent. 

Bientôt se produisit un fait capital pour le séminaire. L’établissement de l’avenue conduisant à la gare allait écorner les dépendances du séminaire en 1863 ; l’architecte diocésain prétendait que la maison elle-même n’était pas solide et qu’il fallait y faire des travaux considérables. Les religieuses de la Retraite, établies au Grador, désireuses de venir en ville à cause de leur école, proposèrent alors à Mgr Dubreil de céder leur belle propriété en échange du séminaire. L’évêque accepta la proposition avec enthousiasme, et fit croire au gouvernement qu’il aurait ainsi un des plus beaux séminaires de France. L'Etat recevait, il est vrai, une belle propriété, mais le logement était insuffisant et trop éloigné de la ville ; le clergé perdait une maison où il aimait à revenir, et où depuis deux siècles il conservait de précieux souvenirs. 

Une loi du 4 juin 1864 sanctionna cet échange, et accorda aux religieuses une soulte de 74.000 francs, pour équilibrer la différence des deux propriétés. Avec cette somme les Dames de la Retraite ont pu remettre en parfait état une maison qu’on disait menacer ruine, tandis que l'Etat a dû bâtir un nouveau séminaire, qui lui a déjà coûté plusieurs centaines de mille francs. L’avantage, certes, ne parait pas avoir été du côté du gouvernement. 

Aussitôt l’échange voté, le déménagement s’opéra. Dès le 24 juillet, le nouveau séminaire servit pour la retraite ecclésiastique, et deux mois après il ouvrit ses portes aux élèves de théologie. 

Le séminaire était à peine installé au Grador, qu’il reçut une libéralité d’un ancien domestique de l’évêché, nommé Isidore Giron. Le legs consistait en une petite métairie, située à la Châteigneraie en Campénéac, et en un modeste capital.

Le décret d’autorisation, signé à Saint-Cloud, le 13 octobre 1865, s’exprime ainsi : « L’évêque de Vannes (Morbihan), au nom du séminaire de son diocèse, est autorisé à accepter, aux clauses et conditions imposées, la disposition résultant en faveur de cet établissement d’un testament public, en date du 22 avril 1862 et par laquelle le sieur Isidore Giron, après avoir fait divers legs particuliers, a affecté le surplus de ses biens, consistant en meubles et créances montant à 4,525 francs, et en une métairie d’une contenance de 7 hectares 26 ares, et d’une valeur estimative de 6,000 francs, à la fondation d’une bourse au profit d'élèves ecclésiastiques peu aisés. — Les sommes à provenir de ce legs seront employées, au nom du séminaire de Vannes, en achat de rentes 3 % sur l'Etat ; mention sera faite sur l’inscription de la destination des arrérages » (Ibid.).

En 1866 mourut, au couvent des Ursulines de Vannes, Marie-Perrine Remolu, dite en religion Sainte-Ursule. Dès le 8, mars 1861, elle avait fait un testament olographe, par lequel elle donnait une bonne partie de sa fortune à ses héritiers naturels et le reste à divers établissements religieux, parmi lesquels était le séminaire de Vannes. La liquidation de cette succession fut assez longue à cause des réclamations des héritiers. 

Enfin, le 28 mars 1868, fut signé au palais des Tuileries le décret suivant : « L’évêque de Vannes (Morbihan), au nom du séminaire de son diocèse est autorisé à accepter, aux clauses et conditions énoncées, mais jusqu’à concurrence de moitié seulement, le legs fait à cet établissement par la Duc Marie-Perrine Remolu, suivant son testament olographe du 8 mars 1861, et consistant en trois métairies situées (à Calzac) sur le territoire de la commune de Sarzeau, contenant ensemble 49 hectares 63 ares 74 centiares, estimées en totalité à 50.750 francs, à la charge de servir une rente viagère de 1.000 francs et de faire célébrer deux messes par semaine à perpétuité » (Ibid.).

