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LES ETATS DE BRETAGNE A MORLAIX.

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On trouve la mention de trois tenues des Etats de Bretagne à Morlaix.

Ville de Morlaix (Bretagne).

La première eut lieu en septembre 1553. Nous connaissons par une lettre de François de Rohan recommandant au duc d'Estampes, gouverneur de Bretagne, le Procureur des Bourgeois de Saint-Malo et les autres habitants de cette ville que furent députés à ces Etats (Dom Morice, Histoire de Bretagne, Preuves, t. III, fol. 1028).

La seconde tenue s'ouvrit le 25 septembre 1557. A ces Etats, le roi de France, Heuri II, demanda par l'intermédiaire du duc d'Estampes, que la Bretagne voulût bien équiper et entretenir à ses frais un certain nombre de vaisseaux, ou bien qu'elle lui accordât 20 sols par tonneau de vin pour lui permettre de former ce « convoy », destiné à défendre les navires de commerce bretons contre les pirateries des vaisseaux de l'empereur Charles-Quint et de son fils Philippe II, roi d'Espagne. Les Etats remontrèrent très respectueusement au Roi de France l'impossibilité pour la Bretagne de supporter une telle dépense qui serait la ruine totale du pays ; mais ils se déclarèrent prêts à subvenir dans les limites de leur pouvoir aux frais de la guerre. Henri II écouta favorablement ces remontrances, et aux Etats suivants, rassemblés à Vannes, un mois après (novembre 1557), il déchargea la Bretagne de cet impôt et accepta à sa place une somme de 60.000 livres que lui offrirent spontanément les Etats pour frais de guerre. Le Roi de France, dans la circonstance, déclara vouloir « maintenir et conserver en leurs anciennes liberté, franchise et privilège, » les Etats de Bretagne, « promettant en bonne foy et parole de Roy, — en ce qui concernait l'impôt ci-dessus — tant pour nostre regard, disait-il, que pour nos successeurs, les en tenir quittes et exempts à, jamais et à perpétuité » (Dom Morice, Histoire de Bretagne, Preuves, t. III, fol. 1213).

Etats de Morlaix de 1772-1773.

L'Assemblée des Etats de Bretagne la plus importante tenue à Morlaix fut celle qui s'ouvrit dans cette ville le 20 octobre 1772 et se ferma le 20 janvier 1773.

La Bretagne était très agitée par les luttes du Parlement contre le pouvoir royal dont il refusait d'enregistrer les édits contraires « aux droits, libertés et franchises de la Province ». Le procureur général La Chalotais et son fils, M. de Caradeuc, ainsi que trois conseillers, avaient été exilés. Le pouvoir royal répugnait à convoquer les Etats à Rennes. Ceux-ci soutenaient le Parlement, et la présence de l'Assemblée bretonne dans la capitale n'était pas propre à améliorer la situation ; d'autant que l'évêque de Rennes, président de droit des Etats dans sa ville épiscopale, passait pour être l'un des principaux chefs de l'opposition.

Le secrétaire d'Etat de la Province, Louis Phelypeaux, duc de la Vrillère [Note : Il n'était due de la Vrillière que depuis 1770, auparavant il avait le titre de comte de Saint-Florentin. Mais comme secrétaire d'Etat, il contresignait les ordonnances royales de son nom patronymique de Phelypeaux], qui avait l'oreille de Louis XV, pensa à réunir les États loin de Rennes. Il parla à l'évêque de Tréguier de les convoquer dans son diocèse. Celui-ci en entretint l'évêque de Dol, pendant l'Assemblée provinciale de Tours, au mois de juin 1772.

« J'ay vû à Tours l'évêque de Tréguier, — écrivait en effet Mgr de Hercé à Mgr Bareau de Girac, — et nous y avons beaucoup parlé d'Etats. Vous savés, sans doute, tout ce qui s'est passé à cet égard, entre M. le duc de la Vrillière et lui. J'espère, quoi qu'on en dise, que nous militerons sous vos drapeaux, et qu'on sera forcé de venir cuire à votre four » [Note : Lettre datée de « Nantes 20 juin 1772 ». Cf. Ch. Robert, Urbain de Hercé, dernier évêque de Dol (Victor Retaux, 1900)].

Le spirituel prélat se trompait, les Etats ne vinrent pas cuire au four de l'évêque de Rennes ; ils militèrent sous les drapeaux de l'évêque de Tréguier. Les Etats siégèrent à Morlaix, dans la partie est de cette ville dépendant du diocèse de Tréguier [Note : La partie ouest de la ville faisait partie du diocèse de Léon].

