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LA VILLE DE VANNES A LA FIN DU XVIIIème SIECLE

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 Prodromes de la Révolution manifestés aux Etats de Bretagne. — Analyse des délibérations de la communauté de Vannes, 1788-1789. 

A la séance du 15 mai 1788, M. Hervieu, procureur de Vannes, syndic de la communauté, remontra qu'il n'était plus possible de douter que différents édits transcrits par autorité sur les registres de la Cour n'ont pour objet que d'anéantir la magistrature ou au moins de la mettre dans l'impossibilité de s'opposer aux projets destructifs des droits, franchises et privilèges de cette province.

Au surplus, tous les votants s'engagent d'honneur à n'accepter ni remplir aucun emploi dans les tribunaux de nouvelle création, si, contre l'espoir de la nation, il était possible qu'ils eussent un jour quelque existence. — Des copies de la présente protestation seront adressées à MM. le premier président, au procureur général et doyen du Parlement, à M. le Comte de Botherel, procureur général, syndic des Etats, avec prière de les déposer au greffe de la commission intermédiaire suppliée de les faire parvenir au pied du trône.

Puis MM. Le Gros, Poussin, de la Chasse et Bernard sont chargés, avec MM. les officiers municipaux, de rédiger un mémoire détaillé de tous les torts et griefs que souffrirait la ville de Vannes de l'exécution des nouveaux édits. Suivent quarante signatures.

Cette délibération provoqua de la part des destinataires cités plus haut des témoignages de sympathique approbation. A la séance suivante, le 5 juin 1788, apparaît M. Caradec, insistant avec une éloquente énergie sur la nécessité de maintenir la protestation et de la renouveler s'il le faut.

« A son avènement au trône, dit-il, Louis XVI mérita les surnoms de Juste et de bienfaisant, qui emportent nécessairement celui de Bienaimé. Si nos plaintes lui parviennent, s'il voit couler nos larmes, que nous osons répandre dans son sein paternel, s'il peut apprécier le degré de confiance avec laquelle nous recourons à sa justice et à sa bonté, il retirera, n'en doutons point, les nouveaux édits qui font gémir tout le royaume et sa bonne province de Bretagne, ou, du moins, il en suspendra l'exécution jusqu'à ce qu'ils n'aient été acceptés par les Etats généraux dont il a solennellement promis l'assemblée, etc. ».

Mais, du 5 juin au 21 juillet, de graves événements se sont passés. Douze députés de la noblesse de cette province ont été enlevés et menés à la Bastille. A cette nouvelle, l'entrée de la salle des délibérations est demandée par les notables de la ville. En première ligne se montre exceptionnellement M. Amelot, signant Sébastien Michel, évêque de Vannes, et 70 autres signataires approuvant la réclamation.

Le 29, la détention se prolongeant, deux membres, MM. Le Gros et Bernard sont chargés de se joindre aux députés des trois ordres des différents décrets pour solliciter leur élargissement et le maintien des droits et franchises de la province.

Le 5 août 1788, la communauté, toujours empressée de témoigner son zèle pour le rétablissement de l'ordre, le rappel du Parlement, l'élargissement des députés détenus, et le maintien des droits et franchises, a nommé pour commissaires MM. Houet de Chenevert et Delourme, lesquels, avec de Keronic et de Francheville, déjà nommés dans l'ordre de la noblesse, et ceux que MM. du Chapitre nommeront, devront correspondre directement avec la commission de correspondance établie à Rennes. L'animation est très grande.

Les séances se succèdent. Le 18, on confirme les décisions des 15 mai, 5 juin et 21 juillet.

Le 22, séance d'affaires courantes.

Le 2 septembre, l'affaire du quai Billy, place du Fez-ty (maison Labordette) est réglée moyennant cession d'un terrain d'environ 6 cordes par afféagement mis en adjudication. Le 5 et le 6, examen des droits de la ville sur les terrains avoisinant le port, d'après les lettres-patentes de 1611. Le 12 septembre se reprennent les délibérations politiques.

M. Caradec donne lecture des lettres de Sa Majesté et de Mgr le duc de Penthièvre annonçant l'ouverture des Etats à Nantes, le 21 octobre, au lieu d'Ancenis. C'est dans cette séance que se montre pour la première fois la mention du cahier des charges à donner aux députés qui seront désignés dans la suite. Des commissaires sont nommés :

1 ° Dans l'ordre de l'Eglise : M. l'abbé de Boishéraud.

     Du présidial : M. Poussin.

     De la noblesse : M. de Beaulieu.

     Des avocats : M. Bourgerel.

     Des négociants : M. Bodin.

     Des procureurs : M. Perret. 43 signataires.

Nouvelle séance le 23. Le 27, 42 membres présents hâtent la rédaction du cahier. Les commissaires sont prêts, le 3 octobre, et le document est lu en 11 articles. Il ne sera pas demandé de nouveaux octrois ; on ne consentira aucun changement dans l'administration municipale de Vannes ; on demandera des secours efficaces pour les fontaines, les pompes ; on se procurera une copie exacte de toute la tenue des Etats ; on insistera sur une nouvelle répartition de la capitation entre les ordres de la noblesse et du tiers ; on demandera, pour l'ordre du Tiers, création de pensions militaires et des bourses dans les collèges, des sommes égales à celles que les Etats accordent pour l'entretien de l'hôtel des gentilshommes et des demoiselles, et pour des pensions à la jeune noblesse. Suppression des octrois municipaux, du logement des Gouverneurs et commissaires des guerres, et autres charges extraordinaires ; fouages, longueurs de procédures plus onéreuses que l'impôt même, etc... 36 approbateurs. Le 8 octobre, lecture d'une nouvelle lettre fixant la réunion des Etats à Rennes pour le 27 octobre.

Au cours de la séance, MM. Le Gros et Bernard rendent compte de leur mission à Rennes et à Paris. Leur rapport, inséré au registre, est très intéressant. Exemple : « Nous avons fait les plus vives démarches pour obtenir l'élargissement des douze gentilshommes détenus à la Bastille, de M. Riollay, l'abbé Raymond, M. Royon, M. Bourgeois ; la révocation des lettres de cachet distribuées dans la province, notamment contre MM. du Couédic, de Kersalaun, de Keratry, de Maubreuil, de Saint-Pern, de Freslon. Nous eûmes enfin la satisfaction de voir les douze gentilshommes en liberté, M. Riollay, quelques jours après, et d'apprendre de M. Necker même la révocation de tous les ordres rigoureux ». Remerciements chaleureux des auditeurs.

A la séance du 10 novembre 1788, après avoir exposé les affaires courantes, M. Caradec a dit, en six pages serrées, sans autre préambule :

MESSIEURS ,

« Avant qu'il fût question parmi vous de nommer vos députés aux Etats, vous sentites qu'il ne suffirait pas de leur donner dans la forme ordinaire pouvoir et procuration de représenter cette commune à la diète nationale, et qu'il tenait aux circonstances d'étendre la mission de vos députés et de la rendre plus utile en leur donnant des charges qu'ils promettaient de remplir. A votre assemblée du 23 septembre, vous arrêtâtes ce cahier des charges, sans examiner si vous seriez les seuls à former au tribunal de la Nation de trop justes demandes ; vous ignoriez même si quelqu'autre ville suivrait la même marche. Aujourd'hui, Messieurs, vous avez la satisfaction d'apprendre que l'intérêt de l'ordre du tiers s'est également fait entendre dans la capitale. La municipalité de Rennes a fait pour lui autant et plus que vous ; vous en jugerez par la lecture des charges qu'elle a, le 20 octobre, données à MM. Les députés. Elle vous invite, par sa lettre du 7 de ce mois, à lui faire part des observations dont vous croirez sa délibération susceptible ; elle vous prie en même temps de lui communiquer les charges que vous aurez données à MM. vos députés, et s'engage à contribuer de tout son pouvoir au succès des demandes qui, comme les siennes et les vôtres, n'auront que le bien public pour objet ».

