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L'origine et l'histoire du château de Rohan.

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Le Château : son origine, un mot de son histoire, ses dépendances, les gouverneurs du château, étendue de la châtellenie.

Alain de Porhoët troisième fils d'Eudon Ier [Note : Eudon Ier eut 4 fils : Jostho, Geoffroy, Alain et Bernard] comte de Porhoët, abandonna sa résidence de Castennec [Note : Castennec, mot breton qui signifie château des noix] en Bieuzy près de Pontivy, pour venir s'établir sur les bords de l'Oust. Il prit le nom du roc sur lequel il avait bâti son château (1104), et devint le premier seigneur de Rohan.

C'est l'époque de la féodalité. Solidement campés dans leur fief, les grands seigneurs du temps nous offrent le type de souverains en miniature. Leur vie s'écoule en luttes incessantes parfois contre leurs suzerains, le plus souvent contre leurs rivaux. Pour eux la guerre est un métier.

Afin de parer à une attaque toujours à craindre d'un puissant voisin, Alain de Rohan fortifia sa demeure féodale. Elle consistait d'après le plan ordinaire des châteaux forts à cette époque, vraisemblablement dans une motte féodale surmontée d'une tour carrée avec bâtiments accessoires, talus hérissé d'une palissade ou mur d'enceinte.

Avec le temps Alain et ses successeurs rendirent plus fort leur château. L'esplanade dressée, ils firent tailler à pic les assises, élever au-dessus des rocs escarpés des murailles ornées de créneaux, garnies aux angles de tours rondes massives. Ils entourèrent leur donjon, à l'est par le lit de l'Oust élargi sur une longueur de 400 mètres environ, et qui, au fort de l'été, se transformait en marécages ; à l'ouest par des douves que traversait un ruisseau venant de Crédin. Dans le prolongement de ces douves et à l'effet de les alimenter, vers le midi ils créèrent deux étangs superposés. Pour cela il leur suffit, suivant l'usage en Bretagne, d'établir une chaussée à la base de chaque pièce d'eau.

Les seigneurs de Rohan rendirent encore l'attaque de leur château plus difficile, en faisant arrondir au-dessus de l'étang inférieur, les flancs de la colline Saint-Martin.

Transformés aujourd'hui en prairie, on y constate à première vue, en dépit des siècles, le travail de l'homme.

D'autre part les rives escarpées des deux étangs en augmentaient la profondeur.

Enfin au sud de la forteresse, du côté de Saint-Martin, on creusa des fossés profonds.

La construction de la forteresse achevée, le contrat tacite suivant fut conclu entre le seigneur et les habitants. « Désormais, leur dit le Vicomte de Rohan, vous serez mes hommes-liges, mes vassaux ; vous me paierez la dîme et les redevances seigneuriales. En retour je serai votre chef militaire, votre grand justicier, votre administrateur. Je vous consacrerai ma vie, mon sang. Au premier signal du danger, vous viendrez chercher un asile, un refuge sous les remparts de mon château. Là je vous protégerai comme la poule défend ses poussins sous ses ailes ». Et, en effet, quand les petites maisons de Rohan haussaient vers le donjon tutélaire leurs toits suppliants, il savait les protéger. En cas d'attaque leur sort était lié : ils partageaient la victoire ou la défaite.

Alain VII vicomte de Rohan avait embrassé le parti de Charles de Blois contre Jean de Montfort et les Anglais. Ceux-ci, pour l'en punir, viennent, sous les ordres du Comte de Northampton, chef des anglais, attaquer Rohan. Ils ravagent et brûlent la ville, mettent le feu au château, le détruisent (1342) [Note : Le château de Pontivy fut détruit dans la même expédition (Dom Lobineau, Histoire de Bretagne, I, 330)]. Les habitants avaient abandonné la place, comme ils feront plus tard sous la Révolution.

Peu de temps après, le château était rebâti avec une grande puissance défensive pour l'époque. Il est ainsi décrit par Jean II en 1479 : « Le chasteau de Rohan place forte et advantageuse, bien emparée de tours, maisons, clostures et fossez pour la defense d'iceluy et des biens des subjets du païs, lorsque nécessité adviendroit, où il y a guet et garde, capitaine et connestable, et vaut ceste capitainerie plus de 400 livres par chacun an  » (Taillandier H. CLXV).

Revenons un moment en arrière.

Le 18 mai 1420, il est urgent de venir en aide aux villes, forteresses et châteaux de Rohan, Josselin, la Chèze... « de présent moult besoigneux et de très grande nécessité d'habillements de défense ».

Le duc de Bretagne autorise le vicomte de Rohan Alain VIII, à lever des impôts sur certaines denrées et marchandises en vente dans ses fiefs, pour la restauration de ses châteaux. (Biblioth. de Nantes fonds Bizeul : anciennes archives de Rohan. Actes notables n° 205).

