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Origine de Rohan : ville, château, famille, prieuré, paroisse.

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D'où vient le nom de Rohan ?

Le voyageur qui descend le cours de l'Oust, voit de distance en distance de gros rochers qui comme des promontoires, s'avancent jusqu'à la rivière.

En face de Saint-Gouvry il trouve Roc'huhan, un peu plus loin Roc'morgan, puis Roc'hugué, etc... Entre Roc'huhan et Roc'morgan se dresse le rocher qui servait de base au vieux château de Rohan.

Rohan est un mot breton qui a dû s'écrire originairement Rochan, car le vieux breton ne connaissait pas le c'h. Mais le ch dans la langue celtique avait la prononciation du c'h. Ensuite on écrivit Roc'han. Cette forme se lit dans les vieux titres de Quémenet près de Quimper.

En breton comme en français roc veut dire rocher. L'aspiration bretonne c'h manque en français. En passant dans notre langue, elle a donné simplement une h aspirée ; le c ne s'est pas prononcé et Roc'han est devenu Rohan avec la dernière syllabe han très dure. Rohan est donc un nom de lieu, un mot breton terminé par le diminutif an ; il signifie petit rocher. Ce sens est justifié par la topographie : le château de Rohan fut bâti sur un petit rocher.

Comment Dom Morice en employant dans le texte latin de la fondation du château de ce nom (1104), et dans la donation faite par Alain de Porhoët (1127) n'indique-t-il pas sa signification originelle : rupes de Han ou rupes quae vocatur Han ? — Parce que l'auteur a voulu user du mot breton.

Voilà, à notre avis, l'origine du mot Rohan. Elle s'appuie sur l'opinion d'un celtisant qui fait autorité dans la matière, M. E. Ernault (Le « Fureteur breton ». n° décembre 1906).

Parmi ses formes anciennes on trouve : castrum de Rohan (1128), Rocan (1264), Rochan (1266) (dom Morice, Pr. I, 1003), Roc'han (Rozenweig, Dictionn. topogr. du Morbihan), duché de Rohan.

Rohan donna son nom au château, édifié sur son roc, à l'agglomération qui l'environna, à son seigneur fondateur et au fief dont il fut le chef-lieu.

Origine de la paroisse de Rohan.

La construction du premier château de Rohan, par Alain de Porhoët (1104) coïncida avec l'érection de Rohan en vicomté.

Mais depuis quand Rohan existe-t-elle comme paroisse ?

Nous connaissons plusieurs documents relatifs à cette question. Le premier est un titre provenant du monastère de Marmoutier [Note : Ancienne abbaye de Bénédictins, située à 2 kilomètres de Tours. Elle fut fondée par saint Martin en 371. On en voit encore les ruines]. Du sceau il ne reste que les lacets ; au dos du parchemin, on lit : de castro Joscelini, du château de Josselin. La pièce précieuse est conservée à la bibliothèque nationale à Paris, dans la collection des Blancs-Manteaux, N° 22.319.

Les trois petites villes voisines : la Trinité-Porhoët, Josselin, Rohan furent fondées, la première au Xème siècle, la seconde au XIème, et la troisième au commencement du XIIème, par les comtes de Porhoët d'où sont issus les ducs de Rohan. La Trinité-Porhoët doit son origine à un comte de Porhoët, Josselin à Josselin, fils de Guéthenoc, Rohan à Alain vicomte de Porhoët qui prit le titre de Rohan.

Une forteresse de ces puissants seigneurs fut le berceau de chacune de ces cités. A titre de reconnaissance, elles prirent les noms de leurs fondateurs.

A l'exemple de son aïeul Guéthenoc, au moment de son arrivée à Josselin, Alain de Rohan bâtit sa chapelle, notre première église paroissiale, à côté de son château de Rohan.