« Le 1er article des charges de la ville de Rennes dit de défendre dans toutes les circonstances les droits et les intérêts du Tiers-Etat. Toutes les communes ont nécessairement contracté cet engagement, et, dans les circonstances actuelles, il est certain que toutes les municipalités se réuniront pour protéger et secourir l'ordre du tiers ; pour lui donner l'influence qu'il doit avoir dans les assemblées nationales, et diminuer, autant qu'il sera possible, la masse de tant d'impôts qui ne pèsent que sur lui.

Il est vrai (abstraction de ce qui concerne la ville de Rennes), Messieurs, qu'à la dernière tenue, après s'être longtemps excusé de consentir l'impôt, l'ordre du Tiers ne l'a enfin consenti, au moment de la clôture, qu'en réitérant ses protestations ; il me paraît donc certain, qu'à l'assemblée prochaine, la réclamation sera générale dans l'ordre du Tiers, et nous devons espérer que, suivant l'espèce d'engagement qu'ils en ont contracté dans la dernière tenue, les Etats s'empresseront de prononcer sur cette importante question et que la décision sera favorable au Tiers-Etat.

Par le 2e article, la ville de Rennes demande une diminution de sa capitation.

Que les nobles continuent, en récompense de leurs services, à jouir de leurs prérogatives et de leurs droits honorifiques, nous le verrons avec plaisir ; mais que les impôts soient répartis plus également entre nous. Disons avec le généreux citoyen dont les écrits méritaient d'accélérer l'heureuse révolution qui, depuis le 10 mai, faisait l'objet de tous mes voeux ; disons avec cet écrivain célèbre justement applaudi par la noblesse même ; disons avec M. Bergasse :

Disons que toute distinction en matière d'impôt entre les divers ordres de citoyens est absurde et tend à avilir la plus grande partie de la nation...; qu'il faut absolument que les propriétés soient imposées de la même manière...; disons surtout avec M. de Bergasse, qu'il n'est aucun membre du clergé, de la magistrature et de la noblesse qui n'applaudisse du fond du coeur à ces principes, et attendons tout de la justice des Etats et du désintéressement de MM. de la noblesse ».

Au 3e article, la municipalité de Rennes réclame l'établissement de casernes. Celle de Vannes éprouve le même besoin.

Le 4e article tend à obtenir des Etats que les députés du Tiers soient plus nombreux et que tous aient également voix délibératives. Il faut espérer que les Etats, malgré les difficultés que peut présenter ce beau et excellent projet, rendront un règlement conforme à nos désirs. Ce même article 4 tend, en outre, à écarter des Etats les nobles ou anoblis parvenus, les subdélégués, les procureurs fiscaux, receveurs des seigneurs et tous autres agents officiels comme dépourvus d'une indépendance suffisante. C'est aux Etats qu'il faut réserver la décision.

Par l'article 5, la ville de Rennes demande que dans les commissions intermédiaires le nombre des commissaires du Tiers soit égal au nombre réuni des commissaires de l'Eglise et de la noblesse.

Par l'article 6, l'abolition de la corvée devrait être prononcée et ce service remplacé par une imposition sur les propriétés des trois ordres.

Enfin, la municipalité de Rennes demande l'adjonction au clergé d'un certain nombre de députés, de MM. les recteurs des villes et des campagnes, et même des ordres religieux. Les Etats aviseront. Le cahier des charges de Nantes, récemment arrivé, ne peut être analysé. Mais celui de Vitré est plus progressif, il va droit au but.

La délibération de la ville de Vitré, en date du 1er novembre, tend uniquement à demander au Roy qu'aux Etats généraux les députés de Bretagne soient convoqués dans un nombre proportionné à sa population. Que ceux de l'ordre du Tiers soient au moins en nombre égal à ceux des ordres réunis de l'Eglise et de la noblesse, et que ces députés soient choisis par l'ordre du Tiers, sans pouvoir être pris parmi les nobles anoblis, les subdélégués, etc.

Par circulaire, Vitré invite toutes les municipalités à s'assembler par députés à Ploërmel ou Josselin, du 25 au 30 de ce mois, pour concerter un plan uniforme. Pouvez-vous, Messieurs, vous rendre à cette invitation ? pouvez-vous demander qu'aux Etats généraux, le Tiers soit égal aux deux autres ordres ? Les constitutions de Bretagne ne s'opposent-elles pas à cette nouvelle formation des Etats généraux. Je ne déciderai pas ces embarrassantes questions ; mais j'oserai dire que si vous vous décidez à former pareilles demandes, c'est aux Etats de la province que vous devez l'adresser. C'est à eux de porter votre requête au pied du trône ; c'est d'eux, c'est par eux que vous devez obtenir cette satisfaction, qu'ils ne vous refuseront pas s'il est possible de vous la donner. Pesez, Messieurs, les réflexions que j'ai cru devoir vous représenter, et faisons des voeux pour le maintien de l'harmonie :

Triplici foedere. Telle devra être la nouvelle devise de la Bretagne. Les trois ordres ne se diviseront jamais.

Après cet intéressant exposé (trop écourté ici), M. Caradec fait remarquer que ses deux années d'avocat de la communauté étant échues, il y a lieu de lui choisir un successeur.

A la séance du 12 novembre, l'assemblée, après lecture et plus mûr examen des lettres, mémoires, requêtes, charges et arrêtés des municipalités de Rennes, Nantes et Vitré, charge ses députés : 1° de défendre, avec toute l'énergie possible, les droits et intérêts du Tiers, etc. Et à son 1er cahier des charges, elle ajouta le paragraphe suivant :

« La communauté a arrêté de nommer des commissaires pour rédiger incessamment et de jour à autre une requête au Roy, tendant à obtenir de S. M. qu'à l'assemblée prochaine des Etats généraux, les députés de l'ordre du Tiers soient convoqués en nombre égal à ceux des ordres réunis de l'Eglise et de la noblesse, et que ces députés du Tiers soient choisis par l'ordre du Tiers seul, sans pouvoir être pris parmi les nobles ou anoblis, qu'ils soient ou non parvenus au partage noble, parmi les subdélégués, procureurs fiscaux, receveurs de seigneurs, employés dans les fermes et régies, de quelque espèce qu'elles soient, et, à cet effet, a nommé pour commissaires MM. l'abbé de Livoys, ch.  scol. Le recteur de Saint-Patern, M. G. A. Le Croisier, Poussin, Lucas-Bourgerel, père, de la Chasse, frères, Josse, Bachelot, Pichon, Bodin, Gougeon et Bertho, avec les officiers municipaux. Pénétrée de confiance dans la justice des Etats, assurée de l'intérêt qu'ils prennent au sort de l'ordre du Tiers, la communauté a chargé des députés de supplier les Etats d'appuyer eux-mêmes auprès du trône le succès de sa requête. Elle décide enfin que ces charges et délibérations seront imprimées au nombre de 400 exemplaires ».

