Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

PUAUD (DES BARRES) ET LA PRISE DE POUZAUGES EN NOVEMBRE 1793.

  Retour page d'accueil       Retour page "Les seigneurs de la Roche-Bernard"  

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Lorsque l'armée vendéenne eut passé la Loire, au mois d'octobre 1793, les patriotes de la Vendée commencèrent à lever la tête ; ils s'imaginèrent que la guerre était finie et qu'ils pouvaient en revendiquer le profit et même la gloire. Sur le dernier article leur prétentions étaient mal fondées, et, en justice rigoureuse, ils eussent dû se montrer modestes. Mais de tout temps le rôle des poltrons a été le même, et le ridicule qui les atteint ne les corrigera jamais.

L'église de Pouzauges (Vendée).

Les républicains de Pouzauges se distinguèrent parmi les survivants d'un cataclysme dont ils se disaient les victimes. Ils brossèrent leurs uniformes, un peu ternis dans leurs cachettes, ils organisèrent à la hâte un club, une garde nationale, et ils se mirent en mesure d'être au niveau de la situation.

Il invitèrent les amis disséminés çà et là à venir les rejoindre, et bientôt ils formèrent une troupe assez nombreuse. On les voyait parader, le fusil au bras, excitant leur courage guerrier par les chants braillards fraîchement éclos, et menaçant d'exterminer les aristocrates , qu'ils croyaient tous partis. Quand ils avaient mis, par-dessus le tout, quelques rasades au petit vin du crû, leur attitude laissait vraiment peu à désirer.

Mais il y avait à côté d'eux un homme dont ils ne soupçonnaient pas la présence ; sans cela, leur enthousiasme eût été vraisemblablement plus circonspect.

Puaud (des Barres) avait été garde-chasse chez M. de Grignon ; c'est à cela sans doute qu'il devait d'être l'un des meilleurs tireurs de toute la Vendée. C'était un homme de petite taille, un peu, brusque et légèrement frondeur, mais plein de sang-froid et de ressources. Rusé par calcul, audacieux par caractère, son courage le fit remarquer, même parmi les plus braves. Nul n'entendait mieux que lui cette guerre de buissons, qui fit tant de mal aux bleus : il y avait en lui du général et du braconnier. Il comptait sa vie pour peu de chose et, naturellement, celle des républicains ne devait pas lui paraître plus précieuse. Du reste, bon et simple parmi ses compagnons d'armes, il s'en faisait aimer, et tous le suivaient avec confiance.

Puaud commanda plusieurs fois des corps assez importants, mais son rôle fut toujours secondaire ; néanmoins, ceux qui le connurent ne parlaient de lui qu'avec une estime mêlée d'admiration.

Ce fut lui qui eut l'idée, à la fin de la guerre, de lever une dernière fois le drapeau de la Vendée, pour l'ensevelir dans un combat héroïque. Il rassembla en 1794 quarante braves paysans vendéens et s'enferma avec eux dans le château de Saint-Mesmin. Le siège qu'il y soutint a été décrit, je n'ai pas à le raconter ; mais je ne puis passer sous silence un fait qui montre l'idée qu'on avait de lui dans l'armée vendéenne.

Le château de Saint-Mesmin (Vendée).

Au siège de Saumur, il se trouva en retard, pour un motif que j'ignore. Lorsque les chefs assignaient les postes pour l'attaque, on entendit une fusillade dans le lointain. Les généraux, qui croyaient n'avoir aucun détachement en arrière, furent inquiets ; ils demandèrent quel pouvait être cet engagement, et ils parlèrent d'envoyer du secours. — Ce doit être Puaud des Barres qui arrive, dit quelqu'un, car il est le seul absent. — Oh ! si c'est Puaud des Barres, répondit-on, il n'y a pas à s'en inquiéter, il saura bien se tirer d'affaire. — Cet avis fut suivi, et l'on avait deviné juste, car Puaud parut bientôt, après avoir bousculé les républicains, qu'il avait rencontrés.

Puaud ne suivit pas l'armée au delà de la Loire ; on ne m'a pas dit pourquoi. Probablement, il jugea, comme son ami Lapierre, que, dans les victoires, la place des braves est à la tête, et que, dans les défaites, elle est à la queue. Je suppose qu'après la bataille de Cholet, ils restèrent ensemble pour protéger la retraite, et qu'ils arrivèrent trop tard pour passer le fleuve.

Quand les armées eurent disparu pour un temps du sol de la Vendée, Puaud se retira dans sa petite maison des Barres, village qui appartenait aux deux paroisses de Pouzauges et de la Pommeraye : c'est là qu'il se trouvait au moment dont il s'agit.

Les parades ridicules dont on lui parlait tous les jours, eurent bientôt lassé sa patience, et il forma le projet d'y mettre fin. Seulement les hommes résolus étaient rares autour de lui, et les armes aussi ; mais il savait par expérience comment on fait des soldats et il eut vite arrangé son plan.

Il se rendit à la Pommeraye, où il trouva Joseph Bonin, qui avait eu la cuisse traversée d'une balle et qui commençait à se rétablir.