Les seigneurs de Porhoët avaient, en outre, édifié à Josselin trois monastères (ils existent encore en partie) : Sainte-Croix, oeuvre de Guéthenoc (1030) ; Saint-Martin construit par Eudon I (1105) ; Saint-Jean des Prés par Eudon II vers 1160. Sainte-Croix dépendait de Saint-Sauveur de Redon, et était tenu par des moines bénédictins. Ils habitaient aussi Saint-Martin ; une partie de leur chapelle restaurée, forme la loggia superbe où tous les ans est célébrée la messe, le 8 septembre, fête de Notre-Dame du Roncier. Des chanoines réguliers de Saint-Augustin, étaient à Saint-Jean des Prés (aujourd'hui Saint-Jouan).

De ces deux dernières maisons, les seigneurs de Porhoët, résidant à Josselin, envoyèrent des moines travailler à l'évangélisation des campagnes environnantes. Dotés d'un prieuré où ils allaient s'établir, ces religieux prirent le titre de prieurs. Bientôt, après l'érection en paroisse du territoire sur lequel ils exerçaient le ministère, on les appelait prieurs-recteurs, prieurs-curés.

La paroisse de Rohan n'a pas une autre origine ; l'acte suivant nous en offre une preuve. Nous allons citer le texte original ; les points remplacent les mots effacés ou illisibles. Bien qu'en latin, il est de nature à piquer la curiosité de nos lecteurs qui connaissent cette langue.

FONDATION DU PRIEURÉ DE ROHAN PAR ALAIN VICOMTE DE PORHOET ET DE ROHAN.

En faveur des moines bénédictins de Saint Martin de Josselin (1127).

Anno ab Incarnatione Doruini MCXXVII, Ludovico rege régnante, Conano Britannorum Comite, Alanus Vicecomes Porrohetensis .... donavit Deo et Sancto Martino Majori-Mon. ejusque monachis in Castro Jocelini Deo servientibus, totum burgum... portam castri sui novi quod vocatur Rohan ad construendam ecclesiam et cimiterium... porta castri usque ad... usque ad fluvium Ultii, et unum molendinum in superiori stanno, et terram ad unam carrucam prope ipsum castrum, et omnes consuetudines burgensium... Dedit etiam tertiam partem ecclesiae de Querdin cum duabus partibus decimæ. Præterea dedit monachis totam decimam... prope ipsum castrum... et forfaicturas burgensium... Act... claustrum Sancti Martini castri Joscelini V. kal. Aprilis. Testis Alanus Vicecomes, Josc... filius ejus qui firm... super altare... Morvanus atque Aldroinus... Mingardus... Pissardus, Judicael, Caphra, Daniel de Ferraria... Herveus Rivallonius presbyter et alii multi.

Voici la traduction de cette pièce :
L'an de l'Incarnation du Seigneur (1127), sous le règne du roi Louis, Conan étant duc de Bretagne, Alain vicomte de Porhoët.... donna à Dieu et à Saint-Martin du Grand-Monastère (Marmoutier), et à ses moines qui servent Dieu dans la ville forte de Josselin, toute la bourgade... sise à la porte de son nouveau château de Rohan, pour bâtir une église et un cimetière. Cette concession s'étendait jusqu'à... et à la rivière d'Oust. Il accorda, de plus, à ces religieux, un moulin dans l'étang supérieur, et une terre près de son château, équivalente à « une journée de charrue », la recette de tous les droits de coutume, sur les bourgeois...

Alain de Porhoët ajouta le tiers des revenus de l'église de Crédin avec les deux tiers de la dîme en cette paroisse..., enfin toute la dîme... près la ville forte de Rohan...