A la séance suivante, le 29 janvier 1789, la délibération revêt un caractère complètement nouveau. Le Tiers revendique même à Vannes de s'occuper seul de ses propres intérêts. M. le Maire, Le Menez de Kerdelleau, après avoir communiqué à la réunion le résumé des affaires courantes, voyant dans le nombre des membres présents MM. l'abbé de Kerhoent, de Douhet, de Livoys, de Boutouillic, de la Villaloys, de l'ordre de l'Eglise ; MM. Le Gros et Houet de Chenevert, du présidial ; MM. de la Chapelle, du Plessix de Grénédan, Gibon de Keralbaud et de la Landelle, qu'il avait eu l'attention de ne pas convoquer, leur fit observer que la délibération de ce jour ne devant porter que sur les intérêts du Tiers-Etat, il augurait trop bien de la délicatesse et de l'honnêteté de leurs sentiments pour craindre de n'être pas compris. M. le Maire a donc l'honneur de les prier de se retirer pour cette fois-ci, afin de laisser aux membres de l'ordre du Tiers la liberté nécessaire pour opiner avec maturité et avec toute la réflexion que la matière exige. Vous savez tous, Messieurs, la maxime que l'Eternel a gravée dans tous les coeurs : « Personne ne peut être juge dans sa propre cause ».

Si contre mon attente, ajoute M. le Maire, vous pensez ne pas devoir vous rendre à ma prière, j'ai l'honneur de vous déclarer que, me devant tout entier, dans le moment présent à des intérêts qui me sont spécialement confiés, je serais obligé de lever la séance et de la transférer dans une autre chambre où je n'admettrais que des membres du Tiers-Etat ; mais j'ai trop bonne opinion de votre amour de la justice pour ne pas, Messieurs, éloigner de moi la crainte que vous vous refusiez à un acte de 1er équité et a mon dit sieur le Maire, signé.

« MM. de la Noblesse et de l'Eglise, MM. Le Gros et de Chenevert, sénéchal et procureur du roi, du présidial, mais nobles, ne s'étant pas rendus à la prière qui leur fut faite de se retirer, persistant au contraire à vouloir délibérer avec le Tiers-Etat, qui constitue essentiellement les municipalités, j'ai à l'instant levé la séance et pris le registre pour y porter de suite, et dans une autre chambre, l'avis et délibération que les membres du Tiers-Etat jugeront à propos de prendre. A l'endroit, M. l'abbé de Livoys s'est retiré. Et rendu dans une salle basse de l'hôtel-de-ville, accompagné de MM. Poussin, lieutenant du présidial ; Dusers, conseiller ; Lucas de Bourgerel, doyen des avocats, Caradec et de la Chasse, avocats ; Josse, Latour, Bachelot, Bourgerel fils aîné et Bourgerel fils cadet, capitaines de la milice bourgeoise ; Le Maignen père, Pichon, Serres, Brulon, Maignen fils, négociant ; Hervieu, Goujon et Bertho, procureur, — délibérant sur l'objet proposé, le projet suivant a été, entre autres, préféré : approbation et confirmation des décisions précédentes, recommandation renouvelée aux députés de défendre avec toute l'énergie possible les droits du peuple et de la nation, avec interdiction néanmoins de protester contre ce qui sera décidé à la pluralité... La présente délibération sera imprimée pour être envoyée partout où besoin sera et notamment aux municipalités de la province, et ce qui s'est passé dans cette séance a été écrit de la main du maire, le sieur Coquerel, greffier ordinaire, n'ayant pas voulu suivre les soussignés au lieu où ils se sont retirés »

Cette séance du 29 janvier fut suivie d'une suspension de deux mois. La municipalité ne se réunit plus que le 5 avril. Le clergé n'y figure plus.

Aux membres nommés ci-dessus, vinrent se joindre MM. Rollin de la Farge, destiné à jouer un grand rôle dans la création du département, Piard de Quellenec, négociant, arrivé des bords de la Vilaine, Lauzer-Larmor, Dubois, G. Servet, Lorvol, Tiret, Debray, Kerviche, Forget, Mahéo, Galliot, Moisson, Allanic, Frumechon, Boucher, Janin, Grignon, D.-M. ; Aubry, Aubin , Bodin, Lombart, Jamet, tous représentant les différentes corporations, corps et communautés de cette ville ou des bourgeois et habitants, lesquels, pour obéir aux ordres de Sa Majesté, portés par ses lettres données à Versailles, le 24 janvier 1789, pour la convocation et tenue des Etats généraux de ce royaume, et satisfaire aux dispositions du règlement y annexé, ainsi qu'à l'ordonnance de M. le Sénéchal du 31 mars dernier, déclarèrent s'être rendus en la présente assemblée, où ils vont s'occuper, de la rédaction de leur cahier de doléances, plaintes et remontrances. Et, en effet, ayant vaqué à la confection du cahier des charges, ils nous représentèrent ledit cahier, signé par les délibérants, et par nous, ne varietur, et de suite, les dits représentants, conformément aux lettres et règlements, ont, à la pluralité des suffrages, désigné pour députés à Rennes, M M. Kerdelleau, Lauzer (de Larmor), Poussin, Dusers, de la Chasse, Caradec, Hervieu, Brulon, Debray et Rollin qui, acceptant, ont promis de s'acquitter fidèlement de leur mandat. Le Secrétaire absent.

Les réunions suivantes, 29 mai 1789, 5 juin, 16 juin, id. 23 juin, sont employées à l'expédition des affaires courantes. Secrétaire, Coquerel.

A la réunion du 3 juillet, après lecture du procès-verbal de la séance royale du 23 juin, de la lettre de MM. Bourgerel Lucas et Dusers, députés de cet arrondissement aux Etats généraux, et des divers bulletins qui instruisent de ce qui s'est passé postérieurement.

L'assemblée se félicite de n'avoir eu que quelques jours d'inquiétudes et d'alarmes et se livre avec transport à la joie que lui inspire la réunion des trois ordres et la félicité publique qui doit en résulter.

Après avoir partagé, avec le plus vif intérêt, l'exposition orageuse et critique où s'est trouvée l'assemblée nationale depuis le moment décisif de sa constitution ; pleinement assurée de l'inutilité des efforts que l'on a faits pour surprendre la religion du meilleur des rois, et éloigner le bonheur qu'il est impatient de procurer à ses peuples.

Intimement persuadée que la nation doit cette heureuse révolution au coeur d'un monarque, le premier ami de ses sujets, à la conduite ferme et prudente de l'Assemblée nationale, au patriotisme de Mgr le duc d'Orléans et aux vertus de MM. Necker et Montmorin, Elle a arrêté de charger MM. Bourgerel-Lucas et Dusers, députés de cet arrondissement, de déposer sur le bureau des Etats-Généraux une expédition de la présente comme le gage le plus vrai de son respect, de sa reconnaissance et de son adhésion formelle à tous les arrêtés pris jusqu'à ce jour par les communes, d'en présenter des expéditions à Mgr le duc d'Orléans, à M. le comte de Montmorin et à M. de Necker, et, qu'au surplus, il en sera envoyé dans toutes les municipalités de la province. 43 signataires. — Coquerel, greffier pour la dernière fois. A la réunion du 25, cet employé est remplacé par Le Lagadec, qui a promis et juré, la main levée, de se bien et fidèlement conserver.