Seulement Alain VIII — comme tous les seigneurs de sa famille — préféraient les forteresses de la Chèze et de Josselin à celle de Rohan, parce que plus artistiques et plus puissantes. Leur « habillement » engloutit la presque totalité des ressources.

Aussi, quand en 1462, le duc accorda une nouvelle concession d'impôts pour trois années, eut-il soin d'y inscrire cette clause : « l'argent qui sera versé en la châtellenie de la Chèze et aussi en la vicomte de Rohan, sera mis et employé en la restauration du château de Rohan, et non ailleurs, parce que par avant ces heures, l'argent qui pour semblable cause a été levé en la dite Vicomté, a été mis à la réparation du dit lieu de la Chèze » (Reg. chancellerie, même stipulation en 1468 et 1477. Cité par M. du Halgouët : La Vicomté de Rohan, p. 102).

Les aveux de 1461 et 1471 parlent des « grosses tours » du château de Rohan, de ses barbacanes, de ses basses-cours, le tout cerné de murs et de douves avec « belouvard et autres embataillements ».

Le comte Louis de Rohan prince de Guéméné, son beau-frère le maréchal de Rieux, ses cousins issus de germain Jean II vicomte de Rohan, et son frère poussés par l'ambition des honneurs dont ils avaient été éloignés par Pierre Landais, grand trésorier et favori tout puissant du duc François II (Jean II était en outre furieux d'avoir été jeté dans les geôles ducales) machinent une intervention de la France contre leur pays, au risque de faire perdre à la Bretagne son indépendance. Une lutte acharnée s'en suivit entre français et bretons, et qui désola l'Armorique en la couvrant de ruines.

Au cours de cette guerre, la forteresse de Rohan fut deux fois investie. Après avoir pris Vannes aux Français, le 3 mars 1488, l'armée bretonne vint mettre le siège devant Josselin, la Chèze et Rohan. En janvier 1490, le maréchal de Rieux s'empare de vive force du château de Rohan. Sans doute, il subit le sort des autres châteaux de la Vicomté, qui furent « gastés, démolis et dégarnis », suivant la lettre du roi Charles VIII au vicomte de Rohan Jean II, lui permettant de lever pendant cinq ans, le droit de billot [Note : Billot : droit sur les boissons mises en vente au détail. Le mot billot vient des billettes placées à la façade des auberges, à titre d'enseigne] sur ses vassaux, à l'effet de réparer ses places fortes [Note : Dom Morice, Preuves, III, 783, et de la Borderie, Histoire de Bretagne, v, 541]. En outre le roi de France lui vint en aide.

Avec cet argent, dans les premières années du XVIème siècle, Jean II commandait des réparations à son château de Rohan [Note : Il restaurait en même temps les châteaux de Pontivy, de Corlay, de la Chère et de Josselin. On lui attribue la façade de dentelle de ce dernier château]. On fit venir du tuffeau de Vannes, de la chaux d'Auray, des ardoises de Mûr ; on prit des bois dans les forêts de Lanouée et de Loudéac. On répara le corps de logis, et un pignon dont la seule réfection exigea huit cents charretées de pierres, on bâtit « une tour neuve, une grosse tour devers Saint-Martin », un grand nombre de fenêtres, de lucarnes, de cheminées, une muraille sur le petit étang.

Guillaume le Devet, entrepreneur et en même temps tailleur de pierres, avait la direction de la restauration. Parmi les ouvriers on remarquait des maçons de Guilliers, et d'autres, des spécialistes sans doute, venus jusque du Limousin.

La Maladrerie de Noyal fournit des cordes, pour mettre les poutres en place.

Le curé de Rohan célèbre à Saint-Martin, la messe pour les ouvriers.

Au cours des années 1500, 1501, 1502, Hervé le Mancazre avait dépensé pour la restauration du château 2334 l. 4 s. 3 d. Dans son compte qu'il adresse au vicomte de Rohan, il lui marque un déficit, car les recettes provenant des billots, des ventes dans les forêts et du panage à Lanouée, ne s'élèvent qu'à 1933 1. 16 s. 8 d. [Note : Cartulaire m. s. du Morbihan, par M. Rosenzweig, qui avait découvert ce compte aux Archives de Kerguéhennec].

Après l'acquisition du comté de Porhoët (1407), les Rohan désertèrent peu à peu le château qui fut le berceau de leur famille. Pas une seule fois la signature d'un Rohan ne figure sur nos registres paroissiaux, qui commencent en 1653. De préférence ils habitèrent la Chèze, Josselin et ensuite Blain [Note : Des ordres de paiement (voir Bulletin Monumental, t. LXXIV, 1910, p 489) furent signés aux château de Rohan et de Blain par Jean II vicomte de Rohan, pour les travaux exécutés au château de Josselin en 1505 et 1506]. Au reste, la plus grande partie de leur temps, à partir du commencement du XVIème siècle, ils la passèrent à la cour et à l'armée.

