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FABRIQUE et PAROISSE de VANNES |
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FABRIQUE DE VANNES
La
fabrique est un établissement chargé du bâtiment de l'église et de
l'entretien du culte divin.
Dans
les paroisses ordinaires, ses intérêts sont gérés par un conseil composé du
recteur et de quelques laïcs choisis. Dans des églises cathédrales ils sont gérés
par le chapitre seul.
Le
conseil ou le chapitre, ne pouvant se réunir journellement pour les détails du
service, délègue un de ses membres pour en avoir soin. Ce délégué, appelé
tantôt procureur de la fabrique, ou
simplement fabrique, tantôt trésorier, est chargé de recevoir les fonds et de payer les dépenses
autorisées ; il doit rendre ses comptes tous les ans, soit au conseil, soit au
chapitre, suivant les cas, et ces comptes doivent être approuvés par l'évêque
ou par son vicaire général, parce qu'il s'agit de biens ecclésiastiques.
Les
ressources des fabriques viennent d'abord des oblations volontaires, faites à l'église ou versées dans les
troncs : c'est un usage qui remonte à l'origine du christianisme, et qui se
continue de nos jours. Elles viennent ensuite des droits casuels perçus pour les mariages, les purifications, les
enterrements, les tentures, les sonneries, le luminaire, les chaises, les
serments sur les reliques, etc...
L'église
cathédrale de Vannes avait en outre les Annates
; c'est-à-dire la moitié des gros fruits de l'année qui suivait la vacance de
chaque paroisse du diocèse : l'autre moitié appartenait au nouveau recteur. En
admettant une moyenne de cinq ou six vacances par an, on arrivait à une somme
importante.
Ce
droit d'annate, au profit de la fabrique, existait à Vannes dès le XIIIème siècle
au moins. En 1409, le recteur de Saint-Jacut était poursuivi par le procureur
de la fabrique de la cathédrale pour le paiement de ce droit. Il en était de même
en 1441, pour le recteur de Saint-Jean-Brévelay. Dès 1419, une pension
annuelle de 22 livres avait été imposée sur la paroisse de Moréac au profit
de la même fabrique.
Voici
quel était, en 1475, l'état de ses recettes.
Oblations
du tronc et boîte de Saint-Vincent et autres : 88 livres 16 sols 10 deniers.
Recettes
des enterrements, services, etc. : 121 livres 2 sols 11 deniers.
Sonneries
aux enterrements et services… : 1 livre 10 sols.
Devoir
de 8 deniers par chaque noxaille (mariage) : 12 sols.
Devoir
de 4 deniers par purification des femmes : 13 sols.
Devoir
de 5 sols par serment sur les reliques : 6 livres.
Luminaire
des messes de la duchesse Jeanne : 9 livres 2 sols 6 deniers.
Pension
annuelle sur la paroisse de Moréac : 22 livres.
Annates
de plusieurs paroisses : 262 livres 11 sols 3 deniers.
Total
: 513 livres 8 sols 6 deniers (G. Fabriq.).
Cette
somme de 513 livres, d'après ce qui a été dit précédemment, valait en 1900
environ 17,955 francs.
Depuis
quinze ans, la fabrique appliquait toutes ses ressources disponibles à la
construction de la nef actuelle de la cathédrale, et en cette même année
1475, elle avait dépensé 308 livres 10 sols, c'est-à-dire environ 10,797
francs (valeur en 1900), rien que pour les tailleurs de pierres. Le chapitre de
son côté contribuait largement à l'oeuvre, et l'évêque y appliquait les aumônes
provenant des indulgences accordées par les souverains pontifes.
Quant
au personnel, le même compte porte 3 livres 6 sols 8 deniers pour les gages de
l'organiste, 20 sols au souffleur, 30 sols au porte-croix, 33 sols au prévôt
ou bedeau, 100 sols à la lavandière, 4 livres au prédicateur du carême ;
celui-ci était payé en outre par le chapitre et par l'évêque.
Parmi
les autres dépenses, on remarque « 25 sols pour 25 quartes de vin, pour les
communiants de Pâques ». Ce vin n'était pas consacré ; il était
distribué après la communion pascale, et il rappelait l'antique usage de la
communion sous les deux espèces.
Les
comptes des années suivantes sont tous taillés sur le même modèle. Il suffit
d'y relever quelques notes historiques.