Dans ce singulier partage, le séminaire eut une métairie et la moitié d’une autre, et pour avoir la métairie entière, il dut racheter l’autre moitié ; malgré la réduction du legs il eut néanmoins toutes les charges.

On croira peut-être qu’après toutes ces libéralités, le séminaire était riche et pouvait faire des économies. — Il n’en était rien. Ses charges étaient énormes, et égalaient ses revenus, quand elles ne les surpassaient pas. Prenons comme preuve le premier venu de ses comptes annuels. Voici par exemple celui de 1890, conservé aux Archives départementales. 

I. Recettes.

1° Reliquat de l’année 1889 : 1 046 livres 10 sous.

2° Revenu des biens-fonds : 9 960 livres 50 sous.

3° Rentes sur l'Etat : 3626 livres.

4° Rente sur particulier (Gibon) : 40 livres.

5° Actions de la banque de France : 3615 livres.

6° Obligations diverses 80 livres 80 sous.

7° Pension des séminaristes (148) : 30 393 livres.

8° Dons et aumônes 10 309 livres 75 sous.

9° Quêtes dans le diocèse : 12 318 livres 30 sous. 

10° Recettes diverses 1 285 livres 20 sous.

Total : 72 434 livres 65 sous.

II. Dépenses. 

1° Traitement du supérieur, et 8 directeurs : 6 800 livres.

2° Gages de 21 domestiques : 3 705 livres.

3° Contributions : 1 881 livres 59 sous.

4° Acquit des fondations : 1 809 livres 70 sous.

5° Frais de nourriture : 42 384 livres 32 sous.

6° Luminaire et chauffage : 1 756 livres 25 sous.

7° Blanchissage du linge : 857 livres 40 sous.

8° Réparation des bâtiments : 3 615 livres 55 sous.

9° Frais du culte : 1 141 livres 45 sous.

10° Ouvriers divers : 2 089 livres 55 sous.

11° Achat de linges et meubles : 1 190 livres 35 sous.

12° Dépenses diverses : 5 146 livres 89 sous.

Total . 72 378 livres 65 sous.

En retranchant les dépenses des recettes, il ne restait que 56 fr. 60. 

C’est ce compte qui fut produit pour obtenir l’autorisation d’accepter la métairie et le moulin de Kerguizec en Surzur, légués au séminaire par Mlle Géhanno, de Vannes, suivant son testament du 11 septembre 1891. L’autorisation fut accordée le 9 mai 1892, mais à la condition formelle de vendre les immeubles et d’en placer le prix sur l'Etat, comme le prouve le décret suivant : 

« L’évêque de Vannes (Morbihan), au nom du séminaire de son diocèse, est autorisé : 

1° A accepter, aux clauses et conditions imposées, le legs fait à cet établissement par la Dlle Jeanne-Françoise Géhanno, suivant son testament public du 11 septembre 1891, consistant en immeubles situés sur le territoire de la commune de Surzur, contenant ensemble 86 hectares, 56 ares, 25 centiares, et estimés 60,000 francs, à la charge de faire célébrer deux messes par semaine à perpétuité ; 

2° A vendre aux enchères publiques, en un ou plusieurs lots, les immeubles légués, sur une mise à prix égale au montant de l’estimation ; le produit de la vente sera placé en rentes 3 % sur l'Etat, au nom du séminaire de Vannes, avec mention sur l’inscription de la destination des arrérages. Il sera justifié de ce placement auprès du préfet. Fait à Paris, le 9 mai 1892, Signé : CARNOT »

La vente eut lieu le 20 août 1892 et produisit 75,000 francs.  Le bureau du séminaire dut prélever 6,306 fr. 25 pour payer les frais d’actes et de mutation, et plaça le reste sur l'Etat.  La rente sert à faire dire les messes fondées et à payer la pension de séminaristes pauvres. 

En terminant cette étude, il est nécessaire de dire un mot sur chacun des supérieurs de la maison pendant le XIXème siècle. 

