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LA GUERRE A MORLAIX EN 1914-1918

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*** LA GUERRE DE 1914-1918.***

Note : La Première Guerre mondiale, aussi appelée la « Grande Guerre », est un conflit militaire impliquant dans un premier temps les puissances européennes et s'étendant ensuite à plusieurs continents. Le conflit oppose la Triple Alliance, composée de l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie, et d'autre part la Triple-Entente, composée de la Grande-Bretagne, la France et la Russie. Elle dure du 28 juillet 1914 au 11 novembre 1918. Armistice signé le 11 novembre 1918, mettant fin aux combats sur le front occidental. Le 14 juillet 1919, un défilé militaire consacre l'armée française victorieuse. La Première Guerre mondiale a causé la perte d'environ 10 millions de vies militaires et entre 7 et 10 millions de civils.

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Hôpital temporaire de Morlaix durant la guerre de 1914-1918 (Bretagne).

Le 13 juillet 1914, le bataillon du 116ème revint de Coëtquidan et défila le lendemain, avec ses officiers, plumet au képi.

Les enfants de mon âge lisaient « Les Boys-Scouts franc-tireurs » ou « La Guerre de demain » et l'on songeait à des événements qui n'arriveraient peut-être jamais.

Et qui furent là tout-à-coup !

Le samedi 1er août, les affiches furent collées, le tocsin s'envola des clochers, et le lundi, à une heure et demie du matin, le commandant Arnoux passa en revue ses compagnies. Par la Villeneuve, la colonne monta vers la gare. Le « Chant du Départ » lui faisait escorte et il y avait des sanglots dans les adieux.

Dans les villages, des chaînes furent tendues en travers des routes ; les factionnaires prirent la garde au viaduc, près des ponts. Les débits fermèrent à 9 heures. La guerre commençait ; confiance et gravité dans l'union de tous.

Au cours de la deuxième quinzaine d'août, une milice fut créée, mise à la disposition de la gendarmerie pour combattre l'espionnage. Elle comportait deux sections, l'une à pied, l'autre à cheval, sous la direction de M. Bertrand, président de la Société des anciens sous-officiers. Mon père, âgé de 57 ans, en fit partie. Ces hommes refusèrent d'être payés. On leur répondit que le règlement exigeait qu'ils le fussent. Ils firent don de leur solde à des œuvres. jusqu'au jour où on les renvoya dans leurs foyers sous prétexte qu'ils coûtaient trop cher !

Le 2 septembre, on vit arriver les premiers réfugiés, une soixantaine de malheureux qui furent dirigés sur Saint-Jean-du-Doigt. Les pertes étaient déjà très lourdes. Les blessés affluèrent. Des hôpitaux temporaires avaient été créés, portant les numéros 8 (auxiliaire), 16. 17, 22, 34. 35, 40 et 41.

 Infirmières de la Croix-Rouge de Morlaix durant la guerre de 1914-1918 (Bretagne).

Au 1er octobre, on compte 118 blessés au Collège, 62 au Poan-Ben ; plusieurs centaines arrivent dans les semaines qui suivent ; on en soigne également à Saint-François-Cuburien. La nouvelle se répand que seize Morlaisiens, pris à Maubeuge, sont internés à Munster, en Wesphalie. Le populaire champion cycliste Françis Le Bars est mort au Champ d'Honneur, Les obsèques de soldats deviennent très fréquentes. Nous voyons passer sur le quai de Tréguier le cercueil du capitaine de Nanteuil, recouvert du drapeau tricolore et suivi de militaires en armes et d'une grande foule. Des affiches convoquaient la population à assister à ces enterrements et les scouts y participaient.

Tout cela impressionne la masse qui sent continuellement la présence de l'immense guerre ; aussi, comme les premiers frimas annoncent un hiver rigoureux, on commence à tricoter pour les soldats des tranchées. Le capitaine Wattebled organise l'oeuvre du lainage militaire.