Mais les affaires de la commune font place à de nouvelles préoccupations. La communauté arrête, par acclamation, de nommer des commissaires pour accompagner à Rennes, à Nantes et à Lorient, et, après vote, elle a nommé pour Rennes M. Piard de Quellenec, pour Nantes M. Danet aîné, et pour Lorient M. Caradec, ceux de Messieurs les jeunes gens qui sont chargés de féliciter ces différentes villes de la conduite qu'elles ont tenue et du rôle patriotique dont elles ont renouvelé les preuves dans les circonstances actuelles, et de leur demander quelle marche elles ont suivie ou sont disposées à suivre à l'égard de MM. du clergé et de la noblesse, et de ceux des membres du tiers-état qui ont eu la lâcheté de déserter leur ordre pour se ranger du parti des aristocrates. 22 signataires.

A la ville de Nantes demandant le superflu des grains de Vannes, on doit répondre que, loin d'en avoir à l'excès, on craint la disette.

Déjà ! elle devait se déclarer bientôt et s'imposer avec plus ou moins d'intensité pendant 25 ans (1791-1815).

La communauté estime que la ville d'Auray pourrait venir en aide à la ville de Nantes !

A la fin de la séance, l'entrée de l'assemblée est accordée à M. le Lieutenant de la maréchaussée, M. Fabre, éprouvant le besoin de déclarer que les cavaliers de la résidence ne feraient d'autre travail que celui de veiller à la sûreté des sujets du Roi et qu'il se conformerait aux prescriptions de la municipalité.

Réunion du 28 juillet 1789. Il est devenu pressant de former la réorganisation de la milice bourgeoise et nationale, et, à cet effet, d'en dresser un code provisoire en attendant le règlement annoncé par les Etats-Généraux. Une commission nommée s'occupera de suite de cette opération. Mais on s'aperçoit que la ville est dépourvue d'armes de toute espèce depuis que, par ordre du Gouvernement, celles des miliciens et des gardes-côtes ont été transférées à l'arsenal du Port-Louis, les unes en 1776, les autres en 1782. Des députés sont désignés pour aller solliciter des officiers municipaux de Lorient l'envoi de mille fusils et baïonnettes, sabres, ceinturons et gibernes, avec 4,000 cartouches, un millier de poudre à canon et quatre caisses de balles, le tout le plus tôt possible ! Ces approvisionnements et les munitions, laissés à la disposition du Sr. Coquerel, seront déposés à la tour du Connétable, sous la surveillance d'une sentinelle de la milice bourgeoise. Enfin, la misère publique est toujours telle qu'un secours de 1,200 livres est voté et des quêtes seront faites à la cathédrale pendant les six derniers jours de la neuvaine qui s'y fait.... 

Le 29, la communauté, prévenue qu'il doit exister dans des châteaux voisins des dépôts d'armes diverses, décide qu'une demande de cinquante hommes sera faite à M. le Commandant de la troupe en cette ville pour, conjointement avec cinquante jeunes gens de la milice nationale, exécuter les visites jugées nécessaires.

Le 30, à dix heures du matin, des députés de la ville de Rochefort, Gillet, Le Clainche, Duperron et Brébion, sont admis à exprimer leur dévouement au salut de la patrie. Remerciements et promesses de concours sont donnés par la municipalité.

Le même jour, à deux heures, la communauté, considérant la retraite de cette ville de plusieurs gentilshommes, attendu que cette conduite peut faire présumer que les communes de la ville ont des intentions hostiles vis-à-vis de ces Messieurs, ce qui serait une injure faite aux habitants, qui jamais n'ont eu dans leur coeur de pareils sentiments ; attendu d'ailleurs que par là on prendrait prétexte de suspecter la façon de penser de Messieurs de la Noblesse, arrête, à l'unanimité, que M. de la Ville-es-Cerf, doyen de la noblesse de cette ville, sera, par députation, invité à recommander le retour à leur domicile à tous ceux qui sont partis. L'horizon se rembrunit.

Le 31, à huit heures du matin et à deux heures du soir, M. le Maire dépose sur le bureau une lettre des commissaires des communes de la jeunesse de Pontivy. Des remerciements sont votés ; les habitants de Vannes (est-il ajouté) n'ont jamais cru avoir rien à craindre de la part de la noblesse de cette ville, et ils assurent les commissaires de leur dévouement pour la cause commune.

Il est aussi déposé sur le bureau un extrait d'une lettre de M. Quinio, Maire de Sarzeau, annonçant certains événements passés en cette ville et aux environs. La communauté vote les mêmes assurances. A deux heures de relevé, on forme la liste des représentants de la municipalité. Aux membres déjà connus viennent s'ajouter : Grignon, avocat ; Guyot (de La Chauvelais), receveur des domaines ; Quellenec (Piard de).

Puis vient une nouvelle catégorie dite de Messieurs des communes. Ce sont :

Notables : Legris, Duranquin (Jouchet), Malherbe père, Le Malliaud, Harembert, Rollin (de la Farge).

Médecin : Blanchet ; chirurgien, Parseille.

Marchands : Guyot (Alexis), Séveno, Huchet, Forget.

Orfèvre : Roissard. — Maître-ès-arts : Le Galliot.

Cordonniers : Peschart, Moisson suppt.

Apothicaire : Lombart (prédéc. de Jouanguy).

Cloutier : Jean  Renard, Yves Auffret suppt.

Fermes du Roy : M. Chalon ; M. Bourdais.

Fermes des devoirs : M. Colliban.

Maréchaussée : M. Fabre.

Cotherel, couvreur. — Aubin, Gallais sup., perruquiers.

Descormiers fils, Garisson suppt, tailleurs.

Frézeau, Guyot suppt, boulangers.

Rivalain, Tossen suppt., drapiers.

Servet, Guillevic, suppt., menuisiers.

Blancho, Le Guennec suppt , serruriers.

Bogard, Chauvel suppt., vitriers.

Plessix, sculpteur.

Janin, huissier.

Dupuis, constructeur. — Chrétien, sellier.

Nail (Jn-M.), suppt.

James, Briendo suppt., relieurs.

Mahéo (a), tanneur.

Mahéo (cadet), tanneur, suppt.

Députés du 2° ordre de l'Eglise : MM. Launay, archiprêtre, Fruneau, prêtre ; Laudren et Rivalain, abbés de théologie.

La brave Jeunesse.

MM. de Bray, son président, Philippe, Bonamy, Le Clainche, Housset, Bouet.

Députés pour l'organisation des milices nationales : MM. Dubois, Ribot des Marais, Lamour, Pitel.

Puis, délibérant sur la conduite à tenir à l'égard des concitoyens qui ont déserté la cause commune pour s'attacher au parti contraire, la réunion a arrêté de les exclure à jamais de l'entrée aux assemblées municipales. Quant à ceux qui avaient déjà l'honneur d'y voter, ils donneront incessamment leur démission et leur renonciation formelle à ce droit honorable, faute de quoi leur exclusion et leurs noms seront inscrits au registre. Soixante signataires.

Lundi 3 août, à huit heures du matin, 1ère séance. — Pour éviter toute surprise, les membres sont invités à faire part des motions qu'ils pourraient proposer à une commission spéciale qui en apprécierait l'opportunité....

C'était une précaution en vue de ce qui pouvait advenir à la réunion annoncée pour trois heures de relevé, réunion digne d'être consignée dans l'histoire de la ville de Vannes sous le nom de Journée du 3 août 1789.

