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LES CARMELITES DE VANNES

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Les Carmélites, établies au Bondon en 1463 par la B. Françoise d'Amboise, et transférées aux Coëts près de Nantes en 1480, nourrirent toujours l'espoir d'envoyer une colonie de religieuses à Vannes. Voyant leur communauté riche en sujets, elles résolurent en 1513 de commencer les démarches préliminaires pour cette fondation, et de lui donner le nom de Nazareth, conformément au désir de la feue duchesse leur mère. A cet effet, elles jetèrent les yeux sur une propriété, située au nord-ouest de Vannes, entre la ville et le moulin de Rohan : elle est occupée à la fin du XIXème siècle par la prison départementale, la manutention militaire et les Petites-Soeurs des Pauvres. Elle appartenait alors au prieuré de Saint-Martin de Josselin, et elle en portait le nom. 

SAINT-MARTIN

C'est Eudon, vicomte de Porhoët en 1142, comte de Rennes et de Vannes en 1148, par son mariage avec la duchesse Berthe, qui avait donné cette propriété à Saint-Martin, vers 1153. Il lui axait soumis toutes les terres voisines et leurs habitants, à l'est et à l'ouest, avec obligation de payer au prieur la dîme à la douzième gerbe, d'acquitter les droits de lods et de ventes, et d'obéir à sa justice. En un mot, il en avait fait un véritable fief. Il y avait ajouté quelques droits sur les cordonniers et autres ouvriers, qui étalaient leurs marchandises dans la cohue de Vannes le samedi avant Noël.

Le fief de Saint-Martin était limité au nord par le ruisseau qui descend du moulin de Rohan. Il comprenait ensuite les deux côtés de la rue de Saint-Martin, dite aujourd'hui du Moulin, jusqu'au bout de la rue du Puits, où une borne le séparait des Régaires de l'Evêque. La ligne de démarcation suivait ensuite une petite ruelle, puis la cour du Collège et le mur d'un verger, pour aboutir au haut de la rue Saint-Yves ou d'Auray. Tournant alors au sud par le côté occidental du Champ-de-Foire actuel, elle arrivait à la rue de la Vieille-Boucherie ou de la Loi, et englobait les champs qui la bordent à gauche, depuis la route de Bernus jusqu'à la Madeleine. De la route de Béléan, elle remontait au nord, le long de la prairie Marquaise, et aboutissait au pont de Gouez-le-Du sur le ruisseau qui descend a Rohan. Tout ce qui était à l'intérieur de cette circonscription relevait du fief de Saint-Martin, sauf quelques enclaves.

A cette libéralité le comte Eudon en ajouta une autre en 1164. Se trouvant à Marmoutier, avec une nombreuse suite, il donna a Saint-Martin le tiers des droits imposés sur les vins qui entraient au port de Vannes ; et comme ce tiers appartenait aux enfants de son frère Joscius, il prit l'engagement de dédommager ses neveux, et en cas de refus de leur part, de donner une autre rente équivalente aux moines. En même temps, à sa prière, son cousin germain Alain II, vicomte de Rohan, donna aux mêmes religieux un autre tiers lui appartenant sur les mêmes droits : de cette façon Saint-Martin eut les deux tiers des droits mis sur les vins. Alain IV de Rohan confirma, en 1205, la concession faite par son aïeul. (Saint-Martin — Orig. parch.).

Un acte de 1236 mentionne expressément les hommes de Saint-Martin demeurant au faubourg de Vannes, et voici dans quelles circonstances. L'évêque Cadioc réclamait à ces hommes un devoir de gélinage et d'avenage, probablement comme seigneur supérieur, mais les moines de Josselin et de Marmoutier, très chatouilleux sur leurs droits, ne voulaient pas de rapport direct entre l'évêque et leurs hommes. L'archevêque de Tours trouva un biais pour mettre tout le monde d'accord, c'est que le sergent du prieur percevrait lui-même douze deniers par an de chacun de ces hommes et les verserait le 2 janvier entre les mains de l'évêque ou de son alloué ; en cas de retard, l'évêque aurait droit à une taxe double ou à la saisie d'un gage. Cet arrangement fut accepté par tous les intéressés, et confirmé plus tard par le métropolitain. (Ibid.).

Un siècle après, au 3 janvier 1337 (N. S. 1338), on trouve un autre arrangement, passé entre Fr. Olivier Le Merle, prieur de Saint-Martin de Josselin, et les habitants de Vannes, pour réduire et fixer les droits à payer pour le vin. «  ... Pour chacun tonneau de vin, venant et arrivant au port entre les bornes des coustumes, et appartenant aux bourgeoys et mansionnaires de Vennes, ledit prieur levera par soy ou par aultres 5 deniers sur chacun tonneau de vin, et 2 deniers et maille sur chacune pipe de vin ; et aussi pourra prendre et lever sur les vins des tonnes selon la quantité et à l'altérant qu'ilz porteront ; et partant sont, seront et demeureront les dits bourgoeys, citoyens et mansionnaires, eulx et leurs hoirs, de la dite ville, quittes, francs et délivrez envers le dit prieur et ses successeurs de touz vinages, coustumes, charges, forages et aultres debvoirs, que le dit prieur avoit et pouvoit requérir et demander sur les dits vins... » (Ibid.).

Ce droit de vinage s'appelait aussi bouteillage, comme on le voit dans une lettre du duc Jean IV, du 2 juin 4365. « Nous faisons savoir à touz, dit-il, que comme le bouteillage que le priour de Saint-Martin près Châtel Jocelin et ses prédécesseurs ont anciennement acoustumé avoir et lever en nostre ville et port de Vennes ; eust été prins, saési et levé en nostre main, à cause de noz guerres, dont le dit priour nous a longuement pourseu pour en demander délivrance ; Nous, qui ne voudrions en nulle manière détenir le droit de nostre mère sainte Eglise, eue délibération en nostre Conseil, sur aucunes informations qui en ont esté faites, et considérant que nos prédécesseurs donnèrent anciennement celle chose au dit priour, avons mis et par ces présentes mettons au dit priour son dit bouteillage au délivré et hors de nostre main, voulanz que il en joisse en la manière que son droit y est, et que ses prédécesseurs ont acoustumé en joir anciennement, sauf nostre droit et nostre souveraineté sur les dites choses... » (Ibid.).

En 1390, le procureur du duc et son receveur de Vannes firent saisir ce droit de bouteillage, sous prétexte que le prieur devait mettre un sergent pour veiller à la propreté du port et contribuer au curage du canal. Mais le prieur, Fr. Geoffroy Rossignol, prétendit que la concession primitive ne lui imposait pas cette charge. « Sur quoy furent enquis par l'alloué et par le dit procureur Olivier Audet, Jan Daniélou, Raoul Macéot, Pierre Moreau, Olivier de Coetlagat, Johan Valin, Nicolas Le Solec, Guillo Loquisten, Pierre Le Clerc, Olivier Le Fur, Pierre Le Prévost, Guillo Le Ganalen, et plusieurs autres témoings vieulx et anciens, de l'aage de soixante ans, habitans et demourans en ceste ville et forsbourgs de Vennes, qui recordent par leurs sermens que oncques n'avoint veu celuy priour, né ses prédécessours, né autres en nom d'eux, faire faire celle servitude, né ne sçauroint qu'en droit le deussent faire ». En conséquence, aux plaids généraux de Vannes, tenus le 22 mai 1392, il fut reconnu que le prieur n'était point soumis à cette servitude ; et le duc, par ses lettres du 6 juin suivant, ordonna de lui rendre les deniers perçus depuis deux ans. (Ibid.).

En 1475, nouvelle attaque contre le prieur, Fr. Geoffroy Guiton, pour lui imposer le balisage de la rivière de Vannes. L'intimé se contenta de produire les pièces du procès ci-dessus, pour prouver qu'il n'était soumis à aucune charge pour jouir de son droit de bouteillage.

Quant aux terres dépendant du fief de Saint-Martin à Vannes, quelques-unes appartenaient en propre au prieur. C'est ainsi qu'on trouve en 1428, le prieur Salomon Chevalier, afféageant à Pierre Loret, sous le consentement réservé de l'abbé et du monastère de Marmoutier, trois pièces de terre situées sur le chemin du Dondon et contenant ensemble trois journaux, de plus deux autres pièces situées entre le dit chemin et la Madeleine et contenant deux journaux 76 verges, le tout pour un cens annuel de 28 sous. 

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AFFEAGEMENT

La première démarche que firent les Carmélites des Coëts, pour fonder un monastère à Vannes, fut d'en solliciter l'autorisation de la reine Anne, duchesse de Bretagne. Celle-ci l'accorda volontiers, et fit expédier au mois de novembre 1513, des lettres patentes, qui furent confirmées par le roi Louis XII. La reine étant morte deux mois après (9 janvier 1514), le roi donna de nouvelles lettres au mois de mars suivant, et ordonna que tout ce qu'avait octroyé la feue reine, touchant la fondation de ce nouveau monastère, serait mis à exécution. La mort de Louis XII, arrivée le 1er janvier 1515, sembla devoir compromettre l'entreprise ; mais le nouveau roi François Ier et la jeune reine Claude, fille d'Anne de Bretagne, firent savoir qu'ils tenaient à voir construire le couvent projeté.

Les religieuses s'adressèrent alors à Messire Antoine Fumée, prieur commendataire de Saint-Martin de Josselin, et lui demandèrent de leur céder, moyennant indemnité, son fief de Vannes, avec les droits accessoires y annexés. Le prieur refusa d'abord, parce qu'il ne voulait pas entamer l'héritage qu'il avait reçu de ses prédécesseurs ; mais menacé de l'intervention royale, il finit par céder, et il chargea Messire Pierre de Champeigné de consentir pour lui à l'afféagement demandé. L'acte fut passé à Vannes, le 24 octobre 1516, entre le dit de Champeigné agissant, d'une part, pour le dit prieur, et Pierre Lorfèvre et Dom Jean Le Comte, stipulant pour les Carmélites, d'autre part.

« ... Quelles parties transigent, pacifient... et font accord, par lequel le dit de Champeigné, au dit nom, moyennant le décret de notre Saint Père le Pape, pour éviter à la malvolance que les Roy et Royne pourront concepvoir à l'encontre du dit prieur, attendu l'affection qu'ils ont de l'édiffice du dit convent, comme peult apparoir par leurs mandementz et aultres, et en obtempérant à iceulz, aussi pour obvier à la rigueur et longueur du procès que à cause de ce pourroit avoir le dit prieur o le dit seigneur et ses commis, a transporté, cédé et délessé héritellement, à tiltre de censie et rente, ausdits Le Comte et Lorfèvre, acceptans èsdits noms, tout le fyé et juridicion, rentes par deniers, ventes et lodes, devoirs de juridicion, seigneurie, obéissance, préémynences, et aultres droitz et devoirs de havre et de cohue du dit Vennes, et de dismes deues, et que le dit Fumée, prieur susdit a et lui peuvent et doivent compéter et apartenir, par raison du dit bénéfice, en la ville, cohue, havre, forbourgs et apartenances du dit Vennes, sans rien né aucune chose réserver ;

« Parce que cieulx Lorfèvre et Le Comte, èsdits noms, ont promis et se sont obligés, promettent et s'obligent, sur l'ipothèque et obligation des choses ci-dessus à eux baillées et transportées, et aussi sur l'ipothèque du dit convent, lorsqu'il sera édiffié..., et de tous les biens et revenus du dit convent, quelque part qu'ils soint et puissent estre..., pour servir et continuer à jamais au temps avenir, par chacun an, et à chaque feste de saint Martin, unziesme jour de novembre, quarante livres bonne et forte monnoie de Bretaigne, cens et rente au dit prieur et ses successeurs ; quelle rente se poyera au dit prieur, ou son procureur ou commis, les allant quérir et recepvoir au tournouer du dit nouveau convent ;

« Diet et conditionné que si les dites religieuses sont en défault d'en faire poyement celui jour, comme dit est, elles seront tenues poyer au dit prieur ou son procureur ou commis dix soulz monnoie, en nom de paine (amende), par chacun jour qu'il tardera, après le dit jour saint Martin, attendre le dit prieur ; de la requeste du quel poyement par chacun an, le dit prieur de Saint-Martin, ou son procureur ou commis, seront creuz à leur simple serment, appellant un notaire royal, ou deux des prochains voisins dignes de foy ;

« Oultre ont promis et sont obligés, sur pareille obligation, poyer, servir et continuer au dit prieur de Saint-Martin et ses dits successeurs la somme de cinq soulz de chef-rente, à deux termes par chacun an, sur la dite ypothèque, scavoir, deux soulz seix deniers, au jour et feste de la Translation de saint Martin, 4e jour de juillet, et le parsus qu'est aultres deux soulz seix deniers, au terme de Saint-Martin, 11e jour de novembre, qui seront poiez et receuz au dit tournouer, à pareille paine, et o telles et pareilles conditions qu'est dit ci-devant pour le poiement des dites 40 livres. 

« Et pendant que le dit convent sera sans estre édiffié, et les dites religieuses. sans y habiter, les dits poiementz et chacun seront faitz et receuz en la méson de Jehan du Botderu au Marcheix de Vennes, et o pareilles conditions que devant, à commencer le premier poiement des dites rentes et debvoirs à la feste de la Translation de saint Martin, quart jour de juillet prochain venant, et continuer en l'advenir, comme dit est.

« Et pour ce que y avoir aultreffois une chappelle de saint Martin ou dit fié, quelle a esté ruineuse de longtemps, par raison des guerres, est dit et conditionné entre eulx que en l'église du dit nouveau convent les dites religieuses feront faire et construire ung aultier et ymage de Monsieur Sainct Martin, pour mémoire de la fondation du dit prieuré de Saint-Martin de Josselin... Donné tesmoin le seau estably aux contratz de nostre court. » (Saint-Martin — Orig. parch.).

Cet acte, si minutieux pour les dates de paiement, ne mentionne ni la contenance de la propriété, ni l'existence d'une maison voisine de la chapelle.

Cet arrangement fut accepté par les Carmélites des Coëts, le 26 décembre 1516, et ratifié par le pape Léon X, le 8 juin 1517.

L'évêque de Vannes consentit à la fondation du monastère le 1er août 1517, et le 21 septembre suivant le recteur de Saint-Patern fit un accord pour la sauvegarde de ses droits.