Ils s'ouvrirent, ainsi que nous l'avons dit, le 20 octobre 1772, et tinrent leurs, séances dans l'église des Pères Jacobins (Archives départementales d'Ille-et-Vilaine : C. 2696 A, Reg. des Etats de 1772-1773).

Le Révérend Père en Dieu Jean-Marc de Royère, évêque et comte de Tréguier, présida l'ordre de l'Eglise composé des Révérends Pères en Dieu Charles-Jean Bertin, évêque de Vannes, Urbain-René de Hercé, évêque de Dol, Jules Ferron de La Ferronnaye, évêque de Saint-Brieuc, Jean-François de La Marche, évêque de Léon, Joseph des Laurents, évêque de Saint-Malo, et Emmanuel-Louis de Grossoles de Flamarens, nommé à l'évêché de Quimper ; puis des abbés de Lantenac, de Saint-Jean-des-Prés, du Tronchet, de Beaulieu, de Langonnet et de Paimpont; enfin, des députés des neuf chapitres de la Province.

L'ordre de la noblesse fut représenté par 322 de ses membres. Aucun haut baron n'étant présent, le comte Desgrées du Lou fut élu président de l'ordre. Une grande partie de la session se passa en discussions sur les difficultés élevées à l'occasion de l'affaire de La Chalotais (Voir Barth, Pocquet, Le duc d'Aiguillon et La Chalotais, Perrin, Paris, 1900).

En deux mots, de quoi s'agissait-il ? Les états s'étaient opposés à ce qu'on chargeât le peuple breton de nouveaux impôts. La noblesse s'était particulièrement montrée dans la circonstance ; elle avait pris énergiquement en main la défense du peuple. Le Parlement avait fait de même ; il avait été dissous ; le procureur général La Chalotais et son fils Caradeuc, ainsi que plusieurs membres du Parlement, avaient été emprisonnés, puis exilés. Un nouveau Parlement avait été malement constitué. Voilà les faits.

« Les Etats consultant leur zèle plutôt que leurs forces, et malgré l'épuisement actuel de la Province, ont, dit le procès-verbal, d'un consentement unanime, accordé au Roi le don gratuit de 2 millions pour les années 1773 et 1774  » (Séance du 20 octobre 1772).

Mais, après avoir donné au pouvoir royal cette marque de dévouement, les Etats voulurent s'occuper « de l'état du Parlement de Bretagne et de l'administration de la justice dans La Province ». Les commissaires royaux le leur défendirent au nom du Roi. Les Etats demandèrent la levée de cette défense, invoquant le droit qu'ils avaient de s'occuper d'un objet faisant partie du rapport de leurs députés en cour. Les commissaires reconnurent le bien fondé de cette réclamation. « Le droit qu'ont les Etats d'examiner les édits qu'il plaît au Roy de faire publier sur l'administration de la justice souveraine en cette province, le droit d'en délibérer, le droit de faire à ce sujet des représentations convenables, ne peut leur être contesté, » répondit, en effet, aux Etats le duc de Fitz-James qui s'engagea à envoyer au Roi une requête des Etats à ce sujet (Séance des 28 et 29 octobre 1772).

Quelques jours après, délibérant sur l'article 8 du rapport des députés en Cour, concernant le Parlement et les exilés, les trois ordres, d'un commun accord, chargèrent leurs nouveaux députés en Cour de solliciter l'entière liberté des exilés (Séance du 11 novembre 1772).

Une violente contestation s'éleva entre les ordres à l'occasion d'une délibération du 21 décembre 1770. Les Etats avaient, à cette date, adopté le mémoire fait par une commission pour examiner le mémoire de Linguet, avocat du duc d'Aiguillon, l'ennemi de La Chalotais, et en avaient ordonné l'impression à 3.000 exemplaires. Ce mémoire avait pour titre : Réponse des Etats de Bretagne au mémoire du duc d'Aiguillon. Le greffier avait reçu l'ordre, le 21 janvier 1771, d'insérer en marge de cette délibération un arrêt du Conseil d'État, supprimant le mémoire comme attentatoire à l'autorité de Sa Majesté, et en même temps la délibération du 21 décembre 1770 (Archives départementales d'Ille-et-Vilaine, C. 2695).