Pendant qu'à Versailles s'agitaient les grandes questions qui allaient se discuter dans la nuit du 3 au 4 août, la municipalité, étant réunie en assemblée politique :

« On a annoncé Mgr l'Evêque de Vannes à la tête de MM. les Dignitaires et Chanoines de la cathédrale. On a annoncé de suite MM. de la Noblesse de cette ville, qui tous demandaient l'entrée de l'Assemblée et l'on a député vers eux quatre membres de la municipalité et des communes pour les recevoir sur le perron. Entrés dans la salle, Mgr l'Evêque placé à la droite de M. le Maire, on a présenté des sièges à MM. du Clergé et de la Noblesse, en face du président. Celui-ci a adressé à Monseigneur un discours pour lui témoigner combien l'Assemblée a été sensible à la démarche qu'il faisait pour ramener l'union entre l'ordre du clergé et les communes ; il lui a pareillement exprimé tous les sentiments de vénération qu'inspiraient ses vertus qui contribuent si essentiellement au bonheur de Vannes et de son diocèse. Monseigneur a répondu, en son nom et en celui de son clergé, par un discours qui réunissait tous les sentiments patriotiques les plus propres à ramener le calme et la paix ».

Alors, M. de Francheville, prenant la parole pour MM. de la Noblesse, a exprimé les mêmes sentiments et terminé son discours par le cri de Vive le Roi et la Nation !. De suite, M. le Maire a répondu, au nom de l'Assemblée, qu'elle voyait avec plaisir MM. du Clergé et de la Noblesse faire une démarche aussi solennelle pour ranimer et cimenter l'union entre les membres d'une même famille, et les a priés de se retirer en leur annonçant qu'on allait de suite délibérer. Ces Messieurs ont été reconduits par les mêmes commissaires.

L'assemblée délibérant a arrêté, d'une voix unanime, de témoigner à MM. du Clergé et de la Noblesse qu'elle avait entendu avec satisfaction leurs dispositions à la concorde et à la paix ; qu'elle en acceptait l'augure d'autant plus volontiers que des sentiments pacifiques avaient toujours caractérisé les bons citoyens des communes, mais que l'exemple du passé exigeait d'elle des précautions pour l'avenir, et l'obligeait de demander à MM. du Clergé et de la Noblesse de cette ville une déclaration par écrit d'adhérer et se soumettre purement et simplement à tous les décrets faits et à faire par l'Assemblée nationale qu'ils reconnaissent dès ce moment être légalement constituée et compétente pour opérer la régénération du royaume ;

De demander que MM. de la Noblesse rétractent formellement et par écrit les serments prononcés par eux à Rennes et à Saint-Brieuc, et que MM. du Clergé révoquent de la même manière leur adhésion à ce serment.

Qu'ensuite MM. du Clergé et de la Noblesse viennent au sein de la municipalité et des communes prêter conjointement avec elles le serment d'union et de fidélité au Roi et à la Nation ;

De demander enfin que MM. de la Noblesse de Vannes s'empressent d'inviter ceux de leurs membres, qui depuis peu ont quitté la ville, d'y revenir au plus tôt, parce qu'une plus longue absence les rendrait suspects, ne pouvant croire qu'une terreur injurieuse à la ville soit le seul motif qui les aurait fait disparaître.

La Municipalité et les communes, persuadées que ces différents arrêtés sont déjà dans le coeur de MM. du Clergé et de la Noblesse, attendront avec impatience de leur part l'acte qui les constatera, et s'empresseront de se réunir à eux pour le bien commun et le salut de la ville de Vannes.

Et sera, un extrait de la présente délibération, remis à Mgr l'Evêque, à M. le Doyen du Chapitre et à M. le Doyen de la Noblesse.

(Approuvé par 45 signataires, LAGADEC, greffier, compris).

Courte réunion le lendemain, 4 août 1789, dans laquelle M. Bachelot demande que le compliment, prononcé par les Dragons de la milice nationale de Lorient qui ont escorté l'envoi de secours, soit inscrit au registre. (Accordé.)

Le voici :

« Messieurs, nous saisissons avec empressement ce moment de réunion, pour vous exprimer les sentiments qui nous ont portés vers vous. L'union et la liberté, voilà ce que nous indique l'amour de la patrie. Voilà ce qui a rendu, tout à la fois, le citoyen militaire et le militaire citoyen ; et voilà ce qui a fait triompher le vrai Français de la trame la plus odieuse et la plus noire contre son existence ; voilà, enfin, ce qui nous a conduits en votre Ville. Nous y venons, Messieurs, réunir notre patriotisme au vôtre. Nos armes sont communes pour la défense de la même patrie ; nos sentiments sont les mêmes pour la conservation des droits de la première des nations et du roi le plus chéri. Que notre entrée en votre cité a été majestueuse ! Que ces moments étaient flatteurs pour nous ! Quel triomphe pour de jeunes citoyens, que de voir à leur tête et autour d'eux une Municipalité aussi respectable, une commune, une jeunesse aussi généreuse, aussi brave ! Ah ! Messieurs, pouvons-nous trop vous exprimer combien cette réunion nous a été précieuse ? Combien les Lorientais sont flattés de regarder comme leurs frères chéris, les citoyens de Vannes. Veuillez, Messieurs, inscrire sur vos registres la relation d'une journée aussi intéressante pour nous, et le serment que nous faisons tous de verser notre sang, conjointement avec vous, pour la défense de la Nation ».

Le 7 août , sur les neuf heures du matin, 30 membres présents.

Discussion concernant le règlement des séances.

Approbation du règlement de la brave jeunesse.

Il est appris à la réunion que des membres de la Noblesse, transfuges de cette ville, ont été arrêtés à Saint-Malo, et qu'ils doivent être ramenés sous l'escorte de MM. de la brave jeunesse de Saint-Malo et des brigades de la Maréchaussée. L'Assemblée arrête que, dès leur arrivée, ces Messieurs seront conduits à l'hôtel-de-ville pour y être interrogés par MM. de la commission de correspondance, le Maire, Caradec, Dubois, Lombart, Le Malliaud de Kerharno, Bachelot, Goujon, Le Clainche et Bonamy.

Le même jour, à deux heures de relevé (48 présents), il est donné lecture d'une délibération de MM. du Chapitre qui ne satisfait nullement l'Assemblée. Elle arrête, à l'unanimité, de faire savoir à ces Messieurs qu'ils aient à se conformer, sous une heure, aux dispositions textuelles de la délibération du lundi 3 du présent mois, déclarant que si ils ne s'y portent, l'Assemblée regardera leur silence comme une négative, un refus formel « d'adhérer, et prendra de suite l'arrêté qu'elle verra bon être ; et, afin que ces Messieurs ne prétendent faute d'ignorance de la présente, l'Assemblée a arrêté d'envoyer, sur le champ, le greffier leur en porter une expédition dans la personne de M. le Doyen, dont ledit greffier demandera un reçu. Au même instant, l'Assemblée recevant deux lettres, l'une de M. de Douhet, grand-chantre, dignitaire et chanoine, l'autre de M. Daumière, également chanoine, applaudit le sentiment patriotique de ces Messieurs, et déclare qu'elle est disposée à recevoir leur serment ».

A l'endroit, se sont présentés MM. les Dignitaires et Chanoines, introduits par M. Bachelot ; ces Messieurs disent qu'ils viennent déclarer à l'Assemblée qu'ils adhèrent purement et simplement, et sans réserve, à tout ce qui est compris dans la délibération du 3 de ce mois, et déclarent comme non avenue leur délibération du matin de ce jour, et de suite et à l'endroit, ces Messieurs ont prêté le serment d'union et de fidélité au Roi et à la Nation, et tous, avec l'Assemblée, ont crié : Vive le Roi, vive la Nation, et ont signé : L'abbé de la Corbière, archidiacre, de Boutouillic, de Jacquelot, trésorier, de la Pommeraye, Bonin, de Grimaudet, de Querhoent, de Boishéraud.