Tous ces préliminaires réglés, les travaux de construction du couvent commencèrent enfin en 1518, comme l'indique une enquête judiciaire, faite en cette année par la cour de Vannes, à l'instance de Fr. Jehan Boloré, docteur en théologie, vicaire et procureur des Carmélites des Coëts, pour constater l'existence du fief de Saint-Martin, l'étendue de sa juridiction, et la tenue de ses plaids.

D'un autre côté, à la demande du roi François Ier et de la reine Claude, le pape Léon X donna, le 4 décembre 1519, une bulle concédant à la future maison de Nazareth les mêmes droits, privilèges et exemptions que ceux qui avaient été accordés au monastère des Coëts. — Or, le principal privilège, accordé par le Pape Sixte IV, le 20 septembre 1483, consistait pour les religieuses à dépendre directement de leur Père général et non d'un provincial, à choisir dans tout l'ordre un Supérieur ou Visiteur, qui serait pour elles le Vicaire du général, et enfin à choisir librement leurs confesseurs parmi les profès de l'ordre.

La bulle de Léon X fut publiée dans les diverses églises de Nantes et de Vannes en 1520, et ne rencontra nulle part la moindre opposition.

Le nouveau couvent était toujours en construction. Le directeur des travaux était un Carme, le Fr. Geoffroy Le Borgne, ancien prieur du Bondon, et alors évêque titulaire de Tibériade. Il utilisa les matériaux provenant de l'ancien couvent des Trois-Maries, mais il dut s'en procurer beaucoup d'autres, car l'établissement était considérable. Le couvent se composait d'un carré d'édifices autour d'un cloître, l'église formant le côté sud. Les travaux marchèrent lentement, et ne furent terminés qu'au commencement de l'année 1530.

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NAZARETH

Avant d'envoyer les religieuses à Vannes, les Carmélites des Coëts firent dresser l'acte suivant par devant notaires, pour bien préciser les conditions de la fondation ; il est du 6 avril 1530 (N. S.).

1° « ... Pour la fondation, dotation et entretenement perpétuel et pour l'advenir, de trèze religieuses encloistrées et quatre religieuses pour le dehors, qui seront envoyées du prieuré et convent des Couetz au prieuré et convent de Nazareth, auront et jouiront en l'advenir, et leur ont les prieuse et convent et religieuses des Couetz, dés à présent comme dès lors, baillé et délaissé toutes et chacune les tenues, terres, rentes et revenus à elles appartenantes, et qui leur peuvent et doivent compéter et appartenir, tant au terrouer de Gouellou, en l'isle de Ruys, en la juridicion de Vennes, que à Redon, sans aucune chose en réserver né excepter ; - à la charge des dites religieuses de Nazareth d'y faire service divin, ainsy qu'est accoustumé faire au dit prieuré et convent des Couetz, et que la règle et statuz de leur religion le requiert ; et que les religieuses du dit convent de Nazareth esliront de troys ans en troys ans l'une d'elles à prieuse, et ne passera la dite prieuse les dits troys ans ; et n'auront les dites prieuse et convent de Nazareth avecques celles du convent des Couetz que ung seul Vicquaire du Général de l'Ordre, lequel sera leur supérieur et visiteur des deux convents, comme a esté par cy-devant ordonné tant par feu Maître Bernardin de Senys, que Dieu absolle, en son temps Général de la religion de Notre-Dame du Mont du Carme, que par le Général moderne Maitre Nicolas Audet ; quel supérieur, visiteur et vicaire du Général sera esleu, lorsque sera requis d'y pourvoir, par la plus saine et maire voix des religieuses professes du coeur des deux convents des Couetz et Nazareth, et non autrement.

2° Et aussy a esté dict et convenu que ou cas que par fortune de feu ou guerre, le dit convent de Nazareth seroit ruyné, ou que par peste ou autre cas fortuit, que Dieu ne veille, il ne demoureroit religieuses ou dit convent en suffizant nombre, pour y faire le service divin et entretenir le dit prieuré, ou que les religieuses du convent de Nazareth ne viveroint en bonne réformation et observation, selon la règle et statuz de leur religion, ou que la prieuse du convent de Nazareth seroit plus que troys ans après sa nomination, ou que elles vouldroint avoir autre supérieur, visiteur et vicaire du Général, que celuy qui sera esleu comme dit est : ésdits cas et chacun, les dits biens et revenuz, que les prieuse et convent des Couetz délaissent par ces présentes au dit convent de Nazareth, retourneront entièrement aux prieuse et convent des Couetz, et en jouiront tout ainsy qu'elles ont fait et acoustumé faire ès temps passés ; et ès dits cas seront tenues les prieuse et convent des Couetz et leurs successeures prendre et recueillir au dit prieuré des Couetz le résidu qui sera alors des religieuses et de la fondation et des pensionnaires du dit convent de Nazareth.

3° Oultre a esté entre elles accordé que des mises qu'elles ont par cy-devant faites les dites prieuse et convent des Couetz pour l'édiffice et construction du dit convent de Nazareth, quelles mises se montent à mil livres et beaucoup plus, comme elles ont cognu et appuré, les religieuses qui yront au dit convent de Nazareth et leurs successeures en iceluy convent en demeureront et demeurent quittes, et les en ont celles du convent des Couetz quittées et quittent, et de touz autres choses jucque à ce jour, parceque les prieuse, religieuses et convent des Couetz prendront et auront une tierce partye des deniers qui seront esligez et receuz du Roy, nostre sire, usufructuaire du duché de Bretaigne, père et légitime administrateur des biens de M. le Daulphin, duc ou seigneur propriétaire du dit duché, du reste de cinq mille salutz qui estoint deubz à la feue duchesse Françoise d'Amboise, qui les donna au prieuré et convent des Couetz, queulx prieuse et convent des Couetz seront tenuz poyer une tierce partye de la mise qui sera faite à la poursuite et esligement du dit reste.

4° Pareillement a esté dit et convenu entre les dites religieuses que les deniers ou rentes par héritaiges ou acquestz héritelz, faictz des deniers qui par cy-devant ont esté baillez et donnés au prieuré et convent des Couetz, à l'entrée d'aucunes des religieuses qui seront envoyées du dit lieu des Couetz, avecq les arréaiges des pensions jucques à ce jour seulement, sans que les dites religieuses qui yront au dit lieu de Nazareth ou leurs successeures y prennent né y puissent prendre, réclamer né demander aucune chose, fors la somme de sept-vingtz livres tournoys, pour toutes celles qui yront à Nazareth, une foiz poyez, qui leur sera poyée et baillée par les prieuse et convent des Couetz, lorsque celles qui yront à Nazareth partiront à y aller ; aussy auront et jouiront les dites religieuses qui yront à Nazareth des pensions qui leur ont été promises à viaige par leurs parens, du jour de leur parlement pour aller à Nazareth, et pour le temps avenir. 

Ce que les dites religieuses et chacune ont accepté respectivement l'une pour l'autre, et pour elles et leurs successeures des dits deux convents..., moyennant le vouloir et consentement de dévôt religieux Maître Jehan Roch, du dit Ordre, docteur en théologie, à présent supérieur, visiteur et vicaire du général des dites prieuse, religieuses et conventz des Couetz et de Nazareth, quel ilz supplient apposer son décret à ces présentes ; et ont icelles prieuse, religieuses et convent promis et juré par leurs sermentz et sur tout le leur, tenir, fournir, enthériner et accomplir, sans jamais révocation en faire, né encontre venir par plégementz, né opposition, quérir, avoir né demander aucune dilacion, né par quelque autre moyen que ce soit.

Donné tesmoign le seau estably aux contractz de nostre court. Ce fut fait et gréé au monastère du dit prieuré des Couetz, le sixiesme jour d'apvril, l'an 1529 avant Pasques (N. S. 1530). G. de Carheil, passe. — P. du Breil, passe » (Carmel. Nazareth. — Orig. parch.).

Immédiatement après cet accord, le R. P. Vicaire, Fr. Jean Roch, nomma, de concert avec la communauté, les religieuses qui devaient se rendre à Vannes.

Voici leurs noms :

1° Jéhanne Lyminec, prieure, âgée de 62 ans.

2° Amette Louvedoy, sous-prieure, âgée de 59 ans.

3° Guyonne Louer, du Poitou, discrète, âgée de 65 ans.

4° Hélène Ernault, de Nantes, discrète, âgée de 63 ans.

5° Jeanne du Rocher, de Redon, secrétaire, âgée de 61 ans.

6° Catherine de la Chasteigneraye, âgée de 49 ans.

7° Françoise Thiéry, des environs de Rennes, 48 ans.

8° Héliette du Bot, du diocèse de Vannes, 47 ans.

9° Marie Tronquerault, de Cornouaille ? 54 ans.

10° Jéhanne Menant, d'Amboise, âgée de 40 ans.

11° Anne de L'Espinay, de Nantes, âgée de 41 ans.

12° Claude Audebert, d'Orléans, âgée de 37 ans.

13° Perrine du Doyt, d'Amboise, âgée de 35 ans.

14° Anne de Carné, du diocèse de Saint-Malo, 32 ans.

15° Marie de Rosmar, du Goello, âgée de 29 ans.

16° Yvonne Thuaudière, de Saumur, converse, 31 ans.

17° Jéhanne Viaigue, converse, âgée de 33 ans.

C'était le nombre convenu. Néanmoins on y ajouta une novice de choeur, Marguerite Guyot, et deux postulantes, Françoise de la Roche de Saint-André et Jeanne Courape de Keroual. Peut-être même leur adjoignit-on dès lors les deux soeurs Jeanne Le Cornu et Marguerite Bougaud, qu'on retrouve plus tard à Nazareth.

Les Carmélites, désignées pour Vannes, quittèrent le couvent des Coëts, le 8 avril 1530 (N. S.), et s'embarquèrent sur la Loire en présence d'une grande multitude de peuple. Elles arrivèrent à Vannes le Mercredi-Saint, 13 avril, et furent mises aussitôt en possession de leur monastère.

Le 28 mai suivant, elles ratifièrent par acte capitulaire, rapporté par Lorveloux et Magouéro, notaires de Vannes, l'accord fait aux Coëts le 6 avril précédent.

Le 6 juin 1530, les religieuses des Coëts, qui s'étaient réservé un tiers de la créance sur le Roi, réduisirent leurs prétentions au quart, en payant un quart des frais. La dette de 5,000 saluts correspondait à 10,375 livres ; sur cette somme le Roi avait remboursé 3,914 livres 11 sous, en sorte qu'il ne restait plus à payer que 6,460 livres 9 sous ; c'est sur ce reste que portaient les arrangements conclus entre les religieuses.  Cette dette fut complètement payée deux ans plus tard.

Le 26 août 1530, les religieuses des Coëts abandonnèrent à leurs soeurs de Nazareth les arriérés des pensions et des rentes qui leur avaient été réservés.

De leur côté les Carmélites de Nazareth firent quelques arrangements avec Geoffroy Le Borgne, évêque de Tibériade, qui avait dirigé la construction de leur couvent.

Toutes ces conventions furent approuvées par le général de l'Ordre, Maître Nicolas Audet, suivant acte authentique donné à Paris le 8 novembre 1530.  

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COMMENCEMENTS

Les Carmélites de Nazareth virent bientôt accourir de nombreuses postulantes. Pendant les dix premières années de leur établissement, elles admirent Françoise de Languéouez en 1530, Jeanne Le Digouédec eu 1531, Susanne de Vaugirault en 1533, Jeanne de Bellouan de Saint-Laurent en 1534, Jeanne Hardouin de la Giraudière en 1535, Anne de Sesmaisons en 1536, Yvonne Quentin et Anne Prioul, converses, Jeanne Le Pennec de Louvergnac en 1539, et Madeleine de Cardelan en 1540. Au bout de dix ans, la communauté comptait donc une trentaine de personnes, et ce nombre augmenta considérablement dans la suite.

Le 17 décembre 1540, mourut le Père Jean Roch, vicaire du Général et supérieur des couvents des Coëts et de Nazareth. Il avait été convenu, en 1530, qu'il n'y aurait qu'un Vicaire ou Visiteur pour les deux maisons ; mais l'expérience avait montré les inconvénients de cette mesure. 

Dés le 4 janvier 1541 (N. S.), les Carmélites de Nazareth se firent relever de leur engagement par François Pérégrin, docteur en droit et vicaire général de l'évêque de Vannes. Le 13 janvier elles élurent pour vicaire ou visiteur le P. Jean Gally, du couvent du Bondon, docteur en théologie, qui prit possession de son office le 15 janvier. En 1542, le R. P.  Nicolas Audet, Prieur général de l'ordre des Carmes, ratifia le fait accompli, et permit aux religieuses de Nazareth d'avoir désormais leur vicaire particulier.

Le vicaire était le supérieur de la communauté, et rien d'important ne pouvait se faire sans lui. Il confirmait les deux ou trois confesseurs élus par les religieuses et formait avec eux une petite société, qui était logée dans des appartements situés sur la place actuelle de Nazareth et complètement en dehors du monastère des soeurs.

Le 22 septembre 1543, les Carmélites fournirent l'Aveu suivant, qui donne un état précis de leurs biens à cette époque.

« C'est le mynu et déclaration des maisons, terres, héritages, rentes et choses héritelles, que humbles et dévotes religieuses les prieuse et convent de Nazareth, sittué prés Vennes, tiennent et confessent tenir de Monseigneur le Dauphin (Henri) duc de Bretaigne, tant au moyen de la fondation et dotation faicte du dit convent par feue de bon et clère mémoire Franczoise d'Amboise, en son temps Duchesse de Bretaigne, que aultrernent, en fié admorty, soubz sa cour et jurisdiction de Vennes, comme cy-amprès est décléré :

(Du fief de Saint-Martin).

1° « L'église, maisons, logeix et pourprins du convent de Nazareth, o leurs depportz, yssues et jardrins, sittuez lez les forsbourgs de la ville de Vennes, soubz les queulx est contenu envyron troys journaulx de terre.

2° « Item les praéries, terres et pastures des appartenances du dit convent, prez d'icelluy et d'un tenant et ung circuyt, contenant envyron quinze journaulx de terre.

3° « Item ung aultre pré, ou quel se escoulle et passe l'eau du ruisseau de la fontaine du Garnyer, sur le chemin de Rohan, contenant envyron troys journaulx de terre.

