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L'ORIGINE DE LA PAROISSE |
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Il est rare que l’on connaisse la date exacte de la création d’une paroisse. Et c’est le cas de la paroisse de Saint-Michel-en-Grève (locmikel en Haye). Le terme « loc », outre le sens banal de « lieu », a eu très tôt une certaine spécificité religieuse avec le sens de « lieu consacré ». Les noms en « loc » ont été établis entre la fin du Xème et la fin du XIIIème siècle.
L’apparition du culte de Saint Michel en Bretagne apparaît comme un culte côtier, placé sur les sommets ; l’essor de ce culte de Saint Michel se situe entre la fin du Xème et le milieu du XIIème siècle. Enfin et surtout Saint Michel a succédé aux anciennes divinités païennes auxquelles les hauteurs étaient consacrées. Mais on ne sait pas exactement à partir de quelle époque ce « lieu consacré » a fixé un habitat. Voilà ce que nous révèlent certains écrits sur l’origine de notre paroisse. |
Les documents écrits les plus anciens que nous possédons sur Plestin et sa région ne remontent qu’au XI-XIIème siècle : ce sont des actes d’autorité ou de concession des seigneurs dont notre cité n’était alors qu’une dépendance. Pour ce qui est de l’époque antérieure, nous ne pouvons nous livrer qu’à de timides conjonctures. Le territoire de Saint-Michel, demeuré à ce jour étrangement exigu, ne doit son origine qu’à de successifs empiétements effectués sur les paroisses les plus anciennes, d ‘abord Plouzélambre, puis Trédrez. L’emplacement sur lequel allait s’ériger Saint-Michel devait présenter un fort bucolique aspect. Sans doute, l’excellence de la position stratégique passage obligé où la route franchit une rivière et un bras de mer, ne manque-t-elle pas de frapper la population primitive de notre région. Peut-être les armoricains y établirent-ils un poste. Quant aux guerriers de César, ils y fondèrent certainement un poste pour surveiller la traversée. De même, sous la protection dudit « poste » a pu se développer, croyons-nous, une humble bourgade de pêcheurs et de marchands. Mais nulle inscription, nul document, ne nous permet d’affirmer qu’à l’époque romaine, le lieu qui s’appela par la suite locmikel ait pu faire figure de centre militaire, administratif ou commercial.
Après avoir bénéficié, jusqu’au milieu du IIIème siècle, de la paix romaine, l’Armorique connaît à cette époque les misères de diverses invasions : pirates nordiques, etc… Puis au début du VIème siècle, c’est la menace germanique qui s’étend sur l’Europe occidentale. Rome rappelle ses troupes de (Grande) Bretagne et d’Armorique (la Petite-Bretagne). Au même moment Outre-Manche, les Bretons, refoulés à l’Ouest par les hordes de Saxon, d’Angles et de Jutes, leurs ex-alliés contre les Pictes et les Scots, passent la mer et cherchent refuge à l’extrémité occidentale du continent qu’ils baptisent « Brittia » (Breiz). Ils peuplèrent les éminences voisines qu’ils baptisèrent Ploumilliau, Plouzélambre,…etc. Si bien que Saint-Michel jusqu’en … releva de la paroisse primitive de Plouzélambre.
On
peut observer au passage que les paroisses primitives en « Plou » ne
sont pas l’apanage du littoral. Jamais le centre culturel des Plous possédant
une façade côtière ne se présente comme un port : il s’établit au
contraire sur le plateau bordier, souvent dans un creux du relief à l’abri
des vents dominants, hors de vue depuis la mer. Les premiers michelois ont très
bien pu oublier la mer et même s’en détourner pour regarder vers ce qui leur
importait plus : des champs à remettre en culture, et plus encore des
prairies, des landes forestières propices à un élevage extensif. Pendant des
siècles, une petite minorité d’entr’eux seulement a vécu aux abords immédiats
de la mer.
Sous l’impulsion de leurs chefs militaires et spirituels, ils colonisèrent le pays à tous les sens du mot, imposant aux Gallo-Romains de la péninsule leur civilisation, leur religion, leur langue et la toponymie de leurs lieux d’origine : d’où nos « Lan » (ermitage), « Plou » (clan, tribu), « Tre » (trêve, hameau), etc.. S’organisant peu à peu, les nouveaux venus se partagèrent, de façon plus ou moins égale, leur pays d’adoption, puis créèrent fiefs et évêchés. Malheureusement de l’émigration jusqu’au IXème siècle, nous ne savons presque rien de l’histoire de notre Bretagne. Le territoire sur lequel devait s’étendre Saint-Michel se trouvait compris dans la Domnonée, du nom de la peuplade d’origine insulaire, les Dumnonii, qui occupa la côte nord de la Bretagne.