Fait sous le cloître de Saint-Martin de Josselin, le cinq des kalendes d'avril. Témoins [Note : Alain de Porhoët était frère de Geffroi, de Bernard et de Josselin. Son fils aîné, Josselin, comme nous le voyons par l'acte en question, sert de témoin à la donation de son père : il la confirme sur l'autel. — Cest sur un autel païen que le général Carthaginois Amilcar faisait jurer à son fils Annibal, encore enfant, une haine éternelle aux Romains, IIIème siècle avant J.-C. Alain de Porhoët fonda le prieuré de la Noée à peu près dans le même temps que celui de Rohan (Dom Lobineau, Histoire de Bretagne, I, 131)] : Alain le vicomte, Josc... (Josthe ou Joscelini) son fils qui confirma cette donation sur l'autel... Morvan et Aldroin... Mingard... Pissard, Judicaël, Caphra, Daniel de la Ferrière, Hervé Rivallon, prêtre, et beaucoup d'autres.

Quelques explications sont nécessaires à l'intelligence de ce texte.

Le début solennel de l'acte de fondation, offre une certaine analogie avec l'évangile de saint Luc annonçant la prédication de saint Jean-Baptiste au désert (Luc, ch. III, v. 1 et seq.).

La charte commence par rappeler le grand bienfait de l'Incarnation. Beaucoup d'actes officiels du temps, débutent en termes identiques. Jésus-Christ est, en effet, le centre et le pivôt de l'histoire du monde, le principe d'une ère nouvelle ; pour fixer les dates, on compte les années avant et après sa naissance. — De nos jours encore, les Papes dans leurs encycliques, les Evêques dans leurs mandements, notent toujours l'an de grâce.

A l'époque de cette donation, le roi Louis VI le Gros régnait en France.

Comme les seigneurs du temps, ceux de Porhoët exprimaient ordinairement ainsi le but de leurs donations : « Je donne à Dieu... à l'église de... aux moines de... pour le salut de mon âme, des âmes de mon épouse, de mes enfants, de mes ancêtres et successeurs ». Ici, la formule simplifiée n'en est pas moins belle : Alain de Porhoët donne à Dieu, à Saint-Martin de Marmoutier et aux religieux de ce monastère à Josselin, entre autres choses : toute la bourgade assise à la porte de son nouveau château de Rohan.

Quelle est cette bourgade ?

Le village de Bourc-ès-Moines. En effet :

1° Le texte de la donation est clair : Alain de Porhoët céda, jusqu'à l'Oust, toute une bourgade, pour y construire une église et un cimetière. Par conséquent, où se trouvent l'église et le cimetière, là était le bourg en question. Or, les premières maisons du village de Bourc-ès-Moines, touchent la chapelle et le cimetière de Saint-Martin.

2° La tradition est en faveur de cette hypothèse, puisque le nom est resté : le Bourc-ès-Moines.

3° Le village que nous cherchons, n'était séparé du château que par le parc très restreint du seigneur (aujourd'hui les trois parcelles cadastrales : nos 103 (parc-pré), 104 (parc-terre), 115 (parc-châtaigneraie), et le cimetière, c'est-à-dire, par une distance d'environ 60 m.), à vol d'oiseau. Bourc-ès-Moines se trouvait donc, en quelque sorte, à la porte du château.

4° La bourgade donnée aux moines, n'est pas Rohan ; il n'est pas admissible, que le Vicomte de Porhoët, se soit dépouillé de ses droits seigneuriaux sur ses voisins immédiats : les habitants de la ville actuelle. Et de fait, ceux-ci ont toujours payé la dîme, et relevé de la juridition des ducs de Rohan jusqu'en 1789.

L'objection qu'on peut émettre, que le Bourc-ès-Moines n'a jamais fait partie de la paroisse de Rohan avant 1913, ne vaut pas. Car on voit par cette charte de 1127 et d'autres, que Alain de Porhoët dispose de Crédin. Il a donc pu donner aux moines bénédictins un terrain en Crédin aussi facilement qu'en Rohan.