4° « Item est deu ausdites prieuse et religieuses 25 soubz de rente, chacun an, sur une maison sittuée en la rue Sainct-Martin, prez d'une petite venelle.

5° « Item est deu et prennent les dites prieuse et religieuses de chacun tonneau de vin qui est descendu au port de Vennes par les marchands estrangiers la somme de deux soubz ung denier, et par les marchans et habitans de Vennes cinq deniers : quel debvoir est affermé... livres par an.

6° « Item est deu ausdites prieuse et religieuses, par chacun an, par chacun corduanier, nouagier et carleur, qui estalle en la halle de Vennes, le sabmedy précédant Nouel, savoir, par chacun nouagier ou carleur, troys deniers, et par chacun corduanier quatre deniers ; et en lèvent communément dix soubz par an.

7° « Avecques out droict de fié et juridicion sur certaines terres et héritages sittuez aux environs et vicins lieux du dit convent, nommé vulgaument le fié et juridicion de Saint-Martin, et y prennent et lèvent la disme à la douziesme gerbe, et jouissent des deux partz d'icelle disme, et le recteur de la parrouesse de Saint-Pater du tiers ; quelles deux partz communs ans se poulvent monter à seix perrées de bledz.  

Quel fié, debvoir de dismes et les ditz debvoirs sur les vins, corduaniers et autres, ainsy que devant est décléré, ilz ont et tiennent par censie faicte (en 1516) ovecques le prieur de Saint-Martin de Jocelin, pour le numbre de 40 livres 4 soubz de rante par an, poyable à la paine de dix soubz de amende chacun jour de deffault.

(Du couvent du Bondon).

8° « Ung pré, nommé vulgaument la Marquaise, assez prez de la chappelle de la Magdelayne, touchant le chemin de Kergren, contenant deux journaulx et demy.

9° « Item une maison et jardrin au Bondon, sur le chemin de Vennes à Ploescob, et aussi sur le chemin du dit Bondon au Pargo, contenant envyron ung demy journal. 

10° « Item une aultre maison o son jardrin, nommée la maison Billy, et une pasture, au dit lieu du Bondon, sur le chemin de Ploescob, contenant troys journaulx.

11° « Item une maison et son jardrin, sittuez au haut des Lices de la ville de Vennes, prez la chappelle de Nostre-Damme de Chartres et la rue Latine.

12° « Item ont et tiennent une méthaérye o ses appartenances, sittuée en la parrouesse de Grandchamp, nommée Beaumaroys, laquelle contient envyron trante journaulx de terre, laquelle tient Pierres Allanno par ferme, pour en poyer la tierce gerbe de touz bledz, quelques menus debvoirs, et 7 liv. 10 soubz par argent.

13° « Item est deu ausdites prieuse et religieuses le numbre de huict tonneaux de froment, par chacun an, sur la grande recepte de Reuys, queulx leur furent donnez par le Duc Franczoys, prince de ce pays et duché (1469), pour estre dict fondateur et protecteur du convent des Troys-Maryes, autreffois fondé au Bondon, et pour partye de l'entretènemerrt de leur fondation ».

14° (Les biens et revenus de Plouagat et de Redon sont omis dans cet aveu, parce qu'ils étaient en dehors de la sénéchaussée de Vannes) (Carmel. — Expéd. parch.).

« Qui possède procède ». Les Carmélites de Nazareth éprouvèrent bientôt la justesse de ce proverbe. On a vu qu'en 1516 le prieur Antoine Fumée ne leur avait cédé qu'à regret son fief de Saint-Martin de Vannes. Il avait longtemps gardé le silence, et avait été toujours régulièrement payé. Mais vers 1550, soit pour défaut de paiement, soit pour une autre raison, il porta plainte au sénéchal de Vannes. Celui-ci, allant un peu vite en besogne, ordonna de saisir le mobilier des soeurs, et les sergents ou huissiers chargés de l'exécution saisirent « touz leurs meubles jucques à la venelle et linge du convent ».

Il y avait-là un double excès de pouvoir. Les religieuses en appelèrent au Parlement, et la Cour, par arrêt du 17 septembre 1551, déclara qu'il avait été « mal jugé et sentencié par le dit séneschal de Vennes et mal exécuté par les exécuteurs d'icelles sentences ; que l'exécution faite sur icelles appellantes avait été tortionnaire ; et ordonna que les biens prins par icelle exécution seroient renduz et restituez à icelles appellantes, s'ilz sont en nature de chose, sinon la juste valeur et estimation d'iceux à esgard de justice... ; et quant à la provision requise par l'intimé (le plaignant primitif), ordonna qu'il baillerait sa requeste... ».

La suite du procès nous est inconnue : les actes font complètement défaut.

Peu après, vers 1556, les sujets de Saint-Martin commencèrent à contester puis à refuser le paiement de leurs obligations. Les religieuses, après avoir longtemps réclamé, s'adressèrent enfin au Roi, et Charles IX, par lettres du 4 septembre 1570, donna commission aux conseillers du parlement, aux juges de Vannes et à chacun d'eux, pour examiner l'affaire et la trancher définitivement La décision fut favorable au monastère, et les vassaux furent contraints de payer les droits accoutumés, comme le prouvent les comptes de la maison.

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CONTAGION

Une autre épreuve, bien plus sensible, fut l'envahissement de la communauté par une sorte de maladie contagieuse. Voici comment le fait est raconté dans un registre de la maison.

« Le 1er octobre 15S9, une poule d'Inde, apportée la veille de la ville par une de nos servantes, fut trouvée morte au poulailler : sa chair était toute noire. Le même jour, la servante se plaignit d'un mal de gorge, et le second jour elle mourut.

Le 6 octobre, la soeur Constance de Perrien, qui avait touché l'animal, se plaignit d'un mal de jambe ; le chirurgien déclara que c'était le charbon : elle mourut le 10 octobre à huit heures du soir, âgée de 57 ans.

Le R. P. Claude Le Grand, qui l'avait confessée, tomba malade, et mourut le 17 octobre, à l'âge de 61 ans. Le 21 octobre, nous sommes sorties de nôtre clôture, pour (changer d'air) et nous promener dans nos terres, revenant tous les jours manger et coucher au dedans. Le 24 octobre, à quatre heures du matin, est mort d'une maladie de langueur le R. P. Nicolas Rottreau, notre vicaire, âge de 67 ans ; il ne nous restait plus que notre petit Père Simon Giraut, qui nous a suivies partout, confessant les saines et les malades.

Le jour de la Toussaint, qui était le mercredi 1er novembre, nous sommes rentrées, pour faire l'office du jour et de la nuit, croyant être quittes du fléau du bon Dieu. Le lendemain, jour des morts, durant la procession, la soeur Julienne de Kerveno a été attaquée du même mal ; elle est morte le samedi 4 novembre, à l'âge de 23 ans, et elle a été pendant la nuit enterrée au chapitre.

Le 5, qui était dimanche, nous avons été en procession au Bondon, avec des gaules blanches et des bougies en nos mains, et nous y avons chanté la messe de Saint-Roch. La doyenne, Guillemette Chedanne, rapportée malade, est morte six jours après, à l'âge de 80 ans, et a été enterrée au chapitre. Le lendemain, 12 novembre, la soeur Julienne Gibet, âgée de 27 ans, sortant de la grande chambre d'en bas, où nous avions toutes couché à plate terre, et passant la porte de la terre, tomba à la renverse et y mourut aussitôt ; elle a été enterrée au chapitre par les domestiques. Les Messieurs de la ville nous ayant trouvé, sur la place du Marché, une maison propre pour nous désairer, nous y avons été trois jours, et une de nos soeurs y a été gravement brûlée. Le 20 novembre, nous avons été conduites à Limoges, qui nous a été donné pour maison de santé.

Dix jours après, la soeur Marguerite de Kerlivio, s'est sentie attaquée du même mal, et elle est morte le 6 décembre, âgée de 35 ans ; elle a été portée à Nazareth dans une charrette, et inhumée dans l'église d'en-bas.

Le 9 décembre, la soeur Susanne Durand de la Minière a été attaquée du même mal ; confessée et communiée par le P. Simon, elle est morte le 16 du même mois, âgée de 26 ans ; elle a été enterrée dans l'église d'en-bas. Le 22 décembre, la soeur Anne Prioul, du bas-choeur, qui était demeurée au couvent au dehors, avec une femme pour la soigner, est morte d'une révolution de goutte, à l'âge de 68 ans ; elle a été enterrée aussi dans l'église d'en-bas. Le nombre des religieuses mortes durant la contagion est de sept. Nous n'étions plus que vingt-huit religieuses de choeur, et une du bas-choeur, qui était encore écolière. Le 7 janvier 1590, nous avons procédé à l'élection d'un vicaire, après avoir fait les prières accoutumées pendant trois jours, et fait la sainte communion à la messe du Saint-Esprit dans la chapelle de Notre-Dame du Féty, où nous allions l'entendre tous les jours. N'ayant point d'autres religieux pour seconder notre Père confesseur, nous avons prié M. l'archidiacre (Pierre Dumas) de vouloir bien recevoir les suffrages. L'élection a été faite canoniquement sous le bois de Limoges, en faveur du R. P. Pierre Bertaud, docteur de Paris et provincial des Carmes de Touraine, qui avait prêché l'Avent à Hennebont, où il était encore.

M. l'archidiacre et notre Père confesseur ont été le saluer de notre part, et lui présenter nos lettres d'élection. Deux jours après avoir reçu nos lettres, il est venu au Bondon, et il nous a écrit à Limoges qu'il nous acceptait cordialement, et qu'il voulait, avant de venir nous trouver, aller saluer les Messieurs de Vannes, et les prier de venir faire une visite avec lui dans le couvent.

Etant entrés ils furent bien surpris de voir tout ouvert : greniers, cave, dépense, poulailler et charnier, sans y rien trouver. Cependant nous avions fait les provisions pour l'année, et nous avions laissé en sortant tout le froment de la rente de Ruys dans les greniers, neuf pipes de vin blanc et trois barriques de vin clairet dans la cave, la dépense, le poulailler et le charnier bien garnis. Tout avait été enlevé par les désairreurs, qui sont restés six semaines dans le couvent, et que nous avons bien payés.

Le R. P. Vicaire se fit alors quêteur, et ramassa près de 200 faix de paille, des potées de beurre, douze pipes de vin pour les malades et plusieurs autres petites provisions.  Le jeudi 11 janvier 1590, nous sommes sorties de notre maison de santé, pour rentrer dans notre couvent, dont nous étions absentes depuis deux mois et trois semaines. A sept heures nous avons été entendre la messe chez les Cordeliers et nous y avons déjeuné. A onze heures nous sommes entrées en la première porte de notre couvent, suivies de nos révérends Pères, des premiers habitants de la ville et de la principale noblesse du pays, qui avaient de leurs parentes religieuses.

Nous avons été en droiture a l'église, où nous avons chanté un Libera sur les tombes de notre R. P. Vicaire et de notre R. P. Confesseur, et un autre répons sur les tombes de nos trois soeurs enterrées en ladite église... Ensuite notre R. P. Vicaire s'est détourné vers les Messieurs, selon leurs rangs et dignités, pour les remercier de leur assistance et de leurs aumônes ; et voyant que l'heure pressait de nous faire rentrer, nous sommes sorties deux à deux de l'église, conduites par nos RR. PP. jusqu'à la porte de clôture ; la dernière religieuse étant entrée, nos RR. PP. sont sortis, et on a fermé la porte incontinent.

Le lendemain, la messe et prime dites, on a sonné le chapitre, pour la cession de la prieure, qui était alors la R. Mère Julienne de Neufville du Plessis-Bardoul. Mais avant d'en élire une autre, nous avons reçu notre nouveau Vicaire et lui avons baisé la main. Il nous a fait une exhortation pour commencer les suffrages accoutumés pour l'élection d'une nouvelle prieure, qui a été la R. M. Anne de la Roque d'Estuel, laquelle s'est trouvée bien étonnée de se voir à la tête d'un nouveau ménage, sans provisions ; elle a donné la clef de la procure à la procureuse avec une bourse vide, et un papier de six à sept milles livres de dettes »

Cette situation précaire, due à des circonstances exceptionnelles, s'améliorera bientôt, et l'on verra la communauté parvenir à une grande prospérité pour le personnel et le temporel.  

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FONDATIONS

Les fondations faites chez les Carmélites n'étaient pas nombreuses : il n'y avait que trois ou quatre religieux pour célébrer les messes. Voici, en suivant l'ordre chronologique, la liste des fondations connues.

Le 14 octobre 1579, Jean de Cambout, sieur de Penner, fonda deux messes solennelles de Requiem, l'une au vendredi et l'autre au samedi de chaque semaine, avec des prières accessoires, moyennant une somme de mille livres placée en rente.

Le 1er juillet 1583, Pierre du l'hélio, sieur du Pargo, donna par acte testamentaire une rente de 15 livres, rachetable pour 300 livres, afin de participer à perpétuité aux prières et bonnes oeuvres des religieux et des religieuses.

Le 9 novembre 1593, Messire Bertrand Guymarho, chantre et chanoine de Vannes et recteur de Grandchamp, donna un capital de 100 écus ou de 300 livres, à placer en rente, pour avoir deux messes par an.

Le 21 juin 1599, Charlotte Méhaud, dame du Rangoet, en Molac, légua une rente de 100 livres tournois sur ses biens, franchissable pour 2000 livres, afin d'avoir deux messes solennelles de Requiem par semaine.

Le 13 mai 1607, Julienne Le Meilleur, veuve de Jean de Saint-Guen, donna son jardin, situé à l'extrémité de la rue de Boismoreau, dite aujourd'hui de l'Hôpital, joignant le Champ-Gauchard, à la seule condition de participer aux prières quotidiennes des religieuses.

Le 28 septembre 1607, Madeleine de la Planche, veuve, légua une rente annuelle de 6 livres tournois, sur sa terre de la Planche, aux religieuses de Nazareth, pour dire tous les jours un De profundis pour son âme.

Le 28 mars 1617, Roland Hutteau et Catherine du Roscoet, sieur et dame de Quédillac, donnèrent sur leurs biens une rente de 40 livres, franchissable pour 800 livres, à condition d'avoir une messe basse tous les samedis, et des prières chantées par les religieuses.

