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LA CATHEDRALE DE VANNES

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L'église cathédrale de Vannes, dédiée à Saint-Pierre, a subi, depuis son origine jusqu'à nos jours, de nombreuses vicissitudes. Pour bien s'en rendre compte et pour mettre de l'ordre dans un si vaste sujet, il est nécessaire d'étudier d'abord la cathédrale primitive, puis la cathédrale romane, et enfin la cathédrale actuelle

CATHEDRALE PRIMITIVE

L'an 465, un concile provincial se réunit à Vannes, pour le sacre de saint Patern ; l'assemblée se tint dans l'église de Vannes, in Ecclesia Venetica. Voilà la première mention de notre cathédrale. Que cette église ait été d'abord un palais destiné aux réunions solennelles des citoyens, comme le dit Baillet, ou un temple consacré aux idoles avant de servir au vrai Dieu, comme le pense Bourassé, ou un édifice bâti exclusivement par les chrétiens et agrandi par saint Patern, comme l'insinue Albert Le Grand, il est impossible de le savoir aujourd'hui avec certitude.

Les anciens chanoines de Vannes inclinaient à croire que l'église avait succédé à un palais. Dans un aveu rendu au roi en 1640, ils « disent qu'ils trouvent en leurs vieux registres et légendaires que le duc de Bretaigne (!) donna à Sainct Patern, leur premier évesque, son pallays, où il fist bastir l'église cathédralle de Saint-Pierre, avecq les lieux adjassans,... ce qui fuct fait, comme ils croient, en l'an 465 ». Dans quel endroit de la ville s'élevait cette cathédrale primitive ? — C'était, suivant toutes les apparences, sur l'emplacement de la cathédrale actuelle : le respect que l'on a professé toujours et partout pour l'endroit sanctifié par l'autel primitif, le soin que l'on a mis partout et toujours à le préserver de tout usage profane, enfin l'absence de toute tradition locale en faveur d'un autre lieu, font admettre ce sentiment.

Cette église occupait le centre de la ville gallo-romaine, comme il est facile de s'en convaincre en examinant les restes des murs de cette époque. En suivant le mur gallo-romain du nord, qui longe la rue du Mené, en continuant le mur par le sud-ouest et le prolongeant directement jusqu'à la place des Lices, en prolongeant également en ligne droite le mur sud-est qui longe la rue des Vierges, on obtient un triangle régulier à pointes émoussées dont la cathédrale occupe à peu près le centre.

L'orientation de l'église n'est pas parfaite : son axe incline vers le nord-est, et cette légère déviation est due probablement à la direction de la rue Saint-Guenhaël et à la nécessité de réserver une place pour le cloître du côté du nord. 

Il ne reste absolument aucun débris de la cathédrale primitive de Vannes, et, pour s'en faire une idée approximative, il faut étudier les autres églises de la même époque, qui ont échappé, en partie, du moins, aux ravages du temps et des hommes. « Les premières églises chrétiennes, dit M. de Caumont dans son Abécédaire, ont été calquées sur les basiliques... A l'intérieur, deux rangs parallèles de colonnes ou de pilastres divisaient l'édifice en trois parties inégales dans le sens de la longueur... A l'extrémité de ces trois galeries, il y avait un espace peu profond, qui, comme dans nos tribunaux actuels, était réservé exclusivement aux avocats, aux greffiers et aux autres officiers de justice ; et qui se terminait par un enfoncement semi-circulaire, où s'asseyait le tribun ayant à ses côtés les juges assesseurs ». C'est au fond de cet hémicycle que se plaça l'Evêque, sur un siège élevé appelé cathedra, d'où vint la dénomination de cathédrale. Les prêtres se rangèrent des deux côtés, et cet espace semi-circulaire, appelé auparavant tribune, à cause du tribun, s'appela désormais  presbytère à cause des prêtres.

En face de l'Evêque se dressa l'autel, surmonté d'un baldaquin comme d'un diadème, et l'espace environnant s'appela le sanctuaire. En avant de l'autel, et quelquefois des deux côtés, se trouvait un espace réservé aux chantres et appelé pour cette raison le choeur. Le choeur était séparé des nefs par des balustrades, septa, et confinait à une ou deux chaires, appelées ambons, plus tard jubés, et destinées au chant de l'Epître et de l'Evangile.

Les nefs ou galeries étaient occupées par les fidèles : le côté droit était réservé aux hommes et le côté gauche aux femmes ; les pénitents et les catéchumènes avaient un lieu spécial du bas de l'église, et souvent dans un cloître extérieur appelé atrium et parvis.

Lorsque saint Patern prit le gouvernement de l'église de Vannes, la discipline ecclésiastique et l'usage exigeaient que l'Evêque vécut en communauté avec ses prêtres, ses diacres, et les jeunes clercs élevés sous ses yeux. La maison commune, qui servait ainsi d'évêché, de chapitre, de presbytère et de séminaire, touchait presque toujours à la cathédrale et avait pour dépendance une cour entourée d'un cloître. On peut citer, comme exemples, les palais épiscopaux de Quimper, de Léon, de Tréguier, de Nantes, etc... qui touchent à l'église. Il en fut probablement de même à Vannes, à l'origine. La cathédrale étant circonscrite par des rues ou des places au sud, à l'est et à l'ouest, n'a de terrain libre qu'au nord ; dans cette partie la place du cloître est parfaitement connue ; et l'espace situé entre le cloître et la place Henri IV, entre la rue des Chanoines et le clocher, pourrait très bien avoir été primitivement occupé par la demeure des premiers Evêques de Vannes.

Le cloître servait alors, comme il a servi depuis, de cimetière. On n'enterrait pas encore les simples fidèles dans l'église. Un concile de Nantes, tenu vers 658, s'exprime ainsi : « Il est défendu, suivant les usages anciens, d'enterrer qui que ce soit dans l'église ; l'inhumation doit se faire dans le portique, ou dans le parvis, ou autour de l'église, mais jamais dans l'église même, ou proche de l'autel » (Dom Morice.  Pr. I. 216).

Il paraît toutefois qu'il y avait exception pour les Evêques, car, en 666, quand l'Evêque de Vannes, saint Mériadec, mourut, il fut enterré dans sa cathédrale, et son tombeau fut longtemps illustré par des miracles. L'un de ses successeurs, saint Gobrien, mort vers 725, fut aussi inhumé, non dans l'église cathédrale, puisqu'il n'était plus à Vannes, mais dans une chapelle de Saint-Servan, où il s'était retiré pour vivre dans la solitude.

Vers l'an 800, Charlemagne fit recevoir à Vannes la liturgie romaine. Cette liturgie, légèrement modifiée dans le cours des siècles et augmentée de quelques offices locaux, se maintint jusqu'en 1613, où une nouvelle édition de la liturgie romaine fut reçue à la cathédrale. En 1783, elle fut remplacée par la liturgie parisienne, mais en 1849, elle a repris le rang qui lui appartenait.

En 854, les Normands s'emparèrent du comte Pasqueten et de l'Evêque Courantgen, mais rien ne prouve qu'ils aient pris Vannes, ni incendié la cathédrale, comme quelques auteurs l'ont dit ; et même un acte du Cartulaire de Redon nous montre le roi Erispoé tranquillement logé au palais épiscopal pendant la captivité passagère de l'Evêque : factum in Veneti civitate, in solario Episcopi, Normandis ipsum Episcopum captivum tenentibus. (Cart. p. 369).

Le roi de Bretagne, Alain I le Grand, étant mort en 907, les Normands envahirent de nouveau le pays, et mirent tout à feu et à sang.  Les ravages furent effroyables, surtout à partir de 919 ; les populations épouvantées s'enfuirent au loin, emportant les reliques des saints et les objets du culte. La cathédrale de Nantes fut brûlée, et c'est alors que celle de Vannes subit le même sort.

Les ennemis, par leur présence, empêchèrent longtemps de relever les ruines accumulées. Enfin ils furent chassés en 937 par Alain II Barbetorte, et l'Evêque de Vannes, qui était alors Blenlivet, dut commencer la réparation de son église. Mais on s'aperçut bientôt que tout, ou presque tout était à refaire. Cette oeuvre fut entreprise, au commencement du XIème siècle, par l'Evêque Judicael, frère du duc Geoffroy I, que sa position de famille mettait à même plus que tout autre de mener à bonne fin. D'ailleurs, aux terreurs de l'an mille, venait de succéder une activité prodigieuse, qui se manifesta par la construction de nombreuses églises.

 

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II.  CATHEDRALE ROMANE

On a souvent comparé l'ancien choeur de la cathédrale de Vannes avec le chœur de l'église de Saint-Gildas de Rhuys, et à cause de leur ressemblance on les a rapportés à la même époque. Or, l'église de Saint-Gildas a été commencée en 1025 et consacrée en 1032 ; la cathédrale de Vannes, au moins dans sa partie supérieure, est donc aussi de la même époque, et remonte à l'Evêque Judicael, qui siégea de 991 à. 1037. Le choeur, qui a subsisté jusqu'en 1770, est ainsi décrit par l'architecte Kerleau en 1769 : « Le haut de la croix, au dessus des bras, a 40 pieds de longueur, et est un reste de la très-ancienne primitive église, plus étroit que les bras de la croix, et est entouré de plusieurs piliers antiques et gotiques, qui soutiennent une voûte d'areste en cul de four, de plus de quinze pieds plus basse que la voûte de la nef et de la croix » (Archives départementales, G, Chapitre).

La voûte actuelle ayant environ 63 pieds au-dessus du pavé, la voûte ancienne du choeur n'avait que 48 pieds. Les piliers antiques et gothiques, dont parle l'architecte, étaient simplement des piliers romans, et un autre texte nous apprend qu'ils étaient au nombre de huit. Ce choeur était entouré, comme celui d'aujourd'hui, d'une allée déambulatoire, et il avait de plus, comme Saint-Gildas de Rhuys, trois chapelles rayonnantes.

La chapelle du fond était dédiée à la Sainte Vierge, sous le titre de Notre-Dame de Pitié. En 1323 elle renfermait l'autel du Saint-Sacrement et était le siège de la confrérie de ce nom ; plusieurs chapellenies y furent même fondées. Vers 1436 l'Evêque Jean de Saint-Léon la fit réparer et refit la voûte, et à sa mort, en 1448, il fut enterré dans cette chapelle du côté du nord. Plus tard, deux autres Evêques, Jean de la Haye en 1574 et Louis de la Haye en 1588, furent inhumés l'un près de l'autre du côté du sud. Rien ne signale aujourd'hui ces sépultures. La chapelle de Notre-Dame de Pitié, ouverte par le fond pour donner accès à la chapelle de saint Vincent Ferrier, fut démolie en 1770, en même temps que le choeur, et relevée peu après dans la forme allongée qu'elle présente aujourd'hui. Il n'y a plus d'autel ; on voit encore à gauche, sous une arcade, la statué de Notre-Dame de Pitié.

La chapelle rayonnante du côté du Nord était dédiée à saint André, apôtre. La cathédrale possédait, depuis l'an 1200 environ, quelques reliques du bras et de la croix de ce saint. On est tenté de croire que la chapelle de Saint-André a renfermé jadis la statue de saint Louis roi de France, car Olivier de Bois-Moraud choisit, en 1337, sa sépulture à Saint-Pierre, entre l'autel du Saint-Sacrement et l'autel Saint-Louis. Dans tous les cas, saint Louis eut plus tard une chapelle spéciale dans la nef. On trouve dès 1461 une chapellenie de Saint-André ; une autre du même nom y fut fondée en 1631. Le pavé était formé des tombes de plusieurs chanoines qui y avaient été inhumés. En 1770 la chapelle de Saint-André fut démolie avec l'ancien choeur ; son emplacement est resté en dehors de l'église actuelle.

La chapelle rayonnante du côté du sud était dédiée à sainte Anne. L'aïeule de Jésus-Christ a toujours été honorée d'une manière spéciale à Vannes, bien qu'on n'y possédât aucune de ses reliques. C'est dans cette chapelle que fut enterré, en 1687, le corps de Mgr Louis Casset de Vautorte, Evêque de Vannes, à côté de sa soeur Mme de Luigné et de son neveu Henri sgr. de Luigné. Le cercueil en plomb de l'Evêque portait l'inscription : Louis Cazet de Vautort, Evesque de Vennes, mourut à Vennes le 13 du moys de décembre 1687. La même inscription était reproduite en latin. La chapelle de Sainte-Anne ayant été démolie en 1770, les cercueils en furent retirés l'année suivante, pour être inhumés dans la chapelle de Saint-Vincent, et le nom de Sainte-Anne fut transféré à une chapelle de la nef. L'emplacement de cette chapelle est en dehors du choeur actuel ; il en reste encore quelques vestiges entre la sacristie et le vestiaire : ce sont les seules et dernières traces de la cathédrale romane.

