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SOUHAITS DES HABITANTS DE NIZON EN 1789

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Vous venez d'entendre nos plaintes ; daignez, Sire, exaucer actuellement les souhaits des habitants de Nizon en 1789.

Après la conservation de votre personne sacrée, à l'existence de laquelle tient essentiellement le bonheur de la Nation, ce que nous désirons le plus ardemment, c'est :

1° L'abolition du domaine congéable et le convertissement des rentes domaniales en rentes censives ou féodales et non nobles, avec l'exemption des servitudes et corvées coutumières et la propriété incommutable du fonds et des bois fonciers, le tout à la charge d'une indemnité proportionnée à la valeur réelle des concessions nouvelles.

2° Que ces contrats de convertissement soient exempts de lods et ventes, tant sous votre domaine que sous celui des seigneurs particuliers, ainsi que les contrats d'échange (voir la note qui suit).

Note : « D’après la Coutume de Bretagne (titre II, art. LXVI), les lods et ventes ne doivent pas porter sur les échanges ; mais en 1645, le Roi soumit les échanges aux lods et ventes. Il percevait d’abord cette taxe, puis, en 1674 et 1700, il vendit aux seigneurs ce droit » (SÉE et LESORT, op. cit., t. I, p. 127, n. 3).

3° Que les servitudes des moulins et tours banaux soient franchissables à prix d'argent, ou, en tout cas, converties en une prestation annuelle et pécuniaire quelconque.

4° Que les procédures soient abrégées et, pour y parvenir, que les justices seigneuriales soient supprimées, en sorte que la justice se rendra partout au nom du roi et par des officiers choisis par les trois ordres et qu'il n'y ait plus désormais que deux degrés de juridiction pour toutes les affaires civiles et criminelles, de quelque importance qu'elles puissent être, et qu'à l'égard de la police de nos bourgs et de nos villages, il sera établi, de distance en distance, un petit tribunal électif et populaire, aux ordres duquel sera subordonné, pour le maintieu du bon ordre, un guet et une brigade de maréchaussée, pour juger sommairement et sans appel comme sans frais, toutes causes sommaires d'injures, percussions légères, dommages et arrêts de bestiaux et autres affaires de pareille nature, dont le principal n'excéderait pas trente livres tournois.

5° Que tous les sujets du roi, sans distinction, contribuent, à raison de leur aisance, à l'entretien des grandes routes et que ce travail se fasse, à l'avenir, au moyen d'une imposition pécuniaire à laquelle contribueront également les trois ordres.

6° Que le franc-fief, imposition d'autant plus injuste qu'elle ne porte que sur l'ordre du Tiers, soit entièrement et irrévocablement supprimé et remplacé au trésor royal par une autre imposition annuelle et générale qui portera sur tous les biens indistinctement ; que tous les autres impôts, sans distinction, et nommêment les milices et casernements, fouages et capitation, soient à l’avenir supportés d’une manière égale et par chacun à raison de sa fortune, sans distinction d'ordre, et qu'il n'y ait qu'un seul et même rôle pour tous.

7° Que le tirage au sort pour les milices de terre, de mer et des côtes soit entièrement supprimé, sauf à fournir, à prix d'argent, le nombre d'hommes qui sera nécessaire au roi pour son service.

8° Que tout privilège tendant à loger de l'eau-de-vie en pièces cesse et, qu'à l'avenir tout le monde soit obligé de la prendre au bureau de distribution du fermier où cette liqueur leur sera détaillée à un prix modéré qui sera le même pour tous les ordres.

9° Que la paroisse de Nizon ayant sur son territoire un petit port de mer demeuré impraticable par le mauvais état du quai et des voies qui y conduisent (voir la note 1 qui suit), les octrois (voir la note 2 qui suit) qui se sont perçus jusqu'à présent au profit de la communauté de Concarneau le seront désormais au profit de Nizon, versés aux mains d'un receveur qu'elle nommera et employés aux réparations du port de Pont-Aven et des voies qui y conduisent.

Note 1 : Des bâtiments de 50 à 70 tonneaux peuvent se rendre, tout chargés, jusqu’à l’espèce de quai, pratiqué par les habitants, qu’il serait très utile de réparer. Des bâtiments de 150 tonneaux pourraient alors se charger à Pont-Aven. Je n’ai rien vu de brisé, de rompu, de cahoteux, comme la rue qui conduit au quai « elle est placée sur des rochers dont les blocs inégaux font faire aux roues des chutes de 18 pouces »« Les travaux les plus urgents sont le rétablissement du pont principal, dont une partie n’est soutenue que par des poutrelles placées il y a 13 ans ; l’état du pont est tel que des canons ne pourraient le traverser ; — la prolongation de quai et la réparation du pavé qui y conduit, la destruction d’un grand rocher qui gêne l’entrée du port et l’établissement d’une route qui conduise directement à Bannalec et Scaër » (CAMBRY, op. cit.).