Aux Etats de Morlaix, le Tiers exprima l'avis de considérer cette délibération du 21 décembre 1770 comme non avenue et de supplier le Roi de retirer de dessus le registre l'arrêt du conseil du 21 janvier 1771. La Noblesse déclara cet avis « nul dans la forme et outrageant au fond, » comme étant le désaveu d'un mémoire fait et imprimé par les Etats ; elle demandait simplement le retrait de l'arrêt. L'ordre de l'Eglise, de son côté, s'opposait au retrait de l'arrêt, et au payement de l'impression du mémoire (Séance du 13 novembre 1772). Enfin le Tiers, en grande majorité, se rangea par acclamation à l'avis de la Noblesse. Mais les commissaires défendirent toute discussion sur ce sujet jusqu'à la décision du Roi (Séance du 16 novembre 1772). D'ailleurs, on communiqua aux Etats une lettre du Roi renouvelant l'interdit de « s'occuper, y lisait-on, de ce qui regarde l'état actuel de notre Parlement de Bretagne et l'administration de la justice dans notre dite Province » (Séance du 17 novembre 1772). Et, malgré leurs protestations, les Etats durent enregistrer cette défense, qui fut encore renouvelée quelques jours après (Séances des 19, 20 et 23 novembre 1772). A cette occasion, la Noblesse ayant été accusée de désobéissance au Roi, elle s'empressa d'aller protester en corps auprès du duc de Fitz-James qui se déclara sensible à cette assurance qui, prétendit-il, ne semblait pas s'accorder avec les faits (Séances des 24 et 25 novembre 1772).

Les commissaires du Roi, craignant que ces discussions ne prolongeassent outre mesure la session, font alors savoir à l'Assemblée que « l'intention de Sa Majesté est que les Etats ne demeurent pas assemblés au delà du terme de trois mois à compter du jour de l'ouverture, ce délai étant plus que suffisant pour vaquer aux affaires pour lesquelles ils ont été convoqués ». Les Etats enregistrèrent cette déclaration « sous toute réservation du droit » (Séance du 15 décembre 1772).

L'ordre de la Noblesse avait fait, malgré ces protestations, intervenir dans la salle des séances les sieurs Rinquin de Guermeur et Meurie, notaires à Morlaix, pour prendre acte de son avis dans les discussions précédentes. Un arrêt du conseil royal annula l'acte de la Noblesse et interdit toutes fonctions aux deux notaires (Séance du 18 janvier 1773).

Les Etats firent fond d'une somme de 3.000 livres en faveur de M. de La Chalotais, exilé ; puis d'une somme de 6.000 livres pour la pension de son fils M. de Caradeuc, pour les années 1773 et 1774, à raison de 3.000 livres par an, et d'une autre somme de 21.000 livres pour sa pension des années 1766 à 1772 (Séance du 18 janvier 1773). Ces pensions avaient été supprimées par des arrêts précédents du conseil du Roi ; mais grâce à l’intervention du duc de Duras, précédemment gouverneur en Bretagne, elles venaient d'être rétablies (Séance du 11 novembre 1772).

***

Notons quelques autres incidents qui marquèrent ces états de Morlaix.

Il y avait dans la Province une tendance à ériger de nouvelles baronnies. Les seigneurs de La Hunaudaye, de Coetmen et de Pontchâteau avaient de ces prétentions contre lesquelles les Etats chargèrent leurs députés en Cour de s'opposer (Séances des 11 et 18 novembre 1772).

L'évêque de Saint-Brieuc présenta une requête des habitants de l’île de Molennes qui « eu égard à leur misère et à l'utilité dont ils sont pour la marine et pour le commerce » en servant de pilotes aux navires, « demandaient le privilège de loger annuellement et de partager entre eux, suivant le besoin de chacun, le nombre de barriques de vin et d'eau-de-vie qu'il plairait aux Etats de fixer, et sans être tenus de payer aucuns droits ». — Les Etats écoutèrent favorablement cette requête. Ils accordèrent, à titre de charité, aux habitants de Molennes, le même traitement qu'à ceux de « l'isle des Saints » (l'île de Sein), c'est-à-dire la liberté aux habitants de l’île de Molennes de loger annuellement et de partager entre eux, le nombre de 30 barriques de vin et de 2 pipes d'eau-de-vie pour chacune des années 1773 et 1774 (Séance du 16 décembre 1773).