Le 2 avril 1617, M. Pierre Botherel, sieur du Vertin, juge criminel au présidial de Vannes, donna sur ses biens une rente de 12 livres, rachetable pour 200 livres, afin d'avoir, tous les vendredis de Carême, les litanies de la sainte Vierge et d'autres prières récitées par les religieuses.

Le 8 mai 1631, Messire Sébastien, marquis de Rosmadec et de Tyvarlen, comte des Chapelles et de Crozon, baron de Molac, Sérent, Rostrenen, Penhoet et Plainville, seigneur de Kergournadec, Trahouern, etc., et dame Renée de Kerhoent, sa compagne, donnèrent aux Carmélites un capital de 2000 livres tournois, à placer en rente, pour la récitation des litanies de la sainte Vierge, après l'office des complies, conformément à l'intention de Jeanne de Botigneau, dame douairière de Kergournadec, mère de Madame de Molac, et alors novice à Nazareth, sous le nom de soeur Jeanne de Jésus-Maria.

Le 31 mars 1635, Messire François, seigneur de Kergroadez, baron de Kerlech, etc., et dame Claude de Kerhoent, sa femme, promirent aux Carmélites une rente annuelle de 80 livres, ou un capital de 1,280 livres, pour fonder le chant de trois Ave Maria, après l'office quotidien, pour le repos des âmes de feus Messire François de Kerhoent et dame Jeanne de Botigneau, seigneur et dame de Kergournadec, père et mère de ladite dame de Kergroadez, ladite de Botigneau décédée le 16 août précédent, au couvent de Nazareth, où elle avait fait profession sous le nom de soeur Jeanne de Jésus-Maria.

Le 20 novembre 1642, Anne Mangot, première femme de Messire Jean-Emmanuel de Rieux, marquis d'Assérac, comte de Largoet, seigneur de l'Ile-Dieu, du Gué-de-l'ile, et autres lieus, fit son testament et choisit sa sépulture dans l'église des Carmélites ; elle demanda pour son enterrement toutes les messes et les croix des paroisses et couvents de la ville et faubourgs de Vannes, et prescrivit de donner à Nazareth une somme de 2,000 livres, pour avoir des prières et fonder douze messes solennelles de Requiem, par an et à perpétuité, pour elle, ses parents et amis. — Elle mourut le lendemain, et fut inhumée le surlendemain chez les Carmélites.

Le 11 septembre 1691, Messire Christophe Le Gouvello, sieur de Menémur, et dame Françoise Aubin, sa femme, donnèrent une rente annuelle de 12 livres tournois, pour avoir à perpétuité deux grand'messes de Requiem, l'une au 11 septembre pour leur fille Marie, qui venait de mourir, et l'autre dans la semaine de la Toussaint, pour eux, leurs parents et amis.

Le 10 septembre 1692, les mêmes fondateurs donnèrent aux Carmélites la moitié de leur métairie de la Porte de Menémur, estimée 2,400 livres, à condition d'avoir à perpétuité trois messes basses par semaine, deux anniversaires par an à fixer aux jours de leurs décès, et trois expositions du Saint-Sacrement, avec bénédiction et De profundis.

Le 11 septembre 1697, la soeur Marie-André, dite de Saint-François, donna une somme de 300 livres, à placer en rente, pour avoir deux messes par mois, à perpétuité : ce qui fut accepté par la communauté.

Pendant le XVIIIème siècle on ne trouve guère de fondations pieuses : l'attention des fidèles se portait d'un autre côté. Les archives du Carmel ne mentionnent aucune fondation pendant cette période ; il est toutefois possible qu'il y en ait eu, et que les titres aient été égarés depuis.  

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ACQUISITIONS

On a déjà vu, par un aveu rendu au souverain en 1543, quels étaient alors les immeubles et les droits appartenant aux Carmélites de Nazareth. Pendant un demi-siècle environ leur situation ne se modifia guère, mais ensuite elle s'améliora considérablement, et voici pourquoi. Les religieuses qui entraient au couvent étaient obligées de fournir une pension viagère d'environ 200 livres par an ; mais souvent les familles préféraient verser un capital de quatre à cinq mille livres, pour se libérer entièrement. La communauté étant très nombreuse, il en résultait un afflux de capitaux qu'il fallait nécessairement placer, soit en rentes constituées, soit en biens-fonds.

Les constituts, placés sur des particuliers, remboursables ordinairement à volonté, puis replacés sur d'autres, sont très difficiles à suivre. Il n'en est pas de même des biens-fonds, qui ont un caractère de permanence et de publicité, et dont la trace est facile à suivre. C'est cette seconde série de biens qu'il s'agit de relever ici, en suivant l'ordre chronologique des acquisitions.

1° Le 18 mai 1606, les Carmélites achetèrent, pour 2,600 livres tournois, une grande prairie, située à l'est de leur enclos, avec une petite maison couverte d'ardoise, située au bas de ladite prairie, le tout ayant appartenu à Mgr Georges d'Aradon, évêque de Vannes, puis à son frère René d'Aradon, seigneur de Kerdréan et gouverneur de Vannes : les droits de mutation payés à l'évêque.

2° Le 19 juin 1608, elles achetèrent, à la réserve de raquit, pour le prix de 600 livres, un pré de deux journaux, dit Le Poul, situé sur la route de Vannes à la Madeleine et à gauche de l'entrée du chemin qui conduit au Bondon. C'est là que se tenait jadis en partie la foire dite du Poul.

3° Le 9 novembre 1610, elles acquirent, pour la somme de 1,350 livres tournois, de M. René de Keralbaut, sieur de Kerdelan, et de Jeanne de Montigny, sa femme, le fonds d'une tenue située à Kerubé en Plescop, et le fonds d'une autre tenue située à Guersal dans la même paroisse, les édifices restant à ceux qui les habitaient : le tout sous le fief des rétiaires de l'Evêque.

4° Le 18 novembre 1611, elles achetèrent, pour la somme de 1,200 livres tournois, d'Anne du Ménant, veuve de Mathurin Mersant, le fonds de quatre tenues à domaine congéable, situées au village de Guenfront, en la paroisse de Grandchamp, et dans le fief de Largoet ; les rentes foncières étant payables le 1er septembre de chaque année.

5° Le 19 novembre 1612, elles acquirent, de Messire Bertrand Guymarho, chantre et chanoine de Vannes, pour 4,500 livres provenant de la pension de diverses religieuses, la métairie noble de Botcoet, située en Grandchamp, et la tenue de Rescluez, située en Plumergat, relevant toutes deux de la seigneurie de Kerbervet, à devoir d'obéissance et de rachat.

6° Le 12 mars 1613, elles achetèrent de Pierre Le Tillon, sieur du Bouézit et conseiller au présidial de Vannes, pour le prix de 480 livres, un pré contenant environ deux journaux et demi, situé d'un côté entre l'enclos du couvent et le chemin du Bondon, et de l'autre entre la route de Vannes à la Madeleine et la fontaine du Garnier, et relevant du roi.

7° Le 19 juillet de la même année, elles acquirent de M. Olivier Berthelot, notaire, et de sa femme, pour la somme de 276 livres, un pré vulgairement appelé le pré Marcoul, contenant environ trois journaux et demi, situé au delà de la chapelle de la Madeleine, donnant d'un côté sur la route d'Auray et de l'autre sur le chemin conduisant du Pargo au Bondon.

8° Le 18 juillet 1614, elles achetèrent, pour 12,000 livres, de M. Julien Bino, sieur de Coettro, de Kernivinen, etc., la belle terre et seigneurie de Kercadre, dite aujourd'hui Kercaer, et toutes ses dépendances, savoir les quatre métairies de Kercadre, de Saint-Guen, de Kerizac, de Landréhan, et quelques immeubles dans la rue Neuve et dans le voisinage, relevant pour la majeure partie du prieuré de Saint-Guen, et pour le reste du roi.

9° Le 29 décembre 1617, elles acquirent, au prix de 600 livres, des époux Bihouy, une prairie de deux journaux, située auprès de Saint-Guen : le 28 mai 1619, pour la même somme, des époux Lucas, une prairie de trois journaux, entrée depuis dans le cimetière de Vannes ; et enfin le 3 janvier 1623, des époux Jollis, au prix de 2,450 livres, une grande prairie, située à droite du chemin de Saint-Symphorien à Saint-Guen.

10° Elles acquirent aussi, à une date inconnue, deux maisons situées dans la rue Saint-Yves, au fief de l'Evêque ; puis, le 28 novembre 1636, de Marguerite Tubouc, une prairie joignant l'enclos ; le 18 septembre 1659, des héritiers Le Guéranic, une tenue à Ranuec en Saint-Nolff, au prix de 1,000 livres.

11° Le 27 février 1662, elles achetèrent de Messire Claude de Marboeuf, président au parlement, et de Jeanne Cadio, sa femme, pour la somme de 29,000 livres, la terre noble de Kerguélo en Plaudren et ses deux métairies, avec le fonds de treize tenues congéables situées au Cleyo, à Kerizac, à Talhoet, à Kergourio, à Kerrobin et au Lério ; le moulin de Kerguélo ne fut acquis qu'en 1695, au prix de 1,200 livres : le tout, dans le fief du roi.

12° Le 29 janvier 1681, elles acquirent de M. Julien Le Sénéchal, sieur de Tréduday, etc., pour 16,000 livres, la terre noble du Clérigo, en Theix, et ses deux métairies, avec le fonds de dix tenues disséminées dans le voisinage, le moulin à eau dudit lieu, l'emplacement du moulin de Theix, et le droit de prévôté des régaires : le tout dans le fief de l'Evêque.

13° Le 16 juin 1696, elles acquirent la métairie du Halinier eu Elven, pour 4,0OO livres ; et peu après, divers immeubles situés à Hennebont ; une maison sise à Auray, pour 3000 livres ; une métairie noble située au Moustoir en Arradon, avec quatre tenues, payées en 1697 aux sieurs Touzé, la somme de 7,900 livres en principal.

14° Le 7 mai 1701, elles acquirent par adjudication judiciaire, sur M. François-Marie Champion de Cicé, au prix de 35,800 livres, les terres de Beaulieu, Kerpondarme, Kerauffret et Talforest, avec le fonds de 54 tenues en Bignan, de 5 tenues en Saint-Jean-Brévelay, de 3 tenues à Maustoir-ac, et de 5 tenues à Plumelin : le tout relevant de Trébrimoel et de Kerguéhennec, sauf les terres situées en Plumelin, qui dépendaient de Baud.

15° Le 25 janvier 1708, elles acquirent par adjudication semblable, sur Messire René de Sérent, pour 27,900 livres, les terres de Brambec et de Kerlevenan, en Plescop, comprenant, outre le pourpris, un moulin, trois métairies, des bois taillis, et le fonds de 19 tenues congéables, situées au bourg, à Gusquel et ailleurs.

Là s'arrêtèrent les acquisitions des Carmélites.

Après avoir parcouru cette longue liste de prairies, de métairies et de tenues, achetées par les religieuses, on est porté à croire qu'elles étaient très riches. Il n'en est rien, et elles avaient même dû emprunter pour payer une partie de leurs dernières acquisitions.

Une déclaration détaillée, fournie par les Carmélites de Nazareth à l'Intendant de Bretagne, le 31 janvier 1706, et comprenant tous leurs biens, sauf Brambec et Kerlevenan acquis deux ans après, se résume ainsi :

Revenus de Lanrodec et de Botoha, en Goello : 4,853 livres 2 sols.

Revenus des biens du diocèse de Vannes : 5,943 livres 11 sols.

Revenus de dix-huit constituts : 2,958 livres 18 sols.

Total : 13,755 livres 11 sols.

Sur cette somme il fallait prélever :

La capitation pour les frais de la guerre : 1,500 livres.

Les rentes diverses et les intérêts des emprunts : 880 livres 8 sols.

Les gages des employés, des domestiques, etc : 3,600 livres.

Total : 5,980 livres 8 sols.

Il ne restait donc plus que 7,775 livres 3 sous (sols), pour la nourriture de près de cent personnes, savoir, de 4 religieux Carmes, de 72 religieuses professes, 2 novices et 16 domestiques.

Il fallait encore ménager sur ce chiffre les habits des religieux et des religieuses, l'entretien de l'église et de la sacristie, et les réparations continuelles du monastère et de ses maisons de la ville et de la compagne.

La communauté de Nazareth était depuis longtemps la plus nombreuse de Vannes, et ses revenus étaient en rapport avec le chiffre de sa population.

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COLONIES

Grâce au nombre de ses professes, la communauté put envoyer une colonie à Rennes en 1622, et une autre à Ploërmel en 1627.

Voici le contrat de la première fondation. « ... Des filles dévottes à la Vierge Marie de la ville de Rennes, ayant résolu de quitter le monde et vivre en religion soubz la reigle des religieuses Carmélines, et déclaré leur intention aux humbles prieur et religieux des Carmes du dit Rennes, elles auroient fait entendre ceste sainte intention aux nobles, bourgeois et habitans du dit Rennes, les quelz par acte en deue forme de leur assemblée générale, tenue le 21 décembre 1618, l'auraient approuvée, consanty et requis l'establissement d'un couvent ad instar de celluy de Nazareth lès Vennes, et pour cet effect désigné un lieu propre pour la construction d'icelluy, et duquel ils se seroient déclarés fondateurs : ce quy auroit esté authorizé et émologué par Mgr l'Evesque de Rennes, quy en aurait délivré acte en deue forme le 29e du dit mais de décembre 1618 ; lesquelles intentions auraient esté approuvées et confirmées par Sa Majesté, quy en auroit délivré ses lettres au mois de janvier 1619. Ensuite de quoy, le Révérendissime Père Général de l'Ordre des Carmes aurait délivré sa commission à R. P. Fr.  Philippe Thibaud, son commissaire, le 11e mars 1619, et l'auroit déclaré au R. P. Fr. Jean de Launay, docteur en théologie et vicaire général de Nazareth, le 2e juillet 1620. 