Note 2 : Il était aussi perçu, à Pont-Aven, des droits de coutume – : 8 derniers, les jours de marché, et 1 sol, les jours de foire, par mesure ordinaire. En 1773, ces droits rapportaient 100 l. aux fermiers de M. de Kersalaün (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 1889).

10° Que la piété de nos pères ayant abondamment pourvu, et outre mesure, à la subsistance de tous les ministres de la religion, il soit ordonné au corps entier du Clergé de faire de tous les biens ecclésiastiques une répartition qui sera telle que chaque simple prêtre de campagne recevra annuellement une pension fixe de 400 livres qui sera portée à 600 livres pour les curés et à 2.400 livres pour les recteurs, le tout quitte de retenue.

11° Que les droits d'insinuation, de contrôle et autres droits bursaux de cette nature, devenus par leur extension si onéreux au peuple, soient considérablement modérés ; que, par un juste retour à l'équité et à la raison, le contrôle des sommes inférieures à 10.000 livres soit diminué de moitié et augmenté de la même proportion pour les sommes qui se trouveront excéder la susdite fixation ; que les droits de scellés, dixième des vacations et autres impositions, connues en finance sous le nom de droits réservés, soient entièrement supprimés comme tendant à rendre l'administration de la justice et plus difficile et plus dispendieuse.

12° Que, pour les bonnes mœurs et la sûreté publique, tous les cabarets établis dans les villages écartés ou sur les routes soient supprimés, comme autant de retraites à voleurs, avec défense d’en établir que dans les villes et bourg et sur un certificat du recteur de la paroisse et des douze délibérants pour attester la probité de ceux qui voudraient tenir cabarets ; que toutes les expositions de boissons sur les grandes routes, aux jours de foires, marchés et autres assemblées, soient prohibées dans toute la province comme un usage dangereux dont les paroisses du pays éprouvent journellement les plus funestes effets ; que le fermier des devoirs de la province sera tenu d'établir, dans chaque gros bourg, une cantine qu'il fournira des meilleurs vins de Bordeaux, pour être distribués en détail et à un bénéfice modéré, sur les certificats des recteurs, aux malades de leurs paroisses pour qui l'usage de cette liqueur bienfaisant aura été jugée nécessaire, l’expérience ayant prouvé que l’usage des vins aigres ou fretatés qui se débitent dans les cabarets des campagnes cause journellement la mort aux malheureux qui se flattent d'y trouver la vie.

13° Que, pour rendre plus durables celles de leurs demandes qu'il plaira à Sa Majesté d'exaucer, les habitants des campagnes aient dorénavant des représentants et des défenseurs de leur choix aux Etats de la province de Bretagne ; que le nombre de ces représentants et des autres classes du Tiers égale les représentants réunis du Clergé et de la Noblesse ; que dans l'ordre du Clergé il soit introduit, dans la suite, des députés pris dans le corps pastoral, en nombre égal à celui des députés du premier ordre du Clergé (voir la note qui suit) et, à l'égard de la manière dont les dits députés réunis opineront aux Etats de Bretagne, déclare le dit général adopter cette que tout l'ordre du Tiers jugera devoir tendre plus efficacement au redressement de nos griefs, sans nuire ni préjudicier aux droits, frauchises et immunités de la province auxquels Sa Majesté est humblement suppliée de ne pas souffrir qu’il soit porté aucune atteinte.

Note : Les députés du Tiers aux Etats de Bretagne, au nombre de 42, ne représente que les villes ; les paysans et le bas Clergé ne sont point représentés aux Etats. Par contre, tous les gentilhommes ont le droit d’y assister en personne. Les Etats de Bretagne, lors de leur dernière session (décembre 1788 - janvier 1789) comprenaient environ 900 (965?) membres de la Noblesse, 31 du haut Clergé et 42 députés du Tiers (y compris les agrégés). Cf. H. POCQUET, Les origines de la Révolution, t. II. — « Que pouvaient contre la masse énorme des privilégiés qui assistent aux Etats les faibles efforts de 42 députés, à qui seuls les intérêts de deux millions d’hommes étaient confiés ! » (GORIER. Mémoire pour le Tiers Etat de Bretagne, p. XV).

Lecture donnée au général, tant en français qu'en breton, du présent cahier de ses doléances et remontrances, il a, par acclamation, déclaré l'adopter dans tout sont contenu comme l'expression vraie du vœu général et unanime de l’assemblée.

Fait et arrêté, dans la nef de l’église paroissale de Nizon. Ce jour, 2 avril 1789.

Louis Jouin, Le Prédour, F. Troadec, Jean Guitic, Descourbes de Keranguen, David, Parquer, Julien Thirot, Nicolas Coantic, Antoine Clauze, Pierre Kersulec, P. Le Gorgeu, Thomas Limbourg, Côme Parquer, Yves Le Gac, Aumont, Descourbes, père ; Le Villain, Descourbes de Kervignac, avocat ; Le Breton de Villeblanche, Le Pennec, notaire royal et apostolique et trois signatures illisibles.

(H. E. Sée).

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