L'autel majeur était au fond du sanctuaire, à l'endroit où se trouvent aujourd'hui les stalles de l'Evêque et des chanoines. C'est la disposition conservée jusqu'à la fin du XIXème siècle dans le choeur roman de Saint-Gildas de Rhuys, et cette disposition permettait au clergé et au peuple à la fois de suivre tous les mouvements du prêtre à l'autel. La sainte Eucharistie y était conservée, non dans un tabernacle, qui est une invention moderne, mais dans une custode, suspendue à une sorte de crosse au moyen d'une poulie et d'une cordelette. Cet usage a subsisté chez nous jusqu'en 1770 ; les inventaires et les comptes de fabrique mentionnent souvent cette suspension, ainsi que le renouvellement des cordes servant à hisser le saint Ciboire. On peut encore voir à la fin du XIXème siècle des crosses eucharistiques à Saint-Pol-de-Léon, à Dol, etc...

Au dessus de l'autel majeur s'élevait, conformément au cérémonial, un ciel ou dais, suspendu par des cordes. Ainsi, dans les comptes de 1606, on trouve : « Pour le ciel neuf qui est sur le grand autel, 152 livres 11 sol ». En 1628 : « Pour quatorze livres de fin chanfvre, pour servir à suspendre le ciel au dessus du grand autel, et à hausser et dessandre le saint ciboire avecq la poullie, 2 liv. 8 sols ».

Au maître-autel était adossé un autel appelé parfois Sancta Sanctorum, et où se desservait la chapellenie de Notre-Dame d'Averdon. C'est au-dessus de cet autel qu'on conservait une châsse pleine de reliques, données à la cathédrale, vers l'an 1200, par Guéhenoc, évêque de Vannes, et appelées Corpora Sanctorum. Cette châsse se composait d'un coffret en bois peint et d'une enveloppe en argent doré. L'argent ayant été retiré en 1771, le coffret reparut avec ses peintures primitives ; il est conservé, à la fin du XIXème siècle, dans la salle du chapitre. Ses surfaces extérieures sont recouvertes de feuilles de parchemin sur lesquelles un artiste du XIIème siècle a peint des scènes de guerre, de chasse, et d'intérieur avec une fidélité scrupuleuse pour les costumes. Ce petit meuble, destiné primitivement à un château et appelé peut-être à renfermer des parures de prix, fut converti en reliquaire vers 1200 ; il conserve encore presque toutes les reliques qui y furent alors déposées, ainsi que les étiquettes en écriture de la même époque.

En deça du maître-autel, du côté de l'Epître, s'élevait le trône de l'Evêque, adossé au gros pilier qui séparait le sanctuaire du chœur proprement dit. Cette chaire épiscopale est mentionnée en 1453, comme ayant été nouvellement refaite. En 1665, le trône pontifical était toujours à la même place, et une balustrade le séparait du choeur ; il fut refait à cette époque et coûta 350 livres ; il avait douze pieds de hauteur sur sept pieds de largeur.

En face du trône épiscopal, non loin du pilier du nord, avait été inhumé, le 7 avril 1419, le corps de saint Vincent Ferrier, missionnaire de l'ordre des Dominicains. Son tombeau se composait extérieurement d'une grande dalle en pierre, portant quatre petits piliers, qui soutenaient une seconde dalle en pierre : le tout de couleur jaune. Devant ce tombeau, et probablement auprès du pilier, le duc Jean V avait fait célébrer sur un petit autel des messes en l'honneur du Saint, dès l'an 1419 : l'Eglise n'avait point encore défendu de prévenir ainsi son jugement. La duchesse de Bretagne, Jeanne de France, étant morte en 1433, fut enterrée dans le choeur de la cathédrale, auprès de saint Vincent, et le duc Jean V, son époux, fonda pour elle, en 1438, une messe quotidienne à chanter sur le même autel de Saint-Vincent.

L'illustre missionnaire ayant été canonisé le 29 juin 1455, son tombeau fut ouvert l'année suivante, et ses ossements levés de terre furent renfermés dans une châsse fermant à trois clés. Le lieu de sa sépulture fut réparé et enrichi de quelques-unes de ses reliques, notamment d'une vertèbre et des débris de ses vêtements. Pour y accéder, sans troubler l'office, on creusa bientôt sous le choeur un passage souterrain allant d'un transept à l'autre, et on l'agrandit plus tard de manière à former une petite crypte. Le caveau funéraire renfermait le cercueil du Saint et deux tableaux représentant l'un Jésus-Christ et l'autre saint Vincent ; une grille en fermait l'entrée.

En 1648, le tombeau de saint Vincent fut refait en forme d'autel, en marbre rouge et noir, et laissé dans sa chapelle souterraine. On y grava l'inscription suivante : ANNO SALUTIS 1648, HOC MONUMENTUM STI — VINCENTII BENEFICIO ET MUNIFICENTIA ILLUSmi D. — SEBASTIANI DE ROSMADEC NUPER DEFUNCTI EPISCOPI — VENETENSIS MARMOREUM POSITUM FUIT, SEDENTIBUS — INNOCENTIO DECIMO SUMMO PONTIFICE, ET ILLUSme. D. — DOMINO CAROLO DE ROSMADEC, EJUSDEM — VENETENSIS DIOECESIS PRÆSULE.

En 1775 le tombeau de saint Vincent fut retiré de la crypte, avec ses reliques, pour être placé dans le transept nord, et devenir accessible à tout le monde. On utilisa les matériaux anciens et notamment la plaque de marbre portant l'inscription ci-dessus ; on ajouta sur une autre plaque l'inscription suivante : ANNO 1777, MONUMENTUM HOC PRIUS IN SACELLO — SUB CHORO HUJUS ECCLESIÆ CONSTRUCTO POSITUM, — AD Sti VINCENTII DECENTIOREM CULTUM IN HACCE PARTE — SUMPTIBUS CAPITULI VENETENSIS RESTITUTUM FUIT, — SEDENTE ILLUSTRISSIMO AC REVERENDISSIMO — D. D. SEBASTIANO MICHAELE AMELOT, — VENETENSI EPISCOPO. Ce tombeau renferme, comme les précédents, une vertèbre du Saint, avec les restes de ses vêtements, de ses viscères et de son cercueil.

Outre la duchesse Jeanne de France, Isabeau d'Ecosse, veuve du duc François Ier, fut aussi inhumée dans le choeur de la cathédrale, auprès de ladite Jeanne sa belle-mère. Dès 1494, cette princesse avait fondé pour elle et les siens une messe quotidienne, qui devait se chanter à un second autel de saint Vincent, adossé au pilier sud du choeur, auprès du trône pontifical. Le nivellement du pavé du choeur a fait disparaître la trace de ces tombes princières, et la Révolution a emporté les fondations.

Les deux petits autels du choeur servaient, non seulement pour la messe, mais encore pour les grandes cérémonies. Ainsi un cérémonial, rédigé en 1451 par l'évêque Yves de Pontsal, dit qu'aux jours de fêtes solennelles, le pontife doit encenser le maître-autel, et qu'ensuite deux chanoines doivent encenser les deux petits autels, puis sortir du choeur par les portes latérales et y rentrer par la grande porte du côté de la nef, afin d'encenser le clergé.

Le choeur proprement dit, c'est-à-dire le lieu où les chanoines et leurs auxiliaires chantaient l'office quotidien, était limité par les quatre grands piliers de l'inter-transept. Les piliers actuels occupent exactement la place des anciens, et donnent par conséquent la mesure de l'ancien choeur roman. Deux rangées de stalles hautes et basses bordaient les deux côtés du choeur. Du côté de l'Epitre, on voyait se succéder, en allant de la nef vers le santuaire, les sièges de l'Evêque, du Trésorier, du Scolastique, des Chanoines et des Prêtres ; du côté de l'Evangile, on rencontrait dans le même ordre les sièges de l'Archidiacre, du Chantre, des Chanoines et des Prêtres. Les simples chantres ou choristes, les musiciens et autres employés non prêtres occupaient les stalles basses, et c'est de cette circonstance que leur est venue l'appellation commune d'officiers du bas-choeur.

A l'extrémité du choeur, vers le sanctuaire, il y avait deux aigles ou deux lutrins : on y chantait les leçons, les antiennes, les introïts, et même les Epitres et les Evangiles. Un compte de fabrique de 1485 porte ce qui suit : « Pour avoir mis une bende de fer au pelpitre, et avoir abillé le pyé dudit pelpitre et l'eigle de boays où ce dit l'Evangile, 1 sol 3 deniers ».

Les livres étaient rares avant l'invention de l'imprimerie, on avait soin de les attacher au choeur, au moyen de petites chaînes. Ainsi on trouve dans un compte de 1475 : « Poyé pour avoir relié et couvert de neuff, tant de planches que de peau de biche ungn livre estant au cuer du costé de l'Evangile, 9 sols, et pour atacher le dit livre en son lieu o sa chaîne de fer, 6 deniers ». — En 1483 : « Pour deux chainnes des livres estans au cueur, 11 deniers ». En 1492 : « Pour chaynne de fer, quelle fut mise à ung psaultier du cueur, 6 sols 8 deniers ». Outre les livres liturgiques, il y avait aussi des livres de piété, pour faire des lectures spirituelles, en dehors de l'office. Ainsi le compte de 1483 mentionne le Rationale divinorum officiorum de Guillaume Durand, et le « Pastorale Gregorii estant devant la chaere de l'Evesque dedans le cueur ».

Le choeur était fermé des deux côtés par une boiserie, et en avant, du côté de la nef, par une grille ou un treillis, surmonté d'un jubé. Voici comment s'exprime un compte de 1493 : « Poié à deux charpentiers pour meptre le boays de la closture du chanseau, 6 sols 8 deniers...  Item pour meptre l'uys (porte) et le boays du létrin, 35 sols 10 deniers... Item pour tiller ledit letrin, 8 sols 9 deniers » ; et le compte de 1494 : « Pour avoir painct le devant du lectrin, 50 sols... Item pour abiller ung bout du létrin, où est l'image saint Jacques, 1 sol 8 deniers »

Les quatre gros piliers du choeur se réunissaient à leur sommet pour former des arcs en plein cintre et soutenir un clocher, qui s'élevait majestueusement au-dessus du toit de l'église. Cette disposition du clocher au milieu de la croix formée par l'église, ou, si l'on aime mieux, au-dessus de l'inter-transept, était assez fréquente dans le style roman. Il ne nous est resté aucune description de cette tour centrale, mais les comptes de fabrique la mentionnent plusieurs fois. Ainsi, en 1483, il est question de « l'huys qui est mis amont là où l'on vayt au clocher sur le cueur » ; en 1486, payé « pour quatre cordes ès cloches du cueur, 3 liv. 2 sous, 6 deniers ». Ce clocher fut démoli avec l'inter-transept en 1516.

De chaque côté du choeur se trouvait un transept, comme aujourd'hui. Aucune description ne nous en est parvenue, mais il est facile d'y suppléer, puisque le transept nord de Saint-Gildas de Rhuys existe encore. Leur forme était rectangulaire, avec un grand portail à chaque extrémité, une grande fenêtre au-dessus et un pignon triangulaire. La porte du sud était la porte des Ducs, et celle du Nord la porte des Chanoines ; quoique se faisant face, elles ne nuisaient aucunement au choeur, parce que celui-ci était fermé par une boiserie.

Les autels des transepts étaient, suivant toutes les probabilités, placés dans un enfoncement ménagé du côté de l'Est. Celui du Sud était dédié à saint Guenhael, abbé de Landevenec, et tout auprès se voyait son tombeau ; le chef et les reliques du Saint étaient conservés à la sacristie. Celui du Nord était dédié, paraît-il, à saint Jean l'Evangéliste, puis à saint Barthélemy, et, au moment de la démolition, à tous les Saints. Ces deux transepts menaçant ruine furent démolis, celui du sud en 1504, et celui du nord en 1517.

Au-dessus des bras de la croix, se trouvaient deux édifices accessoires.  Celui du Sud servait à la fois de Chapitre et de Sacristie ; un acte de fondation fut dressé, en 1411, « dans la sacristie, où se tient habituellement le chapitre de l'église » ; un acte de 1455 désigne le même local sous le nom de Vestiaire, qu'il porte encore aujourd'hui. L'édifice correspondant, du côté du nord, servait probablement de décharge ; peut-être aussi faudrait-il y chercher ce que les comptes appellent la Librairie ou la bibliothèque : en 1483 des ouvriers sont occupés « à couvrir sur la grande église, sur le cocher et sur la librayrie » ; en 1475 on trouve « ungn panneau de verre, réparé en plein neuff, avecques les armes de Révérend Père en Dieu (Yves de Ponsal), estant à la librayrie ».

