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LES SAINTS BRETONS ET LES ANIMAUX

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Etude hagiologique et iconographique


Plusieurs statues de nos vieux Saints Bretons sont accompagnées d'animaux, comme emblèmes ou caractéristiques ; saint Corentin a son poisson ; saint Pol de Léon, son dragon ; saint Hervé, son loup, etc. Ces associations d'êtres inférieurs sont basées sur quelque trait de la vie ou de la légende de ces saints ; passons-les en revue, citons les légendes et étudions brièvement les différentes représentations.
Prenons d'abord saint Corentin de Quimper et saint Pol de Léon ; et nous verrons ensuite les autres, par ordre alphabétique.

Bretagne : Saints Bretons et les animaux

Saint Corentin


On sait que saint Corentin, jeune encore, se retira dans un ermitage au bord de la forêt de Névet, au territoire de Plomodiern et qu'il y vivait dans la pénitence. Voici comment en parle Albert le Grand : « Pour sa nourriture et sustentation en cette solitude, Dieu faisoit un miracle admirable et continuel : car, encore qu'il se contentast de quelques morceaux de gros pain, qu'il mendioit quelques fois ès villages prochains, et quelques herbes et racines sauvages, que la terre produisoit d'elle-mesme, sans travail ny industrie humaine, Dieu luy envoya un petit poisson en sa fontaine, lequel, tous les matins, se présentoit au Saint, qui le prenoit et en coupoit une pièce pour sa pitance, et le rejetoit dans l'eau, et, tout à l'instant, il se trouvoit tout entier, sans lésion ny blesseure, et ne manquoit taus les matins, à se présenter à saint Corentin, qui faisoit toujours de mesme ».
L'ancienne hymne de la fête de saint Corentin relatait ce prodige en ces termes : "Carne dum piscis redit integrata - In cibum sese toties daturus, - Aequa lex strictoe quoties suadet - Prandia mensoe".
Mais cette strophe a été retranchée du Pange solemnes, dans la réédition de 1851, par un censeur qui se croyait bien inspiré en supprimant la mention d'un fait qu'il trouvait trop merveilleux. Ce miracle du poisson se renouvelle encore d'une façon plus admirable lors d'une visite inopinée du roi Grallon au saint ermite :
« Un jour Gralion estant allé à la chasse, donna jusques dans la forêt de Névet, en la paroisse de Plomodiern, proche l'ermitage de saint Corentin ; et ayant chassé tout le jour, sur le soir, il s'égara dans la forest, et enfin se trouva près de l'ermitage du Saint, avec une partie de ses gens, ayant tous bon appétit : ils descendirent et s'adressèrent au saint ermite, luy demandèrent s'il ne pourroit pas les assister de quelques vivres ? « Ouy, répondit-il, attendez-moi un petit, et je vous en vays quérir ». Il s'en alla à sa fontaine, où son petit poisson se présenta à luy, du quel il en coupa une pièce de dessus le dos et la donna au maistre d'hostel du Roy, luy disant qu'il l'apprestast pour son maistre et les seigneurs de sa suite ; le maistre d'hostel se prit à rire et se moqua du saint, disant que cent fois autant ne suffiroit pour le train du Roy. Néanmoins contraint par la nécessité, il prit ce morceau de poisson, le quel (chose estrange !) se multiplia de telle sorte, que le Roy et toute sa suite en furent suffisamment rassasiez. Le Roy, ayant veu ce grand miracle, voulut voir le poisson du quel le saint avait coupé ce morceau et alla à la fontaine, où il le vid, sans aucune blesseure, dans l'eau ».
Ce trait est traduit tout entier de la chronique latine de Saint-Brieuc ; il est également relaté dans une séquence ancienne que le Père Cahier cite d'après un bréviaire in-16, d'environ 1600.


0 mirum miraculum !
De parte piscis tertia
Rex cum tota familia
Satiatur,
Et piscis natans integer
Demonstratur ;
Rex Chorentini meritum
Admiratur.


Une autre séquence, dans un missel édité à Quimper chez Jean Périer, vers 1701, le mentionne ainsi :


Cesus piscis integratur,
Rex de pisce sotiatur,
Et piscis non moritur.


Une troisième séquence, imprimée dans le texte même de la messe, et qu'on ne devait chanter qu'à la Cathédrale, mentionne les deux prodiges :


Cui se piscis amputatus, - Parte tamen integratus, - Sponte cibum proebuit.
Rex cum turba epulatur - Et suffecisse miratur - Piscem multitudini.


Je n'ai pas à faire l'examen critique de ce prodige ainsi rapporté, non plus que des autres que je citerai dans la suite : je me contente d'indiquer les faits tels qu'ils sont narrés par les historiens, légendaires et chroniqueurs, et à voir leur application dans l'iconographie, pour former les caractéristiques des différents saints et les désigner ainsi plus clairement aux yeux du peuple.
Pour ce qui est du Poisson de saint Corentin, je sais que quelques prédicateurs, faisant le panégyrique de ce saint et voulant tout simplifier et tout expliquer, y ont vu le poisson symbolique, l'Ichthus des catacombes, signifiant l'aliment eucharistique et désignant par ses différentes lettres les attributs du Verbe incarné : Jésus-Christ, Fils de Dieu, Sauveur. Mais ce symbolisme, en honneur dans les catacombes, n'a guère franchi les frontières de l'Italie, et si on le trouve dans les monuments de la Provence et à Autun, dans une inscription célèbre, nous avons de la peine à admettre qu'il ait pénétré dans notre petite Bretagne et qu'il ait été compris par nos populations armoricaines.
Je n'ignore pas qu'une revue récente, " Le Cursus Studiorum " organe du Hiéron de Paray, revue plus illuminée que claire, prétend que le Ichthus sacré était figuré et sculpté sur nos monuments mégalithiques, dolmens, trilithes, menhirs, dans les âges les plus anciens, mais je me permets de rejeter absolument cette assertion jusqu'à preuve plus certaine.
En tout cas, nos Bretons ont toujours vu dans le poisson de saint Corentin, le poisson commun à notre pays, la bonne truite de nos rivières, et c'est lui que l'on trouve représenté au pied de ses statues.
Saint Corentin n'a, dans sa Cathédrale de Quimper, aucune statue ancienne ; toutes les vieilles images qui existaient ont été brûlées en 1793. On y trouve cependant dans le vestibule de la sacristie, au pied de l'escalier, une petite statue en bois, du XVème siècle, que l'on expose chaque samedi, jour de marché, au bas de la nef, et qui y est vénérée ces jours et surtout les jours de grandes foires par les campagnards qui viennent des paroisses voisines, et même d'un rayon assez éloigné. Le saint y est représenté en chape, mitre et crosse, avec son petit poisson à ses pieds. Au choeur de Locronan il a une grande et belle statue, de très bon style, avec les mêmes attributs.
A Ploéven, il porte son poisson sur son livre. Presque toujours cet attribut accompagne son image. Même à Cast et, à Châteaulin on voit, aux pieds du saint, une fontaine et le poisson traditionnel. Nous trouvons de lui de nombreuses statues : à Bannalec (chapelle de la Véronique et Eglise Blanche), — Briec, (chapelle de Sainte-Cécile), — Dirinon, — Kerfeunteun, (chapelle de la Mère-de-Dieu), — Châteaulin, (chapelle de Notre-Dame de Kerluan), — Landeleau, — Landrévarzec, (chapelle de Notre-Dame de Quilinen), — Lanmeur, —Meilars (chapelle de Notre-Dame de Confors), — Melgven, — Plomeur, — Plonévez-du-Faou, (chapelle de Saint-Herbot), — Pencran, — Pleyben, — Plouégat-Guerrant, — Plouguer, — Pont-l'Abbé, — Saint-Divy-la-Forêt, — Poullan, autrefois une peinture murale, etc.

