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C'était il y a sept ou huit cents ans un joli pâtour du pays gallo, qui menait paître sur la lande sa vache et ses moutons ; un jour une de ses bêtes ayant été égorgée par un loup, Jugon, après avoir prié le bon Dieu, la ressuscita en la touchant de sa houlette ; depuis on s'adresse à lui pour la conservation des troupeaux, surtout en cas de clavelée (maladie dermatologique hautement contagieuse).

Il est le protecteur des moissons ; trois messes de bénédiction de semailles se disent chaque année à son sanctuaire, l'une pour le lin et le chanvre, une autre pour le blé noir et la troisième pour les gros grains. Cette chapelle est à une lieue de La Gacilly et contient le tombeau du saint élevé de deux ou trois pieds au dessus du sol ; les années de sécheresse, afin d'obtenir la pluie, on y va en procession, clergé en tête. La procession fait trois fois le tour de la chapelle, et le porteur de la croix en plonge la hampe dans la fontaine sacrée ; l'eau de cette source est un remède préventif et curatif de la clavelée.

Pour se garantir de la fièvre et de la peur, il faut passer, en rampant dans la poussière, sous le tombeau de saint Jugon, comme on se traîne sous le cénotaphe de saint Philibert dans la crypte de l'église de Noirmoutier.

(André Viaud-Grand-Marais).