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VANNES — La Guerre de Succession de Bretagne.

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Aussitôt Jean III déposé dans son tombeau aux Carmes de Ploërmel, Jean de Montfort met la main, à Limoges, sur le trésor amassé par son frère et l'emploie à se créer des partisans ; la plupart des villes : Nantes, Vannes, Auray, Hennebont, Brest, Dinan, Saint-Malo, Rennes, se déclarent, de gré ou de force, en sa faveur ; il demande l'appui du roi d'Angleterre. De son côté, Charles de Blois porte plainte à son oncle, Philippe VI, qui convoque à Paris le comte de Montfort ; celui-ci, venu prudemment avec une très forte escorte, sent tout de suite la partialité de la Cour de France et, pour éviter une arrestation, reprend en cachette le chemin de Nantes. La Cour des Pairs le condamne par défaut, les rois de France et d'Angleterre sont heureux d'intervenir : c'est la guerre.

Ce n'est pas ici le lieu de relater en détail les péripéties de cette lutte longue et confuse où faits d'armes et négociations se succèdent, où, tour à tour, Blois et Montfort sont prisonniers l'un de l'autre, où Jeanne de Montfort, — Jeanne la Flamme, — et Jeanne de Blois — Jeanne la Boiteuse, — revêtent la cuirasse et relèvent l'épée tombée des mains de leur mari, guerre atroce où le menu peuple de ceulx qui gaignent le bled est foulé par les féroces mercenaires des deux partis. Je me bornerai à résumer le rôle joué dans cette lutte par Vannes et les Vannetais.

Le roi de France, pour donner une sanction à l'arrêt des Pairs, se saisit de Montfort l'Amaury et envoie une armée assiéger Nantes, sous le commandement nominal de son fils Jean, duc de Normandie, le futur Jean le Bon, et sous la direction technique du connétable de France, Gautier VI de Brienne, duc d'Athènes. La plupart des grands seigneurs bretons, Rohan, Beaumanoir, Clisson, entre autres, se joignirent à l'armée française, tandis que la petite noblesse, plus nombreuse, et le peuple se rangeaient sous la bannière de Jean de Montfort.

Celui-ci, obligé de capituler dans Nantes, le 21 novembre 1341, se rendit, sur l'avis et avec un sauf-conduit du duc de Normandie, à Paris pour y demander au roi de s'entremettre entre lui et son rival ; Philippe de Valois ne tint aucun compte des promesses de son fils eT fit mettre le comte aux fers dans la Tour du Louvre.

A la nouvelle de cette violation du droit des gens, la comtesse de Montfort qui, nous dit Froissard, bien avoit cueur d'homme et de lion, rassembla ses principaux partisans au logis de la Motte, à Vannes, et leur présenta son fils Jean, âgé d'un an, en leur disant : Ha, seigneurs, ne vous desconfortez mie et ne vous esbahissez pour Monseigneur que nous avons perdu : ce n'estoit que ung seul homme. Véez ci mon petit enfant qui sera, si Dieu plaist, son restorier et vous fera du bien assez. Elle désigna pour garde et tuteur de cet enfant un des plus braves chevaliers de son temps, Amauri de Clisson et fit appel au roi d'Angleterre. Elle alla ensuite par toutes ses places ; y renforçant les garnisons et y semant le réconfort.

Elle se réfugia d'abord à Brest. L'hiver amena une trêve tacite, pendant laquelle le Conseil du roi imagina de reprendre l'étude du litige et demanda aux concurrents de confier au souverain le gage de la querelle, le duché de Bretagne. Jeanne fut sommée, dans l'église de Brest, à la grand'messe du dimanche de reminiscere, de remettre les places qu'elle avait en son pouvoir ; elle y consentit, sous la réserve de l'aveu de son mari : celui-ci, d'ailleurs, refusa de se prêter aux projets de spoliation du roi.