Les Etats arrêtèrent ainsi qu'il suit les conditions de la place de leur maréchal des logis [Note : « Le maréchal de logis est chargé de pourvoir au logement de tous les membres de l'Assemblée qu'il marque à la craye dans toutes les villes où il plaît au Roy de convoquer les Etats, hors dans les villes de Rennes et Nantes où la craye n'a pas lieu » ARCH, DÉP. D'ILLE-ET-VIL. : Dictionnaire (ms.) de l'administration de la Bretagne] :

ART. I — Nul ne pourra aspirer à la place de maréchal de logis des Etats qu'il ne soit originaire de la Province.
ART. II. — Après qu'il aura été élu par les Etats [Note : D'après le Dict. de l’adm., c'est au gouverneur de la Province qu'appartenait cette nomination, au moment où il fut composé, vers 1765], il prêtera le serment à la manière accoutumée.
ART. III. — M. le Procureur général, syndic en cour, instruira le plus tôt possible le maréchal de logis du temps et du lieu où les Etats seront convoqués. Il sera tenu de s'y rendre quinze jours au moins avant leur ouverture, à l'effet d'arrester des logemens pour tous ceux qui ont droit d'y assister.
ART. IV. — Il s'adressera au maire de la ville où les Etats seront convoqués pour en avoir un état exact de tous les logemens convenables.
ART. V. — Le maréchal de logis marquera et numérotera les appartemens qu'il jugera propre à loger les membres des Etats, et dès lors les propriétaires ou locataires des maisons ne pourront, sous quelque prétexte que ce soit, en disposer en faveur de tous autres qui n'auraient pas droit d'assister à l'assemblée.
ART. VI. — Il prendra des appartemens chez tous les habitans indistinctement, exceptant les personnes véritablement privilégiées, qui ne pourront néanmoins jouir de leurs exemptions en cas de foule.
ART. VII — Aucun habitant ne pourra s'exempter de loger, sous prétexte qu'il n'aurait jamais affermé d'appartement à personne.
ART. VIII. — Il ne pourra arrêter de logement que pour les personnes qui auront droit de séance à l'assemblée des Etats.
ART. IX. — Les membres des Etats ayant droit d'être logés à la craye, il se conformera aux ordonnances de Sa Majesté, concernant les logemens à la craye pour la maison du Roi.
ART. X. — Ne pourra, le Maréchal de logis prétendre aucune retribution des particuliers fournissans des logemens, ou que seraient dans le cas d'en fournir.
ART. XI. — Tous selliers, carossiers ou autres qui auroient des remises ou des lieux propres à loger des voitures, ne pourront exiger des membres des Etats pendant le cours de la tenue plus de quatre livres par mois pour loger chaque voiture à deux roues, et au-delà de six livres par chaque voiture à quatre roues.
ART. XII. — Le Maréchal de logis présentera la liste des logemens à chacun des membres des Etats qui le requérera.
ART. XIII. — Le Maréchal de logis se conformera à tous et chacun des articles du présent règlement, sous peine de destitution.

Le 30 décembre, les Etats accordèrent une pension annuelle de 300 livres à Jean Causeur, de Plumoguer, âgé de « plus de 131 ans », accablé d'infirmités et de misère [Note : D'après Cambry, Voyage dans le Finistère, t. III, p. 186, ce vieillard mourut à 137 ans].

Le mardi 5 janvier 1773, on célébra à neuf heures, dans l'église des Pères Jacobins, la messe anniversaire en l'honneur des Saints Anges Gardiens, fondée à l'occasion de l'attentat commis contre Louis XV, le 5 janvier 1757.

Armand-Louis de Sérent, acquéreur de la baronnie de Malestroit, ayant été reconnu, d'après le règlement de 1770, être en possession des qualités requises pour présider l'ordre de la Noblesse sans élection, les Etats ordonnèrent qu'il prit place sur le banc des barons (Séance du 7 janvier 1773).

Dom Robert Boniface, prieur titulaire de Châteaulin, proposa aux Etats l'abandon de son droit de péage sur le pont de Châteaulin, pour permettre à ceux-ci d'élargir et de reconstruire ce pont « avec la solidité nécessaire au service de la grande route qui s'y trouve établie ».

Mais les Etats n'acceptèrent pas cette requête (Séance du 8 janvier 1773).