Quant à la nef romane, nous savons qu'elle s'étendait depuis les gros piliers du choeur jusque vers le portail actuel ; nous savons en outre qu'elle était moins large que la nef actuelle, et que la chapelle moderne des fonts détermine sa largeur probable ; nous savons enfin que deux rangées de colonnes, faisant suite aux piliers du choeur, se prolongeaient jusqu'au portail. On n'avait pas encore, au XIème siècle, l'idée de couper les nefs latérales par des murs, afin de faire des chapelles ; on laissait la circulation libre et les autels joignaient le mur longitudinal. A cette époque la nef principale était habituellement précédée d'un porche ou narthex, souvenir de l'ancien parvis ou de l'atrium.

Les autels de cette partie de l'église ne sont connus que d'une manière incomplète. Voici néanmoins quelques données positives. Au gros pilier du choeur, du côté de l'Evangile, était adossé l'autel du Crucifix, appelé plus tard l'autel de Sainte-Croix, et aujourd'hui de Saint-Pierre. Quand les chanoines cessèrent d'administrer la paroisse et la confièrent un Vicaire, il lui cédèrent l'usage de cet autel, pour y dire la messe paroissiale : ce qui a été observé jusqu'à la Révolution française.

Au pilier correspondant, du côté de l'Epître, était adossé l'autel de Saint-Jacques, surnommé le Majeur, frère de saint Jean l'Evangéliste et décapité par le roi Hérode-Agrippa ; ses reliques sont honorées à Compostelle, et sa fête se célèbre le 25 juillet. Aujourd'hui cet autel est dédié à saint Paul.

Le long du mur du sud, il y avait une série d'autels, dont le plus près du choeur était dédié à saint Patern, évêque de Vannes, le second à saint Thuriau, évêque de Dol, le dernier à saint Gatien, évêque de Tours.

Le long du mur du nord, il y avait une autre série d'autels, dont le plus rapproché du portail était dédié à La Trinité et à saint Michel, et le plus voisin du choeur à saint Sauveur, puis à saint Yves.

On ne sait trop ou placer les autels de saint Hilaire, de saint Nicolas, de sainte Marie-Madeleine, etc.. mentionnés dans les anciens documents. Du reste plusieurs de ces appellations furent graduellement modifiées, soit par l'adjonction, soit, par la substitution d'un nouveau titulaire. On en verra le détail plus loin, à propos des chapelles de la cathédrale actuelle.

Les sépultures, si rares auparavant dans les églises, devinrent bientôt nombreuses. A la suite des Evêques, les chanoines, puis les simples prêtres demandèrent un lieu de repos dans le temple du Seigneur. Les laïcs se contentaient encore du cloître et du parvis au XIème siècle ; mais bientôt ils envahirent la nef et les chapelles. A Vannes, un document de 1387 mentionne parmi les sépultures laïques celles d'Azelice Moquet, d'Olivier de Kereveno, de Petronille Maydo, de Thomelin Maydo, d'Olivier Joy, d'Amicie de Bréhegay femme de Bonabes de Callac, de Jean Guillouic, de Baudet Le Fauconnier, etc... La coutume était établie, et elle se maintint dans les siècles suivants jusque vers la Révolution française.

Mais déjà la cathédrale romane avait subi une modification considérable au portail, par la construction des tours : c'était l'introduction d'un nouveau style d'architecture et le commencement d'une nouvelle église.

 

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III. CATHÉDRALE ACTUELLE

La Cathédrale actuelle de Vannes est loin d'être l'oeuvre d'un seul architecte et d'une seule époque : elle a été construite par parties, au fur et à mesure de la ruine de l'église romane. Pour en donner une idée d'ensemble, il suffit de dire que la tour est du XIIIème siècle, la nef du XVème, le transept du XVIème, le choeur du XVIIIème et le portail du XIXème. C'est ainsi que presque tous les siècles y ont laissé leur empreinte, aux dépens de l'unité de style. Néanmoins chaque partie mérite une étude spéciale, et nous allons l'entreprendre en suivant l'ordre chronologique. 

§ I. — Tours.

La tour principale, située au nord du portail, remonte au XIIIème siècle : les caractères seuls de l'architecture suffisent pour justifier cette date. La base carrée n'offre que des faces unies, percées de longues et étroites fenêtres à lancettes. Le premier étage est orné de colonnettes toriques, saillantes aux deux tiers, et surmontées de trois arcatures ogivales ; au-dessus s'ouvrent deux fenêtres terminées en plein-cintre ; le dernier étage, où se trouvent les cloches, offre trois fenêtres ogivales entre deux arcatures.

Ce mélange du cintre et de l'ogive caractérise l'époque de la transition, c'est-à-dire le commencement du XIIIème siècle ; et s'il était permis de hasarder un nom, on pourrait rapporter ce travail à l'épiscopat de Guéhénoc, qui mourut en 1222.

Cette tour était couronnée par une flèche pyramidale octogone, d'une grande élévation. Cette flèche était endommagée en 1536, et voici comment Jelian Chevadec, maître-maçon, en parle dans une enquête juridique : « Dict que pour meptre le dict clocher en seurté il conviendroit l'abaptre jusques à environ la carrée, où sont les guarites, et abaptre et démollir les quatre fillettes et petites tourelles, qui sont au cerne du grant aguillon d'icely clocher. Interrogé quant piéz ou quantes toyses il fauldroit abaptre d'iceluy clocher, répond ne le scavoir, à raison  qu'il ne a mesuré, bien dict luy semble que entre la plate-forme où sont les guarites jusques à la poincte d'iceluy clocher y povoit avoir soixante et dix piéz ou environ, et dict ne scavoir au vray qu'il couteroit à démollir et rédiffier le dict clocher, bien dict que pour la difficulté du lieu et la cherté des atraiz lui semble que celuy qui seroit feuratier (entrepreneur) de ce faire pour deux mille livres monnoye, seroit aultant en dangier de perdre que de gaigner ».

Malgré cet avis, la flèche ne fut pas démolie ; elle fut seulement réparée avec soin, et elle a subsisté jusqu'au 18 février 1824, où elle fut renversée par la foudre. La flèche actuelle, reconstruite en 1824 et 1825, sur les plans de M. Brunet-Debaines, architecte, est sans élégance ; elle est octogone, comme l'ancienne, avec de simples cordons de pierres aux angles et quatre petits clochetons à sa base ; elle est beaucoup moins élevée que l'ancienne, et c'est son principal défaut.

A l'angle sud du portail s'élevait une tourelle, bâtie sur le même plan que la tour principale, mais plus étroite. Sa base était carrée et unie, son premier étage décoré de deux arcatures ogivales ; au-dessus se voyait une sorte de lanterne octogonale, surmontée d'une petite pyramide. C'était la tour de l'horloge. Elle était massive jusqu'aux deux tiers de sa hauteur, et on n'accédait à la partie supérieure que par un escalier placé dans l'épaisseur du pignon.

Cette tourelle a été démolie en 1863 et 1867, et remplacée par une construction qui trouvera son histoire à sa place chronologique. Ces deux tours, accolées à l'église romane, servirent plus tard de base, pour les proportions à donner, en largeur et en hauteur, à la nef du XVème siècle, ainsi qu'à la façade qui les unit.

Le XIVème siècle n'a laissé aucune trace dans la cathédrale actuelle. Mais à côté de l'église, entre le choeur et la rue des Chanoines, s'éleva la chapelle de saint Jean-Baptiste. Bâtie en 1310 par Jean de Bois-Hélio, chanoine et archidiacre, elle servit spécialement de baptistère pour la paroisse de Saint-Pierre. Elle était de forme rectangulaire, et mesurait environ 19 mètres de longueur sur sept mètres de largeur. En 1379, Jean Le Taillandier, chanoine, y fonda la chapellenie de saint Jean-Baptiste, à raison de trois messes par semaine.

Dès 1438 la chapelle saint Jean était en ruine, et le Chapitre permit à Pierre Le Fauchour, vicaire de la paroisse, de la rebâtir sur les mêmes fondements, en lui abandonnant la jouissance viagère des oblations qui s'y faisaient. C'est dans cette chapelle que fut inhumé, en 1598, en face de l'autel, en entrant dans le choeur, le corps de Mgr Georges d'Arradon, évêque de Vannes.

En 1768, quand il fut question de voûter l'Eglise, le Chapitre céda à la paroisse l'usage des fonts situés dans la chapelle de la Trinité, à gauche en entrant dans la cathédrale, et abandonna la chapelle de saint Jean pour servir d'abri aux ouvriers. Depuis cette époque ladite chapelle n'a plus servi au culte, et elle a été démolie en 1856.

§. II. — Nef.

Au commencement du XVème siècle, la cathédrale romane était grandement endommagée, au moins dans quelques-unes de ses parties, et l'on prévoyait comme peu éloignée l'époque où l'on serait obligé d'y faire des travaux considérables.

Saint Vincent Ferrier étant mort à Vannes, le 5 avril 1419, et ayant été inhumé dans le choeur de l'église Saint-Pierre, des offrandes nombreuses affluèrent aussitôt à son tombeau. Dès le 30 octobre de la même année, l'évêque Amaury de la Motte et le Chapitre s'entendirent pour appliquer le tiers de ces oblations à restaurer l'église et à la préserver ainsi d'une « ruine imminente ».

Grâce à ces ressources, l'évêque Jean de Saint-Léon put refaire, vers 1436, le vestiaire et la salle capitulaire, ainsi que la voûte de la chapelle de Notre-Dame de Pitié, derrière le choeur.

Mais ce s'était là qu'un travail accessoire, et il fallait songer à rebâtir la nef, qui menaçait ruine. L'évêque Yves de Pontsal, de concert avec le Chapitre, entreprit cette oeuvre. Il fut arrêté que le nouveau bâtiment serait plus large et plus haut que l'ancien ; que les bas-côtés s'aligneraient sur le grand clocher ; que cinq chapelles se suivraient de chaque côté, séparées par des murs ; et que la façade s'harmoniserait avec les tours. D'après ce plan, la nef devait avoir une longueur de 132 pieds et une largeur de 42 pieds, et chaque chapelle une profondeur de 46 pieds.

Pour augmenter les ressources locales, l'Evêque et le Chapitre obtinrent du pape Nicolas V, le 20 septembre 1451, une bulle accordant, pendant dix années, une indulgence plénière à ceux qui visiteraient la Cathédrale, le jour de la fête de saint Pierre et de saint Paul, et y feraient une aumône pour les travaux de l'église. Dès 1452 et 1453, les fidèles vinrent en foule visiter le temple du Seigneur, comme le prouve l'enquête concernant saint Vincent Ferrier.

Les travaux commencèrent aussitôt. 

Le 15 mai 1455, le pape Calixte III suspendit toutes les indulgences particulières, en faveur de la croisade contre les Turcs, qui venaient de s'emparer de Constantinople et qui menaçaient l'Europe entière. A cette époque, « l'Evêque et le Chapitre de Vannes avaient avancé leur oeuvre, et fait élever une grande partie des piliers ;... la nef de l'église était entièrement découverte, .. et l'on se proposait de refaire le cloître... et vingt années de travaux pour le moins paraissaient nécessaires... »

Pour y aider, le même Calixte III accorda, le 23 juillet 1455, la prorogation de l'indulgence de la saint Pierre, pour dix autres années, après l'expiration des dix premières : comme il n'y avait eu encore que trois années d'utilisées, c'était une réserve de 17 ans à valoir après la croisade.

Sur ces entrefaites, le 29 juin 1455, saint Vincent Ferrier fut solennellement canonisé ; son corps fut levé de terre le 5 avril 1456, et une nouvelle bulle du 27 mai 1458 accorda, pour le jour de sa fête, une indulgence partielle ceux qui visiteraient la cathédrale et y feraient une aumône.

Le 6 mars 1459 (N. S. 1460), le pape Pie II leva la suspense imposée par la croisade, et permit à l'église de Vannes de jouir des 17 années d'indulgences accordées par ses prédécesseurs, mais à la condition de réserver un tiers des offrandes pour la guerre contre les Turcs. Les travaux, qui n'avaient pas été interrompus, reçurent dés lors une nouvelle impulsion.