Au cours de la deuxième quinzaine de novembre, les artistes mobilisés du 72ème, du 272ème et du 12eme territorial, donnèrent sous le patronage du commandant Rebeu, trois séances théâtrales, afin de venir en aide aux blessés el aux combattants. On entendit Ancelin, premier ténor de l'opéra-comique, Grandjean, première basse du Conservatoire de Paris. Aveline dansa comme à l'Opéra et Pluquet dirigea un orchestre de 30 musiciens. On chanta le « Clairon » de Déroulède avec scène mimée. On joua « Le Drapeau », comédie patriotique et le premier acte de « Faust », puis des tableaux vivants rappelèrent les victoires du 72ème, s'achevant sur une apothéose chatoyante d'uniformes.

Poilus de Morlaix de la 72eme de ligne en 1915 (Bretagne).

Les ventes d'insignes commencèrent : ce fut le « petit drapeau belge » qui ouvrit la série, puis on connut la journée du « 75 », la journée serbe et bien d'autres. Les remises de décorations donnèrent lieu à des prises d'armes. Le commandant Deloye décora le capitaine de gendarmerie Sapin qui arborait le casque métallique surmonté d'une chenille, dont le port fut éphémère dans la maréchaussée. Le défilé par sections sur deux rangs souleva la poussière de la place Cornic.

En avril, la médaille militaire fut donnée à M. Dagomeau, caserne des Jacobins ; en mai, le maréchal des Logis de Hussards, Maximilien Sauveur, la reçut également des mains du colonel Septans, Le patronage Saint-Martin lui avait prêté un vieux dolman à brandebourgs qui en faisait un hussard de 1880. En juin, ce furent deux soldats blessés ; en août, c'est le capitaine de tirailleurs marocains Le Boëtté, dont la famille est bien connue à Morlaix, qui reçut la Légion d'Honneur et la Croix de guerre, puis la médaille militaire fut accrochée à la capote du jeune Mével, engagé à l'âge de seize ans et deux fois blessé. D'autres boys-scouts avaient également rejoint le front : Lucien Marzin à l'âge de quinze ans et demi, L'Hénaff, etc. Il y en eut méme deux autres, fils d'officiers, âgés de sept et de neuf ans, qui s'échappèrent pour suivre l'exemple de leurs aînés, mais ils furent découverts dans une grange à douze kilomètres de Morlaix et ramenés chez eux.

Parfois, les prises d'armes groupèrent un grand nombre de décorés : ving-trois, en novembre, au Pouliet. On citait des Morlaisiens qui s'étaient distingués : l'adjudant Jaffrennou. parti simple soldat, venait de recevoir la médaille militaire des mains du général de Castelnau. L'agent voyer de Plouigneau. F. Cordon, officier d'élite, accumulait des citations. Le maire. M. Hervé, eut deux fils tués.

Pendant ce temps, la vie reprenait peu à peu dans tous les domaines. Les tournées Baret jouèrent « Colette Baudoche », des équipes du 72ème disputèrent des matches de football à Kernéguez, on créa, le 9 octobre, l'œuvre du « Paquet du Prisonnier » que présida la comtesse du Rusquec et dont Mme Croissant fut l'animatrice. La hausse des prix suscita de l'effervescence aux Halles. Huit cents réfugiés des environs d'Arras furent répartis dans la région.

L'année 1916 commença dans le grelottement des aubes gelées. Le froid n'empècha pas les Morlaisiens d'assister en grand nombre aux soirées musicales et artistiques organisées au profit des différentes œuvres. Des acteurs de l'Opéra-Comique et de la Gaïté Lyrique chantèrent « La Fille du Régiment », de Donizetti ; le 16 février, et six semaines plus tard, une troupe d'amateurs se fit applaudir dans « l’Etincelle » de Pailleron. Lanquetuit, premier prix d'orgue du Conservatoire de Paris, interpréta le « concerto en sol mineur de Mendelssohn ». On l'entendit chaque dimanche à l'église Saint-Melaine ; la fugue de Bach tonnait au-dessus de nos têtes tandis que nous sortions par le porche ogival.

Un cinéma fut installé au théâtre. Mme Bersihan tenait le piano tandis que passait à l'écran « Le Petit Héros Belge » ou des farces de Rigadin.

Des habitudes nouvelles s'instauraient. Des élèves du collège choisirent des filleuls parmi les combattants ; des dames de la ville suivirent cet exemple et adoptèrent ainsi des poilus à qui elles envoyaient des colis contenant du tabac, du chocolat, des conserves, des lainages. Quand la marraine était une jeune fille, il s'ensuivait parfois un flirt à longue distance et il arriva que certains finirent par le mariage.