1° M. Jean-Mathurin Le Gal, né à Rochefort (Morbihan) le 30 juillet 1746, prêtre le 23 septembre 1769, chanoine de Rochefort, puis recteur de Guégon en 1773, entra chez les Lazaristes en 1774. Après son année de noviciat, il fut nommé professeur de théologie à Cambrai, et en 1786 supérieur du séminaire de Vannes et recteur de N.-D. du Mené. Réfugié en Espagne au mois de septembre 1792, il en revint au mois d’août 1797 ; il était à Oléron en 1800. 

Vicaire général de Mgr l’évêque de Vannes en 1802 et supérieur du séminaire en. 1803, il conserva cette double fonction jusqu’à sa mort. On a vu ci-dessus avec quel zèle travailla à restaurer la maison du clergé, et à lui procurer des ressources matérielles. Pendant les vingt-huit ans qu’il consacra à la formation des jeunes prêtres, il acquit sur le clergé une influence qui contrebalançait celle de l'évêque lui-même. Il obtint de Mgr de Bausset, en 1816, l’autorisation d’appeler près de lui quelques professeurs lazaristes ; il eut ainsi M. Pierre Laumont en 1817, M. Jean Daudet en 1821, et M. Charles Dadier en 1823 ; mais sa congrégation étant peu nombreuse, il était obligé d’avoir en même temps des prêtres du diocèse. Il prêchait souvent à la cathédrale et s’occupait aussi de la direction des Ursulines. Enfin, usé par les travaux, il mourut le 5 septembre 1831, âgé de 85 ans. 

2° M. Hénin, prêtre de la Mission ou de Saint-Lazare, recueillit sa charge de supérieur et fut nommé chanoine honoraire par Mgr de la Motte. Bientôt l’évêque, trouvant que la congrégation ne pouvait pas lui fournir assez de professeurs, parce qu’elle était pauvre en sujets, lui retira la direction du séminaire et la donna aux prêtres du diocèse en 1833.  M. Hénin se retira à Paris, et y mourut vers 1861.  

3° Yves Louer, né à Limerzel le 22 novembre 1774, prêtre le 20 septembre 1807, recteur de Saint-Vincent le 1er octobre 1823, fut nommé supérieur du séminaire et chanoine honoraire en 1833. Il maintint le règlement observé par les Lazaristes, devint chanoine titulaire le 7 juin 1837 et vicaire général honoraire en 1846. Affaibli par l’âge et incapable de continuer ses fonctions, il se retira à Questembert et y mourut le 18 février 1855, âgé de 80 ans. 

4° Vincent Régent, né à Saint-Vincent le 25 janvier 1813, prêtre le 23 septembre 1837, vicaire à Ploermel, puis professeur au séminaire en novembre 1841, fut nommé supérieur de la maison et chanoine honoraire le 22 juin 1854, et vicaire général honoraire en 1855. C’est lui qui fut principalement mêlé en 1863 et 1864 à l'échange du séminaire et du Grador. Chanoine titulaire le 22 janvier 1868, il quitta le séminaire en 1870, pour se rapprocher de la cathédrale, et devint vicaire général agréé le 7 avril 1881. 

5° Pierre-Marie Guillonnet, né à Beignon le 15 juin 1835, prêtre le 15 juillet 1860, professeur à Ploermel, puis en 1866 secrétaire particulier de Mgr Bécel et chanoine honoraire, devint supérieur du séminaire le 30 août 1870. Malade, il se retira à Josselin en 1883 et y mourut le 20 juin 1890. 

6° Eugène Jean-Baptiste Laire, né à la Trinité-Porhoët le 27 janvier 1836, prêtre le 23 mars 1860, professeur à Sainte-Anne puis vicaire à Limerzel, aumônier à Lorient, recteur à Férel et curé-doyen de Carentoir, fut nommé supérieur du séminaire et chanoine honoraire le 20 juillet 1884, et mourut le 6 décembre 1886, à 50 ans. 