 

Bretagne : Saints Bretons et les animaux

Saint Pol de Léon


D'après sa vie écrite, ou plutôt transcrite par Wrmonoc, moine de Landévennec, vers la fin du IXème siècle, saint Pol eut en de multiples circonstances, à faire à des animaux de diverses sortes. Etant encore enfant à l'école de Saint-Hiltud, il laissa par une sorte de négligence, ou plutôt vaincu par le sommeil, une troupe d'oiseaux de mer rapaces, dévaster un champ de blé qui avait été confié à sa garde. Tout affligé de ce malheur, il arriva, par ses prières et celles de ses compagnons, à domestiquer en quelque sorte ces oiseaux sauvages et à les emmener comme un troupeau docile au monastère, où il les enferma dans une bergerie, jusqu'à ce que son maître saint Hiltud leur eût rendu la liberté et les eût renvoyés complètement assagis.
Le second épisode se passe après qu'il a débarqué en Armorique. Son disciple et neveu Jaoua Vivehinus ou Jahoevius, voulant se bâtir une hutte pour ermitage, à l'endroit où est maintenant l'église de Lampaul-Ploudalmézeau, vit par trois fois un buffle, bubalus, ou taureau sauvage démolir sa pauvre. cabane. Il eut recours à son maître saint Pol, et celui-ci lui proposa de faire un échange, cédant à Jaoua son ermitage de Lamber, et prenant pour lui-même la hutte en question. L'échange fut conclu, et sur les entrefaites survint le buffle qui, à la vue de saint Pol, s'agenouilla par trois fois en baissant la tête comme pour demander pardon. Le saint en effet lui pardonna et lui dit de s'en aller en paix. Le buffle se retira tout calmé et désormais inoffensif.
Lorsque le saint fut arrivé au vieil oppidum ou castellum romain abandonné, où il établit ensuite sa ville épiscopale, et qui prit son nom de Castel-Pol, il y trouva, comme habitants, une laie qui nourrissait ses marcassins, qu'il rendit douce et docile et qui lui fournit, au bout de quelques années, un abondant troupeau de porcs. Ensuite ce fut, dans le creux d'un arbre, un bel essaim d'abeilles sauvages, qui lui donna de quoi peupler une bonne quantité de ruches. Puis ce fut le tour d'un ours, qui ravageait le voisinage, et qui s'enfuit plein de terreur à sa vue, pour aller se jeter dans une fosse profonde ou une chausse-trappe dans laquelle il périt.
Il y eut encore un buffle, comme celui de Lampaul-Ploudalmézeau. Etait-ce le même, était-ce un autre ? En tout cas, il reçut ordre de vider la place, ce qu'il fit docilement.
Mais la bête la plus importante, celle qui est restée dans la mémoire et l'imagination du peuple à travers les siècles, c'est le dragon de l'île-de-Batz. — Wrmonoc lui donne des dimensions colossales et en fait une description terrible : cent-vingt pieds de longueur, des écailles pointues qui se redressent et sur lesquelles glissent les armes les mieux trempées ; les extrémités des côtes saillantes, hérissées et aiguës comme des griffes ; une gueule armée de dents acérées, sans compter le souffle empesté de son haleine.
Saint Pol lui passa son étole autour du cou et le mena en laisse depuis la pointe Est de l'île jusqu'à l'extrémité Nord-Ouest, où il lui ordonna de se précipiter dans la mer, à l'endroit qui a gardé depuis le nom de Puns-ar-Serpent ou Toull-ar-Serpant, le puits du serpent.
Notre légendaire du IXème siècle ne parle pas du gentilhomme de Cléder, le chevalier Nuz qu'Albert le Grand met en scène, qui voulut assister le saint dans ce combat et auquel celui-ci confia le monstre à conduire jusqu'au rocher d'où il se jeta à la mer, lui donnant ensuite le nom de Ker-gour-na-dec' h, celui qui ne fuit pas.

Dans le trésor de l'église de l'Ile-de-Batz est conservée comme relique, une longue bande d'étoffe très ancienne et très curieuse, qu'on dit avoir été l'étole de saint Pol. C'est un tissu byzantin ou oriental, où sont répétés, comme motif d'ornementation, deux cavaliers affrontés, tenant un faucon sur le poing, avec deux chiens entre les jambes de leurs chevaux. Une étoffe à peu près analogue est conservée au musée de Cluny et y est classée comme appartenant à l'époque Mérovingienne.
Dans tout le pays de Léon, le dragon de saint Pol est connu et on en parle de temps immémorial. Dans la paroisse de Lampaul-Guimiliau, dont il est le patron et où il est spécialement vénéré, lorsque, dans le calme qui suit les tempêtes on entend le bruit lointain de la mer, du côté de l'Ile-de-Batz, les paysans disent que ce sont les hurlements sortant du puits du Serpent : Toull-ar-Serpent o yudal. C'est sans doute le même courant d'idées qui aura fait donner le nom de Carrek-ar-serpent à une roche de l'anse de Tréompan, en face de Lampaul-Ploudalmézeau.
Faisons dès maintenant une observation qui a son importance. Ils sont assez nombreux les Saints Bretons dans la légende desquels interviennent des serpents ou dragons. Sont-ce des monstres réels et authentiques ? ou faut-il voir là simplement un symbole du paganisme qu'ils ont combattu et terrassé ? Cette dernière conclusion est difficile à admettre. Ce symbolisme eût été peu compris du peuple et n'aurait pas laissé dans sa mémoire et son esprit cette impression profonde dont la tradition s'est perpétuée à travers de longs siècles. Y a-t-il eu réellement autrefois des monstres malfaisants, répandant la terreur dans le pays ? Nous savons que dans tous les temps et dans toutes les contrées on trouve mention de ces êtres terribles, minotaures, hydres à tètes multiples, serpents de mer, dragons, tarasques, etc..., habitant des cavernes, des repaires presque inaccessibles ; et le fameux labyrinthe de Crète ne serait-il pas autre chose qu'une grotte profonde, aux nombreuses galeries tortueuses et inextricables où l'on s'égare infailliblement ? S'il s'agit chez nous d'un symbolisme, à quelle époque et par qui ce symbolisme a-t-il été établi et diffusé dans tout le pays ; comment les faits ont-ils été précisés, localisés, de manière à indiquer, à situer exactement le lieu où ces monstres ont exercé leurs ravages, l'itinéraire que les saints leur ont fait suivre, les monuments qui commémorent ces voyages et sont un souvenir de leur passage, comme nous le verrons pour le second dragon de saint Pol-de-Léon ?
Le dragon de l'Ile-de-Batz n'est pas en effet le seul qu'il ait eu à dompter. Wrmonoc ne fait pas mention de ce deuxième monstre, non plus qu'Albert le Grand dans la vie de saint Pol ; mais il en parle longuement dans la vie de saint Jaoua.
Lorsque le neveu du bon prince Arastagn, le seigneur du Faou, païen obstiné et sanguinaire eut massacré les abbés Tadecq et Judulus, amis de saint Jaoua, Dieu, pour le punir de ce meurtre et châtier ses sujets païens, envoya un monstre marin pour ravager le pays. Terrifiés par ses ravages, les habitants envoyèrent une députation à saint Pol, pour qu'il vint les délivrer de ce fléau. Le saint accéda à leur prière et se rendit au Faou, où il commanda au dragon de venir le trouver ; il lui passa son étole au cou et le lia à son bourdon qu'il avait fait ficher en terre.
Puis, après plusieurs jours passés à convertir, à instruire et à baptiser le seigneur du Faou et ses sujets, il prit, avec le dragon, le chemin de Saint-Pol et de l'île-de-Batz. La route qu'il suivit est la voie romaine qui reliait la ville du Faou à l'oppidum de Castel-Paol, voie que l'on peut reconnaître encore sur tout son parcours ; elle correspond assez bien à la route actuelle qui ne s'en écarte en certains points que par suite de rectifications modernes. Elle passe par les bourgs de Hanvec, Sizun, Locmélar, Lampaul-Guimiliau et Plouénan après avoir traversé la partie Ouest du territoire de Guiclan. Différents établissements ou vestiges romains la jalonnent, de près ou de loin : camps et tuiles à Ros-ar-Glouet et à Roudouguen en Hanvec ; tuiles au bourg de Saint-Eloy et dans les champs qui l'avoisinent ; tuiles et substructions au Falzou en Sizun, et magnifique camp retranché à Castel-doun ; retranchements dans un taillis à Coat-locmélar ; près du bourg de Locmélar ; tuiles au bourg de Lampaul-Guimiliau et près de la croix de Traon-ar-vilin ; tuiles et substruction à Keryan ou Guerjean en Guiclan. De là, le chemin s'en va tout droit à Saint-Pol en suivant les hauts plateaux, sur le terrain de Guiclan et de Plouénan ; il était encore très fréquenté dans la première moitié du XIXème siècle et connu sous le nom de Bali-Castel ; et maintenant il est encore remis en très bon état de viabilité entre Plouvorn, Plouénan et Saint-Pol. Le long de cette voie, des monuments encore existants et les traditions conservées dans le peuple semblent donner toute probabilité à la légende.
Prés du pont du Faou, il y a encore un point de la rivière désigné sous le nom de Tout-ar-Serpant, trou du serpent. A 400 mètres à l'Est du bourg de Lampaul-Guimiliau, le chemin en question croise la grande voie romaine allant de Carhaix à Plouguerneau et probablement à Varganium ; or c'est là que se passa l'épisode rapporté par Albert le Grand dans la vie de saint Jaoua, et qui est resté vivant dans les traditions populaires.