Au printenps, Charles de Blois s'empare de Rennes et marche sur Hennebont où réside la comtesse de Montfort ; la contesse, armée de corps et montée sur ung bon coursier chevaulchoit de rue en rue par la ville exhortant les gens a se bien défendre ; elle faisoit défaire les chaussées par les femmes de la ville, dames et aultre, afin de porter les pierres aux créneaux pour jetter aux ennemis et faisoit aussi apporter des bombardes et des pots pleins de chaux vive qu'on jettoit sur les assaillants. Incendiant à plusieurs reprises, dans ses sorties, les logements de Charles de Blois, elle prolongea la résistance jusqu'à l'arrivée du secours anglais amené par Gautier de Maulny. Laissant des troupes de blocus devant la place, Charles de Blois alla assiéger Auray, pendant que son lieutenant Louis d'Espagne bataillait par terre et par mer contre les partisans de Montfort. Après Auray, Vannes dut ouvrir ses portes, à la suite d'un rude assaut où les deux partis perdirent beaucoup de monde ; Geoffroi de Malestroit qui commandait la ville put se retirer à Hennebont avec la garnison.

Une seconde expédition anglaise dirigée par un transfuge, Robert d'Artois, du sang de France, aborda à Brest, le 18 août 1342, fit lever le siège de cette ville, échoua devant Morlaix, battit Charles de Blois à Lanmeur, alla menacer Nantes et vint mettre le siège devant Vannes défendue par Olivier de Clisson, Lohéac et Tournemine ; pendant ce blocus, les troupes mobiles anglaises ravageaient le pays, de la Roche-Bernard au Faouët ; les Vannetais, par d'heureuses sorties, réussissaient à leur reprendre une partie de leur butin. Un assaut général fut enfin tenté, sans succès d'ailleurs, sur les trois faces de la ville qui avait alors la forme d'un triangle aux angles arrondis, de la Porte Saint Patern à celle de Notre Dame, de celle-ci à la Porte Saint Salomon, à place des Lices et à la Tour Poudrière. Pendant que, harrassés par cette rude journée, les Vannetais prenaient un repos bien mérité, de grands feux s'allument au milieu de la nuit devant les portes Saint Patern et Notre Dame, et les assiégeants y poussent de grands cris comme si ils s'excitaient à un assaut. Réveillés en sursaut, la garnison et les habitants se précipitent, incomplètement armés et peu vêtus, aux points qu'ils croient menacés ; pendant ce temps, Gautier de Maulny escalade le mur, du côté opposé, et va ouvrir les autres portes où s'engouffre le reste de l'armée anglaise. La garnison et une partie de la population s'esquivèrent par une poterne, abandonnant la ville dans laquelle Jeanne de Flandre fit son entrée, le lendemain.

Pendant les réjouissances qui suivirent ce succès, Olivier de Clisson rallie les fuyards, reçoit des renforts et se représente devant Vannes, dix jours après l'avoir quittée. Robert d'Artois, laissant en ville quelques centaines d'hommes, se jette au devant des assaillants, mais il a le dessous et voit les portes de la ville se fermer derrière lui ; les Vannetais, et aussi, dit-on, les Vannetaises, viennent à bout de la faible garnison anglaise ; Robert d'Artois couvert de blessures se réfugie à Hennebont, près de la comtesse et y meurt, dans les derniers jours d'octobre 1342, trop belle mort pour un prince français au service de l'Angleterre, pour l'auteur principal de la guerre de Cent ans, Son corps fut emmené à Londres et y fut inhumé dans l'église des Frères prêcheurs.

Le roi d'Angleterre furieux de la mort de Robert d'Artois, jura de le venger. Il débarqua à Brest, le 30 octobre, et s'arrêta quelques jours au manoir du Rosier, près de Daoulas, feignant de ne s'occuper que de chasse et de fêtes, mais attendant et coordonnant les renseignements qui lui arrivaient de toutes parts. Enfin, il se mit en route, vers le 10 novembre, visant à la fois les trois principales places de la Bretagne : Vannes, Rennes et Nantes. Détachant sur Rennes le comte de Northampton, il vient camper à Grandchamp d'où il envoie Warwick et Norfolk sur Nantes et va mettre à Vannes le quatrième siège que cette malheureuse cité eut à soutenir la même année.

Louis de Poitiers, comte de Valentinois, défendait la ville et était bien muni d'armes et de vivres. Dès son arrivée, Edouard donna un assaut infructueux qui dura six heures : rebuté par une résistance à laquelle il ne s'attendait pas, il s'aperçut que le pays était trop ruiné pour nourrir son armée et, après une visite au siège de Rennes, il marcha sur Nantes où se tenait Charles de Blois. Il revint ensuite à Vannes ; la tradition locale place son campement sur la hauteur de la Garenne ; il y dressa tous les engins connus à cette époque pour battre les murailles. Fiers de tenir tête à toute l'armée anglaise et au roi, les Vannetais faisaient de fréquentes sorties et laissaient, par bravade, leurs portes ouvertes.