Que représentait Saint-Michel à la fin du XIIIème siècle ? Bien peu de chose, sans doute. D’abord quelques maisons tapies à l’ombre protectrice d’un prieuré, fondé certainement par un seigneur local et accordé d’après la légende à l’abbaye du Mont-Saint-Michel. La naissance de ce groupe de maison entraînera une segmentation de l’espace paroissial primitif par l’instauration d’une trêve côtière autonome, prélude à une commune indépendante. Le prieuré-cure ne s’érigea en paroisse qu’au XIV-XVème siècle seulement et ce fut ainsi que naquit la communauté de Saint-Michel (Locmikel).
Voilà
ce que nous révèlent certains écrits sur l’origine de notre paroisse. En
1086, l’évêque de Tréguier Hugues (Hugo) qui se qualifiait quelquefois de
« Trigarencis episcopus » et qui se désignait lui-même par le
surnom toponymique de S(ancto) Pabu Tual (Hugues de Saint Pabu) faisait donation
à l’abbaye du Mont Saint-Michel, alors en pleine expansion, de biens situés
en Plestin[-les-Grèves]. Le Grand Rocher (nommé à l’époque le mont
Hyrglas) en Plestin[-les-Grèves] ainsi que la dîme qu’il possédait sur un
certain domaine appelé Plestin, faisait partie de sa propriété et de son
patrimoine (..momtem quemdam mei juris et
patrimonii qui dicitur Hyrglas cum omnibus appenditiis suis et decimam meam de
quadam terra quae vocatur Plegestin). Les motivations de Hugues n’étaient
pas seulement spirituelles : le Trégor était en fait sorti désorganisé
et affaibli des invasions normandes, l’appel aux moines du Mont Saint-Michel
entrait donc dans une stratégie de reconquête des terres, de modernisation des
techniques agricoles que seuls les moines défricheurs étaient en mesure de réaliser
efficacement.
De
plus, le Grand Rocher, rocher maudit qui avait à l’époque une réputation
effroyable, était un rocher stérile contre lequel Hugues se sentait
impuissant. Il trouva ainsi le double avantage de se débarrasser de soucis matériels
et de permettre aux habitants de la région d’apprendre de nouvelles méthodes
de culture propagées par des moines venus d’ailleurs. Pour détenir tant de
biens, la famille du prélat, devait certainement être originaire du terroir et
c’est semble-t-il à Plestin-les-Grèves, que le jeune Hugues a senti s’éveiller
sa vocation. A noter que la charte de cette donation est conservée par Dom
Morice (Preuves, tome 1er, colonne 460).
Hugues,
afin de valider sa donation, sollicita l’accord de son seigneur féodal, et
c’est l’occasion pour nous de constater que le Trégor, sinon même l’évêché
de Tréguier, était à cette époque entre les mains de la maison de Penthièvre,
alors représentée par Geoffroy et ses frères, les fils d’Eudon de Penthièvre
(..assensu domini mei Gaufredi comitis et omnium fratrum ejus filiorum
scilicet comitis Eudonis).
Les
moines envoyés sur les lieux fondèrent à la base du roc Hyrglas, un prieuré,
celui de Lancarré. Les moines contribuèrent par leurs entreprises de défrichement
et de mise en culture, au développement du prieuré. Cette participation
directe des moines aux travaux des champs faisait l’admiration de nombreux
habitants de la zone côtière. Ils se montraient prompts au travail et
oeuvraient de leurs propres mains car ils savaient que la vie n’apporte rien
aux mortels sans de grands efforts. La présence de ces moines ne faisait
pourtant pas que des heureux. La donation de l’évêché de Tréguier provoqua
la protestation du clergé paroissial frappé dans ses recettes. A noter que les
bénéfices ecclésiastiques faisaient souvent à cette époque l’objet de
convoitises et de luttes sans merci. Les moines vers lesquels affluèrent
quantités de terres qui leurs étaient données par des nobles pour assurer, on
serait tenté de dire plutôt acheter, le salut de leur âme, purent de moins en
moins les exploiter directement ; à partir de la deuxième moitié du XIIIème
siècle, aux moines-paysans succédèrent des propriétaires de domaines
soucieux de faire fructifier leurs biens. Les moines du prieuré que l’abbaye
avait établi sur les lieux ne se gênaient pas, en effet, pour étendre leur
influence et prélever la dîme au-delà du Roc sur les quartiers de La Haye, de
l’Armorique et de Saint Sébastien. Les conflits sont de plus en plus
nombreux, reflétant l’exaspération croissante des nobles devant la
disparition progressive de leurs biens au profit du prieuré.