«
Le 29ème jour d'apvril (1485) fut faicte une procession générale du
commendement du Duc, pour recevoir les sermans sur Corpus Domini d'un chacun,
tant gentil homme que d'autre, d'estre loyal au duc, à la duchesse et à
mesdammes leurs filles ; quelle procession fut faicte entour de l'église par
dehors, et au retour d'icelle une messe fut chantée à l'autier du vicaire.
Receu
pour une procession faite tout autour de l'église (en 1486), et célébré la
messe sur l'aultier Mgr Saint-Vincent, à l'intention du Duc, nostre souverain
seigneur, 25 soulz.
En
1487, pour ce que la paroesse de Moréac a esté pillée par les Françoys et
autres gens de guerre, reçeu seulement 5 livres 10 sols.
Le
5ème jour de juign (1488), qui fust le jour du Sacre, ès tabourins espaignols,
les queulx accompagnèrent le Sacre, 10 soulz.
Item
ès sonneurs, pour faire la sonnerie du service des seigneurs décédés au jour
de la bataille à Saint-Aubin, 5 soulz.
Le
20ème jour de may (1490), ès sonneurs pour fère la sonnerie de la paix faicte
entre Mgr le prince d'Orange et Mgr le mareschal de Rieux, 10 soulz.
Le
tiers jour du moy de juign (1491), receu de l'offerte que fist Monsieur le
vicaire (général) de Vennes, quand il print la possession de l'évesché, ung
escu au soulaill, valant 36 soulz 3 den.
Le
16ème jour du mois d'octobre (1492), aux sonneux des grosses cloches à la
procession faite pour la nativité du Daulphin, 2 soulz 6 d.
Le
15ème jour de septembre (1494), fut benoisqué par Rev. Père Henry d'Aradon,
évesque de Cèdre (?) le cymittère (du cloître).
Le
18ème jour de septembre (1496), poié aux sonneurs qui sonnèrent les grandes
cloches à la nativité du Daulphin, 3 soulz 2 den. ».
Au
XVème siècle, la fabrique avait lentement construit la nef et la façade de la
cathédrale ; au XVIème siècle elle entreprit la reconstruction des transepts
ou des bras de la croix. Le pignon du midi fut abattu en 1504, et le pignon
actuel fut immédiatement commencé. La porte, dite des Ducs,
fut surmontée de l'écusson de l'évêque Jacques de Beaune, et la fenêtre
au-dessus décorée de son portrait. L'autel était dédié à saint Guénael,
abbé, et tout auprès on voyait son tombeau, ou du moins son cénotaphe, ses
reliques étant conservées à la sacristie.
A
bout de ressources, on eut encore recours au Saint-Siège. Une indulgence plénière
fut accordée pour le 1er mai 1515 et les deux jours suivants. Les offrandes du
pardon dépassèrent 400 livres. En 1516, l'évêque commendataire Laurent Pucci
fut taxé par le parlement à une contribution annuelle de 200 livres pour la
cathédrale.
Dès
1516, on démolit le vieux clocher au-dessus du choeur, et on commença les
quatre gros piliers actuels. Vers 1520 on entreprit le transept du nord, avec la
porte dite des Chanoines.
Le
style des transepts est ogival, comme celui de la nef ; mais la renaissance se
fait déjà sentir dans quatre petites arcades en plein cintre et surtout dans
deux sortes de contreforts, ajoutés aux deux gros piliers du choeur du côté
de la nef. La renaissance règne seule dans la colonnade du cloître, commencée
en 1530, et dans la chapelle circulaire du Saint-Sacrement, construite en 1537
aux frais de l'archidiacre Jean Danielo.
Il
ne restait plus à faire que le sanctuaire. Dès 1536 on jeta les fondements de
la chapelle absidale de Notre-Dame et Saint-Vincent, et des autres chapelles
rayonnantes. Mais bientôt les ressources firent défaut, et les travaux furent
suspendus. Ce n'est que deux siècles plus tard que l'oeuvre fut reprise sur un
autre plan.
Après
l'immeuble, voyons le mobilier. Un inventaire de 1555 fournit à ce sujet d'intéressants
détails. On y voit figurer 31 chapes, 21 chasubles, 20 dalmatiques, 20
tuniques, 93 aubes, 9 ceintures et 50 nappes d'autel.
