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ROBERT SURCOUF DEVIENT ARMATEUR

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RETOUR EN FRANCE DE SURCOUF - SES DÉMÊLÉS AVEC LE GÉNÉRAL DECAEN - IL DEVIENT ARMATEUR - SES DERNIÈRES ANNÉES - SA MORT.

Le corsaire Robert Surcouf (1773-1827)

Depuis quelques années, l’île de France se trouvait entièrement abandonnée à ses propres ressources ; les hommes manquaient pour la défendre, le matériel naval faisait défaut et la citadelle française de l'Océan Indien était à la merci d'un coup de main. Surcouf constata avec une extrême tristesse qu'il ne pouvait entreprendre une troisième croisière. Il résolut de revenir mettre en sûreté, en France, la nouvelle fortune qu'il avait acquise et particulièrement les véritables richesses capturées sur la Concecao. A cette fin, il avait déjà commencé à armer le Revenant en aventurier, lorsque le général Decaen le réquisitionna pour la marine de l'Etat. Cet acte du gouverneur produisit sur l'esprit de Surcouf l'effet d'une étincelle sur un tonneau de poudre. Il eut un accès de colère terrible, saisit deux pistolets et déjà sortait dans l'intention de brûler la cervelle au général ; très heureusement, ses amis le désarmèrent et le calmèrent un peu. Son entrevue avec le général fut des plus orageuses. Celui-ci allégua les intérêts supérieurs de l'Etat et fit au corsaire menace de l'embarquer de force, comme enseigne, sur son propre navire. Surcouf faillit lui bondir à la gorge. Le gouverneur vit bien qu'il avait été trop loin et essaya de faire entendre raison d'une autre manière au rude homme de mer.

Des armateurs achetèrent pour Surcouf la vieille frégate de l'Etat, la Sémillante. Il la fit transformer, la baptisa le Charles, la remplit des dépouilles des Anglais et des Portugais, et compléta son équipage — avec des étrangers et des prisonniers ; — la majeure partie des marins du Revenant et son état-major étaient passés au service de l'Etat. Au dernier moment, le gouverneur le contraignit à embarquer les officiers portugais de la Concecao ; mais lorsqu'il eut obtenu la libre pratique, Surcouf les renvoya à terre avec le pilote. Decaen, déçu et furieux ouvrit des poursuites judiciaires contre le corsaire et fit mettre ses biens sous séquestre.

Le Charles voguait maintenant vers la France. A l'approche de nos côtes, Surcouf dut encore recourir à toute son habileté de marin, à toutes ses ruses de corsaire pour échapper aux pontons d'Angleterre. Pendant plusieurs jours consécutifs, le Charles fut en branle-bas de combat. Un matin, Surcouf se trouva au beau milieu de la flotte de blocus du port de Brest ; il profita des formes de sa frégate pour la faire passer pour un vaisseau britannique, imitant tous les mouvements de l'ennemi. Cette situation dura tout un jour, qui parut interminable. Le Charles fut reconnu seulement vers le soir ; il se couvrit de voiles et put se sauver à la faveur des ténèbres. La frégate entra enfin dans la Manche, et mit le cap sur Saint-Malo.

Dans les eaux de Bréhat, le Charles hisse pavillon français et demande un pilote ; il est pris pour un anglais et c'est à coups de canons qu'on l'accueille. Surcouf est anxieux, car ces parages sont semés d'écueils, voici que l'exaspérante méprise se continue : toutes les barques de pêche fuient à l'approche de la frégate. Est-elle donc condamnée à se briser sur un récif à l'entrée du port ? Enfin Surcouf parvient à se faire entendre d'un pêcheur qui pilotera le Charles dans les passes de la baie. La frégate pénètre dans la Rance pour venir mouiller sous la tour Solidor, mais un courant irrésistible l'entraîne soudain sur l'écueil de la Mercière. Devant le péril imminent, le pilote improvisé perd la tête.

« Nous sommes perdus ! nous sommes perdus ! » crie-t-on de toutes parts.

« Pas encore, » s'écrie Surcouf. Il saisit le pêcheur à la gorge et, d'un coup de porte-voix, l'envoie rouler, à moitié assommé, sur le pont. Avec un prodigieux sang-froid, il arrive à faire virer de bord sa frégate et à la ramener dans la grande rade.

Cette scène poignante s'était passée sous les yeux d'une foule considérable, qui avait reconnu le pavillon du corsaire. La réception fut enthousiaste.

Surcouf ne tarda point à venir à Paris, faire l'empereur juge de ses démêlés avec le général Decaen. Napoléon le félicita chaleureusement de ses nombreux succès ; mais ne put blâmer son général pour la réquisition du Revenant. Surcouf fut créé alors baron de l'Empire. La croisière du Revenant fut sa dernière campagne de course. Il avait trente-six ans, et, dès lors, vécut à Saint-Malo. La fortune considérable qu'il avait acquise lui servit à armer des corsaires, qu'il lança dans la Manche sous la direction de ses anciens officiers. De ses chantiers sortirent successivement : la Revanche, la Biscayenne, la Dorade, l'Auguste, l'Edouard, la Ville-de-Caen, le Renard, qui tous rendirent son pavillon redoutable aux navires ennemis.