La population fut fortement intriguée par les agissements d'une certaine dame Dupré, en réalité Laure Servais, modiste à Ostende, que l'on prit pour une espionne. Cette personne, qui s'était installée au château de Luzuria, sur la route de Carhaix, n'était qu'une habile voleuse que le tribunal condamna à quinze mois de prison et cinquante francs d'amende.

Plus redoutable était la bande « Manu ». Fréquentant les bals clandestins, provoquant des rixes, ces jeunes voyous obéissaient au sifflet et détroussèrent les passants attardés, en les menaçant du couteau.

Le 25 mai, un conseil de réforme récupéra 30 % des exemptés.

Militaires de Morlaix au camp de Coetquidan en 1913 (Bretagne).

Cependant les fêtes se multiplient. On joue « Les Noces de Jeannette » et « Le Naufrage de la Provence » de Jean Philippe, au profit des matelots. Les commandants Laguë, Rebeu et de Touzalin assistent à cette soirée ainsi que le sous-préfet de Morlaix, M. Cassé-Barthe. Ensuite, c'est une conférence du capitaine de frégate Paul Cloarec, puis une matinée réservée aux collégiens qui admirent le calculateur Inaudi, une soirée au profit des mutilés de guerre. Que de prétextes pour s'amuser, malgré tout !

On sort beaucoup. Le pardon de Notre-Dame du Mur est suivi par une énorme affluence et les églises sont pleines aux cérémonies du soir.

Le 20 décembre on acclame l'abbé Wetterlé, patriote alsacien, ancien député protestataire au Reichstag.

Depuis le mois de Juillet, cinquante prisonniers logent aux magasins du Champ de Bataille. Coiffés de calots ronds, ils travaillent, gardés par des territoriaux en pantalons rouges.

Le barde Pipi Talon, de Locquénolé, parcourt la campagne et prend la parole à la sortie des messes, pour inciter les épargnants à verser leur or. Son langage imagé et ses expressions dramatiques font merveille. Le métal précieux sort comme par enchantement des bas de laine !

Malheureusement, chaque semaine apporte un nouveau deuil. On apprend la mort de l'abbé Le Roux, vicaire à Saint-Melaine, du frère Berthou, de l'école libre de Saint-Martin, tué à Verdun. Le capitaine de Lannurien se distingue, avant de devenir, beaucoup plus tard, directeur de l'Ecole de Guerre.

Tandis que l'on meurt et que l'on sauve le pays, d'autres se livrent à des besognes scandaleuses. L'affaire des briquettes de charbon émeut la ville. Agissant au moyen de commissions, pratiquant des reventes dont le bénéfice était net, de nombreux citadins sont inculpés de vol, pratiqué suivant un plan méthodique, et condamnés à des peines variables. Une colonne de prévenus passe ainsi sur les quais, encadrée de gendarmes. « Où vas-tu, comme ça ? » demande une commère à une autre femme, et l'interpelée répond, en montrant un des gardiens : « En prison, avec ceux-là ! ».

Les premières semaines de 1917 nous permettent d'assister à une conférence de Charles Le Goffic, à la création des cartes de sucre et à l'arrivée de deux cents nouveaux réfugiés. Un foyer-abri est installé à Saint-Martin en face du Porsmeur où Madame Post, généreuse américaine, vient de créer un sanatorium.

Le 20 septembre, un officier italien, Paola Arcari, fait une conférence accompagnée de films sur « l’Effort militaire de l'Italie », et le 9 décembre Jules Boucherit, virtuose du violon. se fait entendre au théâtre.

Hôpital Militaires de Morlaix en 1914-1918 (Bretagne).

De ma chambre, je voyais défiler sur les quais les jeunes soldats des classes 17 et 18. Escortés de vieux sous-officiers, ils chantaient « La Madelon » ou « Verdun, la victorieuse » et l'on éprouvait un serrement de cœur à entendre ces voix d'adolescents qui allaient affronter la mort !

Les librairies et papeteries morlaisiennes exposaient à leurs tourniquets des séries de cartes patriotiques où des soldats embrassaient des Alsaciennes, où Déroulède sortait de sa tombe. Il y avait aussi les portraits en couleurs de nos généraux célèbres et des scènes de guerre.