Quant
à l'argenterie, il y a 21 calices,
dont un en or massif, orné de pierreries, et appelé le calice de saint Patent,
dix en vermeil, et dix en argent. On trouve ensuite une croix de procession en
argent, deux petites croix dorées, trois encensoirs et un bénitier d'argent,
deux burettes en vermeil et deux en argent, un bâton cantoral en argent, le
livre des Evangiles couvert en argent, un petit plat pour recevoir les offrandes
au maître-autel, « un sacraire d'argent
doré, on l'on porte Corpus Domini le jour du Sacre, ayant deux ymaiges d'anges,
le rondeau (pour l'hostie) entre deux, et au dessoubz les imaiges de Jésus-Christ,
Notre-Dame et saint Jehan en bosse ; plus autre sacraire d'argent doré, où est
ordinairement le corps du Seigneur, au dessus du grand aultier ; un petit porte
sacre doré, garni de rubis et perles entrelasés, à deux moutons en bosse
dessus et ung voyrre de cristal » ; deux chandeliers d'argent, une paix
d'argent doré, avec l'image du Père éternel en émail, etc...
Parmi
les objets pontificaux, on rencontre une crosse épiscopale en argent, ayant une
volute dorée avec une image de Notre-Dame et d'un évêque à genoux ; une
autre crosse presque semblable ; une mitre garnie de perles et de pierres précieuses
; une autre mitre en drap d'or, ornée de pierres de diverses couleurs ; une
autre mitre en damas blanc, ornée des images de quatre apôtres ; un anneau
pastoral avec un cristal, la pierre dite de saint Patern avec sa chaînette ;
quatre pierres enchâssées ; deux paires de gants, deux paires de bas ; deux
paires de sandales ; quatre coussins , etc...
Quant
aux reliquaires, il faut noter, en dehors des grandes reliques de saint Vincent
Ferrier, de saint Guénael et de saint Patern, « la vraye croix dans une croix d'argent doré ; deux reliquaires
d'argent de forme plate ; un petit reliquaire d'argent en forme de tombeau ;
etc... ».
On
peut mentionner aussi un tapis, donné par Laurent Cibo, cardinal, archevêque
de Bénévent et évêque de Vannes, mort en 1502 ; on n'en possède pas de
description.
Mgr
Jacques Martin de Belleassise, évêque de Vannes de 1600 à 1622, après avoir
donné au chapitre des livres liturgiques de choeur, et un aigle en bronze, qui
existe encore, fit broder ers 1615 deux grandes tapisseries, longues de 14 mètres
chacune, et reproduisant en 14 tableaux la vie et les miracles de saint
Vincent-Ferrier. Il donna de plus une autre grande tapisserie, dont le sujet ne
nous est pas connu ; celle-ci se tendait ordinairement dans le choeur.
Une
note des Comptes de 1627 porte ce qui suit : «
Paié à Jan Blouet, tapissier, pour avoir raccommodé et rehaussé de couleurs
la grande et haute tapisserie du choeur, donnée à l'église par feu de bonne mémoire
M. de Martin, évesque de Vennes ; et mesme pour avoir raccommodé la tapisserie
des hautes chaires, donnée par le mesme, où est représentée l'histoire de
saint Vincent Ferrier ; et aussy réparé et presque reffait de neuf l'ancienne
tapisserie des dictes chaires, où sont les armes du feu cardinal de Bénévent,
vivant évesque de Vennes, suivant les quittances de 1627, savoir 138 livres ».
Le
procureur de la fabrique était alors M. Yves Audic, chanoine et recteur
d'Elven. C'est lui qui fit faire, en 1626 et 1627, le lambris de toute l'église
de Saint-Pierre, qui n'avait jamais été lambrissée, et qui y dépensa 1,794
livres. C'est lui qui fit réparer le pavé de la nef et des chapelles, pour 846
livres 4 sols ; placer trois tambours aux trois principales portes de l'église,
pour 664 livres ; et renouveler la couverture de plomb de la chapelle du
Saint-Sacrement, pour 330 livres 16 sols.
Encouragé
par ces succès, M. Audic voulut reprendre les travaux d'achèvement du choeur.
Il lui fallait d'abord recueillir de l'argent. Ayant appris qu'une pension
annuelle de 22 livres était due à la fabrique sur la paroisse de Moréac, il
présenta une requête au présidial pour faire citer le recteur. Ayant aussi
trouvé dans les archives que les évêques de Vannes avaient été taxés, en
1516, à 200 livres par an, pour les travaux de la cathédrale, il pria Mgr Sébastien
de Rosmadec de vouloir bien payer la même somme à la fabrique depuis son arrivée
en 1622. Sur le refus du prélat, l'affaire fut portée au présidial, et le
comptable eut gain de cause, le 9 août 1629. L'évêque en appela au parlement
de Rennes, et avant la sentence il fit un arrangement avec le chapitre.