7° Pierre-Emmanuel Dieulangard, né à Pénestin le 28 juin 1845, prêtre le 7 novembre 1869, vicaire à Arzal, puis professeur au séminaire, il devint supérieur de l’établissement et chanoine honoraire le 11 décembre 1886, et vicaire général titulaire le 21 août 1898. C’est lui qui a commencé la construction de la chapelle du séminaire. 

8° Jean-Marie Dubot, né à Guégon le 23 juillet 1853, prêtre le 22 décembre 1877, docteur en théologie, vicaire à Lorient, professeur au séminaire en 1884, supérieur de la maison et chanoine honoraire le 29 août 1898. Il a continué et terminé les travaux de la chapelle. Cet édifice, de style roman, est dû tout entier aux souscriptions du clergé et des fidèles du diocèse. Il a coûté plus de 150.000 francs. 

 

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X. PETITS SEMINAIRES.

Sous l’ancien régime, le collège de Vannes tenait lieu de petit séminaire. La propriété de l’établissement était à la ville, mais la direction intellectuelle et morale était confiée aux Jésuites, et plus tard aux prêtres du diocèse, sous la surveillance de l’évêque. 

Après la Révolution, le despotisme impérial mit tous les collèges sous la dépendance de l'Université ; les évêques furent exclus de la direction des études. A défaut de mieux, les élèves qui se destinaient à l’état ecclésiastique, étaient obligés de suivre les cours de l'Université : la liberté n’existait pas. 

En 1815, le roi Louis XVIII permit aux évêques d’avoir un petit séminaire, pour des élèves internes, conformément au décret du concile de Trente, et les affranchit de la tutelle de l'Université. Mgr de Bausset voulut profiter immédiatement de cette liberté. Il avait acheté, dès le 18 janvier 1810, pour 25,000 francs, le couvent des Carmes de Sainte-Anne, et c’est là qu’il fonda son petit séminaire, en le mettant sous la direction des Jésuites. 

Les premiers professeurs arrivèrent de Paris le 14 novembre 1815, et ils partagèrent en quatre classes les 60 élèves qu’ils y trouvèrent. Le R. P. Cuénet en fut le premier supérieur.  Dès l’année suivante, le nombre des élèves fut considérable, et depuis cette époque, la prospérité de Sainte-Anne s’est toujours glorieusement maintenue. Cet établissement, acquis par Mgr de Bausset en son nom personnel, fut cédé par lui au diocèse de Vannes, le 13 mai 1822. 

Vers 1825, M. Daudet, lazariste, bâtit à Vannes, sur une partie du terrain des Carmélites de Nazareth, un pensionnat de jeunes écoliers, qui devaient suivre les cours du collège. La vie commune, comme au petit séminaire, était pour eux un préservatif contre l’isolement et les dangers auxquels sont exposés parfois les élèves externes, logés dans les maisons particulières. Le pensionnat de M. Daudet ne dura que quelques années. Sa maison a été démolie depuis par les Petites-Soeurs des Pauvres. 

Sous Charles X, les affaires publiques prirent une fâcheuse tournure. Le libéralisme révolutionnaire releva la tête, et le gouvernement, pour déguiser sa faiblesse, se mit à persécuter les évêques et les catholiques. Deux ordonnances, du 16 juin 1828, renvoyèrent les Jésuites des huit petits séminaires qu’ils dirigeaient en France, et limitèrent le nombre des élèves à recevoir dans ces maisons. Pour tempérer ces violences, on accorda un certain nombre de bourses aux petits séminaires, mais bientôt les secours furent retirés et la servitude resta et dura plus de vingt ans.

Le petit séminaire de Sainte-Anne était au nombre des établissements frappés. Mgr de la Motte protesta, comme ses collègues, contre cette iniquité, mais il dut céder à la force et laisser partir les Jésuites. Pour réorganiser la maison, il s’imposa de grands sacrifices, et invita ses prêtres à lui venir en aide. Son appel fut entendu, et c’est grâce à ces sacrifices que le petit séminaire de Sainte-Anne se maintint comme la principale pépinière du sacerdoce dans le diocèse. Le nombre des élèves était limité à 180 ; en 1849 le Ministre de l'Instruction publique le porta à 250 ; la loi de la liberté de l’enseignement secondaire en 1850 donna toute latitude. 