Le roi de France vint en personne au secours de la ville et le choc paraissait imminent quand deux Légats du Pape Clément VI, Pierre des Prés et Annibal de Ceccano, chargés d'accorder les deux souverains, arrivèrent à Vannes et ménagèrent, en janvier 1343, la trève de Malestroit qui mit fin à la première période de la guerre de Succession de Bretagne. Vannes fut, pour éviter au roi d'Angleterre la honte d'avoir assiégé une ville sans la prendre, remise entre les mains des cardinaux jusqu'à la fin de la suspension d'armes conclue jusqu'à la Saint-Michel 1346 ; les Anglais trouvèrent moyen d'y entrer dès 1343.

La trêve de Malestroit permit aux deux partis de prendre un peu de repos et de s'armer pour les luttes futures. Une vengeance de mari trompé livra au roi de France les noms des seigneurs bretons du parti de Blois qui avaient, plus ou moins ouvertement, conféré avec le roi d'Angleterre sur les moyens de rendre la paix à leur pays ; elle causa la mort de quinze des plus vaillantes épées de Bretagne et jeta dans le parti de Montfort les Clissons et les Harcourts. Le roi d'Angleterre libéra alors un de ses prisonniers, Hervé de Léon, en le chargeant de porter son défi au roi de France.

Charles de Blois rentra en campagne, en avril 1344, et débuta par la prise de Quimper. Jean de Montfort s'évadant de Paris, le 27 mars 1345, déguisé en marchand, passa en Angleterre demander justice au roi Edouard à qui il fit hommage, le 20 mai 1345 ; il revint ensuite en Bretagne, essaya de reprendre Quimper, échoua dans cette entreprise, se réfugia à Hennebont et y mourut, presque subitement, le 26 septembre 1345, après avoir, par un testament in extremis, confié la tutelle de son fils Jean à Edouard III. Son corps fut déposé à l'Abbaye de Sainte-Croix de Quimperlé et transporté ultérieurement aux Jacobins de la même ville, Sa veuve, l'héroïne d'Hennebont, tombée en démence, était internée en Angleterre et lui survécut 25 ans.

La mort de Jean de Montfort ne mit pas fin à la guerre : le roi d'Angleterre débarque à la Hougue ; traverse la Normandie, passe la Somme à Blanquetaque, bat le roi de France à Crécy, le 26 août 1346, et va mettre le siège devant Calais ; pendant ce temps, ses lieutenants prennent Carhaix, Guingamp et la Roche-Derrien. Charles de Blois essaie de reprendre cette dernière place, mais, le 18 juin 1347, il est battu et pris devant elle par Thomas Dagworth ; couvert de 17 blessures, il est hospitalisé à Vannes et, après un an de soins, va rejoindre le petit Jean de Montfort à la Tour de Londres.

Maître des deux compétiteurs, Edouard considère, dès lors, la Bretagne comme une mine à exploiter jusqu'à épuisement et ses lieutenants exécutent à la lettre ses instructions. Le célèbre combat des Trente, le 28 mars 1351, et la bataille de Mauron, le 14 août de la même année, ne sont que des épisodes de cette dévastation systématique ; la fin des hostilités eut été pour les Anglais un vrai désastre en tarissant la source de riches revenus.

Jeanne de Penthièvre découragée songea à traiter : elle rassembla à Dinan, en novembre 1351, ses partisans au nombre desquels figurait l'évêque de Vannes, Gautier de Saint Pern, qui avait abandonné son diocèse confié par le roi d'Angleterre à l'archidiacre Jean de Locminé. Elle proposa d'envoyer demander à Edouard III la mise en liberté de son mari, ou, tout au moins, le mariage de son fils Jean de Penthièvre, âgé de moins de sept ans, avec une des filles du roi, Marie ou Marguerite. Edouard consentit à cette union, bien que sa fille fut déjà fiancée à Jean de Montfort ; tout se préparait pour les noces, quand éclata la nouvelle que les partisans de Blois avaient, en dépit des trêves, surpris et massacré la garnison anglaise de l'île Tristan ; cet événement ramena le roi du côté de Montfort à qui il donna sa fille, mais ne l'empêcha pas d'autoriser Charles à passer sur le continent pour y réunir les sommes nécessaires au paiement de sa rançon, en mars 1353.