Pour ayder au bastiment et construction du couvant désiré à Rennes, les religieuses de Nazareth auraient emprunté somme de deniers jusques à la concurrance de 6,000 livres, prestées pour faire l'achapt du fonds du nouveau couvant, soubz la promesse de leur en faire restitution... ; puis par délibération capitulaire du (10e ?) d'apvril 1622, auroient unanimement nommé, esleu et choaisy pour prieure au dit couvant de Rennes soeur Renée Le Flô, dite de Jésus, (et pour compagnes) soeur Jeanne Gibon, dite de Sainte-Cécile, soeur Jeanne Farcy, dite de Saint-Bonaventure, soeur Marie Le Haste, dite de Saint-Etienne, soeur Valence de Carné, dite de Sainte-Claire, soeur Gillette du Ruflay, dite de Saint-François, et soeur Magdelaine de Perrien, dite de Saint-Ignace : toutes religieuses professes du dit couvant de Nazareth, que le dit P. Thibaud, commissaire, auroit retirées de l'obédience de Nazareth, pour aller demeurer et rézider en l'obédience au nouveau couvant de Rennes, soubz la charge et conduite du dit commissaire, quy pourvoira de supérieurs pour la direction du dit convant, suivant et à l'instar des règles et statuts du convant de Nazareth, qui demeure dès à présent déchargé des dites religieuses. Ausquelles religieuses de Nazareth celles de Rennes promettent rendre et restituer la dite somme de 6,000 livres, lorsque les dites religieuses de Nazareth leur en feront la demande et requeste ; comme aussy s'obligent les dites religieuses de Rennes de loger et retirer à jamais les religieuses qui yront du dit Nazareth en leur convant de Rennes.

« En outre les dites religieuses de Nazareth, pour se rédimer de toutes les recherches qu'on leur pouroit faire pour et à cause des religieuses ainsy choaisies pour le convant de Rennes, leur ont présentement donné et délivré les actes concernans leurs pensions, les quelles se montent à la somme de 945 livres par chacun an. Les debcès des dites religieuses advenant, les dites pensions demeureront esteinctes.

— Et d'abondant les dites religieuses de Nazareth, pour le zèle et sainct désir qu'elles ont au dit establissement, ont charitablement donné à ladite Le Flô, prieure et ses religieuses, la somme de 900 livres tournoys pour aider et subvenir aux charges qu'elles pouront avoir au nouveau convant...  Faict et consanty à la greille et parloer du convant de Nazareth, où les religieuses estoient congrégées et assemblées par le dedans.., ce jour 12e d'apvril 1622, après midy.  Ce faict, les religieuses choaizies pour aller à Rennes, ont sorty du convant de Nazareth, par la grand'porte d'icelluy, soubz la conduite du dit P. Thibaud, commissaire. Coué, not. roy. — Basselinne, not. roy. »

(Nazareth. — Expéd. papier).

Après le départ de cette colonie, il restait encore 40 religieuses à Nazareth ; de nouvelles aspirantes vinrent. bientôt combler les vides, et permirent de fonder le monastère de Ploërmel.

« L'an 1627, le 15e jour du mois d'octobre, les religieuses de Nazareth... estantes par le dedans de la greille et parloir du dit convent, chapistre tenant... ; désirant satisfaire au commandement du Révérendissime Père Général de l'Ordre, Grégoire Canalius, suivant la commission donnée au R. P. Philippe Thibaud, vicaire général du dit convant, signée à Rome en 1626, et inclinant aulx pieux désirs des habitantz de Ploermel, quy ont instamment désiré un convent du dit Ordre estre estably en leur ville, selon la bonne intention de Mgr le Révérendissime Evesque de Saint-Malo, Guillaume Le Gouverneur ; désirant à leur pouvoir contribuer à la gloire de Dieu en si louable entreprise, et ayant mis cette affaire en délibération plusieurs fois, elles se séroient accordées aux conditions qui ensuyvent : 

« Elles ont faict élection de quatre religieuses, qu'elles ont jugées capables pour le commencement de l'establissement du dit convent à Ploërmel, savoir, Elisabeth de Bellouan, des Anges, cy-devant prieure, Jeanne de Tymadeuc, de l'Assomption, maîtresse des jeunes, Marie Le Blay, de Saint-Augustin, et Jacquette de la Housse, de la Résurrection, quy se trouveront de jour en autre à Ploërmel, pour l'establissement du nouveau convent y espéré ;

« Lesquelles observeront mesme vie et religieuse régularité que au convent de Nazareth, selon les règles et statutz de l'Ordre, et autres coustumes de la deffuncte de bonne mémoire Françoise d'Amboise, duchesse de Bretagne ; et sera ledit convent despendant de celluy de Nazareth : aucune ne sera receue novice ou professe à Ploërmel sans l'expresse licence et permission du convent de Nazareth, jusques à ce que le convent de Ploërmel ne soit accomply et propre pour y vivre en estroite observance et vie régulière ; ne pourront au dit convent de Ploërmel estre receues plus de traize religieuses, sans l'expresse permission du convent de Nazareth.

« Le convent de Ploërmel n'aura d'autre vicaire ou visiteur que celluy de Nazareth, quy sera esleu au dit Nazareth, où les religieuses de Ploërmel envoiront leurs suffrages ; les religieuses de Nazareth auront toujours la préférence aux élections des Pères confesseurs ; les prieures quy seront esleues à Ploërmel seront tenues, quinze jours après leur élection et confirmation, en advertir le convent de Nazareth.

« Seront tenues les religieuses de Ploërmel d'envoyer à Nazareth copie de tous les contractz d'acquetz ou constitutions de rentes qu’elles feront, de temps en temps, pour estre gardés dans les archives du dit convent de Nazareth ; ne seront receues aucunes au dit convent de Ploërmel sans bonnes et convenables pensions ; ne pouront les dites religieuses de Ploërmel entreprendre ou commencer aucun nouveau convent, sans l'expresse permission de la communauté de Nazareth.

« Sy le dit convent de Ploërmel ne pouvoit estre basty et meublé commodément, et ne pouvoit la religion y estre gardée, les religieuses de Nazareth seront tenues reprendre, tant les quatre religieuses cy-devant choésies pour aller à Ploërmel, que les autres qui auroint esté receues au dit Ploërmel du consentement du dit Nazareth.

« Aux cas de nécessités, pour lesquelz les saints canons permettent aux religieuses de sortir, avecques licence des supérieurs et par ordonnance des médecins qu'il seroit nécessaire de changer d'air, ausdits cas demeurent les dits conventz respectivement tenus de recepvoir celles quy iront de l'un à l'autre, pour y estre nourries et entretenues comme les autres religieuses.

Pour les pensions et entretènementz des quatre religieuses choisies pour aller à Ploërmel, a esté accordé à raison de 120 livres pour chaccune de icelles, ce quy est pour les quatre la somme de 480 livres, oultre les vestementz et linges, quy leur seront donnés... Et d'autant que les religieuses de Nazareth ont fourny la somme 3,300 livres, pour faire achapt de partie de l'emplacement du convent de Ploërmel et meublement de l'hospice, sous la condition de les leur rendre, les dites religieuses de Ploërmel restitueront la dite somme de 3,300 livres dans les trois ans prochains... non compris 300 livres que les religieuses de Nazareth ont libéralement données pour les dites causes à celles de Ploërmel, sans espoir de restitution.

« Les articles cy-dessus ont esté... autorisés par le R. P. Philippe Thibaud..., les dits jour et an que dessus. Allain, not. roy. — Basselinne, not. roy. »  (Nazareth. — Orig. parch.).

En comparant les conditions faites pour les fondations de Rennes et de Ploërmel, on voit que les Carmélites de Nazareth furent plus libérales pour la première maison que pour la seconde. La première était au loin et ne pouvait pas leur nuire, la seconde était plus près et pouvait leur faire concurrence : de là cette situation dépendante et ces nombreuses restrictions, qui arrêtèrent toujours son développement.  

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TRAVAUX

L'église et le couvent de Nazareth formaient, dés l'origine, un carré d'édifices autour du cloître. Peu à peu on y fit des additions, dont le souvenir a été conservé par le Registre du Carmel, qui va nous servir de guide dans tout ce paragraphe.

« En 1618, dit-il, le 19 avril, on a commencé à bâtir la grande infirmerie, avec la vesterie (sic) au-dessous : les frais ont monté à 2,023 livres 13 solz ». Cette note trop laconique n'indique point la situation de ce bâtiment, mais tout porte à croire qu'il s'agit de l'édifice placé à l'angle nord-ouest du couvent.

« Le 16 février 1629, a été posée la première pierre du grand dortoir et du pavillon (allant vers le nord). Toute la communauté y a assisté en chappes, la croix devant, et en chantant les litanies des Saints... Ce bâtiment étant parachevé au mois d'août 1630, notre R. P. Vicaire Philippe Thibaud l'a bénit le 15 septembre suivant, revêtu seulement d'un surplis et d'une étole, portant la vraie croix, et assisté de nos confesseurs. Toute la communauté en chappes est allée, en chantant le Miserere, du chapitre au réfectoire neuf, où le R. P. Dominique est monté en chaire et a fait une belle exhortation sur la sainteté du lieu ; après quoi notre. R. P.  Vicaire a aspergé tout le réfectoire, la cuisine et le pavillon, et les a dédiés aux mystères de la Passion. Puis on est monté au dortoir, qui a été dédié à la Sainte Vierge, notre mère et patronne ; le R. P. Vicaire est entré dans chaque chambre, pour l'asperger, et a mis l'étiquette sur la porte de chacune. Ensuite nous sommes montées au second étage, où est la grande salle et le labeur, avec les cinq chambres au bout du pavillon, dédiées aux attributs de Dieu. Puis nous sommes montées au troisième étage (grenier), qui a été dédié au trône de Dieu ; et après une exhortation de notre R. P. Vicaire, nous nous sommes retirées. Cette bénédiction privée fut suivie, le 26 septembre, de la bénédiction solennelle donnée par M. Sébastien de Rosmadec, évêque de Vannes, en présence de nombreux assistants.

« Notre R. P. Vicaire et nos Mères discrètes, voyant que le bâtiment ci-dessus occupoit quelque peu l'air de notre enclos, ont mis à notre usage, dès 1629, le jardin d'auprès de l'église, qui servoit à nos Pères, et l'ont fait clore de hautes murailles. 

« L'an 1631 , le R. P. Philippe Thibaud a fait bâtir la muraille, qui va depuis le pignon de l'église jusqu'au corps de logis de nos Pères, avec une galerie le long de la muraille pour leur commodité pour aller à l'église.

« La même année, on a aussi bâti la grange près le chemin vers l'occident, pour serrer les grains que l'on prend à la troisième gerbe des métayers, et aussi pour loger nos foins et les autres choses nécessaires : elle a 50 pieds de longueur. Tous les bâtimens ci-dessus montent à la somme de 30,053 livres ».

Le R. P. Thibaud, qui avait été l'âme de tous ces travaux, se vit bientôt en butte à la persécution. Les religieuses de Nazareth jouissaient, depuis leur établissement, du droit de choisir librement leur Supérieur ou Vicaire et leurs confesseurs, dans la province de Touraine ou ailleurs, et de les garder à vie, quand en 1635, le R. P. Léon de Saint-Jean, nouvellement élu provincial de Touraine, voulut supprimer ces privilèges.

Il ordonna au R. P. Thibaud et aux confesseurs de Nazareth de quitter la maison et de rentrer dans le cloître. Les religieuses lui opposèrent les bulles de 1483 et 1519, qui consacraient leurs droits ; l'Evêque de Vannes, le Chapitre, et toute la ville s'associèrent à leurs réclamations. Le Révérendissime Père Général, informé de ces empiétements, écrivit une lettre au chapitre provincial pour les faire cesser.

Sur ces entrefaites le R. P. Thibaud mourut à Nazareth, en odeur de sainteté, le 24 janvier 1638, et fut enterré dans l'église de la communauté, devant le maître-autel. Les religieuses choisirent alors pour Vicaire le R. P. Avertin de Saint-Jean. Le provincial de Touraine, vexé de ce choix, recommença ses procédures ; il se rendit en personne à Rome, surprit un avis favorable de la Congrégation des Réguliers, et obtint un bref du pape Urbain VIII de l'an 1639, portant qu'à l'avenir les religieuses ne pourraient plus choisir leurs directeurs dans la province de Touraine, mais s'adresseraient ailleurs.

Les Carmélites cédèrent au temps et choisirent leurs directeurs, à partir de 1640, dans la province d'Aquitaine. Les religieux de la province de Touraine témoignèrent de grands regrets de l'entreprise de leur provincial, qui leur faisait perdre ainsi la direction d'une maison : ils durent attendre 23 ans avant d'y rentrer (Extrait d'usa mémoire imprimé).

Le R. P. Jean Tuaut, d'Aurillac, ayant été élu Vicaire le 6 mars 1641, gouverna la maison pendant dix ans. « En 1645, dit le Registre, il agrandit notre enclos (en y ajoutant un jardin et une portion de prairie), y fit venir une source de bonne eau, y fit construire une belle fontaine en pierres de taille, en forme de rond, avec des sièges tout autour en dedans, où les religieuses allaient prendre souvent leur récréation en été. Il fit aussi bâtir une voûte attenante à la procure (entrée de la manutention), pour mettre les archives, et y déposer tous nos actes et papiers par ordre ».

Ce même Père Jean Tuaut vit commencer un procès, qui devint funeste à la communauté. Le 30 août 1644, Jean Le Meut ayant acquis une maison et un jardin dans la rue de Saint-Martin, quartier de la Boucherie, les Carmélites s'opposèrent à l'appropriement devant la juridiction des Régaires de l'Evêque, le 4 juillet 1645, sous prétexte que ces immeubles étaient situés dans leur fief de Saint-Martin. Mgr Sébastien de Rosmadec, avant de prendre une décision, demanda aux religieuses de lui faire un aveu ou déclaration de toutes leurs propriétés enclavées dans les Régaires. Cet aveu, dressé le 30 mai 1645 mentionnait , deux maisons dans la rue Saint-Yves, le grand pré de Nazareth ou d'Aradon, les terres de Kerubé et de Guersal en Plescop.

L'Evêque se vit obligé d'attaquer cet aveu devant le Parlement, comme très incomplet. Il réclamait notamment la mention des rentes féodales à lui dues sur les immeubles énumérés ci-dessus, et de plus l'aveu pour les prairies et terres avoisinant l'enclos, y compris l'enclos lui-même : c'était la suppression complète du fief de Saint-Martin.

Une sentence des Requêtes du Palais, du 7 juillet 1646, donna gain de cause à l'Evêque, et condamna les Carmélites à réformer l'aveu général fait au Roi dans la Chambre des Comptes, à compléter l'aveu particulier fait à l'Evêque, et à lui payer les rentes féodales et les droits d'acquêt pour les immeubles situés en dehors de leur enclos.