« Saint Paul, ayant mis ordre à toutes les affaires du Faou,
s'en retourna en Léon, traisnant après soy le dragon, et
estant arrivé en un petit bois qui est entre les paroisses de
Land-paol et Guic-miliau, deux hommes le vinrent trouver
de la part des habitants du Faou et l'avertir que ce n'étoit
rien fait s'il n'exterminoit aussi un petit faon que le serpent
avoit laissé en sa tanière, lequel estant déjà grandelet, me-
naçoit le pais circonvoisin de pareilles misères. Lors saint Paut 
délia le dragon et luy commanda, de la part de Dieu,
qu'il allast quérir son faon et le luy amener en ce lieu, luy
défendant très estroistement de faire mal à personne ; le
Serpent obéit, et ce lieu, en mémoire de cecy, se nomme
encore aujourd'huy Coat-ar-Serpant. »


Cette assertion est vraie, et le petit bois qui se trouve entre Croas-Pol et le vallon garde toujours ce nom ; un autre coat-ar-sarpant se trouve sur le bord du même chemin, près de la chapelle de Saint-Jacques de Lézérazien. La croix plantée au croisement des deux routes, et dénommée Croas-Pol, est du XVIème siècle, mais elle a pu en remplacer une autre bien plus ancienne et plus simple.
Deux fontaines, portant le nom de Feunteun-Bol, se trouvent aussi le long de cette voie, l'une à Lampaul, près de la croix de Traon-ar-vilin, l'autre en Guiclan, à deux kilomètres au Nord de Kersaint-Gilly. Celle de Lampaul est presque monumentale et renferme dans une niche la statue du saint que les matrones du village viennent parer et habiller la veille de sa fête, 12 mars. Cette fontaine est en vénération et est l'objet d'un pèlerinage local. Tous ces monuments et souvenirs sont comme des témoins du passage du grand Evêque thaumaturge.
Les statues de saint Pol ne sont pas très nombreuses, mais toutes le représentent avec le dragon à ses pieds, tenu en laisse au moyen de son étole passée au cou. La plus ancienne est celle qui se trouve adossée au trumeau du porche occidental de la Cathédrale de Saint-Pol-de-Léon. Est-elle du XIIIème siècle, comme le porche, ou date-t-elle seulement du XIVème ou XVème siècle ? Dans la même église, le ciborium qui abrite le grand reliquaire monumental a pour couronnement une statue de saint Pol, menant le terrible dragon.
A Lampaul-Guimiliau, à la façade du porche, datant de 1533, nous trouvons une belle statue du saint Patron. Autre statue en bois, contre le pilier à l'entrée du choeur, côté de l'épître ; puis très noble représentation en riche broderie, sur une bannière du XVIIème siècle ; statue de la fontaine déjà mentionnée.
A Guimiliau, une petite statue en pierre surmonte l'autel logé sous l'arcade du côté Ouest du calvaire ; 1581.
A Lampaul-Ploudalmézeau, le saint a son église, sa statue et sa fontaine. — Statue à l'église de Plouédern, puis à Saint-Thégonnec, au-dessus de la porte de la grande chapelle-ossuaire, 1677 ; également au fronton de l'ossuaire de La Martyre, 1619 ; et dans l'église de Pencran, au-dessus de la porte de la sacristie. Bas-relief au jubé de La Roche-Maurice.
La bannière paroissiale moderne de la Cathédrale de Saint-Pol porte l'effigie du Saint Patron, avec ses caractères traditionnels, de même que la bannière diocésaine de Quimper, où il figure à côté de saint Corentin.

 

Bretagne : Saints Bretons et les animaux

Saint Armel

Dans la vie de ce Saint, Albert le Grand dit que, pendant son séjour au territoire que le roi Judual lui avait accordé comme domaine, distant de Rennes de trois lieues, et qui s'appelle encore maintenant de son nom : Saint-Armel des Boschaux, il opéra un grand nombre de merveilles. Notons ce fait en particulier :
« Il y avait en ces quartiers un horrible dragon, qui avait sa caverne en une petite montagne, près la rivière de Seiche, lequel faisait un grand ravage par le Pays circonvoisin ; saint Armel, regrettant le dommage qu'en recevaient les Paysans, pria Dieu de les vouloir délivrer de cette calamité, et le lendemain, ayant célébré la Messe, il déposa son Chasuble, puis se fit conduire à la caverne du monstre, auquel il commanda de la part de Dieu, de sortir, ce qu'il fit ; alors il lui lia son Estole au col et le traîna à travers ladite montagne, jusque sur le bord de ladite rivière, lui commandant de s'y précipiter, ce qu'il exécuta ; et, pour mémoire de ce miracle la route ou sentier par lequel le Saint traîna le monstre à travers la montagne, (qui fut nommée le Mont Saint-Armel) parut sec et aride, sans qu'il y crût aucune herbe. »
Dom Lobineau parle de ce miracle comme d'une simple fiction, ce qui n'empêche que, dans l'une des planches qui illustrent son volume, et qui est intercalée entre les pages 244 et 245, on voit saint Armel représenté posant le pied sur la tête d'un énorme dragon qu'il tient lié par son étole.
Je ne sais de quelle manière était figuré le Saint dans notre église de Plouarzel dont il est le patron, car cette église a été consumée par un incendie avec toutes ses statues en août 1898 ; mais les statues du Saint, à Languédias et à l'église paroissiale de Pontivy, le montrent tenant le dragon au moyen de son étole.
La ville de Ploërmel, qui vénère saint Armel comme son fondateur, en a fait le patron de son église. Parmi les huit verrières anciennes qui ornent ce monument, l'une retrace en huit panneaux la légende du Saint. Voici quels sont les sujets du 6e et du 7e tableaux.