Cet abandon explique les besoins fréquents de réparations qui se font sentir au château de Rohan, sa ruine progressive et fatale.

Un mémoire en date du 8 janvier 1552, trouvé aux archives de Kerguéhenneuc [Note : Liasse : Titres généraux, n° 1, actes concernant Rohan] sur la vicomté de Rohan, nous en donne la preuve. « Item possède le dit vicomte de Rohan : à Pontivy, Rohan et les Salles, y a chasteaux et mesons belles et de belle..., lesquels sont grandement indigens de réparations et spécialement de couvertures... Item au dit chasteau de Rohan y a guectz qui sont deuz au capitayne de Rohan quelz guectz peuvent valloir environ 330 livres tournois par an... L'estange du chasteau près la ville de Rohan ».

Comme Henri II de Rohan avait embrassé la Réforme, les Ligueurs s'emparèrent de son château de Rohan (1594), qui déjà avait soutenu plusieurs assauts contre le parti catholique. On raconte que par ordre des Ligueurs, des canons installés proche la butte du « Salut », à 2 kilomètres environ de la forteresse, lancèrent des boulets pour la démanteler.

Lorsque les commissaires et procureurs du prince de Condé, vinrent en novembre 1628, prendre possession des terres et châteaux de Henri II de Rohan chef des calvinistes, confisqués par Louis XIII, à cause de la rébellion de son vassal, ils ne trouvèrent à Rohan. « aucun chasteau, ni maison seigneuriale, mais seulement de vieilles ruines et mazures » (Extrait de leur procès-verbal de visite, cité par H. du Halgouët : le Duché de Rohan, p. 27).

Passant par là en 1649, Turquest, correspondant des historiens de Bretagne, note qu'il y a seulement « apparence » de bâtiments (Extrait de leur procès-verbal de visite, cité par H. du Halgouët : le Duché de Rohan, p. 298).

La Déclaration de ses terres — un peu flatteuse, il semble, — que fait au domaine royal de Ploërmel, le 22 décembre 1682, Marguerite duchesse de Rohan, nous fournit des détails assez précis sur la forteresse en question.

« ... En laquelle ville (de Rohan) est un château consistant en un grand corps de logis fortifié de grosses tours, terrasses, forteresses, défenses, machicoulis, porte-canonnières, remparts, pont-levis et dormants, basses-cours cernées de murs, douves et fossés avec éperons, flancs et boulevards, abords, issues et jardins. Auquel château la dame duchesse de Rohan a droit de mettre capitaine, lieutenant, portier et autres officiers exempts de tous devoirs et impôts avec les droits, prérogatives et libertés de guet et arrière guet, garde portes et réparations de douves tant par cens qu'autrement, lequel droit se lève annuellement et de tout temps à raison de cinq sous monnaie tant sur chacun des hommes proches que sur les hommes éloignés ses vassaux » (Arch. départem. de la Loire-Inférieure, série B, 1998, folio 497 et suivants).

Si l'on en juge par cet aveu, en 1682, la forteresse avait encore un aspect imposant.

Au XVIIIème siècle, dom Morice « ne distingue plus dans les tristes ruines du château que les restes d'une belle chapelle que la fureur des guerres avait respectée ». (B. N., m. f. 22.313, cité par H. du Halgouët : Le Duché de Rohan, p. 298).

C'étaient les fragments d'une gloire familiale qui tombait peu à peu dans l'oubli du passé.

Avec l'autorisation ou non des propriétaires, les Rohannais aidèrent le temps dans son œuvre de ruines. Granit et moellon du château ils les employèrent [Note : A la fin du XVIIème siècle], pour l'agrandissement de la chapelle Saint-Gobrien, à la construction des piliers des halles, aux escaliers, aux seuils, parfois aux fenêtres des maisons de la ville. Il est facile de constater çà et là, ces souvenirs de la forteresse.

Négligée pendant le XVIIIème siècle, la Révolution acheva sa ruine. En brumaire IV, les Rohannais pour se défendre des chouans, élevèrent sur les routes, à l'entrée de leur ville, des fortifications ou murs de barrage avec les pierres prises dans les décombres du vieux château (Arch. départem. du Morbihan, L 28).

Lors de la confection du cadastre (1840) (Voir plan cadastral), de la forteresse il ne restait plus que les douves, les débris pantelants de l'enceinte, la base d'une grosse tour, à l'angle sud-est, et une tourelle au nord. Dans les masures où croissaient des arbres, les enfants se plaisaient à grimper et à jouer à cachette, au milieu des lierres géants.