Comme
les moines étendaient toujours plus loin leur emprise et le champ de leurs dîmes,
Guillaume de La Haye et un certain Conan des environs, appuyés par le recteur
Guyomard menacé, quant à lui jusque dans ses limites paroissiales, intentèrent
un procès à l’abbaye. L’évêque de Tréguier et le recteur de Plestin
d’une part, les moines de l’abbaye du Mont Saint-Michel d’autre part, étaient
en désaccord. Le clergé local de l’époque reprochait entre autre aux moines
de « s’être emparés de la
chapelle Notre-Dame de Lancarré, leur déniait le droit d’administrer les
sacrements aux habitants des « fréries » de l’Armorique et de Tréaerdin
et des seigneuries de la Haye et de Conan ; on discutait en outre pour des
terres sises entre la chapelle de Lancarré et le Roc’h Hirglas, et pour la dîme. »
Le temps et la politique jouant contre l’abbaye du Mont Saint-Michel,
les habitants de Plestin[-les-Grèves] auront gain de cause et la charte de 1261
va ramener alors les moines aux environs immédiats du prieuré : « une
transaction préparée par l’official de Saint-Malo fut conclue le samedi après
la Nativité (1261). Il fut décidé que la chapelle avec ses dépendances
appartiendrait aux moines. Les habitants des « fréries » de Tréaerdin
et l’Armorique et des seigneuries de la Haye et de Conan payeraient au recteur
de Plestin les mêmes droits et dîmes que les autres paroissiens, et le prieur
de Hirglas ne pourrait ni les marier, ni les confesser, ni leur distribuer aucun
sacrement sans l’autorisation spéciale du recteur ; »
. Il ne restera donc aux moines que les pierres du rocher et la chapelle
voisine de Lancarré. C’est l’époque où le prieuré commence à montrer
des signes de décadence : les
vocations monastiques se faisant plus rares, l’exploitation des terres est
confiée à des vassaux, convenanciers et le prieuré est délaissé. Les moines
ne font plus preuve de la même ardeur à l’ouvrage ; ils paraissent plus
intéressés par les avantages matériels de ce monde que par la prière et le
salut des âmes. Ils étaient passés maîtres dans l’art de faire fructifier
un capital et ils se servaient avec habileté de leur parfaite connaissance des
lois et des arcanes de la justice pour faire connaître leurs droits. D’hommes
penchés sur la terre, ils étaient devenus au fil des temps des contrôleurs
puis des seigneurs soucieux d’arrondir leurs domaines au prix de la sueur et
parfois de la souffrance de leurs vassaux.
Puis
plus tard, les habitants de Plestin[-les-Grèves] appuyés en cela par le
recteur Bégaignon, reviendront à nouveau à la charge, jusqu'à l’expulsion
totale des moines. Une dernière contestation sera encore enregistrée en 1432.
Ce qui représente près de quatre siècles de batailles judiciaires, dont les
plestinais sortirent finalement vainqueurs. Il faut savoir que Even (Yves)
Begaignon était un personnage illustre, originaire de Plestin, où il serait né
en 1309 (fils de Jean, seigneur du Rumen, en Plestin, et de Catherine Autret,
demoiselle de Ploujean), d’une famille qui possédait la seigneurie du Rumen dans cette
paroisse. Il fut religieux dominicain à Morlaix (en 1326), recteur de Plestin
(dès 1330), docteur en théologie à Paris en 1336, pénitencier apostolique à
Rome (en 1357), évêque de Tréguier (pourvu le 28 novembre 1362), grand pénitencier
de l’Eglise romane (en mai 1371), cardinal (créé cardinal par Urbain IV en 1371), dit le cardinal de
Morlaix. Il se vit attribuer le siège épiscopal de Palestrina, mourut en 1378 et fut inhumé à Rome.