Le terrain concédé aux moines bénédictins, pour bâtir une église et un cimetière, forme l'emplacement de la chapelle et du cimetière actuels. Cette chapelle ils la placèrent sous le vocable de saint Martin leur patron. Elle fut le berceau de la première église paroissiale de Rohan. D'ailleurs, les moines (ils étaient deux au moins), n'étaient pas seulement les chapelains du seigneur : ils fournissaient le service religieux aux habitants de Rohan et des environs.

Ni le budget, ni le denier du culte n'existaient, à cette époque. Pour assurer l'existence de ces religieux, Alain de Rohan leur donna, outre un moulin, une propriété équivalente « à une journée de charrue ». Au Moyen-Age, on mesurait la terre par corde, gaule, verge, sillon, homée de terre à faucher ou à bêcher, journée de charrue (journal), cinquante, toutes quantités évidemment approximatives dans le principe, devenues fixes avec le temps.

Le seigneur de Rohan ajouta, en faveur de ses protégés :
1° Les « coutumes » du village de Bourc-ès-Moines, redevances seigneuriales autres que les rentes sur les terres, comme par exemple : droits de passage, droits de soûle, de guet, droits sur les derniers mariés de l'année, droits d'entrée dans les foires...

2° Les « forfaitures » ou manquements aux devoirs féodaux frappés d'amende.

3° Le tiers des revenus de l'église de Crédin, plus les deux tiers de la dîme de cette paroisse, et toute la dîme près de son château.

Le moulin donné aux moines, était probablement situé entre la chaussée qui séparait les deux étangs.

Alain de Porhoët bâtit un nouveau moulin pour le château, à la pointe occidentale de l'étang inférieur (emplacement de la maison à Mme Veuve Lorand, bouchère). En effet, le jardin attenant à cette maison, porte dans les vieux titres (papiers Chéreux) le nom de jardin de l'ancien moulin du château.

Au surplus, lorsque M. Pierre Lorand construisit sa maison en 1901, il découvrit dans sa cour un déversoir antique.

Quant aux diverses donations dont nous venons de parler, Jostho, fils d'Alain de Porhoët, les confirma dans l'église de Saint-Martin, à Josselin, la main étendue sur l'autel, en présence de nombreux témoins.

En 1128, dans une lettre en latin, datée de son château de Rohan, Alain de Porhoët, confirma la fondation qu'il avait, l'année précédente, faite à Josselin. Suit la traduction de cet acte (Archives départementales, fonds du prieuré de Saint-Martin de Josselin) :

« L'an de l'Incarnation du Seigneur, mil cent vingt-huit, sous le règne du roi Louis, Conan étant duc de Bretagne, moi Alain vicomte, je donne et j'ai donné à Saint-Martin, et aux moines du monastère de Josselin, tout le bourg situé devant la porte de mon nouveau château de Rohan, un moulin et la moitié d'une propriété équivalente à une « journée de charrue », près de mon château. Je leur concède en outre tous droits de dîme dans la paroisse de Saint-Pierre de Querdin, jusqu'à mon château — sauf les pailles [Note : Ces pailles furent d'abord fournies en nature aux seigneurs de Rohan pendant leur séjour à Josselin. Dans la suite elles furent remplacées par une redevance annuelle de 245 livres payées jusqu'à la Révolution à la Cour de Pontivy (voir lettre de François-Marie Le Barre, procurateur de Louis-Antoine-Auguste de Rohan-Chabot, 26 avril 1292, Arch. départem. du Morb. Série B, liasse familles Rohan-Chabot)] — et la moitié de la juridiction dans la même paroisse, pour le repos de mon âme et des âmes de mes défunts.

Fait dans notre château de Rohan, l'année susdite, sous notre paraphe et signe, en témoignage de l'acte ». A. DE ROHAN.

Moins explicite que la fondation de Josselin, cette dernière n'en diffère pas en substance. Toutefois elle ne porte pas le motif de la fondation : faire une église et un cimetière près de Rohan.