Pour
remplacer la cotisation des 200 livres, l'évêque et le chapitre obtinrent du
roi Louis XIII, le 20 avril 1630, des lettres établissant une levée de 5 sols
par tonneau de vin débarqué dans les ports du diocèse de Vannes, durant une période
de neuf ans. Cette concession souleva de grandes difficultés au parlement ;
enfin treize ans plus tard, les Etats de la province finirent par verser au
chapitre une somme de 3,000 livres, pour être complètement quittes.
M.
Audic n'était plus là pour entreprendre les travaux : il avait quitté la cathédrale
en 1635 et était mort à Elven en 1642.
Dès
1632, M. Claude Gouault, archidiacre, chanoine et procureur de la fabrique, fit
placer une horloge dans la petite tour de l'église, commanda une châsse en
argent pour saint Vincent, et acheta au prix de 1,367 livres trois petites
maisons, bâties jadis par Thomas de la Garde au chevet de l'église.
M.
Roland Fruneau, son successeur à la fabrique, fit faire, d'accord avec le
chapitre, tout l'intérieur de la chapelle de Saint-Vincent, de 1634 à 1637, et
y dépensa 14,668 livres. La fabrique n'étant pas en état de fournir cette
somme, le chapitre lui avança 11,000 livres. Autres avances en 1658 et 1668.
Le
procureur de la fabrique était toujours un chanoine, nommé par ses confrères.
Sa charge était au moins d'un an, habituellement de deux, et parfois davantage.
Un
ouragan, qui arriva la nuit du mardi au mercredi 29 décembre 1705, fut si
violent qu'il enleva la plus grande partie de la couverture et de la charpente
de l'église : ce qui força le chapitre, conjointement avec le procureur de la
fabrique, de faire des emprunts prés de divers particuliers jusqu'à la somme
de 6,502 livres.
Les
recettes de la fabrique, en 1706, se montaient à 4,254 livres 10 sols, à
savoir : les troncs et oblations à 140 livres 10 sols ; les draps mortuaires à
10 livres ; les loyers de maisons à 24 livres ; et les annates à 4,080 livres.
Les
dépenses ordinaires pour le personnel et le matériel montant à 3,669 livres 2
sols, il ne lui restait donc que 585 livres 8 sols pour les dépenses
extraordinaires.
En
1767, Mgr de Bertin proposa au chapitre de faire voûter en pierre la nef et les
transepts de la cathédrale, à condition qu'on lui donnerait l'assurance que c'était
un acte de générosité et non d'obligation pour les évêques de réparer l'église.
Ayant obtenu cette reconnaissance, il fit commencer les travaux en 1768 ; les dépenses
montèrent à plus de 100,000 livres, dont 50,000 livres furent donnés par le
roi Louis XV, sur la demande de M. de Bertin, ministre d'Etat, le reste par l'évêque
et le chapitre.
Le
travail était à peine terminé, que le vieux sanctuaire roman menaçait de s'écrouler
: il fallut le démolir en 1770. La fabrique, qui avait près de 80,000 livres
de dettes, ne pouvant rien faire pour le relever, le chapitre prit à sa charge
tout son passif et tout son actif, et sollicita du roi un nouveau secours de
50,000 livres, en promettant de donner 20,000 livres de son côté. La demande
fut agréée.
Le
chapitre avait songé d'abord à utiliser les fondements du choeur commencé au
XVIème siècle, mais dépourvu des ressources suffisantes, il dut se borner à
la construction d'un choeur de style renaissance, dans les dimensions trop
restreintes de l'ancien édifice. Les travaux commencèrent en 1771 et durèrent
jusqu'en 1776 et coûtèrent environ 156,000 livres.
Grâce
à un secours de 80,000 livres, accordé par Louis XVI en 1775, le chapitre put
refaire tout le pavé de l'église, poser un autel majeur en marbre et placer
des stalles neuves dans le choeur. Malheureusement, il bouleversa l'ordre
ancien, en plaçant les stalles au fond de l'église et l'autel au milieu des
transepts, en sorte que le clergé ne voit plus le célébrant, et que pour protéger
l'autel contre les courants d'air, on a du fermer deux portes monumentales,
celle des Ducs au sud et celle des Chanoines au nord.
Les
connaisseurs admirent le maître-autel, sculpté par Dominique Fossati, de
Marseille, les statues de saint Pierre et de saint Paul, et le tombeau de Mgr de
Bertin, dus à Christophe Fossati.