Suivent 40 signatures, et l'Assemblée est renvoyée au lendemain, deux heures de relevé (8 août 1789).

Séance encore plus solennelle, comme on va le voir. A l'ouverture de l'Assemblée, Mgr l'Evêque, ayant demandé l'entrée, et reçu par quatre membres de la réunion, a demandé l'acte qui lui a été accordé de sa déclaration d'adhérer purement et simplement et sans réserve, aux dispositions de la délibération du lundi, trois de ce mois, a en conséquence prêté, avec tous les membres de l'Assemblée, le serment d'union et de fidélité au Roi, à la Nation et a crié, conjointement avec l'Assemblée : Vive le Roi et la Nation et a Monseigneur signé : SEB. MICH., év. de Vannes.

A l'instant, M. Fabre de Kerhervy, lieutenant de la Maréchaussée, brigadiers et cavaliers, prêtaient le même serment. A l'endroit sont admis MM. de la Noblesse, et M. de Francheville, prenant la parole, donne lecture de l'acte suivant :

« Nous, gentils hommes bretons de la ville de Vannes, afin de prouver notre dévouement à la cause commune, déclarons regarder l'Assemblée nationale comme légalement constituée et compétente pour la régénération du royaume, et nous soumettre purement et simplement aux décrets faits et à faire par Elle. Nous rétractons purement et simplement notre serment fait à Rennes, au mois de janvier dernier. Nous sommes prêts à prêter le serment d'union et de fidélité »

A laquelle déclaration de MM. de la Noblesse, l'Assemblée a unanimement applaudi, et ces Messieurs, conjointement avec elle, ont prêté le serment d'union et de fidélité au Roi et à la Nation, en criant à l'envie : Vive le Roi, vive la Nation, et ont signé : Villéon (à peine lisible) de la Touche, Beaulieu, Ch. du Bot du Grégo, de la Haye, de Castagny, de Quifistre de Bavalan, de Séréac, le ch. du Nédo, Dubouexic des Forges, Duchesne, de la Pommeraye, de Kerambert, le Sénéchal, Dondel, Le Mintier, Desgrée, Marie-Mathurin de la Boessière, Louis-Paul de Lantivy-Talhouet, d'Amphernet de Pont-Bellanger, Francheville de Plailain, Charpentier de Lenvos, Boutouillic de la Ville-Gonan, Lescouble de Kerscouble, de la Corbière, de Queronic, de Lantivy de Ferton, Duclos-Bossart, de la Chapelle, du Plessis de Grénédan, Gibon de Queralbeau.

La séance reprend son ordre du jour et le registre reçoit toute une page de cinquante signataires.

A côté du nom de M. Le Menez de Kerdelleau, figure une fois de plus celui de Mgr l'évêque Seb. Mich., évêque de Vannes (depuis 1775).

Le mardi 11, nouvelle séance à 3 heures du soir. — Adhésions diverses.

Le 14, MM. Dubodan, fils, et Bourgeois, en qualité d'anoblis, prêtent le serment d'union et de fidélité, le premier pour lui et son père, empêché pour cause de maladie.

La réunion, où figurait de nouveau Mgr Amelot, renouvelle son adhésion à tous les décrets et arrêtés pris et à prendre par l'Assemblée nationale et déclare, solennellement et formellement, accepter dans son entier la nouvelle constitution, sur laquelle sera à jamais fondée la liberté publique. Puis, les commissaires de la rédaction ayant présenté le procès-verbal des séances, il fut arrêté qu'il serait imprimé à 600 exemplaires et les rédacteurs remerciés.  19 août, vote d'un Te Deum. — 20 et 28 août, adhésions successives. — 1er et 4 septembre, commerce des grains.

Au milieu de cet intense développement d'activité, l'administration fut invitée à user au plus tôt de tous ses moyens pour... éclairer la ville, en y établissant un nombre convenable de lanternes ou reversbert.

Les partisans de la lumière signèrent au nombre de 27.

Puis, revêtant un caractère tout spécialement politique, la réunion, après lecture d'une délibération de la ville de Rennes et de celle des jeunes citoyens militaires de cette ville (de Vannes), en date du matin de ce jour, touchant le Veto royal, applaudit unanimement à la force et à la vérité des principes qui y sont établis, et qu'elles développent de la manière la plus lumineuse et la plus satisfaisante pour les vrais amis de la patrie, et, Considérant :

Que ces vérités sacrées sont la base et le plus ferme appui de la liberté nationale ;

Que le roi, qui connaît l'étendue et les bornes de la puissance qu'il tient de la Nation, a renoncé à tout Veto quelconque, en déclarant, dans le sein de l'Assemblée nationale, qu'il n'était qu'un avec la Nation ;

Que le Veto n'a pu être proposé que par les soutiens du despotisme qui, sous le nom du meilleur des rois, voudrait encore trahir ses vrais intérêts, son coeur et sa justice ;

Que, dans un état monarchique, le prince ou le chef de la nation ne peut jamais avoir d'autre volonté que celle de la nation même ;

Que tout décret, pacte ou déclaration qui tiendrait à donner au chef d'une nation un pouvoir despotique, est nul de droit, parce qu'il ne dépend pas de l'homme, soit en société, soit individuellement, de renoncer à la liberté qu'il reçoit en naissant, la liberté constituant aussi essentiellement l'homme que la raison même ;

Que ce Veto transformait le monarque en despote contre son propre voeu, qu'il a exprimé en s'identifiant avec la Nation. Qu'ainsi, sous quelque rapport que ce soit, cette question du Veto n'eût jamais dû en faire une. Qu'il est surprenant qu'on ait osé la proposer dans l'auguste Assemblée de nos représentants, presque au moment même où elle vient de consacrer, par des décrets immortels, la liberté de la Nation.

« L'Assemblée adhère avec les sentiments du plus pur patriotisme à tous les principes consignés dans la déclaration de MM. les citoyens de Rennes et des jeunes citoyens militaires de cette ville (de Vannes).

Déclare qu'elle les regardera toujours comme la sauvegarde de la liberté et de la puissance nationale, contre les entreprises du despotisme et de l'aristocratie.

Qu'aucune puissance ne peut dépouiller la Nation du pouvoir législatif qui lui appartient exclusivement, et qu'elle a seule droit d'exercer par elle, ou ses représentans, que tout décret qui tendrait à l'anéantir ou à lui porter la moindre atteinte par un Veto absolu ou suspensif serait nul de droit, incapable de lier ou d'engager la Nation qui peut tout pour son bonheur, mais qui est toujours impuissante lorsqu'il s'agit de détruire la source de la félicité publique, la liberté nationale.

L'Assemblée, instruite qu'il existe aussi une diversité d'opinion dans l'Assemblée nationale, sur la question de savoir si elle sera permanente ou périodique ; quel sera, dans ce dernier cas, l'intervalle entre chaque session, et si l'Assemblée sera divisée en Sénat ou chambre haute, et en chambre des communes ou chambre basse.  Déclare que les seuls ennemis du bonheur public et de la liberté nationale peuvent douter de la nécessité absolue des assemblées au moins périodiques ; que la Nation étant seule et exclusivement législatrice, il est indispensable que l'assemblée de ses représentants soit périodique et déterminée de droit, à des époques fixes et rapprochées ; qu'il est essentiel et de la plus grande importance, dans les premières années de la résurrection de la liberté française, que cette assemblée ait lieu au moins pendant vingt ans, trois ou quatre mois de chaque année ; que même l'assemblée actuelle se portant à interdire toute interprétation de la loi au pouvoir judiciaire, l'intérêt national exige que ces sessions de 3 à 4 mois se renouvellent constamment chaque année, avec mutation des membres, afin de prévenir toute interruption ou suspension dans l'administration de la justice. Que les membres de ces assemblées doivent toujours être librement élus par la Nation, pour chaque session ; que, dans tous les cas, Sa Majesté, comme revêtue du pouvoir exécutif, ne puisse jamais retarder ces assemblées permanentes ou périodiques.