Les propriétaires en vinrent à se désintéresser même des ruines de leur antique donjon. En 1844 le duc Anne-Louis-Fernand de Rohan-Chabot, donna à l'abbaye de Thymadeuc les matériaux que les moines voulurent, pour la construction de leur monastère. Dans les murs de leurs écuries, granges et ateliers on reconnait ces pierres archaïques, érodées par la dent des siècles. Les moines enlevèrent également un superbe abreuvoir en granit de forme circulaire : il se trouve aujourd'hui dans la cour devant les étables aux chevaux. Jadis il était sur l'esplanade, à peu près à 20 mètres du pont-levis, en descendant vers l'ouest, devant la tour médiane de l'enceinte. C'est par conséquent de ce côté que devaient se trouver les écuries du château.

Un canal en tuiles d'un diamètre intérieur de 4 à 5 centimètres (on en a retrouvé des vestiges en 1890), amenait à l'abreuvoir dont nous venons de parler, les eaux d'une source au bois de la Plumée.

Quant au puits du château, il existait sans nul doute. Mais où ?...

Quelles étaient les dépendances du château ? En dehors des douves, dans le voisinage immédiat de la forteresse elles comprenaient : l'étang inférieur (n°s 101 et 102 du cadastre) ; l'étang supérieur (n°s 95, 96, 97, 98, 99) ; le parc-pré (n° 103) ; la Capitainerie avec son jardin, le jeu de paume et le vieux moulin (n° 137) ; une maison avec cour (n° 146) ; le parc-terre ou jardin du château (n° 104) ; le parc-châtaigneraie (n° 115), formant ensemble une superficie de 2 hectares 29 ares 10 centiares.

Il faut ajouter une grande prairie coupée par l'Oust, au nord-est de la ville, à 1 kilom. environ de la forteresse ; enfin au XVème siècle, on voyait encore à Rohan une brousse détachée de la forêt de Branguily.

Avant la Révolution les ducs de Rohan étaient les seigneurs de la paroisse. A ce titre, ils possédaient les halles, le four banal, ainsi que les autres droits honorifiques, casuels et utiles dérivant de la puissance féodale, tels des souverains en miniature.

La loi du 12 août 1790 (art. 2, chap. III) stipulait : « les bâtiments, halles, étaux et bancs continuent à appartenir à leurs propriétaires, mais ceux-ci peuvent obliger les municipalités de les acheter ou de les prendre à loyer, et réciproquement ils peuvent être contraints par les municipalités à les vendre, à moins qu'ils n'en préfèrent le louage ».

Or en 1834, le duc de Rohan avait affermé les halles à la commune pour neuf ans, à raison de 400 francs. Le bail expirait le 1er janvier 1843. Mais la commune continua d'en jouir par « tacite reconduction ». Sur les entrefaites, deux particuliers de Rohan ayant mis un prix supérieur à 400 francs, M. Roussin, régisseur du duc Anne-Louis-Fernand de Rohan-Chabot, dans l'intérêt de son maître, passe avec eux un contrat sans prévenir l'adjoint M. Julien Renaut qui faisait les fonctions de maire pour M. Pierre Rolland Desaunay depuis longtemps languissant.

Protestation de la municipalité. Forte de la loi de 1790, elle prétend forcer le propriétaire des halles à les lui louer ou vendre. En cas de désaccord sur les prix de location ou de vente, les édiles soutiennent leur droit de recours à une expertise contradictoire.

Un arrêté préfectoral du 20 mars 1843, annule le bail. Le propriétaire sans se tenir pour battu, en appelle au Conseil d'Etat qui casse à son tour la décision du Conseil de préfecture, et condamne la commune aux dépens. Le débat prend bientôt de l'extension et englobe la question de propriété du château même. Le duc, en effet, assigne les opposants devant le tribunal de première instance de Ploërmel, pour se voir attribuer le droit d'opter soit pour la vente soit pour la location de ses maisons et terres de Rohan et de Crédin.

Le procès menaçait de traîner indéfiniment en longueur. Ce que voyant le duc offre par acte extrajudiciaire, de vendre à la commune pour la somme de 10.000 francs ses immeubles sis à Rohan : les deux halles, le four banal, le château et jardin au sud de l'esplanade (N° 116 du plan cadastral), avec le Parc au fournier situé dans les dépendances du champ Rohan en Crédin.