La lune de miel de Jean de Montfort ne fut pas de longue durée : trente semaines après son mariage, Marie d'Angleterre mourut et Jean, après avoir porté le deuil comme il convient, alla
se distraire de sa douleur en guerroyant en Bretagne auprès du comte de Lancastre, notamment aux sièges de Rennes et de Dinan où s'illustra le capitaine blésien Bertrand Duguesclin. En 1350, devenu majeur, il alla se faire reconnaître comme duc de Bretagne par son beau-père à qui il prêta serment de fidélité.

Le traité de Brétigny, 8 mai 1360, sembla ouvrir une ère de conciliation entre les deux partis, mais les pourparlers ne purent aboutir, et le roi d'Angleterre dut se résoudre à laisser Jean du Montfort revenir en Bretagne ; il ne le fit, du reste, qu'après en avoir obtenu les serments les plus solennels et les avantages les plus substantiels.

Tout le monde était fatigué de cette longue et sanglante querelle : Monfort, lui-même, tente, sur le point d'en venir aux mains avec son rival sur les landes d'Evran, un accord définitif ; il ne réclamait que le Sud de la Bretagne : Nantes, le pays de Vannes et Quimper avec la Cornouaille, abandonnant tout le reste du pays à Charles de Blois. Celui-ci, doué d'un caractère pacifique malgré ses grandes qualités militaires, n'eut pas mieux demandé que de souscrire à cette proposition, mais sa femme ne voulait rien entendre. Elle lui rappela que c'était d'elle qu'il tenait tous ses droits à la couronne de Bretagne et qu'il ne pouvait en abandonner la moindre parcelle sans son aveu, qu'elle refusait, d'ailleurs, à priori. Charles qui, semble-t-il, ne portait pas les chausses dans son ménage, s'inclina devant sa terrible épouse, éluda sa promesse de se rencontrer à Poitiers avec Jean devant le prince de Galles et les hostilités reprirent.

Jean de Montfort qui résidait à Vannes, était incommodé par les garnisons franco-bretonnes qui l'encerclaient : il chercha à se donner de l'air en enlevant, sans grande peine, la Roche-Periou et Sucinio et alla bloquer Auray défendu par un écuyer que Froissard nomme Henri de Hauternelle, et dont le port ouvrait aux assiégés la mer et ses ressources ; il y convoqua une flottille qui vint du Croisic sous le commandement de son Amiral de Bretagne, Nicolas Bouchart.

J'ai raconté ailleurs, la grande bataille qui eut lieu, le 29 septembre 1364, près d'Auray et qui mit fin à la guerre par la suppression d'un des concurrents, Charles de Blois. Les vaincus s'enfuirent, poursuivis par Clisson, jusqu'au delà de Vannes où le vainqueur fit son entrée et où il reçut l'hommage du sire de Malestroit et de l'abbé de Redon.

Après une aussi longue lutte, la Bretagne avait besoin de se reposer et de relever ses ruines : elle accepta le fait accompli et Jean de Montfort pour duc de Bretagne ; l'apanage des Penthièvre et trois places : Jugon, Dinan et Quimper qui, du reste, ne tardèrent pas à ouvrir leurs portes, firent seuls exception ; le 17 novembre, la résistance était terminée par une amnistie générale. Le roi de France avait, du reste, donné l'exemple en convoquant, dès le 3 novembre, Jean de Bretagne, comte de Montfort, à venir, avant le 24 juin 1365, lui faire hommage pour le duché de Bretagne, et son envoyé, le maréchal Jean Le Maingre de Boucicaut, proposait, avec Jeanne de Penthièvre, veuve de Charles de Blois, un arrangement sur les bases de la convention d'Evran.

La paix fut signée à Guérande, le samedi saint, 12 avril 1365 ; le roi reconnaissait Jean de Montfort pour duc de Bretagne ; Jeanne de Penthièvre renonçait, pour elle et pour ses enfants, à la couronne et consentait à faire hommage à son adversaire pour ses apanages bretons ; elle recevait en échange la vicomté de Limoges et une rente de 10000 livres ; la succession de Bretagne était réservée aux Penthièvres à l'extinction masculine des Montforts.

(E. Fonssagrives).

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