Que l'idée de la division des représentants de la nation en sénat ou chambre haute et en chambre des communes — ou chambre basse ne peut être que le fruit des efforts de l'aristocratie expirante ; que si cette séparation funeste pouvait jamais avoir lieu, la chambre haute deviendrait bientôt le siège des aristocrates, qui, amis du despotisme par principe, exercerait un empire tyrannique sur la chambre basse ;

La Nation étant une et indivisible, toute division du pouvoir législatif la replongerait dans les horreurs de l'anarchie ;

Arrête que la présente délibération sera adressée à MM. Les Députés de l'arrondissement pour être par eux présentée à l'Assemblée nationale, qu'elle sera imprimée et envoyée à toutes les municipalités de la province et aux principales villes du Royaume, — 45 signataires ».

 

SEANCE DU 11 SEPTEMBRE 1789.

1° D'une délibération des citoyens de toutes les classes de la ville de Vence en Provence, — 2° des municipalités des communes de Rhuis, du comité permanent de Morlaix, de Lesneven, Hennebont, Châteaubriant.

Le 14, adhésion et serment de MM. de La Landelle et Gibon, après explications.

Le 16, continuation de dépôts de lettres de Quimperlé, Pontivy, Landivisiau, Guérande, Brest, Dol, Lorient, Versailles, Dunkerque, etc., etc.

Un rapport de M. Josse, officier de la garde, informe que M. de La Landelle n'a pas été convenable à l'égard d'une sentinelle appelée dans la salle. Ce personnage, invité à reconnaître ses torts, à être plus honnête à l'avenir, s'est exécuté et a signé.

Le 21, dépôts de lettres de Rennes, de Landerneau, de Locminé. Entre temps M. Bachelot, avocat de la communauté, présente le mémoire de MM. les commissaires chargés par elle d'examiner les moyens de remplacer les octrois de cette ville de manière à ce qu'ils ne pèsent point sur la classe la plus indigente, comme ils l'ont fait jusqu'à ce jour.

Le 25 septembre 1789, neuf heures du matin. M. Bachelot, avocat de la Communauté, représente qu'il est question à l'Assemblée nationale de prendre des mesures pour l'administration de la justice, la formation des districts et la répartition des sièges. La ville de Vannes serait coupable, si elle ne présentait ses réflexions concernant cette formation... Les motifs qui demandent qu'elle soit favorisée dans le nouvel ordre de choses qui va être établi, sont si pressants que nous pouvons être assurés qu'on la dédommagera pleinement des pertes qu'elle a éprouvées en cette partie depuis quelques années. Mais il est instant qu'on s'en occupe. Il y a donc lieu de nommer une commission chargée de rédiger un mémoire sur cette importante question. MM. Caradec, Le Malliaud, Josse, Bertho, Brulon, Kerviche, Ribot et Janin sont, séance tenante, choisis avec les officiers municipaux pour s'en occuper de suite et de se concerter avec MM. du Présidial... (34 signataires).

Le 3 octobre (trois heures du soir), où M. Caradec, avocat, présidait, M. Bachelot rappelle que, d'après une décision récente, il serait donné, le 1er lundi de chaque mois, à toute la commune assemblée, connaissance de tout ce qui se sera passé à l'hôtel-de-ville. La réunion fixe au lundi 5, à dix heures du matin, la séance qui se tiendra dans la salle du présidial. Tous les membres sont invités à s'y trouver en l'absence de M. Poussin, lieutenant.

La séance eut lieu, mais aucun procès-verbal ne se trouve. On sait seulement, grâce à la communication faite, le 9, par M. Bachelot, que l'attention principale se porta sur la question la plus urgente du temps ; le commerce des grains, la cherté des céréales ; la misère présente et les moyens de subvenir aux besoins de la population. Cette situation devait s'aggraver pendant de longues années. Les décrets de l'Assemblée, sanctionnés par le roi, des lettres de mainte et mainte ville depuis Brest jusqu'à Pesenas continuent d'arriver. Il est recommandé de les déposer aux archives. Mais les documents, ainsi que les mémoires lus à la municipalité n'y ont pas trouvé un abri aussi inviolable qu'il eût été à désirer.

A la séance du 12 octobre, neuf heures du matin, M. Bachelot eut l'honneur de remontrer que de grands intérêts provoquent cette réunion : « c'est votre subsistance, c'est celle de tous ceux que vous pouvez aider, que vous voulez assurer. L'esprit d'union a pu seul donner l'être à ce noble projet, cet esprit seul peut en assurer l'exécution etc... »

Mais « Les membres de la noblesse tiennent à notre égard une conduite qui, comme vous l'avez déjà dit, ne peut être que le fruit d'une crainte injurieuse ou de desseins que nous n'avons encore osé leur prêter. Plusieurs d'entre eux abandonnent leurs demeures ; d'autres font entendre que, sous peu, ils suivront cet exemple. Eh ! quelle confiance pouvons-nous et devons-nous avoir en eux d'après de tels procédés ? Oui, Messieurs, ou ils ont oublié le serment d'union qu'ils prêtèrent d'une manière si solennelle avec nous, ou ils pensent que nous sommes assez lâches pour nous parjurer. Eh bien ! parlons-leur le langage de tout véritable français ; faisons-leur connaître, si toutefois ils ont pu l'ignorer, que la loyauté fut toujours notre partage, disons-leur que dès le serment, leurs personnes, familles et biens, nous sont devenus aussi chères qu'à eux-mêmes ; disons-leur que nous les mettons sous notre sauvegarde la plus spéciale ; disons-leur que nous ne faisons plus qu'un avec eux, et disons-leur qu'en retour, ils ayent à nous regarder comme leurs frères et leurs amis... Disons-leur, pour les assurer encore davantage de nos dispositions à leur égard, que c'est le cri de la charité qui nous rassemble. D'après cela pourront-ils (les Nobles) ne pas saisir ce moment si favorable pour détruire les reproches qu'ils ont nécessités en secondant, pour premier acte de l'union qu'ils nous ont jurée, l'oeuvre de charité la plus louable qui fût jamais... ».

La réunion composée de 31 membres, Mgr l'Evêque présent, arrêta que MM. de la noblesse seront prévenus qu'elle verrait de mauvais oeil quelqu'un de ses membres sortir de la ville pour s'expatrier dans les circonstances actuelles ; et pour leur donner une nouvelle preuve de l'assurance de ses intentions pacifiques, la municipalité les prend eux et leurs biens sous la sauvegarde de l'honneur et de la loyauté des communes de Vannes.

A la réunion du 24, trois heures du soir, M. Bachelot rend compte de la démarche faite près de MM. de la noblesse pour faire connaître les vues de l'Assemblée. Le 22, quatre gentilshommes se sont réunis chez M. de la Ville-ès-Cerf. Se préoccupant exclusivement de la question des grains et de la subsistance publique, MM. de Keronic, de La Landelle, de Lantivy et Gibon vinrent déclarer que tous leurs grains seraient réservés pour les approvisionnements de la ville. Un peu rassurée de ce côté, l'administration annonce, comme complément encourageant, que des prières publiques vont demander à Dieu un temps plus favorable aux travaux de la campagne.