Comment saint Armel entoure de son étole la Guivre qu'il a prise dans la forêt.
Comment saint Armel jetta la Guivre en Seiche.

 

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Saint Bieuzy


Albert Le Grand ne parle pas de ce Saint ; mais dans la vie de saint Gildas par l'Abbé Luco nous apprenons que cet illustre Saint eut Bieuzy pour compagon et pour disciple dans son ermitage au bord du Blavet, en la paroisse actuelle de Bieuzy les eaux, au pied du promontoire de Castennec entre Baud et Pontivy. En quittant sa solitude du Blavet pour se retirer à Rhuys, Gildas laissa son disciple en tête du monastère de la Couarde qu'il avait établi sur le plateau dominant son ermitage.
Ce vénérable religieux pour guérir de la rage les hommes et les bêtes, avait reçu de Dieu un don tout spécial qui fut l'occasion de sa mort. Pendant qu'il célébrait la messe un jour de fête, le seigneur du Garo l'avait fait chercher par son écuyer pour guérir sa meute qui était enragée. Le Saint lui dit d'attendre qu'il eût fini le divin office. Irrité de ce délai, cet homme brutal et emporté rassemble ses hommes d'armes et, à leur tête se transporte à l'église, trouve le Saint à l'autel, et lui décharge sur la tête un si rude coup de coutelas, qu'il ne pût retirer son arme. Le Saint prêtre acheva tranquillement la messe, adressa une touchante exhortation à son peuple et suivi de la foule qu'il avait avertie de son départ, prit le chemin de l'Abbaye de Rhuys, toujours l'épée dans la plaie, pour recevoir de son supérieur, avant de mourir, une dernière bénédiction et être enterré au milieu de ses frères.
Quant au Seigneur du Garo, rentré chez lui après son crime, il trouva ses chevaux et tous ses autres animaux enragés comme ses chiens, et fut par eux dévoré misérablement.
Dans l'oratoire de l'ermitage du Blavet, refait ou agrandi en 1838, on voit encore deux autels celui de saint Gildas et celui de saint Bienzy. Sur ce dernier se trouve la statue du Saint, revêtu des ornements sacerdotaux pour le saint sacrifice, et un coutelas enfoncé dans le crâne. Pareille représentation existe dans un vitrail moderne de l'église paroissiale.

 

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Saint Brendan ou Brévalaire


Dans la vie de saint Malo qui fut le disciple de saint Brendan, Albert le Grand raconte que ce dernier pour se soustraire aux méchants procédés de quelques-uns de ses moines, « résolut de les quitter et s'exposer plutoit à la mercy des ondes de la mer qu'à la malice de ses propres frères. Il s'embarqua avec saint Malo et 78 autres personnes, en dessein de trouver les Isles fortunées, fort renommées des anciens (ce sont les Canaries à la côte d'Ethiopie), pour y prescher la Foy aux Barbares et les réduire à la connaissance de Jésus-Christ. Ils furent sept jours voguans en pleine mer, à bon vent, sans voir aucune terre ; enfin, le septième jour, ils ancrèrent à la rade d'une isle, où ils mirent pied à terre et y séjournèrent quelque peu et se préparèrent pour suivre leur route ; mais un Ange leur apparut et leur fit commandement de s'en retourner en leur pays ; à quoy ils obéirent et levèrent les ancres, dressèrent les voiles et tournèrent leur prouë vers le septentrion ; et, continuans leur course, ils se trouvèrent le propre jour de Pasques, en mer, et eussent bien désiré aborder quelque Isle ou coste, pour célébrer les saints Mystères et ne demeurer sans Messe un tel jour. Dieu leur octroya leur désir : car ayant trouvé une forme d'isle (ce leur sembloit), ils y descendirent dressèrent un Autel, et y fut célébrée la sainte Messe ; mais sur le point du Pater noster, toute cette isle vint à se mouvoir de telle impétuosité, qu'un chacun cherchait à se sauver dans le vaisseau le plutot qu'il pourroit, saint Malo voyant ce désordre, les rappella, les asseurant qu'il n'y avait aucun danger ; et, de fait, l'isle ne trembla plus, ny ne se remua, jusqu'à ce que, la Messe étant finie, et tous estans montez dans le vaisseau, ils reconneurent que ce n'estoit pas une isle, mais un poisson et beste marine, qu'on nomme baleine, laquelle commença à sauter et gambader par la mer ; ce que voyant toute la compagnie, ils remercièrent Dieu de ce qu'il les avait délivrés de ce danger et faits dignes de participer ce jour, aux Sacro-Saints Mystères de la Messe ».
Tout ne doit pas être fabuleux dans ce voyage de saint Malo et de saint Brendan. Il serait intéressant de voir une étude bien sérieuse et bien documentée sur l'état de la marine et de la navigation à cette époque. Un séjour de plusieurs semaines sur l'Océan, un équipage de 80 hommes, indiquent un navire de belles dimensions et une bonne expérience des voyages sur mer.

 

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Saint Brieuc et les loups


Extrait de la " Vie de saint Brieuc " par M. le chanoine de la Villerabel, vicaire général.
Un soir saint Brieuc revenait au monastère avec quelques-un de ses frères. Comme ses jambes d'octogénaire ne lui permettaient plus de marcher à pied, il s'était assis dans un lourd et grossier chariot traîné par des boeufs. Il s'avançait au chant des psaumes, et les voix plus jeunes de ses moines alternaient avec la sienne, pour louer le Seigneur. Les derniers rayons du soleil s'éteignaient derrière les futaies.
Tout à coup les chants tombent, le verset reste sans répons, la petite troupe se disperse et fuit avec épouvante.
Autour du vieillard s'est formé un cercle de gueules ouvertes et hurlantes, d'yeux brillants. Ce sont des loups prêts à se ruer sur l'attelage. Brieuc ne s'émeut pas ; il s'avance impassible, la main levée en signe de commandement. Les loups s'arrêtent, s'agenouillent humblement comme pour implorer leur pardon.
Les moines, revenus de leur panique, essayent de rejoindre leur maître. Le cercle de gueules menaçantes se reforme contre eux. Toute la nuit se passe ainsi.
Le matin, un breton qui venait de débarquer à l'estuaire du Gouët, Conan, arrive avec une bande de guerriers émigrés. Il débouche tout à coup dans la clairière, où se passait cette scène émouvante.
" Voyez-vous ?.... Voyez-vous ?...". crie Conan à ses hommes avec stupeur. Nous voyons, répondent ses compagnons non moins stupéfaits. Et Conan, qui a reconnu dans le vieillard un moine, un prêtre chrétien, peut-être son compatriote, Conan saute à bas de son char et lui crie : "— Père
Père ! Nous ne voulons d'autre Dieu que le tien. Il faut que tu nous baptises tous !" (A. de la Borderie).
Dans la chapelle de Notre-Dame de la Fontaine, richement et pieusement restaurée par Mgr Fallières, en l'honneur de saint Brieuc, une statue récente commémore ce fait merveilleux : le saint est debout ayant à ses pieds deux loups qu'il a domptés et adoucis par la puissance de sa sainteté.