L'année 1814 vit l'Empire chanceler sur ses bases, sous le choc des terribles coups de bélier portés par l'Europe entière. Robert Surcouf, dont nous avons dit le dévouement à l'Empire et qui avait été élu colonel de la garde nationale, éprouva une douleur profonde de la chute du conquérant et en garda le culte en son coeur.

De graves intérêts pécuniaires l'ayant obligé à venir à Paris pendant l'occupation étrangère, son séjour y fut, pour ses amis, un temps de transes continuelles. La vue des soldats alliés exaspérait son ardent patriotisme ; il leur parlait de très haut, les bousculait dans la rue, et une nuit, au Palais-Royal, avec un jeune garde d'honneur désarmé, ne put résister au plaisir de rosser à coups de canne trois grenadiers russes.

Revenu à Saint-Malo, Surcouf transforma ses anciens corsaires en bâtiments de commerce ; sa maison prit une importance considérable ; il conserva son grade de colonel de la garde nationale, mais il lui arrivait bien de commander ses sections comme des pelotons d'abordage. Il vécut les Cent-Jours avec l'espoir que Napoléon parviendrait à raffermir sur sa tête la couronne qu'il venait de reprendre.

1815 renouvela pour lui les douleurs de 1814. Il ne se rallia point aux Bourbons.

Vers la fin de 1817, des officiers prussiens du régiment de Wrangel étaient venus en excursion à Saint-Malo ; après un très copieux déjeuner, ils entrèrent dans un café où était justement assis Surcouf, et, tout en buvant, se mirent à proférer en notre langue les injures les plus grossières contre les Français. Surcouf se leva, riposta avec colère, puis, s'échauffant, saisit un tabouret et le jeta à la tête d'un des officiers. Il se produisit une bagarre épouvantable. Les Prussiens se lancèrent, le sabre à la main, sur l'ancien corsaire. Mais lui s'était emparé d'une queue de billard, et, d'un vigoureux moulinet, les tenait en respect.

« Vous êtes des lâches, criait-il, de vous servir de vos armes contre des gens désarmés. Je vous défie tous, les uns après les autres, et vous rendrai raison, si vous n'êtes pas trop capons, pour oser me regarder en face ».

L'ancien corsaire se retrouvait là tout entier, superbe de fureur, criant d'une voix terrifiante, à briser les vitres de la salle. Le défi fut accepté et l'on se rendit sur la grève, derrière le Fort-Royal. Le premier qui voulut croiser le fer avec le Malouin fut précisément celui qu'avait atteint le tabouret. Après quelques passes, Surcouf, d'un coup de sabre d'abordage, lui fit sauter le poignet. Le second qui vint eut le ventre ouvert d'un coup de banderolle et tomba mort. Les amis du marin voulurent arrêter là ce combat si funeste ; les Prussiens s'y refusèrent. Un d'eux se fit encore percer la poitrine d'un coup de pointe. Il en vint un quatrième, puis un cinquième et successivement onze se mesurèrent avec le terrible jouteur, qui semblait invulnérable. Les spectateurs étaient terrifiés. Le dernier des officiers s'avança à son tour avec la contenance d'un condamné à mort : « En voilà assez comme cela, fit alors Surcouf ; il faut au moins qu'il en reste un pour dire comment le combat s'est passé ».

On sait quels procès politiques furent intentés au lendemain de la seconde Restauration. Le général Decaen fut arrêté comme coupable d'avoir pris le parti de Napoléon à son retour de l'île d'Elbe, bien qu'à la première abdication il eût formellement accepté les Bourbons, publié un ordre du jour très violent contre l'empereur déchu, et montré, à Bordeaux, les plus grands égards au duc et à la duchesse d'Angoulême.

La conduite de Surcouf vis-à-vis de l'ancien gouverneur de l'île de France, avec lequel il avait eu jadis de si fâcheux démêlés, montre quel coeur d'or battait en sa poitrine. Tous ses anciens griefs furent oubliés du coup, et, sur-le-champ, il se mit en campagne pour rendre princes et ministres favorables au malheureux général. Sa persévérance fut enfin récompensée : le général Decaen recouvra la liberté : la Duchesse d'Angoulême avait plaidé sa cause près du roi.

Surcouf ne s'était jamais rallié aux Bourbons, il le montra bien à l'époque du voyage que fit à Saint-Malo le duc d'Angoulême. Le prince avait convié l'illustre corsaire au banquet de l'hôtel de ville, afin de le voir. « Dites à votre maître, répondit le marin bourru, que s'il veut voir Surcouf, il peut bien venir jusqu'à Riancourt ».

Cependant la vieillesse approchait.

Durant quelques années encore, on vit le vieux marin, devenu très gros, mais portant toujours la tête haute, apparaître sur le port, ayant pour chacun un mot aimable. On se racontait en souriant ses colères d'un moment, et l'on disait aussi les bonnes oeuvres qu'il répandait largement autour de lui. En 1827, on cessa de le voir : Surcouf avait été saisi d'une sorte de dépérissement qui l'obligea à se confiner dans sa propriété de Riancourt ; avec la conviction qu'il n'en sortirait plus.

C'est alors, nous écrit un de ses petits-neveux, que l'ancien corsaire eut la suprême consolation de retrouver en son coeur les principes religieux que sa mère y avait semés et qu'il n'avait jamais oubliés. Il mourut en vrai chrétien, après une vie donc quelques pages semblent aujourd'hui de ces légendes merveilleuses que l'on raconte le soir sur le gaillard d'avant (Philippe Descoux).

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