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MORLAIX AU MOYEN-AGE

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« Moi, Hervé, vicomte de Léon, j'ai donné à Dieu et à St. Martin, ainsi qu'aux moines du grand monastère (voyez plus bas) près de mon château de Morlaix, un terrain pour construire un monastère, un cimetière et un bourg, depuis la limite de séparation entre mon bourg et celui d'un certain Rehalardre. Je leur donne également mon bourg, avec les hommes qui y sont, etc. Sont témoins de cet acte Galon, évêque de Léon, Grallon, fils d'Ehoarn, Rehalardre et Evan son frère, Hervé frère bâtard du vicomte, Rodand, fils de Guihien, Harnigon, Evan le Chapelain, Buhic, fils de l’évêque. Fait l'an 1128 de l'incarnation du Seigneur, le 5 des nones de Mars. Sceau du vicomte Hervé + Sceau de Guyomar, son fils +. Sceau d'Eudon. [Note : Ego Herveus Leonensis Vicecomes dedi Deo et S. Martino nec non monachis majoris monasterii juxta castrum meum quod vocatur Mons-Relaxus, terram ad consiruendum monasterium cimiterium etiam et burgum, à loco illo ubi separatur burgus cujusdam Rehalardri à burgo meo, idem meum burgum do eis cum meis hominibus qui ibi sunt, etc. Hujus rei testes sunt Galo Leonensis episc. Gradilon filius Ehoarni, Rehalardras et Ewarnus frater ejus. Herveus frater bastardus vicecomitis, Rodandus fil. Guihien. Harnigon. Evanus capellanus. Bubic filius episcopi. Actum anno ab incarn. Domini MCXXVIII, videlicet V. Non. Martin. Signum Hervei vice comitis. + Signum Guihomar filii ejus. + Signun Eudonis].

Au nom du Père et du Fils, et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il. Moi Galon, évêque de Léon, et Radulfe, évêque de Tréguier, nous voulons faire savoir à tous que nos frères les moines du grand monastère sont venus en notre présence demandant que le don que leur avait librement accordé Hervé, vicomte de Léon, leur fut par nous concédé et confirmé de notre autorité épiscopale. Ainsi tout ce que les moines ont ou doivent avoir dans l'église de Saint-Martin de Morlaix, moi Galon, évêque de Léon, je le leur accorde et concède, réserve faite des droits de l'église léonaise : et semblablement la chapelle de Sainte-Marie-Magdelaine et celle de Saint-Augustin, avec tout ce qui leur appartient. Moi, Radulfe, évêque de Tréguier, je leur accorde et concède, réserve faite du droit épiscopal, tout ce que ces moines ont ou doivent avoir du fief du vicomte Hervé : et dans le concile de Dol, qui a été tenu sous le vénérable Légat Gérard d'Angoulême, l’an de l'incarnation 1128, j'ai investi les mêmes moines par l'anneau. Semblablement, moi, Galon, évêque de Léon, j'ai dans ce conseil même, investi les mêmes moines, par ma mitre, des susdites donations. Sceau de l'évêque Galon. + Sceau de l’évêque Radulfe, sceau de l'évêque Robert, + Sceau d'Aimeric, sceau d'Israhel. [Note : In nomine Patris et Filii et Spiritus sancti. Amen. Ego Galo Leonensis et RadulfusTrecorensis episc. notum fieri volumus quod fratres nostri majoris monasterii monachi præsentiam nostram adierunt, orantes ut donum quodeis Herveus vicecomes Leonensis libere dederat, concederemus et episcopali auctoritate firmaremus. Quicquid igitur in ecclesia S. Martini de Monte-Relaxo monachi habent vel habituri sunt, ego Galo Leonensis epic. salvo jure Leonensis ecclesiæ dono eis et concedo. Similiter et capellam sanctæ Mariæ Magdalenæ et capellam sancti Augustini cum omnibus ad eos pertinentibus. Ego verô Radulfus Trecorensis episcopus dono eis et concedo salvo jure Episcopali quicquid de fevo Hervei vicecomitis idem monachi habent vel habituri sunt : et in concilio Dolensi quod sub venerabili Gerardo legato Engolismensi celebratum est anno ab incarnatione Domini MCXXVIII per annulum meum ipsos monachos investivi de hoc. Similiter ego Galo Leonensis episcop. per mitram meam eosdem monachos in ipso concilio de supra dictis donis investivi. S. Galonis episcopi. + Signum Radulfi episcopi S. Robertiepiscopi. + S. Aimerici. S. Israhel. (Marmout.)].

« Moi, Hervé, par la grâce de Dieu, comte de Léon, pour le salut de mon ame et de celles de tous nos parents tant prédécesseurs qu'à venir, j'accorde, je concède et confirme par l'apposition de mon sceau, le don qu'a fait à perpétuité à Dieu, à Saint-Melaine et à ses moines, mon père, le vicomte Guyomar : — à savoir , l'église de Sainte-Marie de Morlaix, située dans la tribu de Jean et tout le domaine de cette terre, et tout ce qui est sous la jurisdiction dans cette terre, depuis le four des moines jusqu'à la vallée dite Dolahan, fief que les Godiens, possesseurs du lieu, ont abandonné en la présence de mon dit père et de plusieurs autres qui se trouvent plus spécialement désignés dans la charte rédigée à ce sujet, et qu'ils ont librement et sans violence accordé et concédé. Lesdits moines ont en outre reçu du susdit vicomte, pour l'usage de leur maison, de leur four et de leur chaudière où ils préparent le sel, ce qu'il leur faudra de bois sec de sa forêt nommée Comburium, son moulin, deux parties de la dime de la tribu Inevoin, la moitié de la dime de miel du pays de Léon et de Castel-Paul, et toute la Chapellenie de Borret, qu'à la prière du vicomte qui leur faisait ce don leur a accordée et confirmée Salomon, évêque de Léon. J'ai aussi ajouté aux dons de mon père pour le salut de son âme, la redime des dîmes que j'ai à percevoir dans tout le Léonais : et je leur ai accordé et confirmé tous ces dons avec ceux qu'ils pourront avoir dans l'avenir de mon consentement et de celui de mes barrons, afin qu'ils le possèdent librement et paisiblement. Le tout conclu en présence de mes fils, savoir E. Le Blanc et Hervé, alloué de l'église de Léon, qui ont vu ce don et l'ont confirmé de leur pleine volonté. Témoins, moi, Hervé, mes deux fils, le fils de Martin, R. de Leveus, E. fils de l'archidiacre Glenio, Cudoret, fils de Gralen (Grallon), G. Le Roux et Monian son frère, le fils d'Otun, le fils de Recalazre (Rehalardre), R. et Hanevi, Buzouarn, Tanet. Ceci a été fait au temps du prieur B.... [Note : Ego H. Dei gratia Leonensis comes, pro salute animæ meæ et pro animabus omnium parentum meorum tam antecessorum quam successorum do et concedo et sigilli mei impressione confirmo donum quod donavit pater meus G. vicecomes, Deo et saneto Melanio et monarchis ipsius perpetualiter habendum, scilicet ecclesiam sanctæ Mariæ apud montem Relaxum in plebe Johannis constitutam et totum dominium terræ et quidquid sui juris erat in tota terra illa, a furno videlicet monachorum usque ad vallem quæ vallis Dolaan dicitur, quod donum allodiares ipsius terræ Godienses scilicet quittaverunt in prœsentia prædicti patris mei et plurimorum aliorum qui in carta inde facta plenius annotati reperiuntur, libere et quiete dederunt et concesserant. Dedit etiam jam dictus vicecomes prædictis monachis ad usum domus suæ et furni et sartaginis sui ubi sal conficiebatur sufficientiam de siccis lignis quæ in silva ipsius Comburium vocata reperiuntur, et molendinum suum, et duas partes decimæ de plebe Inevoin, et medietatem decimæ mellis sui de pago Leonensi et de pago Castelli et totam capellaniam de Borret quam eis precatu vicecomitis hoc donum facientis concessit et confirmavit Salomon Leonensis episcopus. Addidi etiam donis patris mei pro salute ipsius animæ redecimam decimarum mearum per totam Leoniam et hæc omnia et quidquid acquirere poterunt dono meo vel baronum meorum libere et quiete habenda concessi et confirmavi in præsentia filiorum meorum E. scilicet Albi et H. Leonensis ecclesiæ electi qui hoc donum viderunt et gratantes concesserunt. Ego H. et ipsi duo filii mei testes et filius Martin, et R. de Leveus T. et E. filius Glenio archidiaconi T. Cudoret filius Gralen T. G. Rufuls et Monianus frater ejus testes, E. filius Otun T. H filius Recalazre T. R. et Hanevi T. Buzouarn T. R.Tanet T. Hoc fuit factum in tempore B, Prioris (S. Melan.)].