Ce
n’est donc qu’au XVème siècle, que les derniers moines, se retirèrent
dans un prieuré-cure (non localisé à ce jour) situé au bout de la baie, à
Pen Aod (« le Bout de la Grève »), le Saint-Michel-en-Grève
d’aujourd’hui. Certains prétendent qu’il s’agissait d’une dépendance
du prieuré situé à la base du roc Hyrglas. Mais ce prieuré qui semble-t-il portait le nom de
Saint-Michel-en-Grève (Locmikel en Haye) ne figure pas aux possessions de
l’abbaye du Mont Saint-Michel. Ce qui fait dire à certains de nos
contemporains que l’origine de Saint-Michel-en-Grève n’a aucun rapport avec
les moines du Mont Saint-Michel. Il faut savoir pourtant qu’à cette époque
les moines missionnaires pouvaient très bien élever un lieu de culte sans pour
autant acquérir au même endroit des biens pour leur monastère. Ce qui
pourrait expliquer l’absence de trace écrite dans les possessions de
l’abbaye. Le prieuré-cure n’a pas été prélevé sur le territoire de
Plestin, mais sur celui de Plouzélambre. La paroisse primitive de Plouzélambre
de l’ancien diocèse de Tréguier avait à l’époque une superficie
d’environ 17 km² (c’était une des plus petite paroisse primitive « Plou »
de l’évêché de Tréguier) et réunissait l’actuel Plouzélambre,
Saint-Michel-en-Grève et Tréduder. Elle a été fondée à l’époque de
l’immigration bretonne par un moine du nom de « Zélambre » dont
le patronage aurait été par la suite remplacé par celui de Saint Sylvestre.
Les
distances et l’état des sentiers étaient telles dans la région qu’elles
empêchaient les fidèles de Saint-Michel de fréquenter régulièrement l’église
paroissiale située en Plouzélambre. Les moines avaient donc mis à leur
disposition un lieu de culte (chapelle) qui reçut une partie des attributions
paroissiales (il s’agissait certainement d’une chapelle « tréviale »
chargée de la desserte d’une partie déterminée de la paroisse, appelée
« trève »).
Les
alentours de l’actuel Saint-Michel-en-Grève étaient jadis recouverts par une
forêt qu’on appelait la forêt
de Lexobie, les côtes étaient couvertes de futaies : « le
pays a été longtemps abandonné aux seuls soins de la nature ». Sous
l’impulsion des moines, les espaces furent défrichés et mis en valeur;
contribuant ainsi à densifier l’occupation du sol par de nouvelles
implantations agricoles. Ces implantations furent accompagnées par la création
d’une nouvelle paroisse aux dépens de Plouzélambre. A Saint-Michel-en-Grève, les seigneurs supérieurs de l’époque
étaient ceux de Runfao. Ils avaient une demeure sur la rive gauche du Léguer,
à proximité de Kergrist. La seigneurie s’étendait sur les paroisses de
Ploubezre, Loquivy, Ploumilliau, Plouzélambre et Tréduder. Plusieurs autres
seigneuries de moindres importances étendaient leur influence sur la paroisse :
ceux de Kerhuel, de Portzjezegou, Kerropars, Quatredames, Kerarmet, Goasven.
C’est l’époque où les églises et les chapelles se multiplièrent «..dans de modestes villages, au milieu des landes, des merveilles de
granit surgirent du sol breton, immortels témoignages de la foi profonde de ce
peuple croyant et de l’amour du beau qui anime les âmes bretonnes éprises de
l’infini, pénétrées du sentiment de l’au-delà .. ».
C’est également à cette époque que l’on construisit l’église de
Saint-Michel-en-Grève. Le lieu choisi devait être un lieu déjà marqué
d’un caractère sacré : car à cette époque, on trouvait fréquemment
une superposition de cultes : le nouveau culte venant s’amalgamer à
l’ancien. Les patrons et fondateurs de l’église étaient les seigneurs de
Kerhuel-Kerbiriou (du Bois), en raison de leur seigneurie de Kerhuel. Ils se réservaient
le droit de nommer les desservants et prélevaient à leur profit les dîmes et
les autres droits. Mais d’autres seigneurs du terroir ont dû certainement
aussi contribuer au financement de l’église, puisque les murs et les vitraux
sont ornés de leur armoiries. Cette église était la mémoire collective
d’un lieu et d’une société : les blasons placés aux points stratégiques
de l’édifice perpétuaient les droits des seigneurs locaux et réglementaient
avec toutes les nuances souhaitables, les sourcilleuses prééminences, objet de
tant de querelles.
La localité de St Michel est citée comme paroisse du diocèse de Tréguier en 1426 (Arch. De la Loire Atl. B2980). L’église paroissiale sera d’ailleurs durant très longtemps le centre de l’administration et le général de paroisse, ou le conseil de fabrique, remplissait alors l’office de conseil municipal. Le conseil de fabrique était composé d’un certain nombre de paroissiens généralement des bourgeois fortunés de la commune. Il s’occupait des finances paroissiales et des questions matérielles telles que les travaux à effectuer à l’église.
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