Quant
à la fabrique, ses ressources propres étaient les mêmes que par le passé. En
1790, les troncs donnaient environ 160 livres, et les annates une moyenne de
5,580 livres. Le tout passait au chapitre, pour éteindre les dettes. Il en était
de même de la propriété et des revenus des maisons situées au chevet de la
chapelle de Saint-Vincent. En retour, le chapitre se chargeait de toutes les dépenses
qui incombaient auparavant à la fabrique.
PAROISSE DE VANNES
Pendant
les dis premiers siècles de l'Eglise, les villes épiscopales ne formaient
qu'une paroisse, sous la direction immédiate des évêques. C'est le régime
suivi dans les missions naissantes.
L'évêché
de Vannes, avant été érigé au Vème siècle, dut se conformer à l'usage général.
La ville, avec ses faubourgs et les campagnes voisines, ne formait
qu'une paroisse, dont l'évêque
était le pasteur direct mais comme le prélat ne pouvait arriver partout, il était
aidé et suppléé par les chanoines de la cathédrale, qui étaient pour lui de
véritables vicaires. Ceux-ci baptisaient, confessaient, faisaient les mariages
et les enterrements, comme dans les paroisses ordinaires, et présidaient à
tour de rôle les offices, chacun pendant une semaine.
Au
XIème siècle s'opéra le démembrement : tout l'intérieur de la ville,
jusqu'aux murs, forma la paroisse de Saint-Pierre
; tout l'extérieur, avec la campagne, forma la paroisse de Saint-Patern. Celle-ci fut presque aussitôt diminuée des deux
petits faubourgs de Saint-Salomon et de Notre-Dame du Mené, qui furent aussi érigés
en paroisses.
La
paroisse de Saint-Pierre, ainsi limitée par les murs de la ville, fut encore
administrée pendant quelque temps par les chanoines, mais bientôt ils s'en déchargèrent,
avec l'agrément de l'évêque, et ils la confièrent à un vicaire, choisi par eux et institué par le prélat. Le chapitre se
réserva seulement le titre de recteur
primitif, le droit de célébrer la messe paroissiale aux quatre grandes fêtes
de l'année, de recueillir une partie des oblations pour la fabrique,
d'autoriser les inhumations à la cathédrale et d'y assister.
De
son côté, le vicaire eut l'usage des fonts de l'église, pour y faire les baptêmes,
jusqu'en 1310, où Jean Le Bozec, chanoine et archidiacre, fit construire auprès
du choeur la chapelle de Saint-Jean-Baptiste, pour servir de baptistère.
Il
eut à sa disposition l'autel de Sainte-Croix, dit aujourd'hui de Saint-Pierre,
au haut de la nef, du côté de l'évangile. C'est là qu'il disait la messe
dominicale à 9 heures du matin, avec prône et distribution de pain bénit ; il
n'y avait point de vêpres, le chapitre étant chargé de tout l'office chanté
; on y conservait la sainte Eucharistie jusqu'en 1649, où elle fut transférée
dans la chapelle circulaire du Pardon ou du Saint-Sacrement.
Pour
les enterrements, le vicaire eut la chapelle de Saint-Michel et le cimetière
qui l'entourait, situés à l'emplacement du champ de foire actuel. Là, le
vicaire pouvait chanter les messes d'enterrement et de service, à l'heure qui
lui convenait, pendant que le chapitre chantait à la cathédrale son office et
les anniversaires fondés : il n'y avait pas ainsi de conflit possible.
La
chapelle de Saint-Michel avait la forme d'un long rectangle comme celle de
Saint-Jean-Baptiste, et renfermait plusieurs autels latéraux. En 1543, on fonda
dans cette chapelle, alors couramment appelée «
église paroissiale » la confrérie
des trépassés, qui prit bientôt un grand développement. Les nombreuses
fondations de messes et de services nécessitèrent l'établissement de quatre,
puis de huit chapelains ; ceux-ci, présentés par l'abbé de la confrérie et
agréés par le vicaire, formèrent la communauté des prêtres de la paroisse,
et contribuèrent à l'administration des sacrements.
Le
vicaire, présenté par le chapitre et institué par l'évêque, pouvait être révoqué
par l'accord de ceux qui l'avaient établi.
Ce
droit de présentation et de révocation a été formellement reconnu par les
papes Sixte IV en 1480, et Innocent VIII en 1485. Le chapitre a joui constamment
de son droit de présentation, et il n'a usé de son droit de révocation qu'une
fois, en 1664 : sa décision fut approuvée par l'évêque, et confirmée par le
parlement.
