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Saint Yves, patron d'une quinzaine de localités et chapelles au diocèse de Vannes, est le défenseur de la veuve et de l'orphelin ; mais pour les gens vindicatifs il est surtout le grand justicier, le redresseur de torts ; après un procès perdu, on en appelle à son tribunal, on adjure le saint de punir dans ses biens ou dans sa personne la partie adverse, et même le juge, s'il a été prévaricateur. Dans ce cas, saint Yves est considéré comme goaster, jeteur de sorts, littéralement agent de corruption (goast-er) ; et la personne à laquelle le sort est jeté est goastet, altérée, corrompue (goast-et).

Au pays de Tréguier, en la paroisse de Trégarzec, s'élevait au siècle dernier une chapelle de saint Yves la Vérité « que l'on a rasée, dit Gauthier du Mottay, pour détruire une vieille superstition qui consistait a vouer au saint, c'est-à-dire à une maladie longue mortelle la personne avec laquelle on avait eu des difficultés ». Les pèlerinages à ce sanctuaire, qui avaient lieu clandestinement, étaient des pèlerinages de haine et de vengeance, et pour qu'ils fussent efficaces, il fallait faire trois fois le tour de la chapelle en marçhant à l'inverse du soleil.

Qu'il y a loin de cette réminiscence du culte des dieux infernaux aux paroles miséricordieuses du Pater !.

(André Viaud-Grand-Marais).