Le 10 août 1848 la municipalité rohannaise décide cet achat au prix de 9.000 francs. Le maire, M. Cordier, conclut le marché avec le docteur Roussin pour cette dernière somme, à la satisfaction de la municipalité. L'acte fut signé au nom du duc Louis Rohan-Chabot, le 23 septembre 1849, en l'étude et par le ministère de Me Dominique le Guével, notaire à Josselin. La commune ne devait entrer en jouissance que le 1er janvier suivant 1850 [Note : Pour acquitter sa dette, la municipalité vendit, le 25 octobre 1853, huit parcelles de communs, entre autres : le Parc au Fournier, pièce en lande contenant 7 hectares 16 ares 70 (folio 180 de la matrice cadastrale de Crédin) : la Lande de la Haie, 34 ares 80 ; un petit terrain près le pont d'Oust, n° 209 du cadastre ; la Butte de la Chênaie ou Roc Morgan (n° 113 du cadastre) ; la Pâture de la Fontaine, 6 ares 40 ; le four banal, l'ancien corps de garde (n° 286 du cadastre)].

L'esplanade du château servait alors de dépôt général à la ville. La municipalité ordonna l'enlèvement de tous les matériaux qui l'encombraient. Jusque-là les foires se tenaient sur les rues de Rohan. Elles étaient tellement encombrées en ces jours par le grand nombre des bestiaux et la fréquence des voyageurs, qu'il en résultait une source continuelle de dangers, de querelles entre particuliers, une grande difficulté pour la surveillance de l'administration. Par ordre des édiles rohannais, l'esplanade du château devint et est restée le champ de foire aux vaches et aux bœufs [Note : Voir registre des délibérations de l'époque (Archiv. municip. et Archiv. départ. du Morbihan. (Biens communaux, 4 0 198)].

Vers le milieu du dernier siècle, l'esplanade séculaire de la forteresse de Rohan faillit être coupée en deux. Ainsi le voulait le conseil municipal de la cité, comme autrefois Salomon pour l'enfant en litige. En 1858 un projet d'élargissement de la route de Pontivy à Ploërmel à travers la ville de Rohan, avait été sagement élaboré par l'Administration. Il devait embellir la petite cité, et y faciliter la circulation. Malheureusement de ce fait plusieurs maisons étaient frappées d'alignement. Les intéressés se plaignent à leurs représentants que derrière leurs habitations une fois renversées, il ne restera plus assez de terrain pour construire. Echo de leurs doléances les municipaux demandent à l'unanimité, que la route traversière en question, passe par l'esplanade du château [Note : Registre des délibérations : séances du 1er juillet 1858 et 24 mars 1859 (Archiv. municip.)]. Opposition formelle de l'ingénieur de Ploërmel, M. Laroche, et de l'Administration des Ponts et Chaussées. La raison ? Dans ce plan la rampe d'accès à l'esplanade serait trop escarpée, même en rejetant les terres pour combler les anciennes douves.

Poussé par la piété du souvenir, le duc Alain de Rohan-Chabot avait résolu de rebâtir un castel, à l'emplacement de l'antique forteresse de ses ancêtres. A cet effet, il propose au conseil municipal (1897) d'échanger pour l'esplanade du château les jardins qu'il venait d'acquérir des demoiselles Pégorier. Là sans inconvénient, ils transporteraient le champ de foire de l'esplanade. Les représentants de la cité consultèrent en majorité, leurs idées politiques ou leurs intérêts particuliers, peut-être mal entendus dans la circonstance. Ils alléguaient que ce transfert du marché déplacerait le commerce, et leur porterait ainsi préjudice à l'avantage de leurs concurrents. En conséquence le conseil municipal dans la séance du 13 mars 1897, rejeta par 9 voix contre 3 pour, la proposition d'échange. En mars 1901, une nouvelle tentative faite par le duc, semblait devoir réussir. Les édiles rohannais acceptaient l'échange moyennant une clause : le duc laisserait sur l'esplanade une voie d'accès au quai, d'une largeur égale au chemin du pont du château (6 mètres). Cette condition fit échouer à nouveau les intentions ducales. Et cependant un nouveau château d'apparence un peu féodale, bâti face à la chapelle artistique de Notre-Dame de Bonne-Encontre, n'eut pas manqué d'amener à Rohan des visiteurs de marque, et par suite de donner à la petite cité, une plus grande importance.

Au mois de juin 1867, les municipaux Rohannais émettaient le projet de bâtir sur l'esplanade du château une mairie, une justice de paix, deux écoles avec cours séparées, un logement pour l'instituteur et l'institutrice.

Ce projet grandiose tomba à l'eau. Toutefois on vit bientôt se dresser une école publique de filles, et une maison d'habitation annexe pour les institutrices, à l'emplacement du vieux donjon des Rohan.