Parmi
les vicaires de Saint-Pierre, on trouve Jehan Collet qui administra les derniers
sacrements à saint Vincent Ferrier en 1419 et qui mourut en 1435 ; Pierre Le
Fauchour, son successeur, qui réédifia la chapelle de Saint-Jean-Baptiste en
1438, avec le secours des oblations qui lui furent provisoirement délaissées ;
Jean Balluart, qui provoqua la fondation de la confrérie des trépassés à
Saint-Michel en 1543, et qui mourut en 1552.
En
1603, M. François Préau, choriste et vicaire, représenta au chapitre qu'il ne
percevait guère que cinq ou six écus pour ses deniers pascaux, qu'il était
obligé d'avoir un curé pour l'aider, et que son gain du choeur était diminué
par ses absences obligatoires ; en conséquence il sollicita une pension
suffisante pour lui et son curé, et le gain du choeur en cas d'absence forcée.
Nous ignorons la réponse qui lui fut faite ; nous savons seulement qu'il
adressa la même supplique au présidial, qui n'y pouvait rien. Il est probable
toutefois que sa position fut améliorée, puisqu'il resta à son poste jusqu'à
sa mort en 1612.
Jean
d'Origny, chanoine théologal, ayant été pourvu du vicariat en 1623, voulut se
qualifier recteur : mais, le 19 avril 1624, le chapitre lui défendit de prendre
ce titre, qui lui appartenait à lui-même. C'est alors qu'il laissa de côté
le nom de Saint-Pierre, donné jusque-là à sa paroisse, et qu'il adopta le nom
de Sainte-Croix, du vocable de l'autel
qui lui était réservé. Cette nouvelle appellation se maintint durant un siècle
environ.
Guillaume
Le Galloys, également chanoine théologal, fut pourvu du vicariat de
Sainte-Croix en 1645, il était en même temps vicaire général de l'évêque.
C'est lui qui, en 1648, avec l'appui de son conseil de fabrique, demanda au
chapitre la permission de restaurer l'autel de la chapelle du Pardon, pour y
poser le tabernacle de la paroisse, et de construire une sacristie dans le cloître
contre la chapelle de Saint-Yves, avec une porte de communication dans la
chapelle du Saint-Sacrement. L'assemblée capitulaire y consentit, pour obliger
la paroisse, mais elle se fit donner par le vicaire et la fabrique de la
paroisse un acte notarié constatant que cette permission ne porterait aucun préjudice
aux droits du chapitre dans l'église cathédrale. - L'acte est signé par G. Le
Galloys, J. de la Couldraye, P. de la Landelle, R. Lechet, G. Bigaré. A. Crose,
J. Gatechair, A. Guillo, J. Le Louet, P. Le Sérazin, Picault, Binet, J. Chedane
, P. Le Faucheux, Y. Anno, Cl. Gossement, Billy, V. Gillot, Jacq. Rio, G. du
Bois de la Salle, V. Guimar, Th. Authueil, J. Mau, G. Kerviche, S. Nicolas, J.
Coué, J. Gouyon, J. du Plesseix, J. Quéneau, R. Fruneau, Le Yondre, not.
royal, Le Thieis, not. royal.
François
Le Gallois (sic), neveu de Guillaume, devint chanoine théologal en 1676 et
vicaire de Sainte-Croix en 1678. C'est de son temps que fut commencé un fameux
procès entre la paroisse et le chapitre. Les bourgeois composant le conseil de
la paroisse se mirent en tête d'enterrer leurs principaux défunts dans la nef
de la cathédrale, sans l'autorisation du chapitre et sans son assistance aux
obsèques : double économie qui n'était pas à dédaigner. Ils firent si bien
que le présidial de Nantes, par une sentence du 6 septembre 1681, leur donna
raison, et n'admit la participation des chanoines aux obsèques que sur
l'invitation des familles ; leur intervention, nécessaire auparavant, n'était
plus que facultative.
Etonnés
de leur victoire, les paroissiens n'osèrent pas s'en servir et continuèrent à
payer au chapitre les droits d'inhumation dans l'église et les droits
d'assistance aux chanoines. Toutefois, pour maintenir ou rétablir ses droits,
le chapitre fit appel de la sentence du présidial de Nantes à la cour du
parlement, par acte du 10 juillet 1703. Les paroissiens, en ayant eu
connaissance, s'assemblèrent en corps politique, c'est-à-dire en conseil, le 5
août suivant, et déclarèrent renoncer à la sentence de 1681, et ne point
suivre l'appel.