Il est probable que cette charte ou lettre, ne fut pas écrite de la main du Vicomte de Porhoët. A cette époque, en effet, les grands seigneurs étaient plus habiles à donner des grands coups d'épée d'estoc et de taille, qu'à tenir la plume. Ils s'honoraient de ne savoir signer qu'avec leur épée. Leurs lettres et actes officiels étaient rédigés par un notaire, généralement un prêtre, alors investi de ces fonctions par le seigneur.

Alain de Porhoët, premier seigneur de Rohan, mourut en 1128. L'évêque de Vannes, Morvan, décéda la même année, après avoir reconnu la fondation du seigneur de Rohan.

Lorsque l'Eglise et l'Etat marchent unis pour le bien, tout en évoluant dans une sphère distincte, comme sous le Concordat, les fondations pieuses pour être valides, et avoir un caractère officiel, ont besoin de la reconnaissance des deux autorités civile et religieuse.

Le nouveau seigneur de Rohan, afin de procurer aux habitants les bienfaits du service religieux, avait donné une bourgade, un moulin avec quelques autres propriétés, aux bénédictins du prieuré de Saint-Martin de Josselin, à la charge d'y construire une chapelle et un cimetière. Au bout de deux ans, les moines avaient rempli cette double condition. En 1129, Jacques, successeur de Morvan sur le siège de Vannes, confirmait la donation d'Alain de Porhoët par la lettre suivante :

« Moi, Jacques évêque par la grâce de Dieu (il n'ajoute pas : par l'autorité du Siège Apostolique, bien qu'elle ait toujours été nécessaire), je concède, et par l'autorité de mon signe, je confirme le don de l'église de Saint-Pierre de Querdin, que mon prédécesseur de bonne mémoire, Morvan, évêque de Vannes, a fait aux moines de Saint-Martin de Josselin. Je confirme également la donation de la chapelle de Rohan, attribuée à ces moines, par Alain le vicomte. Que si quelqu'un veut y mettre obstacle, qu'il soit anathème. Ainsi soit-il, ainsi soit-il, ainsi soit-il. Donné le jour de vendredi, l'an du Seigneur 1129 » (Archives départementales du Morbihan, fonds du prieuré de Saint-Martin de Josselin).

Notons que l'évêque de Vannes, avant de marquer la date de son acte, pour lui donner plus de force, le termine par trois amen.

Suivant la parole de saint Paul, le prêtre doit vivre de l'autel. Chez les Juifs [Note : Exode XXII-29 ; « Vous ne différerez point de payer les dimes et les prémices de vos biens »], la dîme et les offrandes faites au Temple, assuraient aux lévites une honnête subsistance. Dans la primitive Eglise, les riches étaient obligés de subvenir à l'entretien des ministres du culte, chacun dans la mesure de ses ressources. Mais comme aucune somme n'était fixée, cette situation du clergé ne laissait pas que d'être précaire. Voilà pourquoi l'Eglise, au Moyen-Age, fit établir, en faveur du clergé, une redevance annuelle et stable : la dîme. Le Dénier du Culte en tient lieu actuellement.

Cependant, des dissensions ne tardèrent pas à s'élever, au sujet des dîmes de Crédin, entre les moines de Saint-Martin à Rohan, et un nommé Geoffroi, fils de Raoul. L'évêque de Vannes, Jacques, voulant mettre fin à ce différend, arrêta que Geoffroi jouirait pendant sa vie, de la moitié de cette dîme, et qu'après sa mort, les moines en auraient l'entière et paisible possession, les droits de l'église de Vannes réservés. Parmi les témoins de cet acte épiscopal (rédigé le 11 des kalendes d'août 1128, c'est-à-dire, d'après notre calendrier moderne : le 22 juillet 1129), on remarque outre l'évêque de Vannes : Guyomard, archidiacre, maître Abraham, le doyen Morvan, André prieur, Hervé homme de Dieu, Roscher frère de Geoffroi, Hervé serviteur (Archives départementales fonds du prieuré de Saint-Martin de Josselin) ...