Aidé du plan cadastral, du témoignage des personnes les plus âgées et les plus dignes de foi de Rohan, qui ont vu les ruines de leur antique donjon, ses tours, son enceinte avant l'enlèvement des matériaux de la forteresse, par les moines de Thymadeuc (1844), guidé par les travaux et les fouilles exécutées, à plusieurs reprises, sur l'esplanade et les contours du château, il est assez facile d'en reconstituer le plan, au moins dans ses grandes lignes. Vers 1883, un rohannais fut autorisé par la municipalité, à pratiquer des fouilles dans la partie nord de l'esplanade, à la condition que ses trouvailles fussent sa propriété. Notre ouvrier avec l'ardeur fébrille d'un chercheur d'or, maniait le pic et la pioche, dans l'espoir naïf de trouver un trésor caché par un seigneur de Rohan. Au bout de quelques jours, il découvrit à la pointe nord-ouest de l'esplanade... les cabinets d'aisance !...

Lors des fouilles exécutées en 1890 sous forme de travaux de charité par le maire, M. Olivaux, on voyait encore à l'endroit situé devant l'école publique actuelle, un dallage en grandes pierres vertes ; plus au nord-est des briques vernissées en forme de losanges, jointoyées avec du sable de mer, dans lequel se trouvaient de nombreux coquillages marins : preuve que là était bien l'habitation seigneuriale proprement dite. Son orientation devait être nord-sud, la façade au midi.

Comme on le voit par le plan ci-contre du château de Rohan, son esplanade offrait la forme d'un rectangle légèrement irrégulier, couvrant une surface de 57 ares 80.

A B. — Tours formant le donjon de la forteresse pour la protéger, en son point le plus vulnérable du côté de Saint-Martin. Elles furent dégagées en 1902, par M. Joseph Launay, propriétaire riverain, à l'occasion d'un long procès qu'il eut à soutenir contre la commune, au sujet de la délimitation de son jardin avec l'esplanade du château. La première tour s'élève à peine à quelques centimètres au-dessus du sol. Sise à l'angle des courtines est et sud, devant des mouvements de terre et des pierrailles débris de la forteresse, elle borde le sentier d'accès au canal.

Sa voisine a encore près de 5 mètres de hauteur. Sa base présente une petite fenêtre, vraisemblablement le soupirail d'une cave.

N. — Côté Nord ; S. — Côté Sud.

O. — Souterrain conduisant au donjon formé par les deux tours sud-est ; l'entrée de ce souterrain est visible.

C. — Tour.

E. — Escalier conduisant à un pont dormant. C'est par là que la famille ducale se rendait à la chapelle de Notre-Dame de Bonne-Encontre, et à la route de Josselin. En creusant en cet endroit dans son jardin, M. François Jan découvrit (1902), le mur de soutennement de cet escalier. A quelques pas de là vers le nord, apparait la base d'un contrefort en granit, entouré de ciment.

Plan du château de Rohan (Bretagne).

Plan du château de Rohan.

T. — Ouverture éboulée d'un tunnel, au milieu des broussailles à 1 m. 50 environ du glacis.

Au sud et à l'est on voit les vestiges du mur d'enceinte, assis et accroché çà et là sur les rochers taillés à pic.

Les tours B et C figurent au cadastre.

E. — On peut encore constater l'emplacement de cette tour.

F. — Tour. G. — Tours du guet.

H. — Tour d'angle.

P. — Pont-levis.

M. — Chemin du château à Rohan.

V. — Douves.

R. — Ruisseau coulant dans les douves et fossés du château.

Sur la hauteur dominant le château quelques travaux défensifs durent être établis pour parer à une attaque éventuelle. Mais sa situation en contre-bas de la butte Saint-Martin, rendait la forteresse très vulnérable sur ce point, et beaucoup moins puissante que ses voisines de Josselin et même de la Chèze. Dans la suite, les seigneurs de Rohan se montrèrent plus habiles constructeurs que leur fondateur Alain de Porhoët, premier vicomte de Rohan.

En 1856 la commune de Rohan vendit pour la somme de 320 francs à M. Joseph Simon un terrain de 4 ares 4 centiares dans les douves du château (N° 136 du plan cadastral), avec une bande de 3 m. 33 arrachée au glacis. Elle devait servir de chemin d'accès à une minoterie. L'acquéreur se proposait de l'y établir avec un étang. L'achat comportait les clauses suivantes : droit pour M. Simon de prendre pour sa construction des terres dans les ruines du donjon sans nuire toutefois à son aplanissement. Toutes les pierres qu'il trouvera, seront par lui mises en tas mais avec défense d'en soustraire aucune. Il devra, à ses risques et périls, élever un talus de soutènement au-delà du terrain cédé, un lavoir public dans la partie accessible de l'étang et entretenir le pont du château [Note : Délibération du Conseil municipal de Rohan du 14 avril 1855 et Archiv. département. Aliénations Rohan O].