L'affaire
suivit néanmoins son cours, et le 3 mai 1704, le parlement « faisant droit en l'appellation des chanoines et gens du chapitre de
Vennes, a mis et met ce dont a esté appelé au néant, corrigeant et refformant
(la sentence), déboutte les (paroissiens) intimés de leurs demandes, fins et
conclusions parce que néantmoins il en sera uzé à l'advenir entre parties, en
la dite paroisse de Sainte-Croix, comme au passé ; condamne les intimés aux dépens
des causes principale et d'appel » (G. Vicariat. — parch.).
Au
moment de la signification de cet arrêt, la paroisse de Sainte-Croix avait,
depuis un an, pour vicaire, M. Louis de Keralbaud de Cardelan, chanoine de la
cathédrale. Il habitait, comme ses prédécesseurs, le presbytère de la
paroisse, situé à l'angle de la rue des Chanoines et de la rue du Nord (N°
1666).
L'ouragan
du 29 décembre 1705, qui avait ruiné la toiture de la cathédrale, avait aussi
endommagé la chapelle de Saint-Michel. Aussitôt certains laïcs de la paroisse
en profitèrent pour établir leur service à Saint-Pierre, sans demander
l'autorisation de personne. Voici comment le procureur général du roi rapporta
les faits devant le parlement, dans la séance du 29 décembre 1706.
«
Il y a, dit-il, une confrérie des Trépassés, qui se dessert ordinairement
dans l'église de Saint-Michel de la ville de Vennes ; l'ouragan ayant en partie
ruiné la dite église, les fabriques de l'église et l'abbé de la dite confrérie
transférèrent de leur seule autorité le service de la dite confrérie dans l'église
cathédrale de Saint-Pierre de Vennes, au mois de janvier 1706 ; les chanoines
portèrent leur plainte à la Cour de cette entreprise, laquelle par arrest du
12 janvier les renvoya se pourvoir devant le R. Evesque de Vennes ; — lequel
par son ordonnance du 23 du d. mois de janvier, a transféré le service et les
offices de la d. confrérie des trépassés dans la chapelle royale des Lices,
pour quatre mois seulement, pendant lequel temps il ordonna que les abbés de la
confrérie seraient tenus de mettre en état de bonnes réparations la d'église
de Saint-Michel, passé lequel temps de quatre mois le dit service seroit fait
à l'accoustumé dans la d. église de Saint-Michel.
Non
obstant que cette ordonnance ait été signifiée aux d. abbés le 25 janvier
1706, et que par l'ordre dud. R. Evesque de Vennes il ait été fait un procès-verbal
des indigences des réparations de la d. église de Saint-Michel, les abbés de
la d. confrérie n'ont fait aucune diligence pour faire faire les d. réparations.
Sur
ce délibéré, la Cour, faisant droit sur les remontrances et conclusions du
procureur général du roy, fait commandement aux abbés de la confrérie des Trépassés
de faire incessamment assembler en la manière ordinaire ceux des abbés qui les
ont précédés, et autres qui ont voix délibérative, pour trouver les moyens,
à la pluralité des voix, de faire faire les réparations de la d. église de
Saint-Michel, faute de quoy il y sera pourvu à leurs frais. Rennes, le 29 décembre
1706 ».
Cette
fois, il fallut bien s'exécuter, mais on le lit de si mauvaise grâce que la
chapelle ne tarda pas à retomber en ruines.
Le
conseil de la paroisse renfermait un certain nombre de légistes, qui tenaient
absolument à conquérir la cathédrale. Ils poussèrent le général de la
paroisse, le 16 avril 1707, à demander le rétablissement de la sentence de
1681 concernant les sépultures, l'autorisation de chanter la messe et les vêpres
de la paroisse à la cathédrale, le droit d'avoir un vicaire pris hors du
chapitre, et la faculté de laisser le nom de Sainte-Croix pour reprendre celui
de Saint-Pierre, comme étant le vrai nom de la paroisse.
Après
une longue instruction, où M. Primagnier représentait le chapitre et M. Quérard
la paroisse, le parlement prononça son arrêt, le 5 juin, en ces termes : «
La Cour, sans s'arrester aux lettres de restitution des parties de Quérard,
faisant droit dans l'appel des parties de Primagnier, ordonne que les sépultures
se feront à la manière accoustumée... sauf aux parties de Quérard à se
pourvoir vers le R. Evesque de Vennes, pour estre par luy statué ainsy qu'il
appartiendra au sujet de la grande messe et des vespres par eux prétendues :
… ordonne qu'à l'advenir les parties de Primagnier ne pourront nommer ny
chanoine ny supost du bas-choeur pour vicaire de la paroisse ; et sur la
requeste des parties de Quérard, ordonne qu'ils seront employés dans les
qualités de l'arrest sous le nom des paroissiens de Saint-Pierre de Vannes.. ».