 

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Sainte Clervie et Saint Guennolé


Une des soeurs de saint Guennolé chassant, un jour des Oyes sauvages par la Cour du Chasteau de Les-Guen une de ces Oyes lui tira un oeil de la teste et l'avalla. Cet accident attrista fort ses Père et Mère. Saint Guennolé estant en Oraison dans son Monastère, fut averti par un Ange, de ce qui se passait chez son père ; il s'y en alla en diligence, et, l'ayant consolé, il empoigne l'Oye, lui fend le ventre, en tire l'oeil et le remet en sa place, et, faisant le signe de la Croix dessus, le rendit aussi clair, et beau que jamais. (Albert Le Grand)

 

Bretagne : Saints Bretons et les animaux

Saint Gildas 


Dans la vie de saint Gildas pour l'abbé Luco nous lisons, p. 89 : « Voici le fait qui donna lieu à l'établissement du monastères de Cohet-Lahen ou des Bois. Dans une fosse, qui se voit encore, au sein d'un monticule couvert alors d'arbres et de broussailles, un énorme serpent avait établi sa demeure, d'où il faisait fréquemment, sur le terrain de Saint-Démétrius, des incursions hostiles, surtout à cause du bétail qu'il dévorait. Les habitants désolés eurent recours à saint Gildas, qui ne s'était pas encore retiré sur le Blavet. Il se rendit sur les lieux, se mit en prières, puis, s'approchant du monstre étendu dans sa fosse, il lui jette une corde au cou et le traîne en triomphe à travers le pays, et suivi de la foule qui grossit toujours, traverse le bourg naissant de Sarzeau, se repose sur un petit tertre au Couchant du chemin, gagne une pointe de rocher près de son abbaye, et, de cette hauteur, précipite dans les flots le serpent, qui siffle, s'agite, lutte contre la mort et disparaît englouti et emporté par les vagues. Cette partie de la forêt de Rhuys était, paraît-il, infestée de reptiles. Le saint l'en purgea et y établit son Couvent des Bois, ainsi nommé parce qu'il était dans la forêt appartenant alors à l'abbaye de Rhuys ». — M. Luco ajoute en note : Ces miracles relatifs aux serpents sont mentionnés par le titre de 1001 et la charte du duc Jean, comte de Montfort, de 1369. L'église abbatiale de Rhuys ne possède aucune statue ancienne de saint Gildas, mais dans la chapelle qui existe sous son vocable dans la paroisse de Cast, diocèse de Quimper, nous trouvons deux statues en pierre du saint, ayant grand caractère et présentant le dragon qui est sa caractéristique.
La première se trouve à l'entrée du choeur, du côté de l'Evangile et mesure 2 mètres ou 2m15 de hauteur. Le saint tient un livre ouvert, il a sa chape et sa mitre surchargées d'ornements figurant des perles et des cabochons. A ses pieds est un dragon ailé, à quatre pattes armées de grilles acérées. La seconde statue de saint Gildas a sa place dans le transept Sud, plus petite et ne mesurant que 0m92 de hauteur.
C'est à elle, de préférence, que s'adresse la dévotion des fidèles et elle semble, du reste, être plus ancienne. Le saint, ayant la tonsure monacale et vêtu de la chasuble antique, tient de la main gauche un livre fermé et plonge de la droite le pied de sa crosse dans la gueule d'un dragon à grandes écailles qu'il foule aux pieds. Par son style, cette statue semble appartenir au XVème siècle ou aux premières années du XVIème.
Peut-être doit-on reconnaître comme représentation du même saint, une statue sans désignation qui se trouve dans la chapelle de la Madeleine, en Landrévarzec : évêque ou abbé en chape, plongeant l'extrémité de son bâton dans la gueule d'un monstre.
La paroisse de Carnoët, autrefois du diocèse de Cornouaille, maintenant de celui de Saint-Brieuc, possède une chapelle de saint Gildas, et le saint y est représenté avec deux petits chiens à ses pieds. Quand les gens du pays viennent le prier et l'invoquer, ils commencent par caresser et embrasser les petits chiens. Ce patronage de saint Gildas, pour protéger ou guérir de la morsure des chiens enragés, ne correspond à aucun épisode de sa vie ; mais, il se peut qu'il ait partagé ce privilège avec saint Bieuzy, son disciple, dont nous avons déjà parlé. 

 

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Saint Herbaud


Ce saint très populaire en Bretagne, où il est vénéré comme patron des vaches, a son église et son tombeau au lieu même de son ermitage et de sa mort, terrain dépendant maintenant de la paroisse de Plonévez-du-Faou, mais dépendant autrefois de la paroisse de Berrien. D'après une vie manuscrite, conservée autrefois à Berrien et maintenant perdue, un abrégé a été publié dans la continuation des Bollandistes, supplément de juin. Trévoux donne une vie de ce saint ; on en parle dans l'édition d'Albert le Grand, de 1837, note de M. de Kerdanet, p. 780, et dans l'édition de 1901, p. 663. De plus, M. l'abbé Guillou, dans son petit volume, Buez Sant Milliau ha Sant Moelar, 1883, a donné en annexe quelques pages consacrées à notre saint ermite.
Le texte latin cité par M. de Kerdanet dit que les animaux lui obéissaient : les brebis, les boeufs, les serpents et les loups les plus féroces lui étaient soumis, comme aussi les oiseaux du ciel et ceux de basse-cour. Mais on n'indique pas avec précision son patronage spécial sur les vaches.
En tout cas, dans toute l'étendue du pays il est invoqué pour obtenir la santé et prospérité des troupeaux, abondance de lait et de beurre.
Autrefois, pendant les trois jours du pardon et de la foire, au mois de mai, les boeufs et vaches étaient conduits en pèlerinage à la chapelle du saint, comme on le faisait à Saint-Cornély de Carnac, et, pour ce qui regarde les chevaux, aux différentes églises, et chapelles de saint Eloi.

 

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Saint Hervé et son loup 


Saint Hervé est très populaire dans le Léon et aussi dans la Cornouaille et même le pays de Saint-Brieuc. C'est le saint aveugle, patron des mendiants et des chanteurs nomades. Il s'était rendu avec son guide, nommé Guiharan, à l'ermitage de son oncle Wlphroëdus ou Urfol, là où l'on voit maintenant sa chapelle et son tombeau, dans la paroisse du Bourg-Blanc, pour annoncer au saint Ermite la maladie et la mort prochaine de sa mère.
« Saint Wlphroëdus se mit en chemin, ayant recommandé son petit domicile à son Néveu saint Hervé et à son guide Guiharan de parachever le labourage qui restait, lui laissant son Asne pour ce sujet. Le garçon fit tout comme on lui avait commandé, puis mena l'Asne paistre en quelques champs, où le loup, l'ayant trouvé à son avantage, le dévora. Guiharan, voyant cela et n'y pouvant remédier, se prit à crier et forhuer le Loup. Saint Hervé, qui lors estoit en prières dans l'Oratoire, entendant ce cry, sort dehors, et informé comme tout s'estoit passé, rentre dedans, redouble sa prière, priant Dieu de ne permettre, à son occasion, ce dommage arrivé à son bon Oncle et Hoste. Comme il prioit ainsi, voilà venu le Loup à grand erre, ce que voyant Guiharan crioit au saint qu'il fermast la porte de la Chapelle sur soy ; mais le saint luy répondit : Non, non, il ne vient pas pour mal faire, mais pour amender le tort qu'il nous a fait ; amenez-le, et vous en servez comme vous faisiez de l'Asne, ce qu'il fit ; et estoit chose admirable de voir ce Loup vivre en mesme estable avec les Moutons, sans leur mal faire, traîner la charrue, porter les faix et faire tout autre service comme une beste domestique». (Albert Le Grand)