Pour élargir l'église, le Chapitre avait dû acquérir quelques maisons touchant à l'ancien bâtiment, du côté du sud ; il y avait employé la somme de cinq cents écus. Le duc de Bretagne François II, pour contribuer à la bonne oeuvre et pour compter parmi les bienfaiteurs de l'église, fit gracieusement la remise des droits de lods et ventes qui lui étaient dus, suivant un acte du 25 mars 1473 (N. S. 1474).

Un compte de fabrique de 1475 fournit quelques détails intéressants : « Et est à savoir que Jehan Guével, maistre du dit eupvre, doit avoir par chacun jour qu'il fait besoigne, 5 sols ; et chacun des aultres taillours doit avoir 3 sols 4 deniers, jucques à la feste de Touz Saintz ; ensuite est rabattu a chacun d'eux dix deniers par jour ». La dépense monte encore pour l'année à 308 livres 10 sols 10 deniers ; et pour les servants des maçons à 17 livres 15 sols 3 deniers. L'extraction et le charroi des pierres de Kerhuel en Saint-Nolff, et de Saint-Mathieu en Treffléan atteignent le chiffre de 54 1ivres 10 sols 5 deniers : quelques pierres provenaient de Sérent et d'autres du Colledo en Guéhenno.

Les cinq chapelles du côté du nord paraissent avoir été terminées les premières ; on achevait en 1475 celles du côté du sud. Ainsi l'avant dernière chapelle, en allant vers le portail, fut voûtée en pierres et pavée en tuiles vernies, cette même année 1475. La chapelle suivante, « prochaine de l'orloge », reçut à la même époque son carrelage en tuiles ; elle est plus petite que les autres chapelles, soit pour servir de transition à la petite tour, soit par manque de terrain libre.

« Le 7e jour de janvier 1475 (N. S. 1476), avant jour, décebda Missire Yves de Pontsal, Evesque de Vennes, ou menoir de Kerengoff, et fut enterré le lundi 8e jour du dit moys en la chapelle de Saint André et dempuix translaté en la chapelle Saint Pater, en la dite église de Saint Père ». Cette mort n'arrêta pas les travaux, et ceux-ci étaient assez avancés pour que l'Evêque de Sinope, in partibus, pût, au mois d'octobre 1476, consacrer la nef de l'église et la livrer au culte.

Les indulgences, accordées par les Souverains Pontifes, ayant pris fin à la fête de saint Pierre en 1476, le nouvel évêque de Vannes, Pierre de Foix, cardinal du titre des SS. Côme et Damien, et le duc François II sollicitèrent une nouvelle concession du Saint-Siège. Le pape Sixte IV, par une bulle du 1er avril 1478, considérant « qu'on a travaillé à réparer, à restaurer et à agrandir la dite église, oeuvre remarquable et somptueuse mais inachevée, et que les ressources locales sont insuffisantes pour la terminer, .. » accorde une nouvelle indulgence plénière, à la fête de saint Pierre, pour une période de quatre ans. C'est alors que fut activement poussée la construction de la façade, qui a subsisté jusqu'en 1867, et celle du porche qui la précède.

La grande porte ogivale, maladroitement retouchée plus tard, offrait une série de trilobes à son tympan ; elle était surmontée d'un faux pignon et flanquée de deux piédestaux sans statues ; aux angles s'élevaient deux élégants contreforts à pinacles, reliés par une galerie de style flamboyant.

Le porche intérieur, large et peu profond, était voûté sur croisée d'ogives. Il communiquait avec la nef par une grande porte ogivale, ornée de rinceaux de vignes. Au-dessus de cette porte, au premier étage, s'épanouissait une large fenêtre en ogive, que des placages postérieurs avaient transformée en plein-cintre, et réduite enfin aux proportions d'une vulgaire fenêtre carrée. Ses deux arcatures latérales servaient de transition aux arcatures analogues des deux tours. Le gable était percé d'une haie allongée, et orné de feuilles de choux sur les rampants ; la croix du sommet fut, en 1632, remplacée par une lanterne d'un goût fort douteux.

On peut suivre sur les documents contemporains la date de ces travaux, qui étaient dirigés par Eon Kervélien « mestre du dict eupvre ». Ainsi un arrangement du 12 août 1485 montre que le pignon était fait ; les comptes de la fabrique prouvent que le vieux porche fut démoli en 1484, que le nouveau fut commencé en 1485, que le portail fut couvert en 1486, que la grande porte de l'église fut placée en 1487, que les pinacles furent achevés en 1491, que la grande fenêtre du pignon fut garnie en 1492, que les voûtes du porche furent faites en 1493, et qu'enfin le crucifix, accompagné des images de Notre-Dame et de Saint Jean fut placé dans le porche en 1494.

La moitié de l'église, c'est-à-dire la nef avec son portail, était enfin terminée : elle avait nécessité cinq bulles des Souverains Pontifes, et demandé environ quarante années de travail. Cette nef porte le caractère du XVème siècle.

A l'extérieur, les murs sont garnis de contreforts élégants, décorés de clochetons et de feuilles de choux ; les fenêtres des chapelles sont surmontées d'une accolade, celles du haut en sont dépourvues ; une galerie à jour borde les bas-côtés et une autre longe le toit de la grande nef ; de nombreuses gargouilles, représentant divers animaux, projettent les eaux pluviales.

A l'intérieur de la nef, les murs sont unis ; il n'y a de moulures qu'aux ogives des chapelles et des fenêtres ; au premier étage règne un couloir, bordé d'une galerie moderne à quatre-feuilles et à flammes alternativement : elle a été refaite, en 1845, par M. Charrier, architecte, dans le style général de l'église. Les voûtes des chapelles furent faites dès l'origine ; mais la nef principale, lambrissée en 1627, ne fut voûtée qu'en 1768 et 1769, comme on le verra plus tard.

Les meneaux des fenêtres, qui avaient été presque tous brisés en 1769 par les travaux de la voûte, ont été refaits en 1876, 1877 et 1878. Malheureusement les rosaces ou polylobes, qu'on y rencontre à chaque pas, caractérisent le XIVème siècle, et sont un anachronisme dans une église du XVème. Ces fenêtres, grâce à l'initiative prise par Mgr Bécel, ont été, dans le même intervalle, garnies de vitraux peints, dont plusieurs ne sont pas sans mérite. Les meneaux de la nef et des transepts ont coûté 32,537 fr., payés par l'Etat ; les vitraux, sans tenir compte des frais accessoires, ont coûté environ 34,500 fr., payés par des particuliers.  Avant de quitter la nef, il est nécessaire de jeter un coup d'oeil sur ses chapelles.

§ III. — Chapelles de la Nef.

I. — La première chapelle, à gauche, en entrant par le portail, était jadis dédiée à la T. S. Trinité. On y voyait encore naguères un tableau représentant les trois personnes divines.

Une chapellenie y ayant été fondée en 1328, en l'honneur de saint Michel, la chapelle prit souvent le nom de cet archange. Une autre chapellenie, en l'honneur de saint Fiacre, y ayant été fondée en 1506, elle reçut encore parfois le nom de ce saint. Les fonts baptismaux de la cathédrale, placés précédemment dans la nef, y furent transportés en 1700, et cédés à la paroisse de Saint-Pierre en 1768. Ils ont été retirés en 1856, pour être mis dans la chapelle en face.

Vers 1880, la chapelle de la Trinité n'était pas encore rendue au culte : elle servait provisoirement de lieu de dépôt pour les chaises. On y a placé, en 1878, un vitrail représentant saint Patern et saint Mériadec, évêques de Vannes. C'est une peinture sérieuse, du prix de 950 fr., et qui a été faite, comme presque toutes les autres, par A. Meuret et F. Lemoine, de Nantes. On se demande vainement pourquoi l'artiste a donné des mitres à des Evêques du Vème et du VIIème siècles, quand il est certain que la mitre n'a commencé qu'au XIème siècle.

II. — La seconde chapelle, du même côté, parait avoir été dédiée à saint Sébastien. Une chapellenie de ce nom y fut fondée en 1469, par Alain Philippot. Le double de saint Sébastien y fut également fondé en 1605, par Sébastien Nicolazo. La confrérie de Saint-Sébastien et de Saint-Jean-Baptiste y avait depuis longtemps son siège, quand, en 1648, elle fut enrichie de nombreuses indulgences par le pape Innocent X. Saint Louis, roi de France, y avait aussi son image, et déjà, à la fin du XVIIIème siècle, il avait donné son nom à la chapelle. On y a déposé, en 1814, les ossements des émigrés qui avait été fusillés à Vannes et dans les environs.

C'est en 1878 qu'on a placé l'autel en pierre et la statue de saint Louis : oeuvre de M. Le Merle, et don de M. Hubert. Le vitrail, représentant une série de traits de la vie du saint Roi, est d'une bonne exécution ; il a été donné par M. Hubert et a coûté 3,200 fr.

III. — La troisième chapelle, à gauche, n'avait autrefois aucun vocable, parce qu'il n'y a jamais eu d'autel. Elle servait depuis sa construction, c'est-à-dire depuis 1475 pour le moins, de logement à l'orgue de l'église.

En 1516 les orgues furent refaites. « Poyé à Maistre Barnabé de Lanoë, pour la faczon des orgues, tant du corps des dites orgues que des grosses trompes, et pour toutes choses, la somme de 500 livres, et dix livres que Messieurs ordonnèrent à sa femme et à sa fille pour leurs espilles... Item pour avoir painct l'angelot qu'est sur les orgues, et sa trompette et une couronne, 3 livres ». Des réparations et des augmentations considérables furent faites à ces orgues en 1624, 1695 et 1725.

En 1740, le Chapitre résolut de faire un orgue plus puissant et de le placer au bas de la nef ; il s'adressa au sieur Marcellin Tribuot, de Paris, qui s'engagea à lui en fournir un, dans trois ans, pour 15,000 livres, plus le vieil orgue estimé 1,000 livres, à condition qu'on lui fournirait une tribune et un buffet convenable. La tribune avec ses colonnes, et le buffet avec ses tourelles, ses anges et ses cariatides sculptés par Veniat et Lottembert, coûtèrent en tout 6,260 livres. Des réparations plus ou moins considérables ont été faites à cet instrument en 1778 et en 1876.

L'ancienne chapelle de l'orgue fut, en 1770, pendant les travaux du choeur, fermée par un mur, et convertie en sacristie, avec un revestier au-dessus. En 1777, cette sacristie fut cédée à la paroisse, et l'appartement au-dessus servit aux délibérations paroissiales. Peu après la porte extérieure fut retouchée, c'est-à-dire mutilée. Quant au mur intérieur, il n'a été enlevé qu'au commencement du XIXème siècle. C'est en 1878 qu'on a fait les meneaux du tympan de la porte, donnant sur le cloître, et qu'on y a placé les écussons de la Bretagne, de la ville de Vannes et de Mgr Bécel.

Au mur, qui sépare cette chapelle de la suivante, était adossé jadis le banc du Chapitre, pour assister au sermon, la chaire étant alors du côté du midi. Cette place fut cédée en 1770 au Présidial, et le Chapitre s'établit devant la grille du choeur. Ce n'est que depuis le Concordat que la chaire a été placée du côté de l'Evangile.

IV. — La quatrième chapelle, à gauche, était dédiée à saint Gaudence, martyr, honoré le 30 août. Une chapellenie de saint Jean-Baptiste y fut fondée en 1437 et lui a quelquefois donné son nom. On y desservait aussi deux autres chapellenies, l'une sous le titre de Saint-Gaudence, l'autre sous le nom de Saint-Livry, antérieures à 1516. Une messe quotidienne chantée y fut fondée par Jean Textoris, chanoine, et dotée en 1524 par Jean Daniélo, archidiacre, au profit des chapelains du choeur. En 1764, l'autel de Saint-Gaudence fut supprimé, pour élargir le passage conduisant à la chapelle du Saint-Sacrement, et les fondations qui s'y desservaient furent transférées à la chapelle Saint-Vincent-Ferrier.

V. — La cinquième chapelle, à gauche, avait été d'abord dédiée au Saint-Sauveur. En 1387, une chapellenie y fut fondée en l'honneur de saint Yves, qui avait été canonisé quarante ans auparavant, et peu à peu la chapelle prit le nom de Saint-Yves. D'autres fondations y furent faites dans le cours des siècles. Vers 1880, cette chapelle est dédiée à Notre-Dame de Miséricorde, dont la statue occupe le milieu du rétable de l'autel. Le vitrail, par un heureux retour au passé, représente saint Yves en costume d'official ; quelques médaillons offrent des traits de sa vie. Cette verrière, due à M. Le Moine, de Nantes, a été donnée par le clergé du diocèse et a coûté 2,747 francs.