Sur ces entrefaites, le 29 juillet 1646, mourut Mgr Sébastien de Rosmadec. Son successeur, M. Charles de Rosmadec, fit, le 30 août 1648, une transaction avec les religieuses. Il exigea, conformément à la sentence des Requêtes, la réforme d'un nouvel aveu rendu par elles au Roi le 29 mars 1647, la reconnaissance de sa juridiction féodale ou des Régaires en dehors de leur enclos, et le paiement des rentes et des droits d'acquêt ; mais pour le bien de la paix, il se désista de ses prétentions d'aveu, mouvance et droits, sur le pré au dessous de la fontaine du Garnier, acquis le 23 mars 1537, et sur un autre pré voisin, joignant l'enclos, acquis le 28 novembre 1636 de Marguerite Tubouc.

Dans ce partage, Mgr de Rosmadec avait la part du lion ; les religieuses cédèrent aux circonstances, et se réservèrent de faire valoir plus tard leurs prétentions, comme on le verra en 1676.

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TRANSACTIONS

Le R. P. Sérapion de Saint-Joseph, d'Alby, Vicaire de Nazareth, étant mort le 25 février 1663, les Pères Carmes de la province de Touraine interposèrent l'autorité du Révérendissime Père Général Ari, pour ménager leur retour dans la maison, et demandèrent aux religieuses la remise de l'élection d'un nouveau vicaire jusqu'à l'arrivée prochaine du Général. Ce délai fut accordé.

Le R. P. Ari, étant arrivé, proposa pour Vicaire le P. Gabriel de Saint-Joseph, de la province de Touraine, qui fut accepté par la communauté le 15 novembre 1663. 

Le Révérendissime P. Général, étant sur les lieux, s'enquit des droits de la maison, et après en avoir pris une connaissance exacte, il les approuva par son décret du 19 novembre, et défendit aux provinciaux de Touraine de s'immiscer dans le gouvernement d'une maison, qui dépendait directement de lui et du vicaire confirmé par lui ; puis à son retour à Rome, il obtint d'Alexandre VII la révocation du bref d'Urbain VIII et la confirmation des anciens privilèges du monastère.

Le provincial de Touraine, n'ayant pas obtenu tout ce qu'il désirait, se pourvut au Conseil du Roi, ce qui était une faute canonique ; puis, prévoyant un échec, il amena les religieuses et leurs directeurs à soumettre l'affaire à un arbitrage. Les arbitres choisis, qui étaient des conseillers du parlement, des chanoines de la cathédrale et le sénéchal de Vannes, après avoir vu et examiné toutes choses, après avoir entendu tous les intéressés, rendirent leur sentence définitive en 1668.

Dans ce jugement ils reconnaissent que les religieuses sont bien fondées dans le droit d'élire et de conserver à vie leurs vicaires et confesseurs ; mais que, si elles les prennent dans la province de Touraine, le provincial pourra visiter ses religieux tous les deux ans ; que les religieuses ne seront entendues par lui qu'en commun, à moins qu'il n'ait une commission spéciale du Père Général pour les entendre en particulier ; et enfin que s'il a des griefs contre le vicaire ou les confesseurs, il ne pourra ni les suspendre ni les déposer, mais seulement en donner avis au Père Général, qui prendra les mesures qui lui conviendront.

Cette sentence fut acceptée par le R. P. Général, ratifiée par le chapitre provincial de Tours en mai 1669, agréée par les Carmélites de Nazareth, et maintenue malgré quelques tentatives postérieures des provinciaux.

(Extrait d'un mémoire imprimé).

Ces contestations réglées, les religieuses célébrèrent avec la plus grande solennité la canonisation de sainte Madeleine de Pazzi. Voici le récit des fêtes, extrait du Registre du Carmel, et forcément abrégé.

« Notre Saint Père le Pape Clément IX ayant canonisé à Rome, le 28 avril 1669, notre chère soeur Marie-Magdelaine de Pazzi, Carmélite de Florence, nous en avons célébré la solemnité l'année suivante, pendant huit jours. Et pour le faire avec toute la magnificence que nous désirions, notre R. P. Vicaire Gabriel de Saint-Joseph pria le R. P. Léon de Saint-Michel, carme de Rennes, artiste très expérimenté et très habile, de vouloir bien décorer l'église et prendre la conduite des solemnités.

« Mgr l'Evêque de Vannes, Charles de Rosmadec, ayant assigné le dimanche 27 avril 1670 pour le premier jour de cette octave, les Pères Carmes du Bondon et de Nazareth allèrent processionnellement à la cathédrale chercher l'Evêque, le chapitre et le clergé. Monseigneur chanta lui-même la messe, qui fut répondue par la musique. L'après-midi le R. P. Léon prononça le panégyrique de la Sainte, et l'Evêque ayant chanté les vêpres, donna la bénédiction du Saint-Sacrement, au bruit des trompettes et des caissons. La procession, en retournant le soir à la cathédrale, mit le feu à un immense bucher, dont les dernières lueurs furent remplacées par des feux d'artifice.

« Tous les jours de la semaine, l'église et la cour voisine furent insuffisantes pour recevoir les visiteurs. Outre les messes basses, il y eut chaque jour plusieurs messes chantées, et chaque après-midi vêpres, sermon et bénédiction solennelle, avec accompagnement de musique et de coups de canons.

« Les processions de Vannes et des environs y vinrent à tour de rôle, Le lundi 28 avril, le clergé de la ville, puis les Carmes du Bondon arrivèrent processionnellement à Nazareth et y chantèrent successivement la messe. Le mardi 29, on y vit les processions de Noyalo, de Sarzeau, de Saint-Goustan,  d'Arzon et de l'Ile-d'Arz ; le mercredi 30, celles de Grandchamp, de Plescop, de Ploeren et d'Arradon. Le jeudi 1er mai, ce fut au tour de Séné, de Theix, de Treffléan et de Saint-Avé. Le vendredi 2 mai, arrivèrent les processions de Saint-Nolff, de Plaudren, d'Elven et de Surzur ; le samedi 3, celles de Baden, de Plougoumelen, de Pluneret et de Brech.

« Le dimanche 4 mai, jour de la clôture, les Pères Jésuites du collège y amenèrent 300 congréganistes, puis deux chars de triomphe, où figurait l'image de la sainte. La grand'messe fut chantée par les prêtres de la Congrégation et par la musique de la cathédrale, avec les violons et l'orgue. A 3 heures après midi, les vêpres furent chantées en musique, MM. les chanoines étant venus processionnellement pour y assister ; le R. P. Recteur des Jésuites donna la dernière instruction, et Monseigneur officia au salut ; au moment de la bénédiction on entendit les bruits confus des trompettes, des tambours et des canons. En retournant à la cathédrale, on mit le feu à un très grand bucher dressé sur la place devant la porte du monastère.

«  Sur le soir, Monseigneur revint à l'église, pour prier la sainte. Ensuite il entra dans notre grand parloir, où il nous exhorta à imiter notre sainte soeur, et à continuer pour lui nos prières, avouant qu'il se sentoit tout soulagé d'une douleur très grande qu'il avoit eue à une jambe. Après le souper le R. P. Léon fit partir une centaine de fusées, chargées de divers artifices, ensuite il fit tirer le canon, pour clore cette auguste solemnité par le même bruit qui en avoit marqué l'ouverture ».

Toutes ces fêtes attirèrent l'attention de la communauté sur l'église, qui avait besoin d'être largement retouchée. « L'an 1673, dit le même Registre, on commença à travailler à l'augmentation et décoration de notre église, comme aussi au corps de logis qui est au pignon du grand autel ». — La démission du R. P. Gabriel de Saint-Joseph, vicaire, et son remplacement en 1674 par le R. P. Augustin de la Vierge Marie, de Rennes, n'arrêtèrent pas les travaux, et le 7 juillet 1675, Mgr Louis Casset de Vautorte, évêque de Vannes, consacra l'église restaurée : elle avait toujours la forme d'une croix latine ; le maître-autel était naturellement sous le vocable de Notre-Dame du Mont-Carmel ; les autels latéraux étaient dédiées, l'un à saint Martin et l'autre à sainte Marie-Madeleine de Pazzi.

Le caractère bienveillant de Mgr de Vautorte fit penser aux religieuses qu'il se prêterait peut-être à une révision de l'arrangement conclu avec son prédécesseur, en 1647, au sujet du fief de Saint-Martin. En présence des difficultés nouvelles survenues entre l'Evêque et les Carmélites, des amis communs, pris parmi les membres du parlement, intervinrent entre les parties, et le 10 juillet 1676, fut conclue une transaction définitive, en vertu de laquelle, et après examen des titres réciproques, la partie du territoire située à l'est de l'enclos et comprenant spécialement la rue Saint-Martin, resta acquise au fief des Régaires, et la partie située à l'ouest du couvent, sauf une prairie touchant la maison des cordiers de la Madeleine, fut attribuée tout entière au fief de Saint-Martin. Les recettes faites jusqu'à ce jour restèrent au profit de chacun, comme les procédures restèrent à la charge des deux parties. Cet arrangement fut signé au palais épiscopal de la Motte, entre Mgr de Vautorte, évêque de Vannes, et le R. F. Augustin de la Vierge Marie, vicaire de Nazareth, et ratifié ensuite par les religieuses.

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AMELIORATIONS

L'enclos de la communauté s'était graduellement élargi. Il ne comprenait à l'origine que l'espace carré entourant le monastère. En 1645, le R. P. Jean Tuaut, vicaire, y avait ajouté un jardin, et un bout de prairie. En 1679, le R. P.  Augustin de la Vierge Marie fit enclore tout le terrain situé à l'ouest, pour le mettre à la disposition des religieuses.

« Le travail étant parachevé, dit le Registre du Carmel, on a procédé à la bénédiction le 27 may 1680, qui était le premier jour des Rogations. Le R. P. Vicaire, assisté de nos RR. PP.  confesseurs Félix, Romain et Elisée, tous revêtus des habits sacerdotaux, s'est rendu au choeur des religieuses, vers les 9 heures du matin, et a déclaré à la communauté qu'il assignait le dit espace de terre nouvellement clos, pour être dès à présent et à l'avenir compris dans la clôture des religieuses, avec liberté à elles d'y aller et d'en user tout ainsi que des autres terres ci-devant assignées pour leur clôture, ajoutant qu'il désiroit que cet enclos fût appelé la Sainte-Famille.

En suite le R. P. Félix présentant l'eau et le sel, le R. P. Vicaire en a fait la bénédiction, et lui a donné la commission d'asperger au devant de la communauté ; laquelle chantant les litanies des Rogations l'a suivi, en descendant par les degrés de la procure, et allant tout le long de la cour, jusqu'à la porte du nouvel enclos Là, le R. P. Vicaire a chanté la bénédiction et a jeté de l'eau bénite. Ensuite il est entré le premier et a fait entrer la communauté, laquelle reprenant le chant des litanies a marché à main gauche, faisant le tour, pour rentrer par la même porte dans l'ancien enclos ; puis retournant par le même chemin que l'on étoit venu, on a été au choeur, où l'on a achevé les litanies, et le R. P. Vicaire a chanté les versets et les oraisons.

Comme dans la maison l'on n'avait pas de mémoire que l'ancien enclos, qui est contigu au couvent, et l'enclos que l'on appelle la terre et le précipice, eussent été jamais bénits solennellement, le R. P. Vicaire, à la demande des religieuses, a destiné les deux jours suivants, pour y procéder de la même manière. Le lendemain 28 may, second jour des Rogations, pour bénir l'ancien enclos, la procession est partie du choeur en chantant les litanies, puis descendant par les degrés de la procure, et allant à main gauche le long du cloître jusqu'à la porte par où l'on entre du bas du réfectoire dans le jardin, elle s'y est arrêtée, pendant que le R. P. Vicaire a fait la bénédiction. Puis on y est entré, en reprenant les litanies, et tournant tout autour et par dedans le dit ancien enclos, jusqu'au long des infirmeries nouvelles et anciennes et le pavillon de l'apothicairerie, pour rentrer au couvent et retourner au choeur par la même porte par laquelle on étoit venu.

« Le mercredi, troisième jour des Rogations, la pluie a empêché d'en faire autant à l'enclos de la terre. Cela a été remis au 12 may 1681, qui étoit le lundi des Rogations. Pour cet effet la procession est partie du choeur, en chantant les litanies et passant par la galerie du Saint-Sacrement, pour descendre par les degrés de l'infirmerie, et aller directement par la grande allée du jardin jusqu'à la porte de la dite terre ; où étant et la communauté rangée en la même allée en double haye, le R. P. Vicaire s'est avancé avec les officiers près la porte, et a fait la bénédiction ; ensuite on a repris les litanies et on est entré dans la terre, dont on a fait le tour, jusqu'à l'allée des lauriers, par laquelle on est revenu le long de la muraille de la prée, et on est retourné au choeur par le même chemin que l'on étoit venu ».

Le R. P. Augustin de la Vierge Marie, Vicaire depuis 1674, mourut le 26 juin 1689. Il eut pour successeur le R P. Hilarion de Sainte-Thérèse élu le 18 juillet suivant. Celui-ci établit, dès le 21 novembre 1690, pour les Pères et les Soeurs, l'usage de renouveler leurs voeux de religion, tous les ans, à pareil jour, devant le Saint-Sacrement exposé. Cette pratique, si avantageuse à la piété, a été conservée à Nazareth jusqu'à la Révolution.

Ouvrons encore l'intéressant Registre du Carmel.

« Le 2 avril 1691 , dans la seconde visite canonique que nous a faite le R. P. Hilarion de Sainte-Thérèse, notre Vicaire, la plus part des religieuses lui ont demandé de nous accorder tous les ans une grâce que son prédécesseur avait eu dessein de nous concéder, qui étoit de porter le T. Saint-Sacrement à la procession que nous faisons dans l'octave de la fête. Il l'a accordé avec joie, voyant que la communauté correspondoit aux désirs qu'il avoit de notre bien et avancement spirituel. Le jour assigné pour cette sainte et auguste procession a été le dimanche dans l'octave du Saint-Sacrement. A la fin des vêpres, qui ont été chantées à deux heures, notre R. P. Vicaire est entré, accompagné de nos trois confesseurs, et a été prendre le T. Saint-Sacrement, qu'il avoit posé à la grille, par la fenêtre de la communion ; ensuite, la communauté précédant le Saint-Sacrement est descendue au cloître, ou l'on avoit dressé de beaux reposoirs, en chantant plusieurs hymnes à la louange de Dieu. — L'année suivante, cette procession s'est faite le vendredi dans l'octave, et il a été arrêté qu'elle seroit désormais fixée à ce jour, afin de ne pas retirer les religieuses de l'assistance devant le Saint-Sacrement, pour parer les cloîtres, chacune s'empressant de les parer de son mieux ».