« Cette relation authentique et véritable que voici est soumise à la vue et à la connaissance de tous. A tous les fidèles qui liront cette charte, moi, Yves, évêque de Léon, je fais connaître qu'il s'était élevé une discussion entre les baillis du duc Geoffroy de Bretagne et les moines de Saint-Melaine, au sujet de ceux qui venaient cuire au four situé dans le bourg des moines de Morlaix. Les baillis disaient que les hommes du comte qui sont sur la paroisse de Saint-Melaine ne devaient cuire leurs pains que dans le four du comte : et les moines répliquaient qu'ils avaient là un droit et une concession faite par le vicomte Guyomar, par son fils Hervé, par Guyomar, fils d'Hervé et par Nobilis son épouse. Un conseil de notables personnages ayant été réunis, les baillis dirent aux moines que, s'ils pouvaient prouver ce fait par des témoins probes et honnêtes, on leur laisserait la paisible jouissauce de ce droit. C'est pourquoi les moines firent paraître le plus qu'ils purent d'hommes notables et âgés... qui en notre présence ont attesté par une déposition authentique, que tous les hommes qui sont en la paroisse Saînt-Melaine doivent cuire leur pain au four des moines, et que ces derniers le tenaient de la générosité du vicomte Guyomar, d'Hervé son fils, de Guyomar, fils d'Hervé et de Nobilis son épouse. Et pour que cette discussion ne se réveille plus à l'avenir, nous avons confirmé de l'autorité de notre sceau, ce que nous avons vu et entendu : et Derrien, alors bailli, l'a attesté et revêtu de son sceau. Les témoins sont, moi, Yves, évêque de Léon, Hervé et Sabioc, clercs, Salomon, chapelain, Haraon, sénéchal, et beaucoup d'autres. [Note : Omni visui et auditui præbenda est auctoritas et veridica relalio. Universis fidelibus banc scripturam legentibus ego Yvo Leonensis episcopus notifico, quod quædam contentio erat inter ballios Gaufredi ducis Britanniæ et monachos sancti Melanii super coctoribus furni, quod est in burgo monachorum de Monte-Relaxo. Dicebant enim ballii homines comitis qui sunt in parrochia sanct. Melanii, panes suos coquere nisi in furno comitis : monachi vero acclamabant hoc de jure suo esse et de dono Guiomari vicecomitis et Hervei filii ejus et G. filii Hervei et Nobilis uxoris suæ. Tandem concilio virorum bonorum habito data est à balliis optio monachis quod si possent hoc probare antiquorum hominum attestatione, et in pace eis dimitteretur. Monachi itaque adduxerunt quam plurimos antiquos et nobiles viros... Qui in præsenti nostra veraciter testati sunt omnes homines qui in parrochia sancti Melanii de Monte-Relaxo sunt, debere panes suos in furno monachorum coquere, et hoc habere de dono Gui. Vicecomitis, Hervei filii ejus et Gui. filii Hervei et Nobilis uxoris suæ. Et ut hæc in posterum lis sopiatur, sigilli nostri auctoritate, quod vidimus et audivimus, munivimus : et ipse Derian ballius, qui tunc temporis erat, sigilli sui munimine attestatus est. Testes sunt hi ego Yvo episcopus Leonensis, Herveus et Sabiocus clerici, Salomon capellanus, Hamo senescallus, et multi alii (S. Melan.)].

A nos très chers frères et amis en Jésus-Christ le Seigneur abbé et les frères du Relec, les frères du chapitre du grand monastère (Marmoutiers) et leur humble ministre frère Hervé, salut et prières. Aimant votre ordre d'une pieuse affection, très chers frères, nous vous donnons à titre de possession perpétuelle notre terre de Lanvan en Ploherin (Lonven en Plourin), que nous avions en qualité de rente annuelle : à la condition seulement que vous payiez tous les ans au prieur de St. Martin de Morlaix cinq sous sur cette terre le jour de la Nativité du Seigneur. Fait en l'an MCLXXXIV. » [Note : Carissimis in Christo fratribus et amicis D. Abbati et fratribus de Relet fratres capituli majoris monasterii et eorum humilis minister frater Herveus salutem et orationes. Religionem vestram pio affectu diligentes, fratres carissimi, terram nostram quæ dicitur Lanvan Ploherin consistentem sub annuo censu vobis in perpetuum possidendam donamus, ita videlicet quod singulis annis priori sancti Martini de Monte-Relaxo quinque solidos de terra illa in nativitate Domini reddalis... Actum anno MCLXXXIV (Marmout)].

Comme on voit, les premiers monuments de l'histoire authentique de Morlaix sont des donations ecclésiastiques : elles étaient très nombreuses à cette époque, il serait trop long d'en déduire ici la raison. A l'aide de ces monuments et des notes éparses que nous pouvons recueillir dans l'histoire du temps, nous pouvons déjà reconstruire, d'une main assez assurée, la topographie de la cité naissante au douzième siècle tout entier et même jusqu'à la fin du treizième. [Note : Chronologie de cette époque (992-1212) : Comtes de Léon : Presque tous les comtes ou vicomtes de cette famille portèrent les noms d'Hervé et de Guyomar. Depuis Elven, longue lacune, jusqu'à : 1. Guyomar I, et Hamon son frère : ils vivaient en 1016 et 1029. — 2. Morvan II, prince guerrier et malheureux : vivait en 1069. — 3. Allain, et Alfred son frère. — 4, Guyomar II, mort en 1103, — 5, Hervé II, et un frère illégitime vivaient en 1096, 1128. — 6. Guyomar III, époux de Nobilis. — 7. Hervé II, mort en 1169 ; un frère nommé Guyomar, vivant en 1164. — 8. Guyomar IV, grand guerrier : assassine son frère Hamon, évêque de Léon, dans les montagnes de Feiz-Gar : il avait un autre frère qui laissa trois fils illégitimes : meurt en 1179. — 9. Guyomar V et son frère Hervé, princes guerriers ; ils avaient un frère et deux sœurs (Adam, Guen, Aliénor, peu connus). Guyomar V mourut en 1208. Seigneurs de Tréguier : 1. Le fameux Eudon de Penthièvre, mort en 1079. — 2. Etienne de Penthièvre, époux d'Havoize, mort en 1137. — Après lui démembrement : le comté de Penthièvre échoit à Geffroy Botherel, Tréguier à — 3 Henry, qui vivait en 1151. — 4. (comte de Tréguier) Allain, mort en 1212].

Le château dont parle les chartes couronnait à cette époque les hauteurs qui font presque face à celles du château ducal, postérieur au premier : on peut encore aujourd'hui en suivre l'emplacement dans les pâtures qui dominent la ville, depuis la venelle du Créou jusqu'à la rue des Fontaines. Au pied de ces fortifications s'étendait la ville proprement dite, grosse et laide bourgade que les annnalistes latins nommaient indifféremment Morlæum et Monsrelaxus, les français, Montrelays, Montrelez, les bretons, Montroulez et non Morlaës (grand pertuis), comme l'ont voulu quelques-uns. Cette bourgade enceinte d'un rectangle irrégulier de remparts datant d'une époque inconnue, devait être, comme toutes celles du temps, mal percée, malsaine, composée en presque totalité de ces maisons de bois dont on peut encore y voir quelques débris curieux. Les faubourgs ou burghs (burgi), longs bras qui tenaient à peine au corps de la ville, se nommaient Saint-Mathieu, Viniec, Marcheix (Marhallah), Saint-Martin, Saint-Melaine, Recalazre (du nom d'un ancien Seigneur du lieu), Borret. Dans cette agglomération, déjà importante, on voyait un moulin, deux fours à ban, l'un au duc ou au vicomte, l'autre aux moines du prieuré de Saint-Melaine : une chapellenie à Bourret ou Borret, un prieuré déjà mentionné, relevant de Saint-Melaine de Rennes : une église paroissiale, sous l'invocation de Saint-Mathieu, prieuré relevant de l'abbaye de Saint Mahé, Finistère, et fondé par Guyomar IV, qui paraît l'avoir distrait du territoire de Plourin [Note : Dictionnaire d'Ogée (1843), voyez Morlaix], un beau palais où séjournait le prince suzerain ; et uue église (Saint-Jacques) d'une antiquité très reculée. La croix dite de la Lanterne, existait probablement dès cette époque : on y allumait une lumière toutes les nuits, et il était de tradition que du jour où cette lumière s'éteindrait, la ville serait submergée [Note : Éteinte en 1793 : elle était dans la rue des Fontaines]. Les chartes les plus anciennes font encore mention de deux chapelles, Saint-Augustin et Sainte-Marie-Magdelaine, outre celle de Saint-Jean-Baptiste, en face de l'enceinte du Parc-an-Duc.