VI. — La première chapelle de la nef, du côté du sud, en allant du choeur vers le portail, et où se trouve vers 1880 une porte latérale, était jadis dédiée à saint Patern, évêque de Vannes. Une chapellenie y fut fondée, vers 1334, sous le nom de Sainte-Marie-Madeleine, par l'évêque Jean Le Parisy. C'est dans cette même chapelle que le restaurateur de la cathédrale, Mgr Yves de Pontsal, fut définitivement enterré. En 1506, Olivier d'Arradon, chanoine, y fonda une chapellenie en l'honneur de sainte Catherine et obtint du Chapitre que la chapelle portât désormais le nom de cette sainte. En 1776, l'autel fut supprimé une porte fut ouverte sur la rue Saint-Guenhaël, le pavé fut refait et le tombeau de Mgr de Pontsal disparut sans retour. En 1878, on y a placé un vitrail représentant la B. Françoise d'Amboise et saint Guenhaël, abbé : c'est une bonne peinture, qui n'a coûté que 895 fr.

VII. — La chapelle suivante, en allant vers le portail, était dédiée dans l'origine à saint Thuriau, évêque de Dol. Une chapellenie de saint Martin y ayant été fondée, en 1322, par Raoul Guérin, chanoine, elle en prit le nom ; elle le portait encore en 1694. Mais déjà elle s'appelait aussi Notre-Dame de Pitié, et ce nom paraît lui avoir été donné depuis la suppression de l'autel qui existait dans la chapelle du même nom au chevet de l'église. Après la Révolution elle s'appela Notre-Dame de Bon-Secours ; et depuis 1840, c'est-à-dire depuis l'érection de la confrérie du très saint et immaculé Coeur de Marie pour la conversion des pécheurs, et son affiliation à l'Archiconfrérie de Notre-Dame des Victoires, à Paris, elle s'appelle l'Archiconfrérie. L'autel, placé en 1858, est un tombeau vitré ; le rétable en bois renferme un tableau de la Sainte Vierge ; le vitrail, placé en 1877, donné par Mmes Hervieu et fourni par M. Le Moine, représente l'image bien connue de Notre-Dame des Victoires : il a coûté 1800 francs. Au pilier qui sépare cette chapelle de la suivante, était jadis adossée la chaire du prédicateur. En 1632, une délibération capitulaire arrêta qu'on y placerait une nouvelle chaire en « bon chesne ». A et qu'on mettrait vis-à-vis d'elle un banc neuf pour le Chapitre.

VIII. — La troisième chapelle du sud était sous le vocable de saint Luc, évangéliste. A partir de 1515, ou Guy de Quirissec, chanoine et archidiacre, y fonda une chapellenie sous le titre de Saint-Guigner, elle porta ce nom conjointement au premier. En 1758, elle fut dédiée au Sacré Coeur de Jésus, sept ans avant que le Clergé de France en eut adopté la fête pour tous les diocèses du royaume. L'évêque Charles-Jean de Bertin y fut inhumé le 5 octobre 1774, et le Chapitre, par reconnaissance, lui fit ériger le magnifique mausolée en marbre qu'on y voit encore, surmonté de la statue agenouillée du prélat. Ce tombeau est l'oeuvre de Christophe Fossati, de Marseille, et a coûté 2,800 livres. On y lit l'inscription suivante : HOC IN PERPETUUM SUÆ VENERATIONIS ET GRATITUDINIS PIGNUS DILECTISSIMO ET ILLUSTRISSIMO D. D. CAROLA JOANNI DE BERTIN, EPISCOPO VENETEN. CATHEDRALIS HUJUSCE ECCLESIÆ RESTAURATORI MUNIFICENTISSIMO MONUMENTUM EREXIT CAPITULUM VENETENSE, ANNO DOMINI 1777. OBIIT DIE 23 SEPTEMBRIS ANNI 1774.

L'autel est surmonté d'un rétable renfermant un tableau de la descente du Saint-Esprit ; et le vitrail, donné par souscription en 1877, représente l'apparition de Notre-Seigneur à la B. Marguerite-Marie Alacoque et diverses scènes de la Passion. Il a coûté 2,747 francs.

IX. — L'avant dernière chapelle, du côté du sud, s'appelait parfois de l'Hermine, à cause de l'écusson de Bretagne, qui est à la clé de voûte, et le plus souvent des Trois-Rois, à qui elle était dédiée. Quand on y transféra le service de la chapellenie du saint Nom de Jésus, elle en prit peu à peu la dénomination. La chapelle romane de Sainte-Anne ayant été démolie en 1770, on en transporta le vocable à la présente chapelle, et la corporation des menuisiers obtint du Chapitre de faire l'autel et le rétable de sa patronne. En 1877, on y a placé un autel neuf, sans rétable, avec les statues de sainte Anne, de saint Joachim et de saint Joseph. Dés l'année précédente, on avait placé un vitrail, offert par Mgr Bécel, et représentant une procession à Sainte-Anne ; il est sorti, comme les autres, des ateliers de A. Meuret et F. Le Moine, de Nantes, et a coûté 2,600 fr.

X. — La dernière chapelle, du côté du sud, la plus voisine du portail, semble avoir été dédiée primitivement à saint Gatien, évêque de Tours ; une chapellenie y fut même fondée sous ce titre en 1415. Mais une autre chapellenie y fut établie dès 1332 en l'honneur de saint Samson, Evêque de Dol, et de saint Guillaume, évêque de Saint-Brieuc, et graduellement la chapelle en prit le nom. Elle est aussi quelquefois désignée sous le titre de Notre-Dame des fonts, parce que les fonts baptismaux de la cathédrale étaient jadis dans la nef, auprès du pilier qui sépare cette chapelle de la précédente. Les fonts, après avoir occupé quelque temps la chapelle de la Trinité, ont été placés ici en 1856, et ont donné leur nom à la chapelle. On y voit un bas-relief en pierre, du temps de la Renaissance, et représentant la Cène. Le vitrail placé en 1878 par M. Lobin, de Tours, et offert par Mme de Courcy, représente diverses scènes relatives au péché originel et à sa rémission par le baptême.

Quant aux verrières des hautes fenêtres de la nef, elles consistent en simples grisailles avec quelques ornements fleuris. La grande verrière derrière l'orgue et les deux voisines datent de 1875 et proviennent du Mans. Les huit autres ont été placées en 1877 et 1878, et ont été exécutées à Nantes.

Il faut aussi mentionner ici les grands tableaux à l'huile qui décorent les piles de la nef, Du côté du nord, on voit une bonne copie du tableau du Guerchin, représentant l'élévation du corps de sainte Pétronille, puis une oeuvre capitale de Destouches, représentant la résurrection de Lazare. Du côté du sud, on remarque une toile figurant la Charité, une autre représentant le Christ en croix, et une troisième symbolisant les litanies de la très Sainte Vierge. Tous ces tableaux ont été donnés à la cathédrale par le gouvernement de la Restauration ou par celui de Louis-Philippe, sur la demande des préfets ou des députés.

Le pavé de la nef et des chapelles était jadis formé de pierres tombales de toutes couleurs et de toutes dimensions, qui recouvraient les cendres de chanoines, de prêtres, de bourgeois et de femmes, dont la liste serait ici par trop longue. Depuis le XIIème siècle, l'envahissement des églises par les sépultures avait fait des progrès continus, et les lieux consacrés aux assemblées des fidèles étaient devenus de véritables cimetières. Il y avait sans doute une pensée de foi dans ce désir de reposer dans le temple du Seigneur et de provoquer les prières des vivants, mais il y avait aussi plusieurs inconvénients, qui ont fait proscrire cet antique usage dans le cours du XVIIIème siècle. Dès 1627 et 1628, des réparations considérables faites au pavé de la cathédrale firent sans doute disparaître plusieurs tombes ; ce ne fut toutefois qu'en 1776 que le renouvellement intégral du pavé les fit toutes disparaître. Depuis la Révolution, personne n'a été enterré à la Cathédrale : il n'y a eu d'exception que pour les Evêques, et deux seulement ont profité du privilège, savoir : Mgr de Bruc en 1826, et Mgr Garnier en 1827 : ils reposent dans le caveau, sous le choeur.

§. IV. Transepts.

Après avoir terminé les travaux de la nef, on prépara les matériaux pour la reconstruction des transepts. Et ici encore les comptes de la fabrique vont fournir de précieux renseignements. En 1504, Guillaume Yvon était « maistre de l'eupvre », et il avait vingt tailleurs de pierres sous ses ordres. « Poyé en apvril 1504 pour abattre le pignon devers mydi, 22 l. 15 s. — Aux charetiers qui ont osté la terre des fondementz du portal, 10 l. 1 s. 10 d. — Le 12e jour de juign, baillé aux oupvriers qui estoint à maczonner les fondementz, 5 sols. — Le 7e jour de septembre, à celuy qui apporta le mandement de 400 livres que ordonna la royne Anne, 3 sols 4 den. — Le 21e jour de novembre, pour abattre la muraille devers le chappitre, 10 livres 2 sols ». « Le 8e jour de janvier (1505. N. S.), fut mys l'entrefiche du portal. — Au menuisier, pour les portes de Saint-Guennael, 10 l. — Pour la ferreure des portes, 9 l. 3 s. 9 d. — En juign, à Pierre Bodinaye, pour avoir imprimé le portal, les deux gargoulles, les armoiries de Bretaigne et l'escuczon de l'évesque, 10 l. 12 s. 3 d. » — Il va sans dire que ces écussons ont été mutilés pendant la Révolution ; mais on en voit encore la trace dans l'accolade qui surmonte la porte.

Une lacune de neuf ans dans les comptes de la fabrique nous empêche d'assister à la continuation et à la fin des travaux de cette portion de l'église. Ce transept est de forme carrée ; les angles sont munis de contreforts ornés de clochetons et de choux ; les rampants du toit sont également garnis de crochets ou feuilles de choux. La galerie supérieure, qui longe le toit, et la galerie inférieure, qui borde les bas-côtés, font le tour du croisillon. A l'intérieur, le couloir de la nef se continue dans l'épaisseur du mur et n'est apparent que sous la fenêtre où règne une balustrade de style flamboyant.

La fenêtre du pignon est largement ouverte ; elle renfermait autrefois le portrait de Jacques de Beaune, évêque de Vannes. On a refait ses meneaux en 1876, et on y a placé bravement une rosace du XIVème siècle, sans considérer que l'édifice est du XVIème. La verrière, peinte par A. Meuret et F. Lemoine, de Nantes, représente saint Pierre, le patron de la cathédrale, et renferme plusieurs médaillons reproduisant divers traits de sa vie. Elle a été donnée par le Chapitre, dont elle porte les armes, et a coûté 3,500 fr.

Cette chapelle était autrefois dédiée à saint Guenhael, abbé de Landevenec (Landévennec), et la rue voisine porte encore son nom. On y voyait son tombeau, ou du moins son cénotaphe, ses reliques étant conservées à la sacristie.

En 1776, la porte de Saint-Guenhael ou des Ducs fut condamnée, par suite de l'érection de l'autel majeur au milieu de l'inter-transept, et l'on ouvrit, pour y suppléer, une porte latérale dans la chapelle voisine. L'autel à son tour fut déplacé et adossé à l'ancienne porte ; le retable renferme un tableau médiocre représentant la Sainte Vierge. Le siège de la confrérie du Rosaire y a été établi, il y a plusieurs années, et déjà le nom du Rosaire se substitue à celui de Saint-Guenhael, pour désigner cette chapelle. Au-dessus des confessionnaux, on remarque deux tableaux d'une certaine valeur ; l'un représente la prédication de saint Vincent Ferrier à Grenade, et a été peint par Mauzaisse, l'autre retrace la mort du même saint Vincent à Vannes, et est dû au pinceau de Gosse. On y voit aussi les statues de la Vierge et de saint Joseph. Après avoir construit le transept méridional, et avant d'entreprendre le transept septentrional et l'espace intermédiaire, le Chapitre sentit le besoin de recourir au Saint-Siège, pour augmenter ses ressources.