Les supérieurs de cette maison ont été Messieurs : 

1° Jean-Marie Briend, de Josselin, successeur des Jésuites, puis en 1832 recteur de Plumelec ; 

2° Guillaume-Marie Lacambre, de Rochefort, nommé en 1832, chanoine titulaire en 1833, démissionnaire en 1841 ; 

3° Jean-Charles Charil, de, Lorient, nommé en juin 1841, chanoine titulaire en 1846, curé de Lorient en 1849 ;

4° Aimé-Jean-Marie Le Blanc, de Lorient, professeur, nommé en 1849, mort le 2 février 1851 ; 

5° Jean Jaffré, de Kervignac, professeur, nommé en février 1851, recteur de Guidel en 1863. 

Sous ces divers supérieurs, les professeurs, choisis, parmi les prêtres du diocèse, maintinrent les études au niveau des meilleurs établissements, et constituèrent entre eux un noyau de littérateurs et de savants. Mais bientôt éclata une petite révolution à Sainte-Anne. 

Mgr Dubreil ayant voulu prendre quelques mesures particulières pour la chapelle et la maison, suscita un vif mécontentement. L’évêque maintint ses décisions, nomma M. Jaffré recteur de Guidel le 30 septembre 1863 et le remplaça par M. Fresche, professeur au grand séminaire. Les professeurs ne cachaient pas leur affection pour leur ancien supérieur ; les élèves partageant leurs sentiments désertèrent la maison, M. Fresche, complètement étranger à l’affaire, donna sa démission. L’évêque alors dispersa les maîtres, nomma de nouveaux professeurs et leur donna pour supérieur, le 20 décembre 1863, M. Joseph-Marie Kerdaffrec, natif de Gourin et ancien professeur au séminaire de Vannes.

Le calme se rétablit peu à peu et bientôt, tout rentra dans l’ordre. Les études reprirent leur essor et les élèves obtinrent de nombreux succès aux examens. 

Pendant ce temps s’agitait la question de la reconstruction de la chapelle du pèlerinage de Sainte-Anne. Un concours avait été ouvert aux architectes. La commission, chargée de juger les plans, avait couronné le projet de M. de Perthes, bien que le devis montât à 500,000 francs. Au commencement de 1866, les vicaires capitulaires, assistés de Mgr Bécel, évêque nommé, sanctionnèrent ce choix, et confièrent l'entreprise à M. Normand, qui prit aussitôt ses mesures pour exécuter les travaux dans le temps convenu. La première pierre de la nouvelle église fut solennellement bénite, le 4 septembre 1866, par Mgr Saint-Mars, archevêque de Rennes. 

L’édifice commençait à sortir de terre, quand le supérieur du petit séminaire, M. Kerdaffrec, fut nommé curé de Pontivy, le 13 avril 1867, et remplacé neuf jours après par M. Constant Hillion, professeur à Ploërmel. 

Le nouveau supérieur vit couronner solennellement, le 30 septembre 1868, la statue miraculeuse de sainte Anne et celle de la Vierge Marie, par Mgr Bécel, au nom du Souverain Pontife, en présence de plusieurs évêques, d’un nombreux clergé et d’un concours immense de fidèles. Il vit également, le 30 septembre 1869, Mgr Dubreil, archevêque d'Avignon, bénir la nef de la nouvelle église de Sainte-Anne.

Au mois d’août 1871, M. Hillion partit pour la mission d'Haïti, où l’attendaient les honneurs de l’épiscopat, et fut remplacé par M. Pierre Gabillet, natif de Plumelec et professeur au grand séminaire. Celui-ci ne fit que passer à Sainte-Anne, et mourut le 26 juin 1872, à 42 ans.