Ce Parc-an-Duc était un vaste parc situé au sud-est de la ville, et où les vicomtes de Léon, les ducs de Bretagne et un roi d'Angleterre se donnèrent bien des fois le divertissement de la chasse. Il fut entouré d'un mur d'enceinte par Jean II ; et à peu près à cette époque, le duc y avait accueilli les Jacobins, leur avait fait don d'un manoir situé dans le faubourg Viniec, avec des jardins qui s'étendaient le long du Jarlo, et au-delà de cette rivière, il leur avait concédé la chapelle Saint-Jean-Baptiste, dont ils firent le fond d'un bas côté de leur nouvelle église. — Nous parlerons plus tard de la chapelle Sainte-Véronique, et de l'hôtel du Relec, dans le faubourg Saint Melaine, possédé par les moines de ce nom.

Si nous sortons de la ville, en longeant les deux rives de la rade Hanterallen, nous trouvons un pays couvert de forêts nombreuses et presque vierges, nommément celles de Comburium (Cuburien. — Voyez la donation d'Hervé de Léon) qui occupaient une grande partie du plateau de St. Martin, depuis l'embouchure du Donan jusqu'à la ville : le bois sec que l'on en retirait annuellement, était à lui seul, un article d'une valeur considérable (Cuburien. — Voyez la donation d'Hervé de Léon). Depuis le Dourduff jusqu'au ruisseau de Trividy, une notable portion de la tribu Johan [Note : Ploujean. Plebs, tribu et paroisse] appartenait à une autre forêt dite du Stivel, probablement percée de vastes éclaircies au centre et au nord-ouest. Entre ces deux forêts serpentait le chenal, noir et vaseux, couvrant, à marée haute, une nombreuse ligne de palues qui n'ont définitivement asséché qu'à une date très récente [Note : Palues de Marant, Nécoat, Keranroux. St. François, Lannuguy, Quirio, Trebez, etc.]. Quelques-unes des vallées profondes qui le coupent à angles droits avaient déjà des noms particuliers qu'elles ont perdu depuis, comme celle de Dolaan que d'autres lisent Dolstan ou Daoustank, deux étangs : il y avait effectivement deux moulins alimentés par des étangs sur ce faible cours d'eau, et l'on voit encore près de Ty-Dour, la chaussée d'un de ces étangs. Il est facile de comprendre comment Traondolstan a fait Troudoustein [Note : Voyez les actes précités]. Un fief important s'étendait depuis ce même ruisseau jusques aux forêts qui couvraient le centre et le sud-ouest de la tribu Johan : il appartenait à la famille des Godiens, et il est à peu près certain que c'est le même que celui de Kerscoff [Note : Voyez les actes précités]. Les moines de St. Melaine possédaient une saline importante dans la rade [Note : Voyez les actes précités].

Cet aperçu topographique, aussi complet qu'il est permis de l'exiger pour une époque aussi peu connue, nous a éloigné un instant de la série des faits qui commencent à illustrer cette histoire. C'était le temps où la féodalité, comprimée par des princes despotes et belliqueux, rudement éclaircie par la hache des Northmans, constituait rapidement le gigantesque système dont la devise, Nulle terre sans seigneur, est le fond de toutes nos législations provinciales. Nous avons vu que les sires de Léon, sous les titres successifs de comtes et de vicomtes, furent les premiers possesseurs de la cité, quoiqu'elle fût réellement située dans le territoire de Tréguier. C'étaient des princes actifs, guerriers et turbulents, généralement malheureux dans leurs entreprises militaires : Guyomar IV s'étant attiré la colère du duc Geoffroy et la confiscation de Morlaix (1177), le prince Léonais leva des troupes, et suivi de son frère Hervé, il emporta d'assaut la place en litige. Ceci se passait en 1186 : un an après, Henry II Plantagenest, roi d'Angleterre et tuteur du duc de Bretagne, vint en personne la reprendre.

Le siège dura neuf semaines ; l'attaque et la défense furent menées avec une égale vigueur. Les faubourgs St. Martin, St. Nicolas et Parc-an-Duc étaient les trois points les plus vaillamment disputés : l'armée anglaise occupait les hauteurs du Créou, du Merdy et du Portzmeur, et les divers corps communiquaient entreéux par un pont jeté sur le Queffleut devant Traonar-Vilin. Écrasée par les projectiles qui pleuvaïent sur elle, décimée par une cruelle famine, la place se rendit. Henry II en prit possession au nom du duc Arthur, et resta quelque temps à Morlaix pour se livrer à son aise au plaisir de la chasse.

D'anciens annalistes rapportent qu'un jour que le roi d'Angleterre chassait dans la vaste enceinte du Parc-an-Duc, un énorme sanglier, poursuivi par la meute royale, se retourna brusquement contre les chasseurs et se rua sur le roi lui-même, qui ne fut sauvé que par un hasard providentiel. Un jeune seigneur breton se jeta l'épieu à la main au-devant de la bête et l'abattit : Henry ne crut pouvoir mieux reconnaître ce bienfait qu'en permettant au jeune homme de prendre pour armoiries une hure de sanglier. Ce trophée héraldique se voit encore sur les armes des Salaün de Lesven [Note : En Plougonven : aujourd'hui les Salaün de Kertanguy] qui, sur la foi d'une tradition de famille, se regardent comme descendants du sauveur d'Henry II.

Appelé dans le Léonais, par l'insurrection des deux princes indigènes, le roi d'Angleterre se hâta de quitter Morlaix, et prenant la route de St. Pol-de-Léon, rasa le château fort des deux vicomtes au confluent du Donant et de la rade. Ce château, qui se nommait alors comme aujourd'hui Castel an-Trebez (du trépied), n'est plus qu'un amas de ruines que l'on distingue à peine maintenant au sommet de l'aride promontoire qui forme l'extrême limite de Taulé du côté du levant. En outre, le Léonais, et principalement les riches campagnes du Minihy [Note : Minihy, lieu d'asile : on donnait ce privilège non seulement à des églises ou à des monastères, mais à des paroisses entières dont le chef-lieu était presque toujours une ville épiscopale. Le Minihy de Saint Pot comprenait la paroisse entière, avec les trêves de Roscoff, Santec et Trefgondern : celui de Lanmeur, la paroisse de Lanmeur avec la trève de Locquirec. Le Pont-Minihy, sur la route de Lannion, entre l'Hospital-Pell et Kerforniou, rappelle ce privilège qu'avait Lanmeur, comme ayant été dès le cinquième siècle une ville épiscopale], furent la proie du pillage et de l'incendie. « Comme les Anglais mettaient le feu es maisons et villages du Menehy de Saint Pol, un bon homme voua sa maison et tout son bien à Saint Goulven, laquelle, nonobstant la rage des Anglais fut seule épargnée, toutes les autres ayant esté réduites en cendres ». St. Pol-de-Léon fut enlevé, le château rasé, et le pouvoir politique du comte momentanément réduit à rien. Les princes Léonaise se refirent en silence pendant les troubles sanglants qui firent passer la Bretagne, après quelques lueurs fugitives d'indépendance, de la suzeraineté anglaise à la suzeraineté française, par l'avènement du comte Perron (Pierre Mauclerc — 1212). Seulement la principauté fut réduite de moitié, et les seigneurs de Léon, dont Landerneau devint la capitale, ne purent plus porter que le titre de vicomtes.