C'était Léon X qui occupait alors le trône apostolique. « Considérant, dit-il, dans une bulle du 13 novembre 1514, que l'église de Vannes, à laquelle préside par dispense apostolique notre cher fils Laurent (Pucci), cardinal prêtre du titre des Quatre couronnés... a été commencée, depuis plusieurs années, d'une façon assez somptueuse, et menace tellement ruine au-dessus du maître-autel et du choeur, que les chanoines de la dite église et les autres personnes ecclésiastiques, qui chaque jour y célèbrent les saints mystères, ne peuvent, à cause du danger d'une ruine imminente, y rester avec tranquillité d'esprit, pour y assister aux offices ; désirant qu'elle soit réparée et continuée dans ses constructions et ses édifices, ce qui ne peut se faire sans les aumônes des fidèles.., nous accordons une indulgence plénière, à la prochaine fête des SS. Apôtres Philippe et Jacques, le premier jour de mai et les deux jours suivants, à tous ceux qui, contrits et confessés, visiteront la dite église et y feront une aumône pour son achèvement... ».

Le procureur de la fabrique, M. Robert Rio, chanoine, pour publier ce « grand pardon général », paya, en 1515, « à Jehan d'Allanczon, imprimeur, pour avoir imprimé seix rames de papier des articles du dit pardon contenus en la bulle, 9 livres »  ; puis il envoya des prêtres en porter des exemplaires et les publier à Quimper, Léon, Tréguier, Saint-Brieuc, Saint-Malo, Dol, Rennes, Avranches, Coutances, Angers, Nantes, Poitiers, Luçon, et Maillezais : ce qui lui coûta 53 livres 15 sols 4 deniers. — « Item à quinze hommes en armes, quieulx furent tant aux portes de l'église, pour garde de la presse des gens, que par l'église, le lundi (30 avril) à vespres et toute la nuyct, le mardi (1 mai) et toute la nuyct, à chacun 7 soulz 6 deniers, qu'est 5 l. 12 s. 6 d. — Item pour chandelles pour les troys nuyctz, 11 soulz. — Item pour tendre et destendre la tapisserie tout autour de la nef de l'église, et pour avoir gardé durant le dit pardon les reliques tant de jour que de nuyct, 4 l. 7 s. 0 d. — Item pour avoir faict et fourny des bastons pour les confesseurs, 2 soulz ».

Les offrandes du pardon dépassèrent 400 livres. En 1516, l'évêque commendataire, Laurent Pucci, fut taxé par le Parlement à une contribution annuelle de 200 livres pour sa cathédrale.

Voici quelques extraits des comptes de la fabrique, de 1516.

« Aux tailleurs et maczons de l'eupvre de l'église, dempuix le 9e jour de juign l'an 1516, au quel jour ils commancèrent à tailler la pierre... ; et est à scavoir que Pierre Cadio, maistre du dit eupvre guaigne chacun jour 4 soulz 2 den ; et chacun des dix compaingnons 3 soulz 4 den.  jucques au 1er novembre, et 2 soulz 6 deniers jucques au 1er jour de mars. — le 18e jour de juillet, fut faict marché et feur pour démollir et abattre les troys piliers et la voulte estant au-dessus du choeur, à 42 livres. — Pour l'abateis du vieill clochier et estouper la couverture de l'église et auxi la charpenterie, 46 livres. — Le 10e jour de septambre fut commancé et myps la première pierre du palier devers Saint-Guennel, et pour ce poyé au maistre et compaignons pour le disner, 12 soulz 6 deniers ».

Les comptes de 1517 fournissent les indications suivantes :

« Le second jour de may, poié à Pierre Bodynaye paintre, pour avoir imprimé deux lions estans au pillier (du sud) 2 l. 15 s. 0 d. — Le quart jour du dit moys, pour la faczon de deux cintres, pour faire tenir la voulte, 6 soulz 8 den. — Le 21e jour de juillet 1517 fut commanczé à descoupvrir devers la chapelle de Toussaints, affin de pontillonner le bouays de la dite chapelle, pour abaptre les pilliers et vieille muraille du dit costé. — Le 22e jour de septembre prins les fondementz des pilliers nouveaulx... poyé pour le vin et desjuner 17 soulz 10 deniers »

Les comptes de 1518 donnent aussi quelques renseignements. 

« Le 12e jour de juign, à Pierres Bodynaye, pour avoir imprimé et paint deux personnages, quels sont sur le pillier, devers saint Yves, 50 soulz. — Le 18e jour de septembre, pour deux pièces de boys, pour faire l'échafaudage et les cyntres pour la grande arche d'entre les deux pilliers (devant la nef), 50 soulz. — Pour une autre pièce de boays pour le cyntre, 25 soulz. — En décembre aux charpentiers et couvreulx, pour la coupverture sur la chapelle de Toussaints, 5 l. 17 s. 6 d. ».

Comme on le voit, les travaux avaient été conduits assez rondement, puisqu'en trois ans on était arrivé à la couverture. Les comptes des années suivantes nous manquent malheureusement, et empêchent de fixer d'une manière précise la fin des travaux accessoires du transept nord et de l'inter-transept. Les pierres provenaient, comme pour la nef, de Treffléan et de Kerhuel en Saint-Nolff.

Le transept du nord est semblable à celui du midi, avec cette différence qu'il a un peu plus de profondeur, et que les contreforts des angles sont plus étendus, le terrain n'étant pas limité par une rue comme au sud. La porte est aussi beaucoup plus ornée ; elle est à double baie à anse de panier et accolade, renfermée dans une grande ogive, et accostée de plusieurs niches. Deux pinacles portent des statues ; les contreforts sont décorés de quelques grotesques et terminés par des clochetons. La fenêtre est surmontée d'une accolade, et d'une galerie qui fait le tour du transept.

A l'intérieur, les murs sont nus, et on y remarque seulement la balustrade du couloir qui fait le tour de l'église au premier étage. L'autel, dédié à saint René, évêque d'Angers, était placé près du mur de l'est, et depuis 1776 il est adossé à la porte des Chanoines ; son rétable contient un tableau de saint Charles-Borromée. Deux autres tableaux, représentant l'un l'entrée de saint Vincent à Vannes, l'autre l'ensevelissement du Christ, couvrent la nudité des murailles. On y voit aussi les statues de saint Corneille et de saint Charles. Le tombeau de saint Vincent Ferrier, retiré de la crypte du choeur, a été placé devant l'autel en 1777 ; il est aujourd'hui surmonté d'un reliquaire renfermant le chef de ce saint. C'est grâce à ce monument que la chapelle de Saint-René s'appelle aujourd'hui la chapelle du tombeau de saint Vincent. La fenêtre de ce transept est largement ouverte. Ses meneaux ont été refaits en 1876 et donnent lieu à l'observation déjà faite à propos de la rosace du tympan. La verrière, placée par A. Meuret et F. Lemoine, de Nantes, représente saint Vincent Ferrier dans des proportions trop restreintes, et renferme plusieurs médaillons où sont figurés plusieurs traits de sa vie. Elle a été donnée par M. et Mme de Virel, dont les armes se remarquent au bas, et a coûté 3,500 francs.

Quant à l'inter-transept, il est limité par quatre gros piliers. Les deux piliers du côté du chevet sont octogones et sans ornements ; ils sont reliés aux murs des transepts par une arcade ogivale, sous laquelle passe le déambulatoire. Les piliers du côté de la nef sont également octogones, avec une moulure longitudinale ; ils sont reliés aux murs des chapelles par une double arcade en plein cintre. Les quatre grandes arcades, reliant les quatre piliers entre eux, sont en ogive dans l'axe de l'église, et en plein cintre du côté des croisées. Mais ce qui doit surtout attirer l'attention, c'est l'addition faite aux deux piliers du côté de la nef : cette construction chargée de moulures, ornée de personnages et d'animaux et couronnée d'un vase de fantaisie, est le premier épanouissement du style de la Renaissance dans la cathédrale de Vannes ; elle date de 1517.

Quel que soit le mérite intrinsèque de cette construction accessoire, il faut reconnaître que la réédification des quatre grands piliers du choeur au XVIème siècle a été une faute : s'ils correspondent à l'ancien sanctuaire roman, ils coupent et arrêtent brusquement la nef nouvelle ; ils sont inutiles, puisqu'ils n'ont plus de tour centrale à supporter ; ils sont même nuisibles, puisqu'ils ont empêché d'élargir le choeur et de le prolonger plus loin vers l'est. Aussi Mgr Fagon, en 1741, eut-il le projet de les faire raser, quand il fut question de la reconstruction du choeur. 

 §. V. Cloître, etc.

Après avoir terminé les transepts, on s'occupa du cloître, de la chapelle du Saint-Sacrement, et des fondements d'un nouveau choeur. Le cloître, mentionné en 1455 comme un projet à exécuter, dut attendre patiemment son tour. Pendant la construction de la nef, il servit de chantier aux ouvriers, et, en 1483, on en retira des charretées de décombres, qui furent portées « près les murs de la ville près du chasteau de l'Ermine, vers la porte de Calmon ». En 1494, la nef et le portail étant terminés, il redevint cimetière : « le 18e jour de jnign, pour le portaige de cincq charrettées de pierres de taille, pour faire la croix du cymittère de l'église de Vennes, 16 soulz 8 den. — Item le 15e jour de septembre que fut benoisqui par Révérend Père Henry d'Aradon, évesque de Cèdre ( ?) le surdit cymittère, 2 liv. 19 s. 6 d. ».

Enfin vers 1530, on s'occupa d'entourer ce cimetière d'un portique. La colonnade intérieure existe encore en grande partie ; les chapiteaux sont ornés de choux frisés, et les arcs sont en forme d'anse de panier. La porte principale, maintenant démolie, donnait sur la rue des Chanoines, et était du même style que le cloître. En 1533 on travaillait encore aux murs du cloître, on plaçait la charpente et on commençait la toiture, comme le prouve le compte de fabrique de cette année. Une enquête faite en 1536 montre que le cloître n'était encore ni pavé, ni lambrissé, à cette date ; il le fut plus tard : la charpente du lambris qui existait encore en partie, il y a quelques années, était formée de cercles annulaires, espacés de 50 centimètres d'un arc à l'autre, et portant des moulures curvilignes.

Pendant qu'on travaillait au cloître, on bâtissait la chapelle circulaire du Saint-Sacrement ou du Pardon. Elle ne coûta rien à la fabrique ; les frais furent payés par Jean Daniélo, chanoine et archidiacre de Vannes, protonotaire et abréviateur des lettres apostoliques. Ce dignitaire, né dans la paroisse de Grand-Champ, avait passé plusieurs années à Rome, où il avait admiré les chefs-d'oeuvre de la Renaissance. Sur la fin de sa vie il voulut employer le revenu de ses nombreux bénéfices à élever, dans son pays, une chapelle dont le style rappelât l'Italie. Cet édifice est de forme circulaire pour figurer l'hostie eucharistique.

A l'extérieur, des colonnes ioniques à moitié saillantes séparent des niches, surmontées de frontons alternativement triangulaires et cintrés ; au-dessus règnent des pilastres ioniques, séparant des fenêtres à plein cintre. Dans l'origine et jusqu'en 1829, l'édifice était couronné d'une balustrade à fuseaux et d'un dôme. On peut encore lire l'inscription suivante en capitales romaines : TEMPLUM HOC AC HONOREM ET GLORIAM CORPORIS OMNIPOTENTIS DEI VIVI CHRISTI JHSU, DOMINI NOSTRI, R. P. D. JO. DANIELO, CANO. ET ARCHIDIACONUS VENETEN. AC LRAR. APLICAR. DE MAJORI PRÆS. ABREVIATOR, SUIS STRUXIT IMPENSIS. M. D. XXXVII.

A l'intérieur, les murs de la chapelle du Saint-Sacrement sont nus ; les fenêtres n'ont pas encore de vitraux peints ; la voûte hémisphérique est garnie de caissons. L'autel en marbre blanc et son rétable ogival, placés en 1865 ne cadrent guère avec le style grec de la chapelle. Le parquet marqueté cache actuellement la pierre tombale du fondateur et de son frère, dont l'épitaphe commune est ainsi conçue : JOANNES ET PETRUS DANIELO, ARCHIDIACONI ET CANONICI VENETEN. MULTIS FACULTATIBUS ELARGITIS ECCLESIÆ ET PUPILLIS, OBIERE 10 JUNII 1540 ET 2 JAN. 1557.