M. Louis-Marie Le Priol, d'Hennebont, professeur au petit séminaire, recueillit sa succession le 25 juillet 1872 ; et vit, le 15 septembre suivant, l’archevêque d'Avignon, Mgr Dubreil, bénir le sanctuaire de Sainte-Anne, qui était enfin achevé. Cette église , fut érigée en basilique mineure par le pape Pie IX le 12 mai 1874, et solennellement consacrée, le 8 août 1877, par Son Eminence le cardinal Saint-Mars, archevêque de Rennes. 

Après l’église de Sainte-Anne était venu le tour du petit séminaire. Les bâtiments étaient insuffisants pour le nombre des élèves, et quelques-uns avaient besoin d’être renouvelés.  On profita des plans de M. de Perthes et l’on bâtit un corps de logis au sud près de la route de Vannes et un autre au nord près de la cour de la récréation. 

Cependant M. Le Priol mourut le 29 mai 1880, et eut pour successeur, le 15 juin suivant, M. Claude-Marie Le Guen, d'Arradon, professeur dans l’établissement. Celui-ci continua les travaux commencés, fit construire une grande chapelle intérieure, parallèle au réfectoire, à l’usage exclusif des élèves, refit la fontaine de Sainte-Anne et améliora tous les abords du pèlerinage. Aujourd’hui il construit de nouveaux bâtiments dans la cour de récréation. 

Tant que le nombre des élèves de Sainte-Anne avait été fixé à 180, il n’en sortait guère qu’une vingtaine par an pour aller au grand séminaire. C’était insuffisant pour les besoins du diocèse, et force était d’accueillir les élèves venant du collège de Vannes. Mais quand vint la loi de la liberté de l’enseignement secondaire en 1850, Mgr de la Motte ouvrit largement les portes du petit séminaire, et pour protéger son établissement contre les collèges rivaux, et préparer l’unité d’esprit dans le clergé, il décida que tous les élèves qui voudraient entrer au grand séminaire passeraient auparavant un an à Sainte-Anne. 

C’est grâce à la loi du 15 mars 1850 que les Jésuites fondèrent le collège Saint-François-Xavier à Vannes ; les Pères des Sacrés-Coeurs ou de Picpus en ouvrirent un autre à Sarzeau ; en même temps, M. Maupied en commençait un troisième à Gourin, transféré plus tard à Langonnet, et M. Jean-Marie de la Mennais en préparait un quatrième à Ploërmel. Celui-ci, établi dans la maison mère des Frères, ne devint complet qu’en 1854 et reçut ses professeurs de la bienveillance de l’évêque diocésain. Il eut pour supérieur M. Alexis Guilloux, de Ploërmel, qui devint plus tard missionnaire en Haïti et archevêque de Port-au-Prince. Il fut ensuite confié en 1864 à M. Gabriel Le Blanc, frère de l’ancien supérieur de Sainte-Anne. 

Bientôt les Frères de Ploërmel, se trouvant trop à l’étroit dans leur maison, prièrent le supérieur et les professeurs. de chercher un autre local en ville. Ceux-ci jetèrent les yeux sur l’ancien couvent et l’enclos des Carmes et se mirent en rapport avec la famille de Montchanin, propriétaire de l’immeuble. Le prix d’acquisition fut fixé à 104,000 francs. Mgr Bécel, mêlé à l’affaire, écrivait de Rome, le 5 juin 1870 : « L’immeuble a été acquis au prix de 104,000 francs. Les travaux d’appropriation exigeront immédiatement une dépense de 50,000 francs, sans parler du mobilier ni des frais accessoires. Or la souscription n’a guère produit jusqu’à ce jour qu’une trentaine de mille francs. La différence est donc énorme. Il est vrai que les Frères de l'Instruction chrétienne et M. Peschart, notaire à Ploërmel, ont bien voulu se porter cautions de la somme empruntée... ». En conséquence l’évêque permit de faire, des quêtes ou des souscriptions dans le diocèse, pour libérer l’école libre Notre-Dame des Carmes.