Pierre Mauclerc et la duchesse Alix paraissent avoir beaucoup affectionné le séjour de Morlaix : ils y avaient un beau palais, où ils reçurent saint Dominique quand il vint leur prêcher la croisade contre les Albigeois. Il y prépara la voie à la fondation d'un couvent de son ordre : et en effet, le 29 juin 1235, appelés par le vœu de la population, le pére provincial de l'ordre et deux dominicains bretons, Olivier et Kerizac, arrivèrent dans la localité, L'an suivant, à pareil jour, neuf de leurs confrères vinrent les rejoindre et logèrent provisoirement à l'hôtel du Relec. La fondation y fut ratifiée en 1237, par l'évêque de Tréguier : le duc accordait pour cette fondation son manoir et ses vergers sur les bords du Jarlo, et les habitants s'engageaient à fournir tous les ans une certaine quantité de blé, laquelle se mesurait dans des pierres creusées pour cet usage et placées sous le portail de la chapelle Sainte Véronique [Note : Voyez plus bas, an 1629].

« L'église fut fondée le jour même de l'Ascension, en 1238. Le marché en fut passé le Vendredy-Saint précédent, ainsi que celuy du monastère, à un architecte de Landmeur.... Le chœur, sa maîtresse vitre et l'excellente rose qu'on y voit, le jubé et les garnitures du chœur, haut et bas, furent bâtis aux dépens d'Alain Minot et de sa femme Amou. La chapelle Notre-Dame, la sacristie et le grand dortoir furent construits des libéralités d'Yves Faranus » [Note : Ms. Daumenil, page 408].

Parmi les bienfaiteurs du couvent, il ne faut pas oublier Julienne Le Borgne, qui fut ensevelie dans la salle du chapitre. Son tombeau, couvert d'une lame de cuivre avec son effigie, portait une épitaphe de quatre vers latins,

Ecce sub hoc saxo, fratrum de Monte-Relaxo
Est sita fundatrix, Juliana Dei veneratrix :
Hujus erat virtus quà pollet femina raro,
Mens sincera, manus larga, pudica caro.

Le corps de Julienne ici fut inhumé :
Ses vertus furent sur la terre,
Sincérité, largesse, chasteté,
Vertus, qu'hélas ! femme n'imite guère.
(Trad. de M. Prévost de la Bouexière)

dont voici la traduction : « Sous cette pierre gît la fondatrice des frères de Morlaix, Julienne, servante de Dieu : elle avait ces vertus que possède rarement la femme : un cœur sincère, une main libérale, un corps chaste et pur ».

En moins de douze ans le couvent fut achevé : Hamon, évêque de Tréguier, dédia solennellement l'église le dimanche après l’octave de Saint Pierre et Saint-Pol. Leduc avait donné aux moines, pour servir aux travaux, un arbre de la forêt de Huelgoët, dont on aurait pu, dit un vieil historien, faire construire trois manoirs.

Il paraît que durant les longs déchirements qui eurent lieu à cette époque dans la Basse-Bretagne, par suite des guerres entre les vicomtes de Léon et les ducs de Bretagne, Morlaix retomba aux mains des premiers : du moins nous voyous dans l'histoire du duché que Jean II achète ou vicomte, ruiné par ses folles prodigalités, la ville et le château de Morlaix, moyennant quatre-vingts livres de rente (1280). Déjà Brest avait été vendu pour une haquenée blanche et six cents livres.

Jean II entoura de murailles l'enceinte du Parc-an-Duc, et fonda, pour servir de chapelle à son château, l'église collégiale de Notre-Dame-du-Mur : il en posa ta première pierre le 15 août 1296, assisté de Geoffroy de Tournemine, évêque de Tréguier, de Guillaume de Kersauson, évêque de Léon, de Thébaud, évêque de Dol, de Guillaume de la Roche-Tanguy, évêque de Rennes, et de Henry, évêque de Nantes. Il avait affecté à cette fondation une somme de deux cents livres de Bretagne (40,000 francs de notre monnaie en 1846) à prendre par moitié sur son domaine de Morlaix. Le chapitre fut composé d'un prévôt, premier et seul dignitaire, de huit chanoines, d'un diacre et sous-diacre d'office, de deux suppôts ou chantres, d'un maître de psallette, de quatre enfants de chœur, d'un organiste, d'un bedeau et de quelques autres personnes chargées du service : l'office divin et canonial y devait être célébré comme dans toutes les cathédrales de la Bretagne.

Cette fondation n'avait d'abord été que provisoire, en attendant de faire autre fondation meilleure et plus commode [Note : Eclaircissement apologétique du dessein de rétablir la fondation du Mur, mémoire imprimé de Marc Le Dizeul, chanoine doyen du Mur, en 1671, pages 3-4. — Mémoire des chanoine du Mur - 1752 - page 1]. Plus tard on ne pensa plus au premier projet, et l'église resta dans son ancien état. Jean le Conquéreur posa la première pierre du portail gothique qu'Albert Le Grand y admirait avec raison : sa tour fut entreprise vers 1420, aux frais de la ville qui mit en 1426 deux cents livres entre les mains des gouverneurs ou fabriques de la chapelle du Mur, pour la construction de la tour nouvellement encommencée (Ms. Daumenil, p. 330).

Morlaix commençait à devenir important par son commerce exportatif : ses pêcheries et ses sècheries jouissaient d'une certaine renommée. La guerre civile de Blois et Montfort vint malheureusement arrêter dans son développement cette prospérité naissante. Le comte de Montfort se présenta devant Morlaix — 1343 — et prit la ville.

Rien de bien important depuis cette époque jusqu'à la bataille de Morlaix ou de Cadoret, livrée au mois de juin 1351. A cette date, Charles de Blois rencontra dans les landes de Cadoret, qui paraissent être les landes voisines de Cadoret, en Plouézoch, un parti de Bretons-Anglais commandé par sire Thomas d'Agworth, le héros de la Roche-Derrien. Très inférieur en nombre, le commandant anglais s'établit dans une position redoutable, au sommet du plateau, et repoussa avec vigueur les charges successives de l'armée ennemie, partagée en trois divisions. Vers la nuit, Charles opéra sa retraite avec une perte considérable, tant en morts qu'en blessés. D'Agworth n'eut à déplorer qu'une perte minime dans cette affaire, qui fit le plus grand honneur à ses connaissances stratégiques.

Durant presque toute la guerre de succession, Morlaix fut constamment du parti franco-breton, représenté par Charles de Blois : en 1358, cette ville envoyait à l'assemblée de Dinan, convoquée pour travailler à la délivrance du prince, un des héros du combat des trente, Ewen ou Yves Charruel, seigneur de Guerlesquin, Charruel, le Guerrand et Kergallon : il fut député par les états de Dinan, pour négocier à la cour de Windsor, la liberté de Charles, et nommé, en 1357, l'un des conservateurs de la trêve conclue entre les deux partis. Morlaix était à cette époque une des treize bonnes Villes du duché : en 1363 elle fit un accueil distingué à Bertrand du Guesclin, quand il marchait vers la Cornouaille. L'an suivant, la bataille d'Auray réunit tout le pays sous la bannière de Jean de Monfort, qui vint, en 1366, poser la première pierre du portail de la basilique du Mur.

Quand la Bretagne vint quelques années plus tard à se révolter contre Jean IV le Conquérant, Morlaix fut une des premières villes qui entrèrent dans l’insurrection anti-anglaise. En vertu du traité d'alliance convenu en 1371 entre Jean IV et Edouard III d'Angleterre, cette place avait été remise à Jean du Barry, commaudant d'une garnison anglaise de trois cents hommes. Rançonnés par ces derniers, les bourgeois appelèrent à leur secours le connétable Du Guesclin qui tailla les Anglais en pièces. Malheureusement il ne tarda pas à s'éloigner, et le duc, revenu à la tête de forces supérieures, reprit la ville, et fit pendre sous ses yeux cinquante des principaux habitants. Une vague tradition rapporte à cette exécution militaire l'histoire d'un dévouement semblable à celui des six bourgeois calaisiens : seulement l’Eustache de Saint Pierre breton fut moins heureux que son devancier, et son gibet se dressa sur les hauteurs qui se sont depuis appelée de son nom, la roche Coroller.