La question de la formation des districts et la répartition des tribunaux de justice ne se perd pas de vue. La question des grains préoccupe aussi tout le pays : des troubles ont éclaté à Lannion, 50 volontaires nationaux de Vannes, renforcés de 20 hommes du régiment de Rouergue vont partir pour rétablir la tranquillité publique (sous les ordres de M. de Bray, major des volontaires). Le 27, ce chef fut remercié de son zèle à se porter au secours de concitoyens de Brest et de Lannion, de l'esprit d'ordre et de prudence qu'il a su déployer dans sa mission. Une somme de cent vingt-trois livres lui sera allouée pour ses frais et dépenses pendant la route...

Le 31, M. Bachelot annonce la promulgation d'une loi martiale. Sanction du décret de l'Assemblée nationale du 6 octobre concernant la contribution patriotique.

Il dépose une lettre de nos députés aux Etats généraux avec une motion de M. l'Evêque d'Autun sur les Biens ecclésiastiques, etc. Le dépôt de cette dernière aux archives fut prescrit, elle ne s'y trouve plus.

 

CONTRIBUTION PATRIOTIQUE.

Le 6, la contribution patriotique fut accueillie avec l'expression du plus profond respect pour les décrets de l'Assemblée nationale et les pressantes invitations du meilleur des Rois. La Réunion, Mgr l'Evêque présent, décide de former un extrait des principales dispositions de la déclaration du Roi portant sanction du décret de l'Assemblée, le voici : 

Suivant les articles 1 et 2, il est demandé à tous les habitants et à toutes les communautés du royaume, aux exceptions près indiquées dans les art. 13 et 14, ci-après, une contribution extraordinaire et momentanée fixée au quart du revenu dont chacun jouit, déduction faite des charges foncières, des impositions, des intérêts par billet ou obligation, des rentes constituées auxquelles il se trouve assujetti, et de plus à 2 ½ p. % de l'argenterie ou des bijoux d'or et d'argent dont il sera possesseur, et à 2 ½ p. % de l'or et de l'argent monnayé que l'on garde en réserve.

Suivant l'article 3, il ne sera fait aucune recherche ni inquisition sur la vérité des déclarations. L'assemblée nationale et le Roi, pleins de confiance dans les sentiments d'honneur de la Nation, ordonnent à chacun de faire la déclaration de la manière suivante... Je déclare avec vérité que telle somme .....  dont je contribuerai aux besoins de l'Etat est conforme aux fixations établies par le décret de l'Assemblée nationale etc.

Cette délibération, tirée à 400 exemplaires, fut publiée, affichée dans toutes les paroisses de la sénéchaussée etc. Il n'en reste aucune trace.

Le 7 novembre, à trois heures du soir, 38 assistants. 

Une requête des R. P. Carmes déchaussés, adressée à M. le Maire, demande que « vous vouliez bien employer vos bons offices auprès de l'Assemblée nationale pour la conservation de leur maison ». « Déjà ! ». Puis la réunion arrête que toutes les délibérations à compter du 1er octobre dernier seront imprimées incessamment, et qu'à l'avenir, les délibérations prises dans le courant de chaque mois seront de même imprimées et que des exemplaires en seront remis aux députés des corps et corporations, pour instruire leurs commettants de toutes les opérations de la municipalité.

Le 18 novembre, à neuf heures du matin, 29 assistants.

« A l'endroit, M. Rollin de La Farge, membre de l'académie royale de la marine, donna lecture d'un mémoire intitulé "Aperçu rapide d'un projet d'éducation maritime nationale", lequel a été reçu avec applaudissement et considérant de quelle importance serait pour la Nation et pour cette Ville en particulier l'exécution de ce projet, la Réunion arrêta que ledit mémoire sera adressé à l'Assemblée nationale en la personne de Mgr le Président, avec une lettre d'invitation pour qu'il veuille bien le mettre sous les yeux de l'Assemblée et le prendre en considération ! ».

Hélas ! la ville ne devait plus entendre parler du projet de M. Rollin, et cependant quel plus bel espace, quel plus beau champ de manoeuvres navales que le golfe du Morbihan pourrait être approprié pour l'éducation maritime nationale de la jeunesse bretonne ?

Puis, la Réunion, sentant qu'il est de son devoir de donner l'exemple de sa soumission et de son zèle à remplir les obligations qu'imposent à tous Français les décisions de l'Assemblée nationale, s'empresse de charger M. le Maire, l'avocat, le procureur et le miseur de la ville de dresser l'état du quart du revenu de la communauté quitte de toute charge pour, d'après ce qui sera rapporté à la réunion, être la déclaration de la contribution patriotique inscrite en tête du registre ouvert à cet effet. Ce registre existe : il expose, au poids de l'or, le degré de patriotisme de chaque déclarant.

La séance du 18 novembre se clôt par l'arrêté suivant relatif aux logements militaires : En exécution de l'arrêté de l'Assemblée Nationale des 4, 6, 7, 8 et 11 août dernier, qui décrète que les privilèges pécuniaires, personnels ou réels sont abolis à jamais, la Réunion autorise MM. les Officiers municipaux à assujettir toute personne de quelque condition et qualité qu'elle soit, même les monastères, au logement des gens de guerre et à la fourniture aux casernes. En conséquence, pour que personne n'en ignore, il est arrêté, à l'unanimité, que la présente décision, tirée à 100 exemplaires, sera publiée, affichée, etc. 

Le surlendemain, 20 novembre 1789, trois heures après-midi, 27 présents.

 

DON PATRIOTIQUE.

M. Bachelot, avocat de la communauté, représente que MM. les Officiers municipaux se sont empressés de prendre le relevé exact des revenus de la ville et de ses charges ordinaires. Il résulte de cette opération que les revenus de la communauté montent à 24,150 livres, et les dépenses ordinaires à 16,504 livres, dont le quart net de 7,646 livres est 1,911 livres 10 sols. Vous ne balancerez pas sûrement, Messieurs, pour vous conformer aux vues bienfaisantes de l'Assemblée Nationale et aux pressantes invitations du meilleurs des rois, à ordonner à votre miseur de compter, au terme fixé par la loi, la somme de 1,911 livres 10 sols au receveur ordinaire des impositions. A La Réunion décide qu'elle offrira, comme nouvelle preuve de son patriotisme, sans déduction d'intérêt légal, le 1er avril, la somme de 1,800 livres.

A l'instant s'est présenté le R. P. vicaire du monastère des dames religieuses de Nazareth, accompagné d'un autre religieux. Ils viennent, de la part des dites dames, offrir, en pur don pour la Nation, six chandeliers d'argent pesant 41 marcs 7 onces 5 gros, comme témoignage de leur soumission aux décrets de l'Assemblée. Ce don est accepté avec reconnaissance. Mais, à la séance du 23, M. Goujon, procureur de la communauté, vint remontrer que c'était par un malentendu que les six chandeliers avaient été offerts en pur don. Ces dames, se conformant aux décrets de l'Assemblée, les présentaient à condition d'en être payées en récépissés du Directeur de la Monnaye. Sur quoi le P. vicaire a repris ses six chandeliers pour les adresser lui-même à Nantes.

Les remerciements exprimés à la séance précédente sont rapportés.

(à suivre)

(Par M. Guyot-Jomard).

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