— J'ai besoin de toi, lui dit-il ; il faut que tu me donnes un coup de main. Ces lourdauds de Pouzauges s'imaginent être les maîtres du pays ; ils jurent comme des damnés et hurlent comme des loups. Je suis fatigué de leurs sottises ; il faut leur infliger une leçon. Ils sont fiers, parce qu'ils nous croient tous morts ; je veux leur prouver qu'ils se réjouissent trop vite.

— Je suis bien de votre avis, répondit Bonin ; mais pour le moment je ne puis rien faire, je suis encore trop faible.

— Combien te faut-il de temps pour te guérir ?

— Je pense que dans huit jours je pourrai vous suivre jusqu'à Pouzauges.

— Eh bien ! je te donne huit jours : le rassemblement aura lieu dans le bois de L’Oudrière ; fais en sorte de trouver du monde ; je vais en chercher de mon côté.

Le jour et l'heure furent convenus, et Paud partit.

Huit jours plus tard, cent vingt hommes se rendirent au lieu indiqué. Puaud divisa sa petite troupe en trois bandes. Il donna la première à un nommé Huvelin ; il confia la seconde à Bonin, et se réserva la troisième.

Avant de se mettre en route, Puaud régla l'attaque. Huvelin eut ordre de se tenir en observation du côté du nord-est, vers le point appelé le Puytremeau. Bonin devait s'arrêter vers le château, et Puaud, qui ferait le plus long détour, arriverait par le petit faubourg nommé le Bourbelard. C'est lui qui donnerait le signal, et jusqu'à ce qu'il eût tiré un coup de fusil, les autres devaient attendre dans le plus complet silence.

Les patriotes de Pouzauges, soit excès de confiance, soit faute d'éclaireurs intelligents, n'eurent pas le moindre soupçon de ces préparatifs, et le plan de Puaud put se réaliser sans rencontrer d'obstacle.

Huvelin et Bonin arrivèrent à leur poste et s'y installèrent, en évitant de donner l'éveil.

Du point ou il était, Bonin pouvait apercevoir une partie des républicains, rassemblés sur la place et paradant, au milieu d'un délire tout patriotique.

L'un des soldats voulait tirer tout de suite, sans attendre le signal. — « Ne tire pas ! disait Bonin ; tu connais la défense ; tu ferais tout manquer ! — Bah ! disait l'autre, laisse-moi faire, ce sera toujours un de moins ; puis je crois que mon fusil partira tout seul, tant j'ai envie de leur percer la peau ! ».

Comme la discipline n'avait guère de sanction, dans ces sortes d'expéditions, une étourderie était à craindre, et Bonin, pour clore le débat, lui enleva son fusil.

Il ne tarda pas à le rendre, car Puaud avait marché avec diligence et il était arrivé sans encombre au centre du Bourbelard.

Quand il voulut donner le signal convenu, il aperçut un homme en uniforme, à une assez grande distance. Au lieu d'envoyer sa balle en l'air, il la dirigea vers lui et l'étendit mort. Un autre déboucha d'une rue transversale ; il prit le fusil d'un de ses hommes et le tua comme le premier. Un troisième mit le nez à une fenêtre, un peu plus loin, pour voir de quoi il s'agissait : Puaud tira encore sur lui, mais une pierre qui faisait saillie sur le mur arrêta sa balle ; sans cela il l'atteignait en plein dans la tête. Le combat était fini.

Puaud avait compté sur une résistance quelconque ; il n'avait pas assez de monde pour cerner la ville, et tous ses hommes n'étaient pas d'un courage également éprouvé. Aussi il voulait de la prudence avant tout.

Il arrivait par le côté qui domine Pouzauges, et avait par conséquent l'avantage du poste ; mais le côté opposé, vers le bas de la pente, restait complètement libre : les républicains profitèrent de cette disposition pour s'esquiver. Dès qu'ils se virent attaqués, ils se sauvèrent comme une troupe d'alouettes, et, dans un clin d'oeil, ils disparurent derrière les maisons et les murs de clôture qui favorisaient leur fuite.

Bonin et Huvelin purent bien voir quelques hommes courant dans les rues, mais ils supposèrent que l'ennemi se groupait sur un point indiqué, et ils continuèrent à s'avancer en bon ordre, selon qu'il était convenu.

Lorsque les trois détachements se rejoignirent, ils ne trouvèrent plus personne ; ils aperçurent seulement les derniers fuyards, qui s'éloignaient rapidement dans la vallée et qu'ils eurent bientôt perdus de vue.

La poursuite eût été inutile ; Puaud comprit qu'il fallait y renoncer. Il se contenta de ramasser les armes abandonnées, et de détruire tout ce qui pouvait rappeler le souvenir de la République.

Il quitta ensuite Pouzauges, et licencia ses hommes, jusqu'au premier appel.

La victoire n'était pas précisément brillante, mais le résultat en fut bon : les patriotes de Pouzauges et des environs se tinrent pour avertis, et jusqu'au retour des armées républicaines ils ne donnèrent pas signe de vie.

(L. Augereau, curé du Boupère).

© Copyright - Tous droits réservés.