Jean IV alla coucher, peut-être par prudence, au château de Cuburien : puis il quitta la ville après y avoir laissé une garnison de six cents hommes. Deux ans plus tard les habitants de Morlaix appelèrent encore à leur secours les Français qui couvraient le territoire, et la garnison étrangère fut passée au fil de l'épée : puis quand la cour de France eut décrété la réunion du duché à la couronne, Morlaix se rallia franchement au parti national, auquel elle resta depuis invariablement attachée.

En 1394 , Jean IV faisait sa résidence habituelle à Morlaix, où il se livrait au plaisir de la chasse, à travers bois et collines [Note : MCCCXCIV Dux... cum paucis de suis familiaribus apud villam Montis Relaxi abiit et ibidem diù sejournavit curamque suam circa venationes per montana et nemora exposuit. (Chronicon Brioc.)], dans ce beau Parc-an-Duc, grand et spacieux parc fermé de murailles, disent les chroniques, et rempli de bêtes fauves, pour son plaisir. Vers la même époque, il y reçut les envoyés de la cour de France chargés de le réconcilier avec Olivier de Clisson, et les accueillit avec humeur. « Que viennent faire ici ces Français ? dit-il en apprenant leur arrivée : oh diable ! qu'ils se mêlent de leurs affaires ». Dans l'intervalle de ses rares loisirs et de ses fréquentes querelles avec tous ses voisins, il eut le temps de faire quelque bien à la petite cité commerçante qui commençait à prendre une place importante dans son duché : il lui accorda diverses exemptions, à la charge par elle de restaurer ses murailles. Son successeur accorde définitivement à Morlaix des lettres d'affranchissement de fouages, tailles, contributions aux aydes, emprunts, etc. Cinquante ans après, de nouvelles lettres du duc Pierre II confirmèrent les premières. — 1450.

Le règne de Pierre II fait époque dans l'histoire morlaisienne, en ce qu'il nous donne les premiers monuments de quelque intérêt qui nous en restent. Citons d'abord la réformation du domaine ducal à Morlaix, faite en 1455, par suite de lettres patentes datées de Lestrenaic, près Vannes, le 21 mai de la même année [Note : Fait pat ordre du duc Pierre II, au mois d'aoust de cette année, par maître Morice de Kerloaguen, Conseiller et l’un des Présidents de ses comptes : maître Guillaume de Kerchoënt, pareillement Conseiller et l'un des seigneurs de son parlement, et Henriet Le Saulx, Secrétaire et Auditeur desdits comptes]. Nous n'en citerons que quelques documents topographiques et commerciaux, parmi lesquels un extrêmement curieux, important même ; c'est : « La description et confrontation des bornes de la ville de Morlaix selon la description et recort de :

Hervé de Coetcongar, âgé de LXXX ans ; — Selvestre Le Clerc, âgé de LXXXIV ans ; — Henry L'Onnoré, âgé de LX ans ; — Yvon Le Harnois, âgé de XLV ans ; — Pierre Le Marant, âgé de L ans ; — Maître Guille Le Marant, âgé de LXXIV ans ; — Jehan Portzall, âgé de XLV ans ; — Thomas Mahé, âgé de LXX ans ; — Jehan Morvan, âgé de L ans ; — Jehan Moël, âgé de LXX ans ; — Guenolay Goff, âgé de LXX ans ; — Jehan Gourmelon, âgé de LXXV ans ; — Jouhan Bihan, âgé de LXX ans ; — Yvon Jegou, âgé de LXX ans ; — Jehan Bougaut, âgé de LXXV ans ; — Allain Quinou, âgé de LXX ans ; — Yvon Le Fichant, âgé de XLV ans.

Témoins dignes de foi et enquis par les dits commissaires : et même par l'évidence des lieux ; les dites bornes à les prendre et commencer à Tuonblouchou devers le Marcheiz dudit lieu de Morlaix, au coing dun vergier et jardin clos de murs appartenant a Yvon Le Gall et a Morice L'Abbé à cause de sa femme, quel coing fiert sur le grand chemin menant de Morlaix à Bogast et à Ploëgonven, où il y a certaines bornes que les dits commissaires y ont fait mettre, et vont contre mont an long des vergier, courtil et bois Yvon Le Pinart par un veill chemin qui vat de Morlaix à Ploërin, et delà vont par le dict grand chemin contre bas au long du mur du Parc au Duc, jusques au coing d'un jardrin clos de murs qui autrefois fust à Yvon Le Pontou appartenant a pnt a Yvon Broller, entre lequel et le Parc au Duc, il y a un veill chemin qui mene contre bas au Russel de la fontaine du dict Parc au Duc, et passant oultre le dict Russel dedans ledt Parc en montant rez a rez de la Maison Courtel et Parc Yvon Le Harnoi et chéent en un veill chemin en l'endroit de ladite maison, nomée hent toul au Parc, et delà montant contre mont au long du mur dudt Parc au Duc dun costé et la maison, parc et vergier Maistre Phélipes Coetkis, d'aultre tirant au long dudt Parc au Duc et lessant dedans les dites bornes, la dicte maison parc et closture dudt Maistre Phles, et delà tirant toujours au long dudt mur au coing des parc apartenant a Jehan de Quoëtgouréden Seigneur de Loc-Maria noméz les Parcs Maistre Even, ferans en un chemin qui mene a une croix nomée anciennement la Croix Map-an-Maguerez, laquelle croix a faict réedifier Yvon Ploegomen de Morlaix, et est assise sur un grand chemin qui mene de Morlaix a St. Fiacre, et dudt chemin a l'endroit de la dte croix vont les dictes bornes a un veill chemin qui est entre la terre dudt sire de Loc-Maria d'un costé et la terre du sire de Coetelent d'aultre ; quelle terre dudt de Coetelent demeurent dedans, les dites bornes, férans en un aultre grand chemin qui vient de Morlaix et va a Pont-Paul et dudt grand chemin tirant a un rocher nomé le Rocher de Lan ar Roc'hou au long du parc dudt sire de Loc-Maria, qui est des appartenances de son manoir de Kerbizien, et dudict rocher, tirant aux aultres rochers qui sont vis-a-vis en devalant au coing des Moulins Foulerez et à Tan du Duc assis sur la rivière Cuefflet, laissant dedans les dites bornes, les dicts moulins, la rue aux Brebis, l'Hostel de Belizal et leur appartenance, et d'illec tirent au long de la dicte rivière contre val entre le Parc de Guyon de Kergoat qui est ez dictes bornes d'un costé, et le Pré Jehan Morvan qui est hors les dictes bornes de l'aultre ; et de la rivière vont et montent icelles bornes, contre mont, devers le pays de Léon, au long du russel nomé Russel Tuncio, quel russel commence au village nommé Roudour-an-Nezen, entre le pré dudt Jehan Morvan et le pré Yvon Perrot, continuant en alant contre mont au long dudt russel entre le pré Yvon Perrot et le parc appellé Parc an Bretonic, et d'illeques, par les prés Yvon Le Soult à cause de sa femme, et les enfants feu Jehan Even, ainsi que ledt russel avoit son cours anciennement ; et du bout suzain dudt pré desdis Hoirs Jehan Even, montent contre mont ledt russel et le chemin au long du pré aux Hoirs Guyon Perrot, se rendant audict village de Roudour an Nezen férant sur le grand chemin de Morlaix a Landiviziau et traversant ledt chemin, et alant au long du chemin qui va dudt village de Roudour an Nezen au village de Kerjourdan, entre les deux terres Hervé de Coatcongar, passant ledt chemin entre une pièce de terre appellée la Lande aux Malades et les parcs dudt de Coatcongar, tirant au grand chemin qui mene de Morlaix a Pensez, jusques au coing du mur du parc dudt de Coatcongar, qui est des appartenances de son Hostel de Kerjourdan, lesquels hôtel et parc sont hors desdites bornes ; et dudt coing dévalant contre bas devers Morlaix, au long dudt grand chemin de Pensez, costéant le Boys revenant [Note : Bois qui revient, taillis] dudict de Coatcongar et la forrest de Cuburien, appartenante au vicomte de Rohan, en continuant jusques au coing du Parc nomé Parc Fistill, appartenant à Yvon Symon, lequel Parc est dedans les dictes bornes, et dudt coing alant au long du fossés dudt Parc, tirant vers la Roche Corolleres, au long des fossés des Parcs appartenant a Nicholas Le Mignot, Guenolay Goff, les héritiers Bolhet, Jehan Gourmelon, Jehan fils Hervé Olivier, et le Parc nommé Parc Map Nuz appartenant à pnt a Guille Menez, et le Parc Loys Gourhant, quels Parcs sont audedans lesdites bornes et costeaux, au long de ladte forrest de Cuburien qui est hors desdites bornes, jusques a un petit Parc appartenant aux héritiers Yvon Tanguy, qui est cerné de fossés, contenant un arpent de terre ou environ ; quel parc est hors des dictes bornes et du coing dudt Parc tirant droict a la ligne au long de ladte forrest, jusques a lendroit d'un petit Parc qui fut aultrefois a Hamon Aimoez appartenant a pnt à la Chapelle Notre Dame du Mur dudict lieu de Morlaix ; et dudict petit Parc, les bornes dévalent contre bas a la croix appellée : la Croix du bout de la Ville neufve, joignant au coing du mur du jardrin qui fust aultrefois a Jehan Kerguilliau et a pnt a Jehan de Keriveguen, et de la dicte croix dévallant au havre et rivière dudict lieu de Morlaix ; tirant contre bas ladte rivière jusque a l'Estang qui fut jadis a Hue Jouhan, et dudt Estang tirant contre mont au long du russel jusque à Tuongoursten, et de Tuondousten, tirant au long du russel par les Parcs Henry Tuonmelin et Hervé de Coatcongar, et desdits Parcs traversant un grant chemin qui vient de la Chapelle de St. Nicolas a la fontaine appellée la Fontaine an Barguet, poursuivant toujours le dit russel, par le Parc nommé Parc an Taon, traversant parmy le pré Jehan Perrot jusques a la source dudt Russel qui commence a la fontaine nommée la Fontaine an Guern bihan et de la dicte fontaine au long dun chemin qui flert devant la maison dudt Jehan Perrot qui est ez dictes bornes ; et de la dicte maison au long du chemin qui se rend sur le grant chemin qui mené de Morlaix à Lanmeur, et dudict grant chemin , traversant a un autre chemin au coing de la maison qui fust aultrefois a Jouhan Courtois et Jehannette Saliou, sa femme, a cause d'elle ; et dudt coing tirant au long d'un chemin qui vient de Kerangriffien et qui se rend audit grant chemin qui va de Morlaix à Lanmeur, jusques a un carrefoul nommé Poul-Map-Enen, tirant au long dun chemin, nomé an Portz-Bihan costeant l'Ostel, parc et courtils maistre Phles Coetquiz et Alliette sa sœur, appellé Kerjoce et la terre de la Madrie dun costé, qui sont ez dictes bornes et de l'autre costé a la terre Jehan Perrot qui fut aultrefois a Jehannette Saliou ; et flert ledt chemin au carrefoul et sur le grant chemin qui vient du moulin an Squer a la maison Fraval, de Coëtquis nomée la Villeneufve, et dudt carefoul au long dudt grant chemin, costeant le Boys du Manoir de Coetgongar qui est hors desdites bornes, jusques a un aultre carefoul qui arivé a un aultre grant chemin qui vat de Morlaix a Lannyon ; et d'icelui carefoul, dévalant au long dudt chemin qui vient du moulin an Squer, costéant les Parcs dudict Coetgongar jusques a un aultre carefoul qui est sur le grant chemin qui mene de Morlaix a Ploegat-Gallon en laissant ez dictes bornes la terre devers la Maladerie et la maison Jehan Le Malcon et son fils ; et dudt carrefoul tirant contre bas vers ledt Moulin Ansquer, au long dudict chemin en laissant ez dites bornes la maison Yvon Bellec a cause de sa femme avec ses parcs et clostures, et les Maisons Jehan Le Marant, et Hervé Le Breton a cause de sa femme ; et dudict Moulin Ansquer, qui est hors des dites bornes, traversant lesdites bornes la Rivière de Jarleau et entrant entre le Parc et Pré Pierre Le Broër, et le Parc et Pré les enfants Jehan Du Val, se rendant audt grand chemin qui mene de Morlaix a Ploëgonven, ferant a la cornière du vergier et jardrin Yvon Le Gall et Morice L'Abbé a cause de sa femme, où lesdites bornes commencent ; où quel lieu lesdits commissaires ont faict mettre les dictes bornes de pierre dont cy devant est faict mention.