Le 8 janvier 1773, « sur la requête du Sr Ogée qui a fait graver et qui présente aux états la Carte générale de Bretagne, les Etats ont ordonné, et ordonnent qu'il sera fait fond dans la présente tenue de la somme de 4.000 liv. qui sera payée audit Sr Ogée pour 500 exemplaires de cette carte qu'ils ont acceptée, sur le pied de 8 liv. chacune, et qui seront en conséquence remis au greffe des Etats pour y être distribués, savoir un exemplaire seulement à chacun des membres des trois ordres qui se présenteront à cet effet et en donneront eux-mêmes leur reçu pendant le cours de la présente tenue ; un exemplaire pour chacun des neuf chapitres de la province, un exemplaire pour chacune des villes et communautés députant aux Etats ; un exemplaire pour chacun des neuf bureaux de la commission intermédiaire ; un exemplaire à chacun des officiers des Etats, et un exemplaire au Prieur des Jacobins de cette ville. Ordonnent les Etats qu'après cette distribution ainsi faite, le Sr Ogée disposera à son profit du restant desd. cinq cens exemplaires de cette carte ».

***

Vient ensuite une série de requêtes concernant les cours de médecine.

Les Etats renvoyèrent « à des temps plus heureux » la proposition du sieur Louis, lieutenant du premier chirurgien du Roi à Morlaix, tendant à ouvrir tous les ans pendant six mois, un cours public d'accouchement, en français et en Breton, afin de former des élèves pour les paroisses des différens évêchés de la Basse-Bretagne qui lui seront indiqués.

Mais sur la requête du sieur Brionne, ils rétablirent le cours public de démonstration pour les accouchements fondé antérieurement en la ville de Rennes ; ils ordonnèrent même un fonds de 2.000 liv. au profit de ce chirurgien, afin de lui permettre d'ouvrir un pareil cours « dans les petites villes ou bourgs de l'évêché de Rennes que Messieurs les Commissaires intermédiaires de Rennes lui indiqueront successivement et où ses leçons seront le plus utiles ».

On rejeta la requête du sieur Boueslard de La Touche, médecin à Morlaix, qui sollicitait l'établissement en cette ville « d'une chaire de médecin-professeur en langue française, et proposait différens autres établissemens relatifs a la chirurgie et la pharmacie ».

Les Etats renvoyèrent « à des temps plus heureux » le rétablissement de l'école publique de dessin à Rennes (Séance du 9 janvier 1773).

Le 11 janvier 1773, le comte Desgrées, président élu de l'Ordre de la Noblesse, étant tombé malade, le comte de la Fruglaye fut désigné pour le remplacer.

A cette séance, les Etats chargent leur procureur général syndic « de demander la confirmation de la sentence de police de Morlaix, du 18 mars 1767, qui rejette la saisie faite sur Jean Abgrall, tanneur, par les abbés cordonniers de cette ville, de 20 douzaines de peaux de veau tannées, tant par nullité que par défaut de qualité, avec main-levée desdits cuirs saisis ; » et, de plus, la défense « à la confrairie des cordonniers, conformément à l'édit de 1759, de troubler les tanneurs par aucune visite ou inspection, ni rien exiger d'eux pour prétendues visites directement ou indirectement » (Séance du 11 janvier 1713).

Le sieur Le Brigant, avocat, offrit aux Etats « l'hommage de son travail et de la découverte qu'il prétend avoir faite de la langue primitive, et il les prie d'accepter la dédicace de son ouvrage ». Les Etats chargèrent « la commission intermédiaire d'examiner ou de faire examiner le manuscrit et d'en accepter ou refuser, au nom des Etats, la dédicace, si elle le jugeait convenable ».

Mais la commission repoussa la demande de cet original, que se donnait le titre d' « architecte de l'arche de Noé ».

On remit à M. de la Villéon, héraut des Etats, la somme de 7.104 liv. 1 sol 9 deniers, représentant les frais de construction du théâtre et des autres décorations de la salle où se tenaient les Etats (Séance du janvier 1773).

Le 17 janvier, les trois Ordres assistèrent en corps dans l'église Saint-Mathieu de Morlaix, au sacre de Emmanuel-Louis de Grossoles de Flamarens, évêque de Quimper.

Le 10 janvier, au moment où on allait élire les députés en Cour, c'est-à-dire les trois membres des Etats qui devaient aller traiter auprès de Louis XV les intérêts de la Bretagne, le duc de Fitz-James, commandant en chef de la Province et premier commissaire du Roi, vint incognito dans la salle des séances. Il proposa aux Etats, au nom du duc de Penthièvre, gouverneur de la Bretagne, de nommer députés Mgr de Hercé, évêque de Dol, le comte Desgrées, président de la Noblesse, et Léon de Tréverret, président du Tiers. Les Etats accédèrent à ce voeu.