On travaillait aussi avec ardeur à la construction du nouveau choeur de la cathédrale. Pierre Cadio « maistre de l'eupvre », étant mort le 23 août 1533, avait eu pour successeur Vincent Rabault, qui dirigea la construction de la chapelle de Notre-Dame ou de Saint-Vincent à l'extrémité orientale du nouveau choeur. La première pierre de cet édifice fut posée et bénite le 2 février 1536 par l'archidiacre Jean Daniélo. Au mois d'août de la même année, une enquête juridique eut lieu sur l'état des travaux faits et à faire à l'église, pour prouver à l'Evêque commendataire qu'il ne pouvait pas encore s'affranchir de la contribution annuelle de 200 livres pour les travaux de la cathédrale. Voici un extrait de la déposition de Jehan Chevadec « maistre maczon et tailleur de pierre, demourant en la ville de Vennes : On a laissé au pignon de S. Guénel un adantes (pierres d'attente) en espoir de le faire soubstenir et fortiffier par une longère, que les chanoynes et chappitre ont délibéré faire entre le dict pignon et le cueur neuf, qu'ils ont encommanczé, et y a distance entre le dict endantes jusques à la chappelle Nostre Dame, qui sera l'extrémité du pignon suzain de la dicte église, environ sept vings piez, et pareille distance y aura de la dicte chappelle N. D. jusques à ung aultre endantes estant de l'autre costé d'icelle église, devers septentrion ; et sellon le divis en faict, qui lui a esté communiqué, y aura entre les dictz adantes et la dicte chappelle Nostre Dame, icelle comprinse, neuffs chappelles, et de ceste heure celuy pignon suzain est bien commanczé et avanczé, et est de haulteur par le dehors de quatorze piez ou environ... ». Il ajoute qu'il ne voudrait pas construire ce choeur avec ses chapelles, pour 50,000 francs.

Neuf ans plus tard, les travaux de la chapelle de Notre-Dame touchaient à leur fin. « Le 10e jour d'octobre 1545, fut faict marché et feur avec Guillaume Duval, charpentier... pour le charpentaige... de la chapelle de N. D... pour le pris et somme de cent livres monnoie à cler, et en oultre 20 livres à dire d'arbitres... Item le 25e de novembre faict marché avec Gilles Guehenec, pour coupvrir la chapelle de N. D. pour la somme de 75 livres monnoie à cler et cent soulz à dire d'arbitres ». Les conditions furent remplies et les ouvriers payés en janvier et février 1546.

Cette chapelle offre un curieux sujet d'étude pour l'architecture de transition. Elle présente le plan général des chapelles ogivales, avec contreforts aux angles et pinacles ornés ; mais les détails de l'oeuvre appartiennent à la Renaissance, tels que les cintres des fenêtres, les crochets des clochetons et les moulures des contreforts.

La voûte de la chapelle et sa décoration intérieure furent remises à plus tard. Mais peu après, vers 1550 ou 1560 au plus tard, les travaux furent interrompus au chevet de l'église : les ressources diminuaient, les Calvinistes commençaient à se remuer et les biens ecclésiastiques allaient être frappés de taxes énormes pour faire la guerre aux protestants.

En résumé, les travaux de la nef, des transepts et du nouveau choeur avaient duré environ un siècle, 1453-1550. L'église avait été renouvelée aux trois quarts, et il ne restait de l'église romane que le sanctuaire avec ses trois chapelles rayonnantes : cet état de choses va désormais durer deux siècles, 1560-1768, et nous ne trouverons à glaner durant cet intervalle que des travaux accessoires de réparation et d'ornementation.

Les comptes de la fabrique montrent qu'en 1606 on fit « relever les garites des chappelles du costé de l'Archidiaconé (nord) », et qu'en 1607 on s'occupa du vieux sanctuaire. « Le 23e de mars 1607, marché pour chafauder le desus du coeur, afin de racoustrer la vouste du grand hostel toute ruinée et preste de tomber, 45 livres tournois. — Trois milliers de briques pour racoustrer la vouste, 21 livres tournois. — Pour peindre la dicte vouste, 54 livres tournois. — Pour la cherpente de la couverture du coeur et pour le lambrisage desur le coeur, 210 livres tournois. — Pour trois grandes vitres peintes au coeur, 120 livres tournois »

En 1613, l'évêque Jacques Martin donna au chapitre des livres de choeur du rit romain et un aigle en bronze, sans compter plusieurs ornements et diverses tapisseries.

En 1626, M. Audic, chanoine et procureur de la fabrique, commença d'importants travaux : « Pour dix armoires enfournées en la muraille des deux costez du coeur, par dehors, 34 livres 8. O. — Pour faire à neuf le lambris de toutte l'église de St Pierre, qui n'avoit jamais esté lambrissée : marchés du 1er augst 1626, 19 janvier 1627 et 16 juillet 1627; payé à G. Le Loublanc 1794 livres. — Pour la réparation du pavé, tant de la nef, que du coeur et chappelles de l'église, en 1627 et 1628, paie 890 livres 9. 0. ».

En 1633, on résolut d'achever la chapelle de Notre-Dame, pour y mettre les reliques de saint Vincent Ferrier. « Payé à M. Gilles Moussin, maître architecte, tant pour avoir fait un dessin de la chappelle St Vincent Ferrier, derrière le coeur, que pour son voyage d'estre venu d'Auray exprès icy, 6 livres. — Le 16e de may 1634, marché polir la dite chapelle avecques Gilles et Michel Les Moussins et Guillaume Belliard leur associé, pour 9,550 livres. Le 7e de septembre 1635, marché pour la construction de l'autel de ladite chapelle, avec les mêmes, pour 5,000 livres ». Le tout fut terminé en 1637, et aussitôt on plaça au-dessus de l'autel le reliquaire en argent de saint Vincent Ferrier, donné par le Chapitre et payé 1,623 livres 12. O.

Les travaux exécutés de 1634 à 1637 comprennent la voûte et le rétable de l'autel. La voûte est en plein cintre et munie d'élégantes nervures. L'autel est insignifiant, mais le rétable est remarquable en son genre ; quatre niches décorées de colonnes en marbre et d'ornements à profusion, renferment les statues peintes de Notre-Dame, en haut, de saint Vincent, au-dessous, de saint Patern du côté de l'Evangile et de saint Guenhaël du côté de l'Epitre cette dernière est un vrai chef-d'oeuvre. La Confrérie de Saint-Vincent, érigée dans cette chapelle, en 1645, par Mgr de Rosmadec, y a été rétablie en 1871 par Mgr Bécel.

A gauche, du côté de l'Evangile, on remarque le tombeau de Mgr Sébastien de Rosmadec ; c'est un sarcophage en marbre, surmonté d'une arcade et d'attributs divers. On y distingue encore son écusson, et naguères on lisait sur une planchette l'inscription suivante : HOC IN MONUMENTO QUIESCIT CORPUS SEBASTIANI DE ROSMADEC, VENETENSIS EPISCOPI. MORT LE 29 JUILLET 1646.

A droite, c'est le tombeau de Mgr François d'Argouges ; il offre les mêmes caractères généraux que le précédent et, de plus, une statue agenouillée du prélat. Il a pour inscription : D. O. M. — FRANCISCO D'ARGOUGES, — VENETORUM BRITONUM EPISCOPO, — VERÆ SINCERÆQUE FIDEI ET RELIGIONIS — ASSERTORI INVICTISSIMO, — PRÆSULI IN PAUPERES CHARITATE — MUNIFICO, — ANIMI FIRMITATE ET INGENII PRÆSTANTIA — IN PUBLICIS REBUS GERENDIS — INSIGNI, — IN PRIVATIS MORUM SUAVITATE EXIMIO. — OBIIT IDIBUS MARTIIS ANNI MDCCXVI. — MONUMENTUM HOC — S0R0R PIISSIMA SUSANNA D'ARGOUGES DE CREIL — FRATRI CHARISSIMO MÆRENS POSUIT. 

En avant de ce tombeau, on a enterré le corps de Mgr Louis Cazet de Vautorte, retiré de la chapelle Sainte-Anne en 1771. Devant le balustre, sous une simple pierre sépulcrale, sans inscription, mais marquée d'un carreau bleu, repose le corps de Mgr Antoine Fagon, mort le 16 février 1742. Dans le reste de la chapelle, il y a de nombreuses sépultures de chanoines, aujourd'hui cachées par l'uniformité du pavé. Après la chapelle de Saint-Vincent, il aurait fallu terminer les autres chapelles rayonnantes, dont les fondements existent encore ; malheureusement les ressources manquaient. La fabrique suffisait aux dépenses ordinaires, mais elle était obligée d'emprunter pour faire des travaux extraordinaires, comme le prouve cette note des comptes de 1706 : « Employé 6,502 liv. pour les réparations qui furent occasionnées par la tempeste qui arriva la nuit du mardy au mercredy 29 décembre 1705, et qui fut si violente, qu'elle enleva la plus grande partie de la charpente et de la couverture de l'église : ce qui força le Chapitre conjointement avec la fabrique de faire des emprunts à contract de constitut jusques à la somme de 5,800 liv., et, de plus, de 702 liv. de M. Sebouez, chanoine, sans interets ».

Ce fut donc une bonne fortune pour le Chapitre, quand Mgr Fagon lui proposa de se charger de la reconstruction du choeur, ajoutant, « qu'il étoit dans la résolution d'y faire travailler incessamment, et de donner mesme à Messieurs du Chapitre les suretés convenables pour en assurer une construction parfaitte ». Le Chapitre accepta avec reconnaissance cette généreuse proposition, le 29 décembre 1741, et agréa, le 5 janvier suivant, M. de la Boessière, trésorier des Etats, comme caution de l'entreprise. Malheureusement l'Evêque mourut le 16 février 1742, sans avoir livré les fonds.

Vingt cinq ans plus tard, un autre évêque, Mgr Charles-Jean de Bertin, ayant obtenu, le 5 septembre 1767, par le moyen de son frère, ministre de Louis XV, une somme de 50,000 liv. sur le bénéfice des loteries, proposa au Chapitre de voûter la grande nef et la croisée de la cathédrale : ce qui fut accepté avec empressement le 9 septembre de la même année. Après avoir réuni les matériaux et rassemblé les bois d'échafaudage, on posa la première pierre de la voûte le 5 décembre 1768, comme l'indiqué l'inscription suivante, gravée sur une plaque de cuivre : La première pierre de la voûte de cette église a été posée, ce jour 5 décembre 1768, par Monseigneur l'illustrissime et révérendissime Charles-Jean de Bertin, Evêque de Vannes, et par Dame Charlotte de Bertin, sa soeur, veuve de Messire Henri marquis de Fumel-Monségur, premier baron d'Agenois, qui par attachement pour cette église ont employé leur crédit et celui de M. de Bertin leur frère, ministre et secrétaire d'Etat, pour obtenir du Roy à Messieurs du Chapitre de cette ville les fonds nécessaires pour la décoration de ce temple du Seigneur.

Les travaux, dirigés par l'architecte Kerleau et surveillés par M. Ulliac, durèrent environ un an pour la nef, et coûtèrent, en tenant compte des bois d'échafaudage et des reprises à faire aux murs, 90,210 livres 10 sols 0 denier. Après la nef, vint le tour des transepts ou des croisées, et les échafaudages y furent transportés. Les travaux commencés dans les premiers mois de 1770 furent terminés dans le courant de l'année, et coûtèrent environ 23,508 livres. C'était donc une dépense totale de 113,718 livres 10 sols 0 denier. Le Roi ayant fourni 50,000 livres, la fabrique étant endettée, le Chapitre dut prendre le reste à sa charge. La nouvelle voûte, exécutée dans le style grec, le seul usité alors, est en parfait désaccord avec le style ogival de l'église. Elle est en plein cintre, avec des travées au dessus des fenêtres et des arcs doubleaux dans l'intervalle. Elle est élevée de 63 pieds au dessus du pavé, et se trouve encore à environ 30 pieds au-dessous de l'ancien lambris. 

§ VI. Choeur, etc.

Le Chapitre, qui avait transféré son office à la chapelle de Saint-Vincent, pendant qu'on voûtait la nef, et au Saint-Sacrement pendant qu'on travaillait aux transepts, pensait déjà à reprendre l'usage du choeur, quand, le 21 septembre 1770, M. Bossart, chanoine, chargé des travaux de l'église, lui représente « qu'en considérant les ouvrages faits et à faire, il a remarqué que la voûte du cul de four de la vieille église, à l'endroit qui est au-dessus du grand autel du choeur, menace visiblement une chute prochaine, par le surbaissement considérable qui luy est survenu depuis environ un an ; que M. Guillois, architecte, l'avait déjà condamnée et jugée mauvaise, pourquoi il avoit conseillé de ne pas risquer de placer dessous notre choeur nouveau ; qu'ayant fait examiner avec attention par M. Ulliac l'état de cette voûte, il luy avoit dit qu'il y avoit tout à craindre qu'elle ne tombât à l'heure qu'on y penserait le moins et qu'elle n'entraînât avec elle quelques parties du bas costé, et qu'il en coûteroit pour la réparer 4,122 livres ; qu'ayant parlé de cette dépense à plusieurs chanoines, ils auroient pensé que n'en pouvant tirer aucun avantage pour l'embellissement de l'église, il seroit plus convenable de jeter à bas dès les fondements toute la voûte de ce sanctuaire, ainsy que les bas costés, depuis les deux grands pilliers qui supportent le dosme de la croisée, jusqu'à la sacristie et la maison du sacriste, afin d'élargir le choeur et d'exhausser et vouter le rond-point à la mesme élevation que le reste de l'église ». Cette dernière proposition fut adoptée par le Chapitre. Le Roi venait d'accorder un nouveau secours de 50,OOO livres à répartir en cinq annuités, et l'Evêque une somme de 6,000 livres.