Et n'est point a attendre que ceulx qui demeurent a Tuonblouc'hou ne respondent et soyent subjets a l'entertise et soubs la demande d'aoust dudict lieu de Morlaix et ez aultres debvoirs et subsides ainssis quils ont apcoustumé le temps passé ».

« Après, ensuivent le double de certaines lettres touchant les dictes bornes, laquelle lettre est enregistrée dedans le papier d'office de la Court de Morlaix.

Les Commissaires ordonnés par le Duc notre Souverain Sgr, pour la refformation de son Domaine, ont trouvé par la déposition de plusieurs témoigns dignes de foy, que les bornes de Morlaix doibvent aler par les Parcs et Prés Pierre Le Braer a Tuonblochou et que le chemin qui souloit estre anciennement par ledit parc a commencer au coing des vergiers et courtils Yvon Le Gall et Morice L'Abbé a cause de sa femme audict lieu de Tuonbloc'hou que ledt Le Braër avoit faict clorre, sera déclos et mis à délivre pour le temps à venir, et sera de telle largueur comme est le dict chemin au bout du Boys Yvon Le Pinart ; et au regard dudt chemin qui anciennement souloit passer contre led pré Pierre Le Braër, et le pré les enffants Jehan Du Val et se rendoit en la Rivière de Jarleau a la cornière du Moulin Ansquer qui est sur ladicte Ripviere, est dict et ordonné : Pour ce qu'il semble que le dict chemin ne sert gueres a la chose publique, que le dit Pierre Le Braër mettra ou fera mettre présentement deux grosses pierres haultes pour bornes affin que l'on puisse congnoistre doresnavant où lesdtes bornes de Morlaix et le chemin d'icellcs doibvent aller ; lune sur le grant chemin qui vat de Morlaix à Bogast, à la ligne de la cornière desdts vergiers et clos desdts Yvon Gal et Morice L'Abbé, et l'aultre pierre et borne, hors dudt pré Le Braër, devers la Rivière de Jarleau ; sauf et réservé par aultre temps de mettre ledt chemin a passer par le dict Pré, s'il est trouvé que ce soit le bien du pays et de la chose publique ; et pourra ledt Pierre Le Braër clorre et deffendre, pour le temps a venir aultres chemins qui au temps passez ont été faicts par icelui Parc : Et n'est point a entendre que ceulx qui demeurent a Tuonblouc'hou ne respondent a la lieutenantise de Morlaix et quils ne contribuent a la demande d'Aoust dudict lieu de Morlaix et ez aultres debvoirs et subsides en la manière qu'ils ont accoustumé le temps passé donné.

Donné et faict a Morlaix en la présence dudict Pierre Le Braër et de son consentement le septième jour d'aoust, l'an mil quatre cents cinquante cinq ».

La pièce que nous citons est la seule à laquelle nous puissions recourir pour comparer les limites actuelles de Morlaix avec les anciennes : aussi est-elle précieuse malgré son obscurité et les changements nombreux qu'ont subis les noms de terres et de villages cités dans cette longue énumération.

Tuonblochou (Traonbloc'hou) où commencent ces limites, était le nom d'un massif de maisons situé entre le grand chemin de Plougonven, la rue Traoulen et le Jarlo : la ligue de limitation remontait le long de la route de Ploërin, aujourd'hui route de Carhaix, tournait le Parc au Duc, suivait le pré encore aujourd'hui nommé Prat ar Feunteun, le chemin qui se rendait à Toul an Parc, la route de Pontpaul, passait à la croix de Mab-ar-Vaguerez (le fils de la nourrice) élevée à l'embranchement de la route de Poulfanc et du chemin venant de Penouru : et passant entre les terres du sire de Coëtelan ( aujourd'hui Parcou ar Miliner) et celles des Kerbizien, en Plourin, venait tomber sur le Queffleut, en suivant la crête des pitons de quartzite du Merdy. Ces landes, désignées aujourd'hui sous les noms divers de Goarem ar Roc'h, ar Vilin-Nevez, ar Menez, se nommaient alors plus généralement Lan-ar-Roc'hou, Lande des Roches.