La cueillette de ces dîmes soulevait bientôt de nouvelles difficultés.

L'évêque de Vannes Yvon ou Even, était mort en 1143. Le chapitre de la cathédrale élut pour lui succéder, Rotald ou Rouaud, premier abbé de Lanvaux, de l'ordre de Cîteaux. Peu après son élévation à l'épiscopat, le prieur de Saint-Martin de Josselin, fait connaître à l'évêque de Vannes et à son chapitre, que la dîme était mal payée à ses moines dans la paroisse de Crédin. Le prélat écrivit la lettre suivante : elle montre son amour de la justice et sa préoccupation du salut des âmes.
« Rouaud par la grâce de Dieu, évêque de l'église de Vannes, au clergé et au peuple du diocèse, et à tous les fidèles qui liront ces lettres, salut en Notre-Seigneur. Notre cher prieur de Saint-Martin de Josselin, nous a fait savoir à nous et au chapitre de Vannes, que le vicomte Alain (de Rohan), avec l'assentiment de son fils Alain et le conseil de ses barons, avait concédé à perpétuité aux moines de Marmoutier, la dîme de Kerdin. Or cette dîme, selon ce qui nous a été dit, ne se donne plus intégralement, ce qui est une faute grave. Quant à nous, nous ne voulons pas que la perte d'une dîme soit une occasion de perte pour les âmes de nos diocésains. Aussi, après avoir approuvé la fondation pieuse du susdit Vicomte, et l'avoir affermie par l'apposition de notre sceau, nous avons excommunié quiconque met obstacle à l'objet de notre confirmation et à la libéralité du vicomte. Et nous ordonnons aux chapelains de Rohan et de Kerdin, et aux autres voisins, d'excommunier, sans retard, les insoumis [Note : Ce pouvoir d'excommunier donné à plusieurs prêtres à Rohan et aux environs montre que dans le pays le refus de payer entièrement la dime ecclésiastique, était un peu général] s'ils ne viennent à résipiscence, chaque dimanche et les fêtes à neuf leçons. Témoins de ce décret : D. archidiacre de Vannes, A. doyen, M. moine de l'évêque, S. doyen de Josselin, S. prieur de Josselin, Donoal moine, Jean, prêtre de Kerdin, Robert, prêtre de Saint-Goneri, Pierre, chapelain de Notre-Dame de Vannes » [Note : Dom Morice, Preuves, tome I, p 595. — Le trait de dîme de N.-D. de Crédin rapportait au prieuré Saint-Martin de Josselin, à la veille de la Révolution, 450 livres par an].

Pour empêcher les fondations de tomber dans l'oubli, ou d'être usurpés par quelques héritiers des fondateurs, les seigneurs par lettres officielles, rappelaient de temps à autre, leurs legs pieux. C'est ce que fit Alain IV, vicomte de Rohan en 1205.

Outre les donations faites en 1127 et 1128, à ses chapelains de Rohan, il leur cédait un bois placé sur les confins de la rivière d'Oust et de la paroisse de Crédin. Alain IV retenait cependant 60 sous de monnaie courante sur la terre de Crédin. Moyennant cette somme, il s'engageait, lui et ses héritiers, à défendre la terre, les biens et les hommes des moines (Dom Morice, Preuves, T. I, p. 800). En ces temps de pillages et d'incursions fréquentes, c'était pour les religieux une sage précaution. Car si leurs personnes étaient sacrées et inviolables aux yeux des fidèles, leurs revenus et leurs gens ne l'étaient pas toujours. Malgré son influence considérable, à cette époque, l'église n'arrivait que par une sage lenteur, à arrêter les guerres intestines et leurs désordres.

Quoi qu'il en soit, la paroisse de Rohan n'était pas encore fondée. Mais les seigneurs de Rohan par leurs donations, et les évêques de Vannes en les autorisant, en avaient jeté les assises.