La démolition du vieux sanctuaire roman commença le 6 novembre 1770. Quand il s'agit de fixer le plan définitif du nouveau choeur, longues furent les perplexités de l'Evêque et des chanoines. Quelques-uns voulaient raser les quatre piliers de l'inter-transept, donner au choeur la largeur de la nef, et le prolonger jusqu'à la chapelle de Saint-Vincent en utilisant les fondements jetés au XVIème siècle : ce plan était séduisant ; il fut rejeté comme trop coûteux. Quelques autres consentaient à garder les quatre piliers, à les prendre comme base de la largeur à donner au choeur, mais voulaient prolonger celui-ci jusqu'à la chapelle de Saint-Vincent : ce plan fut rejeté comme donnant au choeur une longueur disproportionnée avec sa largeur. Beaucoup d'autres se contentaient de rebâtir le choeur dans les proportions de l'ancien, en supprimant deux chapelles latérales, et en l'exhaussant jusqu'au niveau de la voûte générale de l'église : ce plan fut enfin adopté comme plus simple et moins coûteux.

Il avait été déjà convenu que le choeur proprement dit serait au fond, à la place de l'ancien sanctuaire, que l'autel majeur serait placé au milieu de l'inter-transept, que cet autel serait en marbre, ainsi que les statues et les autels de saint Pierre et de saint Paul.

Les travaux du nouveau choeur commencèrent en 1771 et durèrent jusqu'en 1774 ; ils furent dirigés par l'architecte Guillois et surveillés par M. Ulliac. On y employa vingt maçons à vingt sous par jour, et douze manoeuvres à douze sous par jour, sans compter les charretiers chargés d'apporter les pierres, le sable, la chaux, etc... La charpente fut placée à la fin de 1774 et au commencement de 1775, et aussitôt garnie de sa toiture. La voûte du choeur et de ses bas-cotés fut faite en 1776, et l'on put dès lors garnir les fenêtres de vitres. Tout ce travail a coûté environ 156,000 livres.

Ce choeur est terminé en hémicycle, comme l'ancien, et entouré également d'une nef déambulatoire. A l'intérieur ses lourds piliers carrés sont reliés par des arcs surbaissés ; sa voûte est au niveau de celle de l'église, mais à l'extérieur le toit est plus bas que dans le reste de l'édifice, ce qui produit un effet disgracieux ; le mur circulaire, dépourvu de galerie, n'a d'autre ornement que des contreforts massifs et sans grâce. Cinq fenêtres, pourvues de verres peints et de grisailles, éclairent le haut du choeur, trois autres éclairent le bas-côté. Mgr de Bertin était mort en 1774. Le Chapitre, à bout de ressources, en présence de travaux accessoires indispensables, recourut à Louis XVI et obtint, en 1775, un secours de 80,000 livres payables en 8 ans. En 1776, le pavé de la cathédrale fut renouvelé en entier ; M. de la Landelle et M. de Chateaugiron avaient permis de prendre gratuitement des pierres sur leurs terres de Roscanvec et de Kerboulard ; la nef, les transepts et le tour du choeur furent pavés de grandes dalles en granit, les chapelles en carreaux de Taillebourg, et le choeur en marbre blanc et bleu.

En même temps, le maître-autel, incrusté de marbre précieux, fut posé au milieu de l'inter-transept, avec ses marches et ses anges adorateurs. C'est le plus bel ornement de la cathédrale. Il a été sculpté par Dominique Fossati, de Marseille, et a coûté, pris chez l'artiste, 7,742 livres, suivant sa quittance.

La même année, les autels et les statues de saint Pierre et de saint Paul occupèrent la place des autels de Sainte-Croix et Saint-Jacques. Ils sont de Christophe Fossati, neveu de Dominique, marbrier à Marseille, et ont coûté, suivant quittance, les autels 1,420 livres, et les statues 2,200 livres : il faut y ajouter nécessairement les frais de transport et de pose.

C'est encore en 1776 que fut posée la grande grille du choeur, fabriquée en fer, par Roussin, de Josselin, ainsi que les balustrades des chapelles et du couloir supérieur de l'église : le tout coûta 12,000 livres. C'est à cause de cette grille et de l'établissement de l'autel au milieu de la croix, que l'on dut fermer les portes des Ducs et des Chanoines, et ouvrir deux petites portes latérales.

Vers le même temps, furent placées les stalles et la boiserie du choeur, le tout en bois de chêne sculpté. D'après les comptes présentés au gouvernement, le bois et la façon auraient coûté 16,122 livres. En 1777 eut lieu la prise de possession du nouveau choeur et de ses accessoires : le tombeau de saint Vincent, placé dans le transept nord, reçut le 4 mai la châsse du Saint ; le maître-autel fut consacré le 14 septembre par Mgr Amelot, évêque de Vannes ; le trône épiscopal fut adossé au pilier sud près de la nef, où il est resté jusqu'en 1864 ; le Chapitre rétablit l'office dans le choeur neuf, reprit l'usage de la salle capitulaire au dessus de la sacristie, et y fit rapporter ses archives. Vers le même temps fut placé, dans la chapelle du Sacré-Coeur, le tombeau de Mgr de Bertin, fait par Christophe Fossati, et payé 2,800 livres par le Chapitre.

En terminant tous ces grands travaux, le Chapitre récapitula ses comptes, et le 6 mars 1778, il trouva qu'il avait dépensé de ses propres fonds 120,139 livres, dont une partie provenait d'emprunts, et que le Roi avait fourni jusqu'alors 120,000 livres ; il restait à recevoir de Sa Majesté 60,000 livres, pour faire face aux travaux accessoires, tels que tambours des portes, peinture des boiseries, reconstruction de la maison du sacriste, retouches au portail, etc.

Cependant la Révolution s'avançait menaçante. Le Chapitre fut dispersé le 30 octobre 1790, et ses biens furent vendus nationalement. Mgr Amelot fut arrêté le 28 février 1791 , et M. Le Masle élu évêque constitutionnel le 28 mars suivant. Bientôt les cloches et l'argenterie furent confisquées. L'église livrée au culte de la Raison le 1er avril 1794, fut purifiée le 29 juin 1795 ; convertie ensuite en magasin, elle fut rendue aux constitutionnels le 1er mai 1796 : c'est grâce à toutes ces circonstances qu'elle dut l'avantage d'avoir traversé, sans souffrir de mutilations graves, une époque fatale à bien d'autres monuments. La grille du choeur disparut à cette époque, et sa grande porte orne vers 1880 le parc de la préfecture.

Le 15 août 1802, Mgr Mayneaud de Pancemont prit possession de la cathédrale et y rétablit le culte catholique. L'Etat resta propriétaire de l'église et en donna la jouissance au Chapitre et à la paroisse. En 1808, Mgr de Bausset-Roquefort fit remarquer à l'administration civile qu'on n'avait fait aucune réparation à l'église, que la pluie dégradait les voûtes et les murs, que les grilles du choeur n'avaient pas été rétablies, et que la portion du cloître non aliénée menaçait ruine. Son appel fut entendu, et quelques travaux furent exécutés à la cathédrale. En 1817, la fabrique construisit, à l'angle nord-ouest du cloître, une psallette, qui servit aux enfants de choeur jusqu'en 1830, et qui a été démolie en 1847.

En 1824, la foudre renversa la flèche du grand clocher et donna lieu à la reconstruction de la flèche, ainsi qu'à l'établissement d'un paratonnerre.

C'est en 1845 que M. Charier, architecte du gouvernement, commença le rétablissement des galeries intérieures et extérieures de la Cathédrale : travail intelligent et conforme au style de l'édifice.

On résolut aussi, vers le même temps, de débarrasser l'église de toutes les maisons qui l'entouraient et qui masquaient ses lignes d'architecture. En 1847, la fabrique commença par démolir la maison de la psallette, et une portion du cloître, qu'elle venait d'acquérir le long de la rue des Chanoines : c'était débuter par un acte de vandalisme ; quand l'Etat voulut intervenir, le mal était fait. Rien de lamentable comme les abords de la cathédrale, du côté du nord, avec une claire-voie et une palissade de planches pourries : et cela dure depuis 34 ans !  Ce malheureux début fut suivi d'opérations plus intelligentes. On démolit graduellement les maisons adossées au chevet de l'église, celles qui étaient placées entre les contreforts du sud, et enfin celles qui masquaient la façade de l'ouest. L'Etat intervint dans toutes ces expropriations et paya seul presque tous les frais.

Cependant le pignon occidental de l'église, atteint par la foudre en 1824, avait beaucoup souffert. Sa démolition fut résolue et commencée en 1863, puis suspendue jusqu'en 1867 où elle fut achevée. M. Charier, architecte, proposa de rebâtir une façade nouvelle avec deux tours neuves, le tout pour 500,000 fr. Le Ministre lui répondit, le 24 février 1866, de conserver la tour de gauche qui était solide, de supprimer le projet d'une seconde tour à droite, et de se contenter de refaire la façade avec un porchet. Sur de nouvelles instances de l'architecte, le Ministre autorisa la construction, à l'angle de droite, d'une cage d'escalier pour conduire à l'orgue et à la tour. Le devis, ne montant plus qu'à 165,000 fr., fut approuvé le 16 mars 1868, et l'adjudication des travaux en faveur du sieur Thareau fut agréée lé 16 mai.

Voici le prix de ces travaux, en y comprenant les honoraires de l'architecte et quelques menues dépenses :

En 1868 : 18,637 fr. 77

—  1869 : 34,646 fr. 44

—  1870 : 46,984 fr. 64

—  1871  : 18,078 fr. 71

—  1872 : 40,484 fr. 70

—  1873 : 38,795 fr. 43

Total : 197,627 fr. 69

Le devis était dépassé de 32,627 fr. 69, et le porchet n'avait pas été fait. Le style de l'oeuvre est nécessairement ogival, comme celui de la nef et des transepts. La porte d'entrée, partagée en deux baies, est surmontée d'un tympan, où sont représentées des scènes de la vie de saint Pierre et de saint Vincent-Ferrier ; elle est ornée d'élégantes colonnettes en pierre de Kersanton et encadrée d'une voussure à feuillages ; au milieu et des deux côtés s'élèvent des piédestaux, destinés à recevoir des statues et surmontés de légers pinacles.

Au premier étage règne une galerie à jour, puis se développe une immense fenêtre ogivale, terminée par l'inévitable polylobe du XIVème siècle, et flanquée de deux arcatures. Au-dessus s'étend une seconde galerie ; et le pignon, percé d'une rosace au centre et orné de crochets aux rampants, se termine par une croix en pierre.

La cage d'escalier, autorisée pour l'angle sud, s'est transformée en une jolie tourelle. Sa base quadrangulaire est ornée de deux contreforts sur chaque côté ; le premier étage est décoré de colonnettes et de clochetons d'un beau travail ; la flèche octogone est d'une élégance irréprochable. Cette tourelle, considérée isolément, satisfait l'œil ; mais comparée au pignon et à l'autre tour, elle est beaucoup trop petite et trop étroite. Ce n'est pas la faute de l'architecte ; le Gouvernement s'est toujours opposé à la construction d'une seconde tour.

En démolissant l'ancien pignon, on avait entamé la voûte de l'église : on avait peut-être l'espoir de la refaire en entier dans le style du monument. L'Etat ne voulut pas entrer dans cette voie, et autorisa seulement la reconstruction de la partie qui s'élève au-dessus des orgues. Cette portion de voûte, avec ses nervures et ses colonnettes d'appui, est bien exécutée, mais elle est en désaccord avec le reste ; la voûte de 1768 avait le tort d'être de style grec, mais elle était au moins uniforme ; aujourd'hui son unité est brisée et remplacée par une bigarrure choquante : il aurait fallu se souvenir de l'axiome : tout ou rien. Ces travaux supplémentaires, exécutés en 1874, ont coûté, avec les meneaux des fenêtres de l'orgue, 23,849 fr. 40. 

extrait de l'oeuvre de J. M. Le Mené, 1881

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