De
son côté, l'évêque de Vannes, Mur François d'Argouges, chargé de régler
la question des offices, signa le 6 novembre 1711 l'ordonnance suivante : «
Veu par nous l'arrest rendu au parlement de Bretagne le 5 juin 1710 ; ... les
conclusions du vénérable promoteur de notre officialité du 4 de ce mois :
Le
tout bien et mûrement examiné et considéré, et le saint nom de Dieu préablement
invoqué :
Nous
avons ordonné et ordonnons qu'à l'avenir ; comme par le passé, on ne chantera
pas de grandes messes ny de vêpres particulières pour la paroisse de
Saint-Pierre de Vannes, desservie à un des autels de notre église cathédrale,
et qu'on se contentera d'y dire une messe basse, pendant laquelle on fera le prône
et on distribuera le pain bény à la manière accoutumé… ».
Comme
conclusion, le général de la paroisse dut se cotiser en 1712 pour payer la
somme de 639 livres 10 sols, pour les frais du procès.
Le
vicaire de Saint-Pierre, M. de Keralbaud de Cardelan, mourut le 5 janvier 1718,
et fut inhumé le lendemain dans la chapelle de Saint-Vincent. Son successeur
fut M. Joseph Touzée du Guernic, présenté et institué le 7 janvier. Il n'était
ni chanoine ni choriste, conformément à la décision du parlement ; il tenta,
mais inutilement, d'obtenir un canonicat en 1721 ; il réussit toutefois à se
faire nommer trésorier, c'est-à-dire second dignitaire de l'église en 1735,
et reçut un bref pontifical pour conserver en même temps sa paroisse.
Ses
paroissiens travaillaient alors à se défaire de la chapelle et du cimetière
de Saint-Michel. Le 21 juin 1740, ils obtinrent l'arrêt suivant du parlement de
Bretagne : « Veu la requeste de la paroisse de Saint-Pierre de Vannes, suite
et diligence de Maître J. B. Launay, notaire royal et procureur au siège présidial
de Vannes, et de n. h. Nicolas Daviers, négociant et ancien consul au dit
Vannes, marguilliers en charge …
La
Cour, sans préjudicier aux droits du général de la paroisse, luy a permis de
faire incessamment travailler à la démolition de la chapelle de Saint-Michel,
de vendre les matériaux, mesme d'aliéner le fonds à la première occasion
favorable, et d'employer tant le produit de la vente des dits matériaux que
celuy du fonds aux réparations et entretien de la chapelle des Lices, dans
laquelle l'office des morts se fait, et où se desservent les confrairies du
Saint-Sacrement et des Trépassés » (G. Vicariat).
La
chapelle de Notre-Dame des Lices avait été fondée en 1428 par le duc Jean V ;
elle était desservie par un chapelain, à la présentation des ducs, puis des
rois de France. La confrérie du Saint-Sacrement y avait été fondée en 1610.
La confrérie des Trépassés venait d'y être transférée par décret épiscopal
du 2 avril 1740, et la chapelle avait été cédée par le roi à la fabrique de
la paroisse.
Quant
au transfert du cimetière sur les Lices, au centre de la ville, il rencontra
une vive opposition. Ce n'est qu'en 1748 que la fabrique put acquérir un
jardin, voisin de la chapelle, pour y faire les inhumations, et qu'on ferma le
cimetière de Saint-Michel.
M.
Joseph Touzée du Guernic continuait à gouverner sa paroisse de Saint-Pierre ;
il finit par prendre le titre de recteur,
en vertu d'une ordonnance royale de 1686. Après avoir exercé ses fonctions
pendant plus de 60 ans, il mourut à l'âge de 91 ans, le 15 septembre 1778, et
fut inhumé le lendemain dans le caveau du choeur.
M. Joseph Guéheneuc, originaire des Fougerêts et prêtre de la paroisse de Saint-Pierre, fut présenté par le chapitre et pourvu par l'évêque le 28 septembre 1778. Il fut le dernier recteur de la paroisse sous l'ancien régime. Il disparut pendant la Révolution, sans laisser aucune trace (abbé Le Mené).
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