La plupart de nos paroisses ont une origine très ancienne, et remontent aux premiers siècles de l'Eglise. L'évangélisation de la Gaule, en effet, commence au temps même des Apôtres. Dès lors, les premiers missionnaires qui apportaient la « Bonne nouvelle », travaillèrent avec ardeur à l'organisation des paroisses.

Celle de Saint-Gouvry devait exister au VIIIème siècle [Note : Quand M. J. Loth écrit (Noms des Saints bretons, p. 49) : « Saint Gobrien à vécu au XIIIème siècle », nous nous demandons sur quel document le savant historien peut appuyer une assertion qui contredit l'opinion généralement admise que saint Gobrien mourut dans la prémière moitié du VIIIème siècle, vers 725]. C'est à l'une de ses extrémités, à l'est sur les bords de l'Oust à la limite de Crédin, qu'Alain de Porhoët bâtit son château.

Un jour, un Evêque de Vannes, probablement par condescendance pour le Vicomte de Rohan, érigea en paroisse, la petite ville sise autour de son château. Par le fait, la paroisse de Saint-Gouvry était démembrée, le prieuré de Saint-Martin de Rohan devenait paroisse, et la chapelle Saint-Martin église paroissiale.

Quand eut lieu cet événement ? Nous ne savons à quelle date précise. Les Rohannais, au XVIIIème siècle, aidés des hommes de lois : avocats et procureurs de la juridiction de Rohan, et du Parlement de Rennes, cherchèrent plus de 20 ans, un document relatif à l'origine de notre paroisse. Ils ne le trouvèrent pas. Peut-être, cette pièce avait-elle été détruite. En tout cas, ils en recueillirent d'autres ; nous les avons consultées avec profit dans cette étude (Archives municipales de Rohan).

Comme un voyageur tâtonne dans la nuit obscure pour découvrir sa route, ainsi en fouillant dans la nuit du passé, nous avons trouvé ces vieux titres. Ils nous ont servi de points de repère et de guides dans nos investigations. Jetons un coup d'oeil sur les jalons les plus éloignés.

1° Dans son testament du 20 mars 1551, dom Jean Jéhannot désire que son corps soit « ensépulturé en l'église parrochiale de Saint-Martin de Rohan, devant le sacraire [Note : Sacraire, tabernacle où reposait le Saint-Sacrement] d'ycelle église, s'il plaist à Monsieur le Recteur d'ycelle, ou ses lieutenants et vicaires ».

De ce texte, il résulte clairement que Rohan était paroisse en 1551. Il semble même qu'il y eût deux vicaires, à cette époque.

2° La « Réformation » faite le 11 décembre 1513 [Note : Extrait de la Noblesse bretonne aux XVème et XVIème siècles, réformations et montres, par le comte E. de Laigue, I, p. 700], dans la paroisse de Saint-Gouvry, jette un nouveau jour sur la question.

Au moyen-âge, les nobles payaient l'impôt du sang, les roturiers l'impôt en argent. Pour ne pas charger le peuple à l'excès, de temps à autre le pouvoir central ordonnait une enquête, au cours de laquelle, les nobles devaient fournir la preuve authentique de leurs titres et qualités. Or, les trois rapporteurs de Saint-Gouvry (pour la Réformation de 1513) : Alain Le Meur, Guillaume Robin, Jean Hervé, déclarent que dans leur paroisse, il n'y a ni manoirs, ni nobles. Donc, le château de Rohan et son seigneur, ne sont plus dans la paroisse de Saint-Gouvry mais dans celle de Rohan.

3° Autrefois, certaines paroisses du diocèse de Vannes, payaient annuellement au Chapitre de la cathédrale, une pension exigible en quatre termes ; toutes les autres paroisses du diocèse, étaient tenues de payer au synode de la Pentecôte, des droits questaux ou censaux. Ce tribut était comme un hommage des Eglises secondaires à l'Eglise mère.