L’acquisition était faite aux noms de MM. Le Blanc, Malinjoud et Cotto. Les secours qui leur arrivèrent diminuèrent la dette, mais ne l’éteignirent pas. Au bout d’une dizaine d’années, voyant qu’ils ne pouvaient se libérer entièrement, ils proposèrent à l’évêque de lui céder leur acquisition. Mgr Bécel, tenant à conserver un établissement qui avait rendu des services dans le passé, et qui pouvait encore en rendre dans l’avenir, souscrivit une promesse d’acquisition, au nom du diocèse, le 22 octobre 1879. 

Puis, voulant assurer l’avenir de la maison, il demanda au gouvernement l’autorisation de la transformer en école secondaire ecclésiastique, ou petit séminaire. Cette faveur lui fut accordée par le décret suivant : : « Le Président de la République française, Sur le rapport du Ministre de l'Intérieur et des Cultes ; Vu la demande formée, le 8 novembre 1879, par l’évêque de Vannes, à l’effet d’être autorisé à établir une école secondaire ecclésiastique à Ploërmel ; Vu l’avis favorable du préfet du Morbihan, du 15 janvier 1880 ;  Vu l’avis du Ministre de l'Instruction publique du 7 mai 1881, proposant d’accorder, sous certaines conditions, l’autorisation demandée ; Vu l’article 70 de la loi du 15 mars 1850 ; Décrète :

Art. 1er . — L’évêque de Vannes est autorisé, à établir à Ploërmel une école secondaire ecclésiastique, sous les conditions ci-après désignées, savoir : 1° Cet établissement ne devra en aucun cas recevoir plus de 220 élèves ; 2° Il ne recevra ni externes, ni élèves primaires, ni élèves de l’enseignement secondaire dit spécial. 

Art. 2. — Le Ministre de l'Intérieur et des Cultes est chargé de l’exécution du présent décret. 

Fait à Paris, le 23 mai 1881. Signé : Jules Grévy.

Par le Président de la République, le Ministre de l'Intérieur et des Cultes. Signé : Constans » (Archives de l'évêché).

Cette autorisation obtenue, l’acte définitif de vente fut rédigé et signé le 23 juin 1881. 

La propriété, telle qu’elle était alors, comprenait un cloître carré, entouré d’édifices sur trois côtés ; il a fallu retoucher les édifices anciens, construire un quatrième côté, avec des bâtiments accessoires, et régulariser l’enclos. 

L’église des Carmes avait été détruite par la Révolution et remplacée par un édifice ordinaire. Il a fallu construire, en 1888 et 1889, une vaste chapelle, qui a coûté 54,215 francs. 

Toutes ces dépenses ont lourdement pesé sur le diocèse et sur la maison elle-même ; mais les moments pénibles sont passés, et le clergé possède un second petit séminaire. 

L’établissement de Sainte-Anne sert pour tout le diocèse, mais spécialement pour la partie bretonne ; celui de Saint-Stanislas est plus particulièrement au service de la partie française. 

Les avantages sont les mêmes pour les deux maisons, et en sortant de l’une ou de l’autre, on peut entrer de plain pied au grand séminaire de Vannes. 

Depuis son érection en petit séminaire, l’école ecclésiastique Saint-Stanislas a eu pour supérieurs :

1° M. Pierre-Marie Lanier, de Campénéac, ancien zouave pontifical, nommé dès le 20 septembre 1879, démissionnaire en 1887, pour entrer chez les Sulpiciens ; 

2° Louis-Marie Rabgeau, de la Roche-Bernard, professeur au grand séminaire, nommé le 5 août 1887, promu curé-archiprêtre de Ploërmel en 1897 ; 

3° Théophile Dubot, de Guégon, professeur à Saint-Stanislas, nommé lie 13 mars 1897. 

(abbé Le Mené - 1901) 

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