Le ruisseau en question traversait primitivement les douves du château. Plus tard, vers 1840, afin de faciliter la construction des maisons édifiées sur les douves, on en détourna le cours pour le faire passer sous la route de Pontivy à Ploërmel. Le pont du ruisseau était séparé du pont du canal, par une distance de 14 mètres. Ce dernier, à ses deux extrémités, formait un angle aigu et un précipice dangereux. Dans l'espace de vingt-trois mois, quatre chefs de famille avaient trouvé la mort dans les eaux de l'Oust en cet endroit (1848 et 1849). Au nom de l'humanité, le conseil municipal de Rohan (Séance du 8 novembre 1849) pria l'Administration de remédier à une imprévoyance aussi déplorable. En conséquence elle établit des barrages.

Tandis qu'au moyen-âge, le ruisseau du château baignait avec l'Oust les remparts de la forteresse, il en est aujourd'hui éloigné d'une douzaine de mètres. Il traverse le jardin de M. Launay, terre d'alluvion. Là quand M. Guillemin voulut, il y a quelque soixante ans, construire, il fut obligé d'édifier sur pilotis. Tel a été depuis, l'affaissement du sol que des lézardes se sont produites au pignon, et des brisures même dans les linteaux granitiques.

Au nord-ouest du pont-levis en dehors des douves, sur leur bord, habitait le gouverneur du château. Sa maison avec ses dépendances s'appelait la Capitainerie. Le jardin a conservé ce nom. Il ne forme qu'un aujourd'hui avec celui du moulin. Sa contenance était d'environ 30 cordes [Note : La corde à Rohan était de 0 are 61 centiares]. II fut vendu par Robin de Morhéry, le 2 juin 1788, à Pierre le Texier pour la somme de 470 livres payables en écus de six francs. Le vendeur se réserva 20 pierres de tailles. D'où provenaient-elle ? Probablement de la maison de la Capitainerie. L'acte de vente décrit en ces termes la pièce de terre dont nous parlons : « Le jardin de la Capitainerie avec ses murs du couchant et nord, et ses talus et murs du levant et midi, donne du levant à partie de la douve du château appartenant à Jean le Piouffle, du midi à autre partie de la même douve au-dessous du pont du château, du couchant à la levée de l'étang d'en-bas, et du nord au jardin à maître de Villiers, autrefois le moulin du château... ».

Citons les noms de quelques capitaines du château de Rohan :

— Jean de Kerardreux, 1433.

— Lors de la rébellion de Jean II, l'armée du duc de Bretagne François II s'empare de Rohan, établit Louis de Belouan commandant de la place, lui envoie mandement (15 février 1484) de choisir 6 bons personnages non sujets aux armes, en habits de guerre, pour résider sous lui en la dite place, à 100 sous de solde par mois (Dom Lobineau : Preuves à l'Histoire de Bretagne, II, 1416).

— Jean de Turmenel institué capitaine des châteaux de Rohan et de la Chèze, par mandement du duc de Bretagne, le 29 mai 1488 (Dom Lobineau : Preuves à l'Histoire de Bretagne, II, 1416).

— Une inscription gothique gravée sur une cloche de l'église de la Grée Saint-Laurent (Canton de Josselin), nous apprend qu'un seigneur de la Grée — probablement François de Quélen — était capitaine de Rohan en 1500.

« Je fus fondu à Jocelin, II c. XXX liv. III quars pessée au pouais angevin — vendredi XIIIème de mars, par le sengneur de la Grée et capitaine de Rohan. — Marguerite fu apellée. MV c. couroit pour l'an ». Nous traduisons : « Je fus fondue à Jocelin ; 230 livres trois quarts pesée au poids angevin, vendredi 13e de mars, par le seigneur de la Grée et capitaine de Rohan. Marguerite fus appelée ; 1500 courait pour l'an ».

— Hervé de Mancazre ou Mancadre (1500 à 1503).

— Un François de Quélen, peut-être le même que le précédent, après avoir été fait prisonnier à Pavie, fut nommé par Henri II gouverneur des villes et châteaux de Josselin, Rohan, Pontivy, la Chèze, Loudéac, la Trinité, Landerneau et Blain (1527).

— Antoine de Montboucher (1534).
Au gouverneur était confiée la garde de la ville et de la forteresse, son entretien. Il avait sous son commandement les soldats du château, les hommes du guet, les vassaux chargés du curage des douves, du transport des matériaux nécessaires à la réfection de la forteresse et des remparts.

Le guet tire son origine de l'assistance des vassaux roturiers, à la défense du domaine qu'ils exploitent.

Au XVème siècle, le guet n'est plus effectif. Il consiste ordinairement en une redevance pécuniaire destinée à l'entretien des forteresses, ou à la solde des hommes qui en ont la garde.