En 1387, plusieurs paroisses ne payaient point les droits de pension et de cens. Aussi le Chapitre profita du synode de la Saint-Luc (1387), pour réclamer juridiquement, c'est-à-dire, par l'intermédiaire de l'official, ce qui lui était dû. A cette occasion, l'official dressa une liste des paroisses tenues à la pension, et une autre des paroisses soumises au cens (nous venons de dire que toutes payaient ce dernier droit).

Dans la liste des paroisses soumises au cens, figurent Lantillac : 2 sols, Radenac 8, Réguéni 13, Rohan 6, Saint-Gobrice 2, Querzin, 13... (Le Mené : Histoire du diocèse de Vannes, I, p. 378-379).

Par conséquent Rohan en 1387, formait une paroisse.

Au moyen-âge les paroisses versaient en cour de Rome une taxe papale. Elle était fixée en 1330 [Note : En 1330 la taxe était versée au pape d'Avignon] pour Saint-Gouvry (Sanctus Goverius) à 10 sols et pour la paroisse de Rohan à 8 sols. Donc en 1330 Rohan était paroisse. Le recteur comme à Saint-Gouvry, était nommé au choix de l'évêque.

A quelle époque les bénédictins quittèrent-ils Rohan ?

Avant la fin du XVIème siècle, sans nul doute. En effet, dans ce temps, le prieuré de Saint-Martin de Josselin tomba en commandite, et fut occupé par un prêtre séculier : d'abord vicaire perpétuel, plus tard recteur entretenu par l'abbé commandataire.

D'après Luco — nous ignorons où il a trouvé cette date — les moines bénédictins de Rohan auraient été remplacés par des prêtres séculiers, dès le XIIème siècle.

Durant le XVème siècle, Rohan comme bénéfice paroissial paie 4 sols 4 deniers, puis 20 sols parce que le recteur ne fait pas sa résidence (ceux qui font résidence ne versent que 10 sols).

A cette époque, Rohan ne figure pas dans la liste des paroisses tenues d'avoir fabriciens et syndics. Au cours des XVème et XVIème siècles, Saint-Gouvry n'a pas non plus de recteur en résidence, mais par contre possède fabriciens et syndics [Note : Pouillés de la province de Tours, diocèse de Vannes, doyenné de Porhoët, par Longnon (1903)].

La chapelle du prieuré devenue église paroissiale de Rohan, conserva son titulaire [Note : Titulaire : saint sous le vocable duquel est bâtie une église ; patron : saint sous la protection duquel est placée une paroisse] Saint Martin ; la nouvelle paroisse elle-même garda le patron de la paroisse-mère saint Gouvry ou saint Gobrien. Car les deux semblent être un seul et même saint. Leur étymologie exige cette identité, bien que les deux fêtes tombent à des dates différentes.

En effet nous trouvons (archiv. municip. de Rohan) passim : Gobritius, Gobritus, Gobrice, Gobrianus, Gibrian, Gouvrius ; alias Goverius (voir plus haut), Goubry, Saint-Govri (1422 chapitre de Vannes).

« Saint-Gobrien, dit M. Loth [Note : Noms des Saints bretons, par J. Loth, p. 45], est une forme littéraire et traditionnelle ; c'est un dérivé de unobri conservé dans Saint-Gouvry (v. gall-unobriach gl. sapientior) ».

ADDITIONS :
1° Raison principale qui milite en faveur de l'identité de Saint-Gouvry et de Saint-Gobrien : s'ils étaient différents, on ne s'expliquerait pas que les Rohannais aient choisi saint Gobrien comme patron ; ils eussent certainement pris saint Martin titulaire de leur chapelle prieurale.
2° Autre preuve de cette identité : l'ancienne chapelle Saint-Gobrien postérieure à l'érection de Rohan en paroisse, montre la fidélité des Rohannais à leur patron.

(P. Martin).

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