Et en effet toutes les statues de saint Hervé le représentent accompagné de son loup, ayant au cou un collier de harnachement, avec une bride ou un licol. Très souvent aussi le saint donne la main à son petit guide Guiharan, lequel porte sur son épaule la besace ou bissac destiné à recevoir les aumônes qu'ils recueillaient dans leurs tournées. Nous trouvons de lui une très belle statue à l'église de Guimiliau, et dans la même église, un petit groupe où figurent Guiharan et le loup. Statuette semblable à Lampaul-Guimiliau. Statues en Kersanton à Sainte-Marie du Ménez-Hom en Plomodiern et autrefois à l'église de Kerlaz. La dernière est d'une facture pour ainsi dire barbare, mais cependant remarquable par son caractère de vérité et de réalisme : saint Hervé a les yeux grand ouverts et la démarche rigide à la façon des aveugles ; Guiharan est armé d'un fouet à noeuds pour mener le loup, qui semble en vérité fort docile.
A Locmélar, l'autel du bas-côté Midi est surmonté d'un tableau représentant le saint conduit par Guiharan et accompagné du loup. De chaque côté de ce tableau sont des médaillons dont l'un représente le loup attelé à une charette et mené par Guiharan, avec cette inscription : Le loup ayant mangé l'asne de saint
-Hervé et mis- en  place à la charrette. On pourrait encore citer la statue qui se trouve à la croix de la chapelle de Christ en Pleyber-Christ, et celle adossée à la croix qui se trouvait autrefois à Saint-Donat et est maintenant transférée près du bourg".

 

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Saint Jaoua.


Ce saint avant de mourir, à Brasparts, ordonna que, « quand il seroit décédé, on mit son corps en un branquart neuf, et que là, où les bestes qui devoient le porter s'arresteroient, ils l'ensevelissent. »
Les boeufs qui furent chargés de conduire son corps, le transportèrent depuis Brasparts jusque près de la place où est maintenant le bourg de Plouvien, et à l'endroit où ils s'arrêtèrent on ensevelit le saint. Là se trouve une assez vaste chapelle bâtie en son honneur, et dans cette chapelle au-dessus du sarcophage où reposèrent ses reliques, un tombeau monumental en Kersanton, avec sa statue couchée et cette inscription en lettres gothiques : Sas. Joevin. Epus. Leons. Fuit. Hic. Sepultus : Saint Joévin évêque de Léon fut ici enseveli.

 

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Saint Ké ou Kénan, patron de Cléder


Près de son ermitage de Rosené, dans le pays de Galles, vivait un Prince nommé Théodoric qui, chassant un jour dans la forêt poursuivit un cerf jusque dans la cellule du saint et comme celui-ci refusait de dire ce qu'était devenu l'animal, il entra dans une telle colère qu'il fit emmener en son château sept boeufs et une vache qui avaient été donnés au saint et à ses compagnons et dont il se servait pour tirer à sa charrue ; mais le lendemain il se présenta au saint pareil nombre de cerfs qui se laissèrent attacher à la charrue et achevèrent de charruer son champ, lequel, en mémoire de cette merveille, fut nommé en breton-walois, Guestel Guervet, c'est-à-dire le champ des cerfs, et depuis, ces animaux servirent domestiquement saint Ké et ses confrères en cet ermitage. (Albert Le Grand)

 

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Saint Lunaire


Parlant du défrichement et de la mise en valeur du sol breton pour les vieux saints, M. de la Borderie dans son histoire de Bretagne, tome I, p. 367-368, retrace la légende de saint Lunaire (Leonorius), d'après sa vie latine et le bréviaire de Saint-Malo, imprimé en 1537.
Un jour, le saint étant à prier et à demander à Dieu qu'il lui donnât ainsi qu'à ses compagnons des ressources pour vivre, il vit se poser près de lui un oiseau tenant au bec un reste d'épi de blé. Plein de joie, Lunaire remercia Dieu et, appelant un de ses moines, lui ordonna de suivre l'oiseau, tout en donnant à celui-ci l'ordre de conduire le moine à l'endroit où il avait pris cet épi. Il le mène en effet à une clairière de la forêt où s'était conservé un petit champ de froment.
C'était pour le saint et sa petite troupe une provision pour servir de semence. Mais il fallait défricher et pour cela abattre un grand espace de forêt. Tout cela se fit à force de labeurs mais aussi par une suite de prodiges. Pour faire le travail de la charrue, douze grands cerfs viennent s'offrir d'eux-mêmes, présentent leurs têtes pour qu'on y mette le joug et travaillent toute la journée comme des animaux domestiques.

 

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Saint Malo


M. de la Borderie, dans le premier volume de son histoire de Bretagne, tome I, p. 467, écrit ces lignes : « Saint Malo ayant trouvé une vigne en ce pays-là, était allé un jour lui donner ses soins. Pour travailler plus à l'aise il ôta son vêtement monastique, sa coule (cucullam), et la pendit à un chêne qui était proche. Alors un petit oiseau, un roitelet, vint pondre dans la coule un oeuf. Le soir, son travail achevé, Malo alla à l'arbre pour reprendre son vêtement. Il vit l'oeuf et dit : "Dieu tout puissant, c'est vous qui avez inspiré à ce petit oiseau d'user ainsi de ma coule. Si je l'ôte de là, le pauvre oiseau perdra son oeuf". Il renonça à le prendre et il le laissa sur l'arbre tant que l'oiseau n'eût élevé toute sa nichée. » (vita 1° S. Maclovii. 1, cap. 73.)

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Saint Maudez


Albert le Grand, d'après le propre de l'ancien bréviaire de Léon, raconte que « ce Saint passa en une Isle distante de terre ferme d'une lieue de Bretagne, la quelle Isle était inaccessible à tout homme, à cause de la multitude de serpens qui y avoient leur refuge : saint Mandez y estant arrivé, chassa par sa prière, tous ces serpens puis bastit un petit Oratoire, et une cellule auprès, où il demeura le reste de ses jours » — Il ajoute :
« Je ne veux obmettre icy le miracle continuel que Dieu opère en vertu de ce grand Saint encore à présent ; c'est que la terre de cette Isle sert d'Antidote et remède très-souverain contre les morsures ou piqueures des Serpens et toutes sortes de bestes venimeuses ; l'usage en est, qu'on en verse quelque peu en la boisson qu'on veut boire, l'expérience de cette merveille se void tous les jours ».
Ce n'est pas seulement dans son île, à Enez-Modez, que l'on prend de la terre, pour en faire un remède miraculeux ; mais partout où se trouve une chapelle ou une statue de saint Maudez, cet usage existe. Généralement c'est aux pieds de la statue ou en face de l'image sainte que l'on prend cette terre ou cette poussière, lorsqu'il n'y a pas de pavé en cet endroit, comme on peut le voir à la chapelle de Loc-Marzin, à Bannalec et à celle de N.-D. de Tronoën en Saint-Jean-Trolimon. Quand un pavé existait, on y avait ménagé une cavité, pour extraire de la terre d'au dessous, comme cela se voyait il y a encore deux ans dans l'église de Mahalon.
Dans la chapelle ruinée de Saint-Maudez, en Edern, c'est sous le maître-autel en pierre que l'on prenait cette provision, et on en a tant pris que l'autel s'est écroulé. A la chapelle de Notre-Dame de Châteaulin, lorsqu'on a fait un nouveau pavé, il y a trente ou quarante ans, on a extrait une bonne quantité de terre d'en face de la statue du saint et on l'a entassée dans le cimetière ; et c'est là que maintenant les dévots fidèles vont s'approvisionner. A Landeleau, au bas du cimetière existait autrefois une petite chapelle sous son vocable ; la chapelle a depuis longtemps disparu, mais on continue toujours à prendre de la terre à cet emplacement.