1918 apporta à notre ville un projet de création d'un port en eau profonde qui ne fut jamais réalisé, Tremplin électoral dont on finit par faire des gorges chaudes : « Le port dans l'eau ! ».

Morlaix connut aussi, comme bien d'autres cités à cette époque : « l'homme qui pique ». On eut peur de cet énigmatique individu à personnalité imprécise qu'on hésitait à placer parmi les anormaux ou parmi les mystificateurs.

Une double évasion eut lieu au Champ de Bataille. En sciant leurs barreaux. un ancien professeur et un prisonnier connu sous le nom de l'Hercule, s'échappèrent fin avril, mais n'ayant pu changer de vêtements, furent repris à Pleyber-Christ.

A ce moment, l'Allemagne lançait ses suprêmes offensives en direction d'Amiens et de Paris. Les professeurs du collège firent des conférences patriotiques dans les principales localités de la région. Une association des mutilés et veuves de guerre fut placée sous la présidence de M. Jules Walbott, grand blessé. On nommait des Morlaisiens dont le chiffre des citations devenait impressionnant : six, sept, huit, et davantage : Coat, de la Légion Etrangère, qui devait plus tard se signaler par ses championnats de boxe, son ivrognerie et ses excentricités, Le Bihan, Bienvenue, neveu du maréchal Foch, et bien d'autres.

Les couleurs américaines firent leur apparition aux côtés des pavillons alliés. Ch. Prince, avocat à Boston, fit une conférence sur son pays et nous vimes une colonne de soldats américains, guêtres et coiffés de feutres, descendre la rue Gambetta, accueillis par des acclamations. Des motocyclistes se groupèrent sur nos places et des trains se suivirent nuit et jour.

Le 14 juillet, les jeunes soldats, après un beau défilé, entrèrent en chantant dans leurs casernes décorées de verdure. Sous de légères averses, on remit des diplômes aux familles des combattants morts au front.

En Août, le Conseil municipal offrit au maréchal Foch le titre de citoyen d'honneur de Morlaix, et en octobre, l'Emprunt de la Libération s'ouvrit au carillon des cloches et au frémissement des étamines pavoisant nos maisons.

Un officier américain se maria dans notre ville avec la fille d'un officier français. A cette occasion. je vis l'amiral Wilson ; il mâchait son chewing gum comme tout bon yankee.

Les événements évoluaient rapidement. Le 11 novembre, après une matinée d'attente recueillie, des sonneries nous avertirent, tandis que nous déjeunions, que le feu avait cessé sur l'immense ligne de bataille et, que l'Armistice était signé.

Militaires de Morlaix, en Bretagne (année 1918).

Un cortège où frissonnaient des drapeaux, suivit le quai de Léon : le personnel de la Manufacture manifestait sa joie patriotique.

Les places étaient noires de monde. De vieux ouvriers s'embrassaient, les soldats américains étaient pressés par une foule joyeuse et répondaient : « Vive « le » France ! ». On agitait des centaines de petits drapeaux ; c'était à se demander d'où ils sortaient. Chacun avait le sien.

Le 16, un Te Deum solennel fut chanté à l'église Saint-Matthieu par le chanoine Kerizit, en présence de la municipalité. L'union sacrée se renouvelait dans la victoire. faisant présager pour notre pays un éblouissant avenir. Hélas, il fallut déchanter peu à peu.

Le 3 décembre, le 72ème de ligne quitta Morlaix. Les prisonniers revinrent, reçus par les dirigeants de l'œuvre. On inaugura des plaques commémoratives : à Notre-Dame du Mur, où 172 noms furent inscrits, et plus tard à l'Hôtel de Ville.

Le maréchal Foch fut reçu solennellement à Morlaix ainsi qu'à Ploujean où il eut son banc d'honneur à l'église et son buste à la mairie. Dans la même commune, le général Weygand venait se reposer en sa propriété de Coatamour.

Morlaix, fier de ses soldats victorieux, mais las de tant de déploiement guerrier, transformait ses casernes en cités ouvrières et, comme le reste de la France, se laissait bercer par l'espérance d'une éternelle paix !

(J. de Trigon).

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