Le Moulin-Neuf a remplacé les moulins à eau du duc, dits Moulin à Tan et à Foulon, situés à peu près dans le même endroit, et aujourd'hui complètement détruits : la ligne de démarcation descendait le Queffleut jusqu'à son confluent avec le ruisseau de Roudour an Ezen (Vallée aux Anes), qu'elle remontait pour aller couper le graud chemin de Landivisiau. Ce grand chemin, abandonné seulement au dix-huitième siècle, est celui qui part de la rue longue Bourret, jette des embranchements à droite vers Kergavarec, et à gauche vers Traonarvilin, et quitte la commune de Morlaix un peu au midi du Roudour : quelques pièces de terre qui le bordent portent encore le nom de Parc-an-hent-bras-coz. Le grand chemin de Penzez ou de St. Pol-de-Léon est aujourd'hui le chemin vicinal qui va de St. Martin à la route de St. Pol par Kergavarec : à son intersection avec la route actuelle de Brest, il y a une pièce de terre qui porte les noms de Parc ar Varyeren et Champ de la Croix des Ladres, nom qui rappelle celui de lande aux malades de la pièce qui nous occupe. De là à la rivière, la ligne séparative qui est restée depuis la même, longeait constamment la forêt de Cuburien, qui avait, comme on le voit, très peu diminué d'étendue depuis plusieurs siècles. La palue Marant, alors couverte par les hautes marées, restait en dehors de la limite, qui remontait la rivière, le ruisseau de Troudoustein, son étang aujourd'hui desséché, et ses parcelles de terre dont deux ont conservé le nom de Parc an Traon, qu'elles portaient il y a quatre siècles. Le Petit Launay (an Guern Bihan), Roscongar (maison de Jehan Perrot), Kerjoce (Kerjoaü), près duquel se trouvait le carrefour de Poul map enaff (marais de l'aîné) [Note : Une pièce de terre voisine s'appelle encore Parc Dourec (champ aquatique)], restaient en dedans des limites. Elles coupaient les grandes routes: 1°de Lanmeur, qui partait de Morlaix par le quartier de St. Nicolas, passait devant la maison dite Hent-Coz (vieux chemin), se rendait à la Madeleine, alors appelée la Maladrerie, faubourg isolé, habité par des caquins, cacoux ou lépreux, qui y exerçaient depuis des siècles la profession traditionnelle de cordiers, et se rendait à Lanmeur par le bourg même de Garlan ; 2° de Lannion, qui se confondait probablement à la Croix-Rouge avec la suivante ; 3° de Ploëgat-Gallon [Note : Plouégat-Guerrand. Ces deux noms viennent de Guerrand et de Kergallon, principales terres seigneuriales de cette localité : le dernier ne s'est substitué à l'ancien que dans le dix-huitième siècle. Par une singulière coïncidence, ce nom de Gallon revécut dans celui de Plouégat-Vallon, donné momentanément à la commune sous la république et tire de sa situation topographique], que suivent encore à présent les piétons venant de Plouégat-Guerrand à la ville ; 4° celui de Rennes par Guingamp, passant par les Tourelles et Lannidy [Note : Nous reviendrons avec plus de détail sur ce sujet important, à l'article des voies de communication] : le chemin qui séparait Morlaix de Ploujean, avait aussi le titre de grand chemin. — Du moulin de la Chèvre, situé en dehors de la ligne, celle-ci passait le Jarlo à la cornière du moulin, gagnait le grand chemin de Plougonven et revenait à Traonblochou.

Il y a une remarque importante à faire dans cette étude comparative : c'est que les limites de la communauté ont été, généralement parlant, celles qui furent imposées à la commune de 1790. Il n'y eut que des changements insignifiants du côté de l'ouest, où l’on se borna à modifier ces limites du côté du ruisseau de Roudour-an-Ezen : à l'est, on ajouta cette longue bande de terre qui s'étend de Traoulen à Berlinga vers Plouigneau et Plougonven, et qui sans appartenir à Morlaix dépendait toujours, pour le spirituel, de la paroisse de St. Mathieu.

Viennent ensuite les droits que les ducs percevaient sur les objets d'importation et d'exportation du port de Morlaix ; c'étaient :

« 1° POUR DEBVOIR D'ENTRÉE :
De chacun tonneau de vins d'Anjou, Touars (Thouars en Anjou), d'Aulnis, Nantes et ailleurs, de la crue hors Bretaigne : 30 sols.
Et pour vin breton : 15 sols.
Pour ancienne coustume les marchands forains doibvent par tonneau : 18 deniers.
De chaque muid de sel venant de Guerrande ou de Rhuis : 5 sols.
Et si ledict sel vient d'ailleurs, il paie par muid, 15 s. s'il n'appert avoir été chargé au dict lieu de Guerrande ou de Rhuis.
Pour le poids de chacun tonneau de fer, qu'est de 2200 livres par tonneau, il est dub d'entrée. 20 sols.
Et par les autres marchands forains, le vingtième du fer.
Par chaque tacre [Note : La tacre était composée de dix peaux] de cuir ......
Et le vingtième d'aultres marchandises que l'on fait entrer ezdits ports et havres.

2° ISSUES.
Pour issue de chaque tonneau froment est dub d'après une coustume : 3 sols 12 deniers.
Et pour trecte de chaque tonneau froment. 30 sols.
Pour chaque tonneau gros bled, il est dub d'yssue. 20 sols.
Pour tonneau chair suif et aultres gresses. 20 sols.
Pour chaque tonneau de vin mené par terre, s'il n'appert avoir payé l'entrée en aucun havre de Bretagne : 30 sols.
De chaque tonneau de vin mené par charroy hors la ville et faux bourgs de Morlaix, excepté les gens nobles et privilégiés pour leur provision : 5 sols.
Et le vingtième d'aultres marchandises comme toiles et aultres denrées que l'on fait yssir desdits havres »
[Note : Debvoirs d'entrées et d'yssues des ports et havres de Morlaix et de Lanmeur (havre de Toulanhéry et de Locquirec, dépendance ancienne de Lanmeur)].

Le même document nous donne quelques détails sur la pêche du congre dans la rivière de Morlaix, pêche qui donnait lieu à cette époque, à un commerce considérable. Tous les pêcheurs établis sur le fief ducal et sur ceux de Bodister, Montafilan et Plougasnou (Ploujean, Plouézoch, Plougasnou, Saint-Jean-du-Doigt, Guimaëc et Locquirec), étaient tenus d'aller chaque année faire la pêche au congre, du 1er mai à la St. Michel. Cette pêche se faisait solennellement : on plantait bannière seigneuriale au lieu fixé pour le rendez-vous, et des arrhes en argent étaient données à chaque homme. La part du pêcheur, pour chaque congre renable, était de seize deniers : le congre renable était celui qui avait un espace ef demi de la tête à l'umbrill : s'il était plus grand, il ne comptait que pour un renable, et s'il était moindre, il en passait à l’esgard du renable choisi. En outre, les pêcheurs avaient droit pour chaque cent à huit quartes de vin : mais s'ils vendaient le poisson en fraude, ils perdaient le prix et subissaient une amende. — Si quelqu'un des grands vassaux susmentionnés cessait de tenir ses sècheries, le duc lui succédait dans tous ses droits.

Outre le congre, les harengs blancs et les harengs saurs abondaients sur le marché de la place : ils venaient probablement des Pays-Bas, et payaient au duc un denier pour droit d'étalage. (Réformation, etc., et notes de M. Aymar de Blois sur le Mss. Daumeni).