Dans le courant de la session, les Etats firent différentes gratifications et aumônes.

Au duc de Fitz-James, ils firent don d'une somme de 30.000 livres, en considération de ce qu'il remplissait pour la première fois la place de premier commissaire de Sa Majesté, et aussi, ajoutèrent les Etats, « en reconnaissance des soins qu'il prend pour le bien des affaires de la Province ».

Lorsque la femme du commandant accompagnait son mari dans la ville où se tenaient les Etats, la coutume était de la gratifier d'une somme de 15.000 livres « comme une marque de leur attachement ». Une députation ayant à sa tête Mgr. de Hercé, évêque de Dol, fut chargée d'aller prier la duchesse de Fitz-James d'agréer ce don. Il se produisit à ce propos un incident assez curieux. La duchesse assez embarrassée avait prié l'évêque de Dol de lui éviter une longue réponse. Le prélat s'engagea gracieusement à lui donner satisfaction.

Connaissant quelque peu la langue bretonne, qu'il avait étudiée pour faciliter ses rapports avec les paroisses de son diocèse enclavées en Basse-Bretagne, Mgr. de Hercé se plut à introduire au milieu de son compliment quelques phrases en breton. La duchesse naturellement n'y comprit rien, mais elle s'en égaya beaucoup, et sut gré au prélat de lui avoir donné d'une façon si spirituelle l'occasion d'une facile et courte réponse.

Le lendemain, en pleine séance, deux des membres de la noblesse, qui faisaient partie de cette députation, attaquèrent vivement Mgr. de Hercé « sur ce langage inusité en pareil cas, et sur le silence qu'il avait gardé touchant ce qu'il comptait dire à madame la duchesse de Fitz-James ». A cette attaque inconvenante, l'évêque de Dol répondit « avec vigueur et fermeté », et termina en déclarant qu'il ne répondrait pas davantage « à des particuliers qui n'avaient pas le droit de lui demander compte de sa conduite ». L'ordre de la Noblesse se garda bien de soutenir la sortie déplacée de ses deux membres ; ce fut heureux, car les ordres de l'église et du Tiers qui marquaient leur mécontentement, eussent à leur tour protesté violemment contre l'inconvenance des deux grincheux (Ch. Robert, Urbain de Hercé, p. 127-128).

Selon l'usage, on fit aux présidents de l'Eglise et, de la Noblesse une gratification de 15.000 livres, et au président du Tiers, une somme de 10.000 livres, « pour leur première présidence dans une Assemblée ordinaire ». De plus, les Etats, lit-on au procès-verbal, « considérant les dépenses excessives qu'ont occasionné à Messieurs les présidents des ordres leur éloignement, les frais de transport de leurs effets, les réparations, leur établissement en cette ville, la cherté des vivres [Note : Les présidents tenaient table ouverte], ont accordé et accordent, sous le bon plaisir du Roi, pour gratification extraordinaire, » 30.000 livres à chacun des présidents de l’Eglise et de la Noblesse, et 20.000 livres au président du Tiers (Séance du 7 janvier 1773). Les mendiants avaient coutume d'accourir de tous les points de la Bretagne dans la ville où les Etats étaient convoqués. Pour éviter leur importunité, on avait pris l'habitude de les renfermer dans l'hôpital de la ville et de leur faire distribuer une certaine somme. A Morlaix, les administrateurs de l'hôpital reçurent une somme de 1.200 livres pour l'entretien des « pauvres mendiants » durant la session (Séance du 20 octobre 1772).

Le prieur des Jacobins de Morlaix reçut la somme de 4.700 liv. à titre de remboursement de toutes les dépenses faites dans l'église du couvent pour la mettre en état de former la salle de l'Assemblée ; plus une somme de 2.000 liv. pour les débris de ladite salle, et enfin tous les bois et planches qui avaient servi à la construction du théâtre.

Les Etats firent également don aux capucins et aux Récollets de Morlaix d'une somme de 300 livres (Séance du 19 janvier 1773).

Selon l'ordre que leur en avait fait donner le Roi, Nosseigneurs les Etats ne prolongèrent pas leurs séances au-delà des trois mois fixés ; mais ils ne cédèrent pas d'un jour : ils s'étaient réunis le 20 octobre 1772, ils se séparèrent le 20 janvier 1773.

(Charles ROBERT).

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