 

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Sainte Nennok et son cerf


Sainte Nennok, dont on trouve une vie détaillée dans le cartulaire de Quimperlé, avait son monastère au lieu appelé de son nom : Lan-Nennok, au bord de la mer en Ploemeur près de Lorient. Un jour que le comte Erekh, étant à la chasse, poursuivait vivement un cerf, celui-ci se réfugia dans l'église du monastère. Le comte y étant entré trouva le cerf réfugié aux pieds de la sainte abbesse, qui y chantait l'office divin avec ses religieuses. Il fut pris d'une telle vénération pour elle qu'il lui fit donation de plusieurs belles terres et revenus.

 

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Saint Pérec


Ce saint, en latin Petrocus, Pezrec, est patron de notre paroisse de Lopérec. Il a vécu et s'est sanctifié au monastère de Gaël, et l'on conserve encore une partie de ses reliques au trésor de Saint-Méen, au diocèse de Rennes, trésor provenant de l'ancien monastère. Une vieille statue vénérée dans l'église de Lopérec, représente le saint vêtu en ermite ou en moine, robe, scapulaire, manteau à capuchon, avec un cerf ou un chevreuil qui grimpe contre lui de manière à reposer ses pattes de devant et sa tète sur sa poitrine, et le saint le caresse doucement de la main droite. On ignore malheureusement les détails de sa vie, et on ne peut savoir à quel trait particulier il faut attribuer cette caractéristique.

 

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Saint Ronan


La vie de ce Saint écrite par Albert le Grand et empruntée au bréviaire de Quimper nous parle d'un prodige qu'il opéra, en délivrant une brebis qu'un loup emportait dans sa gueule et qu'il allait dévorer. Une autre vie inédite publiée par Dom Plaine, (Bulletin de la Société, archéologique du Finistère, année 1889, p. 281) est plus explicite sous ce rapport et nous dit qu'il accomplit très souvent pareil prodige par compassion pour les habitants du voisinage.
Mais la tradition populaire va plus loin, et l'on répète encore dans le pays que le bon saint faisait chaque jour à jeun une sorte de procession ou de circuit autour de son ermitage pour chasser les loups et protéger les troupeaux qu'ils menaçaient, et que, une fois par semaine, il faisait ce parcours sur un rayon plus étendu.
C'est ce qui aurait donné naissance aux processions de la Troménie que l'on fait tous les ans à Locronan, et de la grande Troménie que l'on fait tous les six ans et qui comprend un circuit de 10 ou 11 kilomètres.
Saint Ronan, pour fuir les foules qui venaient le visiter dans son ermitage, se retira au loin, à Hillion, au Sud de la baie de Saint-Brieuc, au bord de l'anse d'Yffiniac. Après sa mort son corps fut mis sur un chariot, attelé de deux boeufs, lesquels le conduisirent à travers le pays jusqu'à l'endroit de son ancien ermitage, où s'élève maintenant la belle église de Locronan et la chapelle du Pénity, construite pour abriter son tombeau.
Aucune des nombreuses statues de saint Ronan ne présente de caractéristiques spéciales mais deux des médaillons en bas-relief qui décorent la chaire, datée de 1707, retracent le miracle de la délivrance de la brebis de la gueule du loup, et le transport merveilleux du cadavre du saint, accompagné par trois évêques.

 

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Saint Suliau

C'est le patron de la paroisse de Sizun. Au fond du porche Midi de cette église nous trouvons sa statue en bois, drapée de la chasuble antique, aux plis souples et gracieux, ayant la figure jeune et imberbe, tenant un livre de la main gauche. La main droite a disparu ; si elle avait existé, nous y aurions constaté sans aucun doute le même emblème que l'on voit dans les trois autres statues du même saint. En effet, la statue en bois du choeur, celle en pierre qui se trouve au-dessus de la porte de l'ossuaire, et une autre plus petite, sur la face Sud de la sacristie, tiennent dans leur main droite quelque chose comme une petite botte d'asperges, quatre chevilles ou courtes brochettes. Pour en avoir le sens, il faut recourir à l'histoire du saint, qui nous en donne l'explication. Voici ce que nous lisons dans sa vie, par Albert Le Grand, édition de 1901, p. 434 :
« Ayant obtenu autant de terre qu'il luy en fallait pour bastir un Hermitage pour lui et pour ses confrères (au bord de la Rance, au lieu où l'on voit encore l'église de Saint-Suliac), il commença à travailler, et, en peu de jours édifia une petite Chapelle et quinze petites cellules pour se loger lui et ses religieux ; et ayant labouré de ses propres mains une pièce de terre qui luy restait dudit don, il y sema du bled, lequel crût fort beau ; mais le bétail qui d'ordinaire, paisait ès prochains marests, se jetta, une nuit, dans ce champ qui n'était pas fermé et en gâta une partie ; le matin on vint en avertir S. Suliau, lequel ne s'émût pas beaucoup ; seulement, il se mit en prière, et puis prit son bâton, dont il traça une ligne tout à l'entour du champ, et, aux quatres coins d'iceluy, planta quatre petites houssines pour toute haye et fossé ; priant Dieu de ne permettre que le bétail outre-passât ces bornes, pour endommager les semailles de ses serviteurs. Dieu exauça son Oraison, et, la nuit suivante, les mêmes animaux sortans des marêts et paturages, se voulurent jetter sur le dit champ ; mais (chose merveilleuse si-tost qu'ils touchèrent cette ligne que le Saint avait tracée tout à l'entour de son champ, ils devinrent tous immobiles, sans se mouvoir, n'y remuer, non plus que s'ils eussent été de marbre ou de bronze. Le matin, les païsans du voisiné, ne trouvans pas leur bestail dans les marêts, les trouvèrent en cette posture tout à l'entour du champ de S. Suliau ; et le bruit de cette merveille ayant couru par le pais circonvoisin, une grande multitude de peuple se rendit en l'hermitage pour voir une chose si étrange. Le S. Abbé, craignant que cette affluence de monde n'interrompit les exercices de ses Religieux, s'en allant devers le champ, donna sa bénédiction à ces animaux, et leur deffendit désormais de venir ravager son bled, ce qu'ils observèrent invariablement et se retirèrent dans les marêts ».
Ce sont donc ces quatre houssines ou piquets plantés par saint Suliau aux coins de son champ, que les sculpteurs lui ont donné comme caractéristique.