On distinguait dans la vicomté de Rohan, les tenues à domaine congéable, et celles à héritage, les unes et les autres soumises au droit de guet. Il était, comme pour la forteresse de Josselin, pour le château de Rohan de 5 sous monnaie sur les vassaux et les arrière-vassaux (Déclaration de Marguerite de Rohan).

Cour seigneuriale.

Le mariage de Béatrix de Clisson, fille du connétable, avec Alain VIII de Rohan, au commencement du XVème siècle, réunit dans la famille de celui-ci, tout le comté de Porhoët de Guéthenoc, à l'exception du Guéménée détaché en juveigneurie. Cet immense fief les Rohan le gardèrent jusqu'à la Révolution.

Les sires et dames de Rohan sont à l'apogée de leur puissance, à cette époque. Ils ont une cour presque royale, ces vicomtes de Rohan : gentilshommes, archers, coustilleurs, pages forment leur compagnie d'armes. Outre les officiers militaires on distingue les officiers civils : argentier, maîtres d'hôtel, grainetier, bouteiller, écuyer de l'écurie, barbier, officier de la vénerie, parfois héraut d'armes, un chapelain, un précepteur des enfants, un Conseil et une Chambre des Comptes, un Receveur général et un Trésorier général.

Nous parlerons plus tard de la Cour seigneuriale de justice à Rohan.

La Vicomtesse de Rohan possédait aussi sa maison.

Le duc de Bretagne François II avait fait venir à Vannes, Marie de Bretagne, pendant la captivité de son époux Jean II vicomte de Rohan, et lui accorda une suite de 18 personnes hommes et femmes : 2 écuyers, 2 chapelains, 1 confesseur particulier, des dames d'honneur, un maître d'hôtel, 1 page, des valets, des femmes de service, 1 porte-queue avec sous-ordre.

Ce fastueux Jean II avait 1 fou comme les rois (Hervé du Halgouët : La Vicomté de Rohan, p. 112).

Vraiment les seigneurs de Rohan pouvaient arborer leur fiére devise : « Roi ne puis, prince ne daigne, Rohan suis ».

Comme tous les châteaux importants celui de Rohan avait son jeu de paume. Le 20 septembre 1785, Me Yves-Marie Paullon, notaire à Pontivy, louait à Sévère Cherouvrier, de Rohan, pour neuf ans à partir du premier mars suivant, « un jardin ou courtil appartenant au sieur Nicolas le Maître, situé près des mazures du château de cette ville anciennement servant de jeu de paume au dit château ». Le fermier paiera la somme de 4 livres. Il acquittera en outre les rentes et charges seigneuriales outre les vingtièmes et 2 sols par livre du dixième (Archiv. du Morbihan, série B, liasse Rohan-Chabot).

En quel endroit était le jeu de paume ? Dans le jardin du vieux moulin du château. A sa place dans la première moitié du XIVème siècle, on voyait un jeu de boules. Quant aux masures du château, elles furent démolies vers 1840, par M. Chéreux pour édifier sur leurs ruines sa maison d'habitation (ancien hôtel de France). Une marche de l'escalier donnant de la maison dans la cour derrière, portait les armes des Rohan.

A la châtellenie de Rohan se rattachaient les paroisses de Crédin, Radenac avec Saint-Fiacre et Châteaumabon, Réguiny pour la grande partie (toutefois le fief même de Réguiny s'étendant aux maisons nobles de Porman, de Coëdrigan, du Rogouët, et la seigneurie du Resto faisaient partie du comté de Porhoët), Rohan, Saint-Gouvry, Saint-Samson pour quelques tenues en la bourgeoisie de Rohan, Saint-Allouestre avec sa trêve Buléon (Hervé du Halgouët : Le Duché de Rohan, p. 12).

De la châtellenie de Rohan dépendait aussi, dans le principe, la seigneurie de Pleugriffet ou Ploeuc-Griffet [Note : Les gens du peuple disent Pleugriffet ou simplement Pieu, comme ils prononcent Pieucadeuc pour Pleucadeuc, Piermê pour Ploërmel] qui comprenait toute la paroisse. Le château-fort de Griffet était comme la sentinelle avancée de la forteresse de Rohan, d'où le nom de Clefrohan, village voisin de ce château.

En 1356 Jean Ier vicomte de Rohan donne comme part d'héritage paternel, le fief de Plœuc à sa sœur Marguerite qui épouse Jean de Beaumanoir. C'est de ce partage vraisemblablement que date la rupture du lien féodal qui rattachait la seigneurie de Pleugriffet à la vicomté de Rohan (Hervé du Halgouët : Le Duché de Rohan, p. 233).

La châtellenie de Rohan formait une circonscription administrative et judiciaire, ressortissant à Pontivy, siège supérieur de la juridiction seigneuriale de la vicomté.

(P. Martin).

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