Les intérêts spirituels ne faisaient pas oublier les besoins temporels. « L'an 1692, le logement des domestiques du dehors étant fort vieux et très mal situé, le R. P. Hilarion de Sainte-Thérèse, notre Vicaire, du consentement de la communauté, l'a fait abattre ; et au lieu qu'il étoit vis-à-vis et très proche du logement de nos R. R. Pères, ce qui leur étoit très incommode et mal-séant, pouvant voir dans les chambres des servantes et être vus d'elles, il a jugé à propos de le faire rebâtir aux deux bouts de la cour : la cuisine et la chambre au dessus pour les servantes, à l'entrée de la cour, et les officines et logement des serviteurs à l'autre bout. Entre les deux il fit un petit jardin, orné et fermé d'une balustrade de pierres de taille, avec une porte au milieu, un crucifix au dessus, et aux côtés de la porte deux statues de pierre, l'une de notre Bienheureuse fondatrice la duchesse Françoise d'Amboise, l'autre de Sainte Magdeleine de Pazzi, afin d'exciter la dévotion et d'apprendre aux étrangers que nous sommes des Carmélites.

« Suivant une délibération de la communauté du 9 may 1694, le R. P. Hilarion a fait abattre une maison proche l'église, appelée Saint-Martin et qui menaçoit ruine. Avec les matériaux, il a fait bâtir deux chambres au dessus de notre portail, pour loger les personnes qu'on ne peut s'exempter de recevoir, et un petit parloir pour les affaires particulières, qui est aujourd'hui (1785) celui de la procureuse.

« Par une délibération du même jour, il a fait aussi transporter un colombier que nous avions à Kercair, où il nous étoit inutile, et l'a fait rebâtir dans notre enclos (à l'angle sud-est du jardin) ; le tout a été achevé l'année suivante.

«  L’an 1695, le R. P. Hilarion a établi la chapelle de Sainte-Anne dans notre enclos (près du colombier). La R. M.  Julienne du Boschet de Saint-Joseph, qui étoit prieure alors, a mis la première pierre le 29 juillet ; toute la communauté y a assisté, chantant des hymnes à l'honneur de sainte Anne. La dite chapelle, avec son rétable, ses statues et tout le reste, étant achevée, a été bénite le 22 septembre 1696 par notre R.  P. Vicaire. Elle a coûté 945 livres 13 sols, que notre R. P.  Vicaire a fournis de l'argent qu'il avoit eu de ses parents pour faire un voyage à Rome, à la réserve de 180 livres, qu'un ancien domestique tailleur, nommé Thomas, avoit données en mourant ».

A l'angle nord-ouest du même enclos, on établit, comme pendant, un oratoire dédié à sainte Marie-Madeleine.

« En 1703, le R. P. Hilarion fit placer six grandes statues dans la nef de l'église, ainsi que tous les bas-reliefs à corniche, et tous les autres ornements représentant la vie de la Bienheureuse Françoise d'Amboise, et aussi la grande balustrade de fer faisant le tour de l'église : il fit faire le tout à ses frais, comme bienfaiteur ».

Ce fut sa dernière oeuvre : il mourut le 16 juin 1705, et le R. P. Colomban de Saint-Jean-Baptiste fut élu pour lui succéder le 6 juillet suivant.  

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CONFLITS

Le nouveau Vicaire vécut longtemps en paix avec ses religieuses. Mais en 1717, trouvant que la communauté était assez riche, il lui imposa l'obligation de recevoir désormais et à perpétuité 24 novices sans dot.

Les religieuses, en présence de cet excès de pouvoir, en appelèrent au Révérendissime Père Général Cornaccioli, qui délégua, par acte du 18 janvier 1718, pour instruire et terminer l'affaire, le R. P. Joseph Calmel de la Nativité, docteur de Sorbonne, et religieux du grand couvent des Carmes de la place Maubert de Paris.

« Le R. P. Commissaire, dit le Registre du Carmel, après avoir lu et examiné, avec toute l'application et toute la maturité requises, tous nos actes de fondation, ayant trouvé l'ordonnance du R. P. Colomban entièrement opposée à tous nos privilèges et statuts, a cassé et annullé ladite ordonnance, et déchargé la mère prieure et la communauté de toutes les injonctions y contenues, a pareillement et expressément défendu au R. P. Colomban et à tout autre religieux. et religieuse de troubler la paix pour raison de ce, sous telles peines canoniques que de droit.

« Mais le R. P. Colomban ne voulut pas se soumettre à la sentence portée contre lui. — Ayant appris d'ailleurs qu'il portait nos affaires au dehors, malgré les défenses que nous en font nos lois, et que des avocats de Rennes avaient des mémoires, écrits de sa propre main et remplis d'invectives contre la R. M. prieure, contre la plus grande partie de la communauté et contre le T. R. Père Commissaire, nous avons trouvé dans toutes ces raisons des motifs suffisants pour le destituer de la place qu'il occupoit, conformément au pouvoir que nous en donnent nos statuts, et à la patente de notre Révérendissime P. Général du 31 janvier 1719, par laquelle il destitue ledit R. P. Colomban de sa place de vicaire, et nous ordonne de procéder à l'élection d'un autre supérieur. Cette sentence a été reçue par une délibération, signée de toute la communauté, le 27 février 1719.

En conséquence, le R. P. Colomban a été renvoyé dans sa province, par un ordre exprès du Roi du 17 mars suivant. Il a été vicaire quatorze ans, et il a causé durant ce temps bien des troubles dans notre communauté, et occasionné des procès qui ont coûté plus de six à sept mille livres à la maison, comme on peut le voir dans nos livres de mises. Ce R. P. avant de mourir, demanda pardon à notre communauté de tous les chagrins qu'il lui avait causés, et pour marque d'une parfaite réconciliation, il a envoyé à notre R. M. Prieure une croix d'argent, pleine de reliques de saints ».

Le R. P. Joseph Calmel de la Nativité, ayant rempli sa mission, comptait retourner à Paris ; mais les religieuses de Nazareth l'en empêchèrent en le choisissant pour vicaire le 29 juillet 1719. Il résista d'abord et finit par accepter. Durant sept ans, il maintint la paix et le bon ordre dans la maison.  Mais, désireux de rentrer dans son couvent, il donna sa démission le 9 octobre 1726. L'un des confesseurs, le P. Tiburce, partit le mois suivant, et il ne resta plus que le P. Dominique et le P. Juvénal, de la province de Touraine. 

Ceux-ci, voulant avoir un vicaire de leur province, travaillèrent activement près des religieuses, et mirent la division dans la communauté. Informé de ces faits par la prieure, Mgr Antoine Fagon, évêque de Vannes, par une ordonnance du 19 juin 1727, priva quelques religieuses de voix au chapitre, retira aux deux Pères Carmes le pouvoir de confesser et nomma des prêtres séculiers pour les remplacer. D'un autre côté, le Roi, se mêlant de ce qui ne le regardait pas, ordonna de faire l'élection d'un vicaire et de trois confesseurs.

Une première élection eut lieu, le 16 septembre 1727, en faveur d'un vicaire et de trois confesseurs, de la province d'Aquitaine. Ce choix n'ayant pas été agréé, une seconde élection eut lieu le 21 octobre suivant, et le R. P. Jean-Baptiste Montagne, de Saint-Eugène, custode de Touraine, fut désigné comme vicaire, et le R. P. Louis de Saint-François, prieur de Dol, comme confesseur.

Le Révérendissime Père Général, Gaspard Pizolanti, évêque de Cervie, confirma, par acte du 21 janvier 1728, l'élection du vicaire et celle du confesseur, en maintenant à leur poste les deux anciens confesseurs, les PP. Dominique et Juvénal. En ce qui concerne les confessions des religieuses, le Père général empiétait ici sur les droits de l'évêque diocésain.

Aussi Mgr Fagon protesta dès le 28 février... «  Comme le Père général, dit-il, par son ordonnance veut gêner les consciences des religieuses, en les privant des confesseurs qu'elles nous auraient requis de leur donner, et en les contraignant de se confesser aux quatre religieux Carmes, qui sont présentement dans la maison, dont nous avons interdit deux, et refusé nos pouvoirs aux deux autres ; pour remplir notre sollicitude pastorale et maintenir les droits attachés à notre caractère..., Nous déclarons que les dits quatre religieux Carmes, de quelques privilèges et exemptions qu'ils puissent se prévaloir, n'ont aucun caractère ni authorité pour confesser dans notre diocèse les religieuses de Nazareth, ny aucun autre de nos diocésains, que les confessions qui leur sont faites et celles que leur font les dites religieuses sont nulles, qu'ainsi elles ne peuvent et ne doivent se confesser à eux, quelque ordre qu'elles en puissent avoir de leur Père général, les dits religieux n'étant point approuvés de nous... ».

Le conflit des pouvoirs était donc bien prononcé, et il pouvait durer longtemps ; mais bientôt il fut aplani par la Providence. Le Révérendissime Père Général Gaspard Pizolanti fut remplacé en 1728 par le R. P. Amable Feydeau, d'un caractère conciliant, et le R. P. Vicaire de Nazareth touchait à sa fin. Celui-ci, prévenu contre la R. Mère Prieure, Louise Le Febvre de Sainte-Ursule, et contre plusieurs des religieuses, ne craignit pas de les traduire au conseil du Roi, malgré les recommandations de l'Eglise : il voulait leur faire élire deux confesseurs, dont elles ne voulaient pas. Il mourut le 6 mai 1728.

Son décès fut suivi d'un coup d'autorité de la part du Roi, savoir l'exil de trois soeurs, en vertu de trois lettres de cachet, qui leur furent signifiées le 18 mai. La Mère de la Goublaye de l'incarnation, discrète, fut envoyée chez les Carmélites réformées de Guingamp, la Mère du Bourgblanc de Beaurepaire, procureuse, chez les Carmélites de Ploërmel, et la soeur Prudence Le Seneschal de l'Assomption chez les Carmélites réformées de Morlaix.

Cependant le Roi, se substituant aux autorités ecclésiastiques, prescrivit la nomination d'un nouveau vicaire et de deux confesseurs, et enjoignit aux Carmélites de renvoyer au Révérendissime P. Général le choix de ces trois religieux, pour cette fois seulement, sans tirer à conséquence pour l'avenir : ce qui fut accepté par la communauté réunie.

Le Révérendissime Père Feydeau, voulant garder un juste équilibre, et bannir tous les intérêts particuliers, choisit les trois religieux dans trois provinces différentes ; par un acte du 26 août 1728, il nomma le R. P. Augustin de Saint-François, prieur de Bayonne, de la province de Bordeaux, en qualité de vicaire, le R. P. Elisée de Saint-Claude, de la province de Narbonne, et le R. P. Michel de Saint-Ange, de la province d'Aquitaine, comme confesseurs, le R. P. Louis de Saint-François, de la province de Touraine, étant maintenu au même titre.

Le Roi accepta toutes ces nominations, et le 5 octobre suivant il prescrivit à la communauté de s'y soumettre : ce qui se fit sans difficulté.

L’Evêque de son côté accepta la transaction, et donna les pouvoirs spirituels aux confesseurs.

Les religieuses exilées, reconnues enfin innocentes, furent rappelées par ordre de la cour le 5 décembre 1728. 

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DIVERS

Le R. P. Augustin de Saint-François, Vicaire, gouverna la communauté de Nazareth durant 22 ans, sans éprouver de difficulté, parce qu'il sut respecter toujours les droits des religieuses.

De son temps, les Carmélites voulurent faire diverses réparations aux bâtiments du monastère et aux édifices accessoires, dont les uns avaient souffert du feu et les autres s'en allaient de vétusté. Pour se procurer des ressources, elles songèrent à la vente des bois situés sur leur propriété de Kerlevenez, en Bothoa. Elles obtinrent à cet effet, le 16 mai 1730, l'autorisation du Roi, « à la charge par les adjudicataires d'en remettre le prix aux mains du receveur général des domaines et bois de Bretagne, pour être employé, sur les ordonnances du sieur grand maître, aux réparations les plus urgentes à faire aux bâtiments du monastère, suivant l'adjudication au rabais qui en sera faite par le dit sieur grand maître ...» — Voilà où en était arrivée la propriété religieuse par l'envahissement graduel de l'administration civile. Le propriétaire ne pouvait plus vendre ses arbres sans autorisation, il n'en touchait pas le prix, il ne faisait pas le marché des réparations, il était traité en mineur et en interdit ; il ne restait plus qu'à le dépouiller, et la Révolution le fera dans quelques années.

Le R. P. Augustin de Saint-François mourut le 22 août 1750, et eut pour successeur le R. P. Denis de Saint-Martin, élu le 17 octobre suivant. Il vit les religieuses faire, le 15 septembre 1752, un échange de terrain avec M. de Lescouet, seigneur du Menémur ; elles lui cédèrent un petit bois taillis, de deux journaux, enclavé dans les dépendances du Menémur et reçurent en retour un pré de deux journaux, situé prés de Limoral, à l'angle du chemin de Bernus et du chemin de la Madeleine. Cet acte fut sanctionné par lettres patentes du roi Louis XV, données à Fontainebleau au mois d'octobre 1752.

Le nouveau Vicaire était, paraît-il, d'un caractère entier, qui voulait gouverner, sans tenir compte des droits d'autrui. Il en résulta de nouveaux troubles, dont la responsabilité lui appartient. Voici comment le Registre du Carmel les raconte.