 

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Saint Téleau


Saint Téleau ou Téliau (Téliavus) évêque de Landaff au. pays de Galles est chez nous patron de la paroisse de Landeleau et de la jolie chapelle qui porte son nom en Plogonnec. On le représente toujours chevauchant sur un cerf, vêtu en évêque, portant chape, mitre et crosse. Voici, tel qu'il est raconté par les hagiographes anglais et probablement par le Liber Landavensis, le fait qui donna lieu à ce genre de représentation.
Un soir qu'il n'y avait plus de bois pour préparer le repas des moines, le Saint avec son disciple Madoc, s'en alla à la forêt voisine pour en prendre une provision ; mais comme le besoin était pressant et qu'ils risquaient fort d'être en retard, voici que deux gentils cerfs, attelés ensemble, vinrent à eux, semblant proposer leurs services. Théleau et son compagnon leur confièrent la charge de bois et retournèrent au monastère, suivis des deux dociles animaux. Le peuple voyant cette merveille s'écria : « 0 pieux frères, combien manifestement vous avez été illuminés aujourd'hui de la divine grâce, puisque les animaux sauvages sont devenus vos serviteurs ! Malheureux sommes-nous, puisque nous n'obéissons pas aux saints, cependant que l'exemple nous est donné par ces bêtes ».
Les cerfs restèrent longtemps au monastère et aidèrent les moines quand ils eurent besoin de leurs services.
A Landeleau la légende est différente. Le Saint quand il arriva en ce pays se bâtit d'abord un ermitage et construisit ensuite une église à laquelle il désira joindre un territoire pour former une paroisse. S'étant abouché avec le seigneur de Châteaugall, celui-ci lui dit : je t'abandonne tout le territoire dont tu pourras faire le tour en une nuit, mais il est bien entendu qu'au chant du coq, en quelque lieu que tu sois tu feras halte. Le saint rentrant chez lui conta la chose à sa soeur qui depuis quelque temps était venue tenir son ménage ; celle-ci feignit un grand contentement, mais conçut une violente jalousie. Cependant, saint Téleau se tenant sur le seuil de sa porte se mit à siffler, aussitôt un cerf sortit du bosquet et vint s'agenouiller aux pieds du Saint ; celui-ci, la nuit tombée, monta sur le cerf et se mit en route, l'animal galopant de toute la vitesse de ses jambes, mais comme il traversait la cour de Castel ar Gall, les gens lachèrent sur eux les chiens, le saint n'eut que le temps de sauter sur un chêne, tandis que le cerf se réfugiait dans le bois.
Pendant ce temps sa soeur alla prendre un coq dans le poulailler et le fourra dans le tuyau de la cheminée, puis elle mit le feu dans l'âtre à un fagot de bois vert ; le coq cherchant à fuir la fumée, battait ses ailes, chanta désespérément, réveilla les basses-cours du village, et ce cri se transmettant de ferme en ferme arrêta saint Téleau, lié par sa promesse, sans quoi la paroisse de Landeleau se serait étendue jusqu'à Collorec d'un côté et à Cléden de l'autre. (Chanoine Peyron, mémoire lu au Congrès de l' Association Bretonne, Concarneau, 1905 ).
Dans cette église paroissiale de Landeleau existe une très belle représentation en chêne sculpté, figurant saint Théleau sur un cerf ; groupe semblable à la chapelle de Kerdévot, en Ergué-Gabéric, puis au Musée archéologique de l'Évêché ; une autre, au rebut, dans le jardin du presbytère de Pleyben. — A la chapelle de Saint-Téleau en Plogonnec, au retable du maître-autel, beau bas-relief en bois doré, le saint chevauche son cerf qui gravit à toute vitesse une colline couronnée par un château féodal ; peut-être le Châteaugal de Landeleau. A l'église paroissiale de Plogonnec, panneau de vitrail, provenant de la même chapelle et figurant le même saint sur la même monture.

 

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Saint Thégonnec


Il est patron de la belle paroisse qui porte son nom dans le Léon, et de la chapelle de Saint-Trégonnec, en Plogonnec. Nous trouvons sa légende en tête de la Monographie de l'Église de Saint-Thégonnec, par M. l'abbé Quiniou. Il aurait vu le jour à Tréfentec, non loin de Sainte-Anne-la-Palue, en Plonévez-Porzay. Chassé par les habitants du Village qui lancèrent les chiens à ses trousses, il vint fixer son ermitage dans un lieu appelé depuis Plogonnec (peuple de Egonnec) ; et en punition de la méchanceté de ses compatriotes il leur prédit qu'ils seraient toujours pauvres et que tous les chiens enragés qui courraient le pays passeraient par chez eux :

Kernent ki klanv a deui er vro 

Dre Trefentec a dremeno.

Ce qui, dit-on, s'est vérifié. Mais comme correctif, l'eau de la fontaine qui coule dans la chapelle bâtie sur son ermitage, guérit de la morsure de ces animaux.
Plus tard il vint dans le Léon et entreprit de bâtir une église à saint Thégonnec. Il charroyait lui-même les pierres au moyen d'un pauvre malheureux cheval qui fut un jour dévoré par un loup. Mais le Saint fait un signe de croix sur le loup et le prend pour l'atteler à son chariot. Cet étrange équipage fait son entrée au bourg à l'ébahissement de la population et tous alors se mettent de bonne volonté à aider celui qui voulait leur bien corporel et spirituel et qui devint plus tard le patron de leur église.
Un beau tableau, dans un vitrail moderne, à Plogonnec, retrace cette scène, d'une façon mouvementée.
A Saint-Thégonnec, au-dessus du petit autel adossé au massif du calvaire une statuette du Saint est accompagnée d'un chariot attelé d'un boeuf ou d'un cerf.

 

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Saint Tugean


Il est patron de l'église de Brasparts. Ne serait-ce pas Tusvcanus, Tusvan, Tusan, Tujean, auquel saint Jaoua résigna sa paroisse de Brasparts, et son monastère de Daoulas ?
Ce Saint a une chapelle monumentale en Primelin, dans le Cap-Sizun, où on l'invoque contre les chiens enragés et dont le pardon annuel, en juin, est fréquenté par une foule innombrable de pèlerins.
Pourquoi ce patronage spécial qu'il partage avec saint Hubert de Maestricht ?
Le peuple n'en donne pas d'autre explication que l'exclamation échappée à saint Tujean lors d'une escapade malheureuse de sa soeur « il est plus facile de défendre les gens contre les chiens enragés que de garder la vertu d'une jeune fille ».
Le bon Dieu le prit au mot et lui dit que désormais il serait chargé de préserver les gens des chiens enragés et de les guérir de leurs morsures.
Dans sa grande chapelle de Primelin, aux pieds de la belle statue qui le représente en évêque ou en abbé avec chape, mitre et crosse, on voit un chien enragé, et à genoux, implorant le saint, un petit enfant qui vient d'être mordu. On trouve encore ses statues avec chien, dans une niche extérieure à l'angle Nord-Ouest de l'enclos du Calvaire à Landerneau, à la chapelle de Saint-Tugdual de Landudal, à la chapelle de Loc-Mahé, ou St-Mathieu, en Bannalec, chapelle de Saint-Jean en Saint-Nic, chapelle de Saint-Gildas en Cast, dans la cour du presbytère de Cast, là le Saint lient sa clef traditionnelle et est accosté d'un gros chien qui en mord un petit. La statue patronale de l'église de Brasparts n'a pas de chien.
La chapelle de Loc-Mahé de Bannalec, outre la statue, a la représentation du même Saint dans le vitrail de l'abside. 

(Chanoine Abgrall) 

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