« Le R. P. Saturnin, l'un de nos confesseurs, mourut le 12 avril 1752. Le R. P. Denis de Saint-Martin, notre Vicaire, prétendant avoir le droit de nous obliger à élire un des religieux qu'il lui plairoit de nous présenter pour confesseur, a assemblé la communauté le 6 juillet 1752, pour l'élection d'un autre confesseur, et a présenté en même temps des réglements contenus en huit articles, qu'il avoit obtenus du Révérendissime Père Louis Laghi, notre Général, le 14 février 1752, et un arrêt du Conseil du Roi, du 17 juin de la même année, avec une lettre de cachet, qui en ordonnoit l'exécution, et qui a été signifiée à la communauté par M. le subdélégué de Vannes.

« A quoi la communauté n'a rien répondu, sinon qu'elle se soumettoit à l'autorité supérieure. L'élection a été faite à l'unanimité en faveur du R. P. Paul Berthelot de Saint-René, qui sortoit de la charge de prieur du couvent de Rennes.

« Après avoir procédé à la dite élection, quinze religieuses ont protesté contre les dits règlements, comme contraires à nos privilèges, et injurieux autant à nous qu'à nos confesseurs ; se réservant de représenter à Sa Majesté leurs très humbles remontrances, pour lui faire connoitre que sa justice avoit été surprise.

« Cependant le R. P. Vicaire, croyant gagner les opposantes, a demandé au Révérendissime P. Général et obtenu le 4 juin 1754, une modification du 8e article, qui regarde les confesseurs, dont il a fait lecture à la communauté le 4 juillet suivant. Sur quoi les opposantes ont répondu que la modification du 8e article supposant l'acceptation des sept autres, elles ne consentoient ni à la dite modification, ni aux autres articles.

« En conséquence elles se sont pourvues devant Sa Majesté. Mais le Roi a donné ordre au subdélégué de M. l'Intendant de la province de se transporter dans notre communauté, et d'y faire lecture d'une lettre de cachet adressée aux religieuses, portant en substance que Sa Majesté, voulant terminer toute discussion au sujet des élections des confesseurs, avait commis le dit subdélégué pour ouïr chacun des partis en particulier, et recevoir par écrit les raisons de part et d'autre, afin de les envoyer à M. le comte de Saint-Florentin, secrétaire d'Etat, et de statuer sur la matière en question ce qui seroit convenable. Mais cette commission n'a pas eu tout l'effet qu'on en attendoit ».

Il est souverainement regrettable de voir l'autorité royale se compromettre ainsi, à chaque instant, dans des questions minutieuses de droit monastique ou de droit ecclésiastique et se substituer aux juges naturels des parties. Dieu, qui est jaloux de la liberté de son Eglise, allait bientôt briser toutes ces chaînes, et ceux qui les forgeaient.

« Vers la fin de 1754, notre R. P. Vicaire s'est retiré à Paris, au couvent de la place Maubert, mais sans donner sa démission : ce qui nous a mises dans un grand embarras. Nous étions sans Vicaire, et presque sans confesseurs, car l'un étoit aussi à Paris depuis près de deux ans, un autre qui avoit été élu dès 1753 ne venoit point à cause des troubles et des divisions qui régnoient dans la communauté, et il ne nous en restoit qu'un (le P. Elisée de Saint-Claude) qui étoit aveugle depuis plus de vingt ans ; en sorte que nous étions obligées de recourir à des externes depuis cinq à six ans, quand enfin le R. P. Vicaire donna sa démission le 22 janvier 1760.

Le 20 mai suivant, eut lieu l'élection du R. P. Paul Berthelot de Saint-René, en qualité de Vicaire, et tout rentra dans l'ordre... Le dit R. P. de concert avec la prieure et les discrètes, voyant que le clocher de l'église menaçoit ruine, le fit abattre en 1769, et le remplaça par un autre plus solide et plus beau, qui coûta 2,683 livres. On fit aussi en même temps un petit campanile au dessus de la maison des Pères ».

Le R. P. Paul Berthelot de Saint-René mourut le 6 novembre 1770, et fut remplacé par le R. P. Eustache Mingant de Saint-Joseph, élu le 14 janvier 1771. C'est sous son gouvernement que fut rédigé le Registre du Carmel, qui nous a conservé tant de notes intéressantes. Il fut écrit par le R. P. Barthélemy Rousset de Saint-Pardoux, l'un des confesseurs de la maison, et « extrait mot-à-mot et avec beaucoup d'exactitude d'un ancien original et des livres de décisions, et mis dans un nouvel ordre, pour servir d'instrution aux religieuses qui liront ce livre. Fait et achevé à Nazareth le 12 avril 1774 ».

Il est intitulé : « Livre des choses remarquables qui se sont passées depuis le commencement de notre établissement, contenant les noms et le nombre des religieuses venues des Coëts et de celles qui ont été reçues à Nazareth ; les noms et le nombre des prieures ; les noms et le nombre des Vicaires et confesseurs , et plusieurs autres choses curieuses et remarquables ».

Le R. P. Eustache Mingant, Vicaire, mourut le 17 novembre 1777, et eut pour successeur le R. P. Calixte Desmoulins, élu le 19 janvier 1778. Il approuva le marché fait en 1782 entre la communauté et le frère Florentin Grimont, pour la réfection de l'orgue ; les frais montèrent à 600 livres, sans compter la pension et le logement du facteur pendant un an, et la fourniture des matériaux nécessaires, en sorte que la réparation revint à la communauté à près de deux mille livres.

Le R. P. Barthélemy Rousset, qui avait écrit le Registre historique, mentionné ci-dessus, le continua depuis 1774 jusque vers 1787, où la maladie l'arrêta ; il mourut le 16 janvier 1789, à l'âge de 76 ans et demi, et fut enterré dans la chapelle de Sainte-Madeleine de Pazzi, dans une tombe du côté de l'Epitre. Il mourut à temps pour ne pas être témoin de l'orage révolutionnaire, qui s'avançait menaçant.

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REVOLUTION

L'Assemblée nationale, dès le 2 novembre 1789, avait mis tous les biens ecclésiastiques à la disposition de la nation. Et afin que rien n'echappât, elle prescrivit bientôt d'en dresser partout des inventaires détaillés.

Voici celui qui fut fourni par les Carmélites en 1790, et arrêté en Directoire à Vannes le 2 janvier 1791, par MM. J. Glais, Brulon, Bernard et Rollin.

Dans ce tableau, les revenus en grains furent réduits en argent, à raison de 27 l. 7 s. 1 d. la perrée de froment, 17 l.  4 s. 9 d. la perrée de seigle, 8 l. 1 s. 4 d. la perrée d'avoine 20 l. 1 s. 2 d. la perrée de mil, mesure de Vannes, 12 sous 6 d. le chapon, et 6 sous la livre de beurre.

I. Revenus.

Les droits du fief de Saint-Martin, affermés... : 135 livres.

Plusieurs maisons, jardins et prés, situés à Vannes : 650 livres.

Trois prairies réservées près de l'enclos : 317 livres 3 d.

Trois autres prairies, affermées à divers.... : 254 livres.

Deux maisons et terres, près du Bondon : 303 livres 14 sous 2 d.

La terre de Lanrodec, en Plouagat-Châtelaudren : 6,000 livres.

La terre de Kerlevenez, en Bothoa : 1,600 livres.

La terre de Beaumarais et tenues en Grandchamp : 1,901 livres 15 s. 10 d.

Le pourpris de Kerquer, prés Vannes : 245 livres.

Les métairies de Kerquer, Saint-Guen, Kerizac, Landréhan : 1,633 livres 12 s. 5 d.

Les terres de Kerguélo et tenues en Plaudren : 1,261 livres 15 s. 8 d.

La terre du Clérigo et dépendances en Theix : 2,171 livres 4 s. 4 d.

La métairie du Halinier, en Elven : 342 livres 14 s.

Tenues en Bignan, Saint-Jean, Moustoirac, Plumelin : 2,695 livres 13 s. 5 d.

Les terres de Kerlevenan et de Brambec, en Plescop : 3,363 livres 4 s. 4 d.

La métairie de Moustoirien, en Séné : 266 livres 3 s. 9 d.

Trois tenues congéables, en Arradon : 492 livres 17 s. 10 d.

Une terre et deux convenants, en Saint-Nolff : 117 livres.

Une tenue à Rescluès, en Plurmergat : 41 livres 13 s. 8 d.

Rente foncière sur le domaine de Rhuys : 640 livres.

Rentes sur des particuliers et un pré à Sarzeau : 180 livres 18 s.

Rente foncière sur le comté de Rochefort : 180 livres.

Rente foncière sur une maison à Hennebont : 180 livres.

Rentes foncières à Nantes, Redon, Hennebont : 29 livres 19 s. 6 d.

Rente constituée sur le clergé de Vannes : 88 livres.

Rente constituée sur les tailles de Bretagne : 124 livres 16 s.

Rente constituée sur l'Hôtel de Ville de Paris : 557 livres 15 s.

Rentes sur divers particuliers : 729 livres.

Total : 26,602 livres 8 sous 2 deniers.

II. Charges.

Les décimes de la communauté : 1,786 livres.

Rente due au prieuré de Saint-Martin : 48 livres 6 s.

Rente due au prieuré de Saint-Guen : 75 livres 11 s. 9 d.

Rente due au domaine de Rhuys : 48 livres 6 s.

Rente due à la chapellenie de Saint-Vincent : 1 livre 19 s. 7 d.

Rente due aux Carmes du Bondon : 1 livres 4 s.

Rente due aux Dames de la Visitation : 14 livres 16 s. 7 d.

Rente de froment due à l'Evêque : 232 livres 10 s. 2 d.

Total : 2,208 livres 14 sous 1 denier.

En défalquant les charges foncières, on voit que le revenu net était de 24,393 livres 14 sous 1 denier — Avec cette somme, il fallait entretenir les bâtiments de la ville et de la campagne, nourrir et habiller la communauté, pourvoir au culte, payer les domestiques, etc...

La communauté comprenait alors (1790) 35 religieuses professes dont 26 dames de choeur :

1° Marie-Joseph Cudon, de Sainte-Agathe, prieure, professe en 1767.

2° Jeanne Le Métayer, de Sainte-Claire, professe en 1748.

3° Angélique Ryo, de Sainte-Rosalie, professe en 1749.

4° Catherine Le Nepvou, du Cœur-de-Jésus, prof. en 1759.

5° Nymphe de Gouyon, de Saint-Paul, prof. en 1764.

6° Marie-Joseph Frogerais, de Saint-Raphael, prof. en 1765.

7° Marie-Vincente Kerberon, Marie-de-Jésus, prof. en 1765.

8° Anne Guyornard du Roscoet, Catherine-de-Jésus, professe en 1767.

9° Susanne Renault, de Sainte-Pélagie, prof. en 1767.

10° Vincente Renault, de Sainte-Ursule, prof. en 1767.

11° Marie-Anne Jamet, de Sainte-Euphrasie, prof. en 1768.

12° Françoise Guyomard du Roscoet, des Anges, prof. en 1771.

13° Louise Bocou de Lézunan, de Sainte-Félicité, prof. en 1771.

14° Louise Conan, de Saint-Gabriel, prof. en 1772.

15° Perrine Prévost, de Saint-Joseph, prof. en 1772.

16° Marguerite Clément, de Saint-Basile, prof. en 1773.

17° Marie-Fr. Juguet-Villero, de Saint-Hyacinthe, prof. 1773.

18° Perrine-Marguerite Caradec, de Sainte-Scolastique, professe en 1775.

19° Marie-Rose Caro, de Sainte-Elisabeth, prof. en 1776.

20° Marie-Modeste Lavergne, de Sainte-Angélique, prof. 1777.

21° Catherine Macé, de Saint-Emmanuel , prof. en 1778.

22° Marie-Louise Grignon, de Sainte-Constance, prof. en 1780.

23° Anne Le Bart, de Sainte-Reine, professe en 1781.

24° Marie-Jeanne Courtel, de Saint-Augustin, prof. en 1783.

25° Marie-Geneviève Dupleix-Sylvain, de Saint-Fidèle, professe en 1785.

26° Marie-Anne Lavergne, de Sainte-Cécile, prof. en 1786.

Soeurs converses :

27° Catherine Flahec, de Sainte-Marguerite, prof. en 1750.

28° Mathurine Galais, de Sainte-Marie, prof. en 1752.

29° Perrine Le Pelletier, de Sainte-Julie, prof. en 1758.

30° Olive Le Flahec, de Sainte-Céleste, prof. en 1758.

31° Augustine Clément, de Sainte-Monique, prof. en 1769.

32° Marguerite Quilliau, de Saint-Joachim, prof. en 1774.

33° Vincente Le Thaumour, de Saint-François, prof. en 1783.

34° Perrine Philippe, de Saint-Nicolas, prof. en 1784.

35° Julienne Samson, de Saint-Vincent, prof. en 1789.

Toutes ces religieuses, interrogées au mois de novembre 1790, sur leur intention de continuer ou de cesser la vie commune, répondirent unanimement qu'elles voulaient la continuer.

Les quatre religieux Carmes, savoir, les RR. PP. Jean-François Desmoulins, vicaire, Jacques-Joseph Magny, Etienne Carrat, et Paul Durieux, confesseurs, firent la même déclaration.

Le 1er juin 1791, la chapelle des Carmélites, par ordre du directoire du département, fut fermée au public et réservée aux seules religieuses.

Le 1er octobre 1792, les Carmélites furent brutalement expulsées de leur monastère ; et quelques jours après, elles furent invitées à quitter leur costume et à se retirer dans leurs familles.

En novembre 1793, cinq d'entre elles, les soeurs Ryo, de Gouyon, Kerberon, du Roscoet et Caro, furent détenues à l'hôpital Saint-Nicolas, avec beaucoup d'autres religieuses, et n'en sortirent qu'au commencement de 1795.  Pendant ce temps, on vendit nationalement, les uns après les autres. tous les biens appartenant au couvent de Nazareth, et situés à Vannes et ailleurs.

L'Etat ne conserva guère pour lui que le couvent et l'ancien enclos, et y établit une manutention militaire. Plus tard, vers 1825, le département obtint tout le terrain situé à l'est, et y construisit une prison départementale ; la manutention conserva toute la partie située à l'ouest : la ligne de démarcation, allant du nord au sud, traversait le cloître et l'église.

L'emplacement de la maison et du jardin des Pères Carmes avait été déjà converti en une place publique, qui conserve le nom de Nazareth. Le reste de l'enclos, comprenant les trois quarts de l'ancienne propriété, après être passé en différentes mains, appartient à partir de 1874 aux Petites-Soeurs des Pauvres.

J.M. Le Mené

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