Si du commerce nous passons à l'industrie, nous trouvons déjà les corporations solidement établies à Morlaix : outre la confrérie du sacre, composée des mariniers et des armateurs, nous avons celle de la Trinité, formée par les fabricants et marchands de toiles, les tailleurs et les tisserands. « Pierre par la grâce de Dieu duc de Bretaigne conte de Montfort et de Richement a notz seneschal alloues de Treguier Morlaix et Lameur, leurs lieutenantz et a toulz aultres a qui de ce appartiendra sallut. Les abbez preuots procureurs et gentz de la frayrie de la trinite fondée et entretenue par les gentz du mestier et art de texerie a Morlaix nous ont expose que parauaut ces heurres pour obvenir à frauldres et abbuz que les texiers desds vill-et faulxbourgz de Morlaix et Lammeur et leurs chase tellanyes et aultres voisins commettent en leur dict mestier nous eussions ordonne que deslors en auant chacun texier usant d'un mestier eussent gange et moison pour faire leurs toilles marchandes bonnes et comptables et avoir de troys quartz de leaise de trente quatre allnes coutils chacune avec saize fils de laquelle ordonnance les gentz dudict mestier ayent use au temps passe et pour entretnir et continuer leurdict mestier ayent fonde iadicte frairye cy....
L'homneur de la Trinité nostre Seigneur a faict plusieurs aultres belles institutions pour laugmentation de Indicte frairye et des gentz dudict mestier lesquelles ils ont treuues et gardées sans en fraindre et par icelles, ays este ordonne que lesdictz gentz de mestier ceulx qui seront trouues par lesdictz abbez et visilteurs faisants ou vsantz au qtraire que pour chacun deffault celluy qui en seront repriss y payeron une livre de cire a offre conssentye au prouffict de ladicte frairye et d'abondant en seront tirez par nous et notz aultres officiers desus les lieux ainsi que seront et debvoir estre a nous amendes : ce nonobstant aulchuns nos subiects tans de nosdictes chastellanyes de Morlaix et Lanmeur et aultres proches et adjoints desdits lieux ont faict et font de jour en aultres au contraire car ils font toilles quy ne sont pas de moison competant en abusant dudict mestier desquelles ilz viennent exposer en vente au dit lieu de Morlaix : quelle chose est au préjudice de la chose publique de notre pays et en la grande charge et dommaige de nosdicts subiects de Morlaix : pourquoi nous lesdictes choses considérées ne voulant ceulx abus tollerer ne souffrir, etc. »
(Lettres patentes du 5 mars 1452).

L'industrie linière et de texerie était florissante, quoique très nouvelle, à Morlaix : elle était due sans doute aux Flamands et aux Normands, que les guerres malheureuses de la France contre l'Angleterre jetaient en foule sur cette terre de Bretagne, paisible oasis oublié dans la conflagration universelle.

Quelques années auparavant [Note : 1445. « On voit encore dans une des cours de ce monastère des macles formées sur le pavé et distinguées en pierres blanchâtres des cailloux verts qui composent le remplissage de cette cour » (Daumenil)] Alain de Rohan avait donné son château de Cuburien à des Cordeliers qu'il avait fait venir de l’île Vierge, pauvre et aride rocher situé sur la côte de Léonais, mais qui a fondé les trois abbayes de Morlaix, de Landerneau et des Anges, ce qui donna lieu au jeu de mots pédantesque : Virgo peperit trés, postea infirmari cepit et fuit derelicta et sterilis. — « La Vierge a eu trois enfants, puis devenue infirme, elle a été stérile et abandonnée. » — Ce dernier mot fait allusion à la durée éphémère de la mère abbaye et de ses succursales, où les Récollets remplacèrent plus tard les Cordeliers. Ces derniers ont, à Morlaix, bien mérité des lettres en établissant à Cuburien une bonne imprimerie d'où sont sortis de précieux ouvrages et dont nous parlerons plus loin : il est bon de remarquer que vers la même époque le duc François II, protecteur éclairé de la sapience, envoyait à Morlaix son aumônier Yves Le Grand, pour recueillir les traditions et les antiquités locales.

Cependant les événements politiques marchaient rapidement dans le duché : le duc François était mort à Couëron, et la bonne duchesse Anne, pour conserver ses états entamés par les armées françaises et les trahisons des grands vassaux, avait appelé une armée anglaise qui débarqua à Morlaix, sous le commandement de Richard Egiccimille ou Eggesmill. Cette armée fut soldée au moyen de monnaies fabriquées à la Tour-d'Argent, où l’on battait monnaie depuis quatre-vingts ans au moins : la matière première sortait probablement des riches minières de Whelgoët, que jadis nos princes firent ménager et ouvrir. Cette armada, du reste, ne se signala que par des pillages dont Albert le Grand narre naïvement un épisode caractéristique : c'est l'enlèvement du doigt de saint Jean, qui fut emporté par Eggesmill en Angleterre, et qui ne se retrouva plus au débarquement, au grand étonnement des ravisseurs. Le doigt miraculeux était retourné dans sa chapelle (Albert le Grand, translation du doigt de saint Jean-Baptiste).

Nous avons momentanément négligé les nombreux changements et accroissements que subissaient à la même époque l'intérieur et les fortifications de la ville. En 1453, le duc donnait deux, cents livres monnaie, à prendre sur Yvon de Kerderyan, receveur général de l'évêché de Tréguier, pour les travaux de la ville. On bâtit un mur le long de la vue confluant à la chapelle de N. D. du Mur. En 1454, les pont-levis de Bourret, du Marcheix, le Pont-Borgne (près des Jacobins), furent refaits en solives de vingt pieds de longueur et garnis de planches de quatre pouces d'épaisseur. Le duc permit d'employer huit cents livres monnaie à cette dépense.

En 1483, on abattit la porte et les tourelles du Marcheix, ainsi qu'une maison qu'on y avait élevée : on reconstruisit une nouvelle porte sur un devis de Jean de Kerloaguen-Rosanpoul, lieutenant du gouverneur, et on éleva de fortes barrières à tous les carrefours des faubourgs. Ces travaux coûtèrent quarante-six livres monnaie. A la même époque la corde de bois coûtait deux sols un denier, la journée d'un homme deux à trois sols, la livre de fer ouvré six deniers.

On fit venir de l'artillerie de Nantes : elle se composait de huit serpentines garnies chacune de deux boîtes et de quatre couleuvrines de fonte. Plus deux barriques de poudre, chacune du poids de cent livres, complétaient le matériel de cette artillerie. Elle avait été achetée par Bizien Méryan, Mizeur, et pesait mille cinquante livres (1483).

La guerre que l'on prévoyait alors avec la France ne tarda pas à éclater, et les travaux de fortification furent poussés plus activement que jamais. On établit de nouvelles barrières aux faubourgs de Ploujean, de Saint Martin et des Fontaines : on creusa des tranchées devant le boulevert de Bourret, et on construisit un nouveau mur derrière ce boulevert : on répava le pont de l'hôpital (de Viarmes), le château, et ou engagea des canonniers, un maître à soixante et dix livres par an, les autres à cinq livres : on fit disposer par Jean Le Diouguel, menuisier, dans les portes et dans les tours, des logements propres à loger ces canonniers, des arbalétriers entretenus par les bourgeois, et une garnison composée de la noblesse des environs et d'une compagnie de gens à pied, commandée par Ollivier de Keraudren, qui eut une pipe de vin pour gratification. On gagea encore un portier, Jean Ploemenan, à cinq livres par an outre son logement dans la porte du Marcheix [Note : Lettres du duc Pierre II (10 décembre 1453) et Mss Daumenil, p. 3-4].

Quelque temps après, la duchesse Anne épousa Charles VIII : les villes bretonnes devenaient françaises, et Pierre de Rohan vint recevoir le serment des Morlaisiens que l'éminente dignité du maréchal ne réconciliait guère avec un homme infidèle à sa souveraine et à son pays natal. L'injurieux proverbe appliqué depuis à cette illustre maison dans toute la Basse-Bretagne, a trouvé de l'écho à Morlaix, où il s'est conservé jusqu'à nos jours [Note : Dans les montagnes, l'expression proverbiale pour désigner un traître est : Dibri a ra d'an eo exel Roüan (il mange à l'auge comme Rohan) : ainsi dans le Morbihan, un pourceau s'appelle burlesquement map Roüan (fils de Rohan), et Morlaix, pour expressions équivalentes, voila un duc de Rohan, — on va tuer monsieur le duc, etc.].

« Du reste la progression ascendante de la cité continuait, nonobstant les changements de monnaie et les guerres civiles. L'agriculture se relevait ; la découverte de l'Amérique allait réagir favorablement sur le commerce, et, bien que la Bretagne n'eût point encore, comme la France, d'armée permanente, des croisières ducales protégeaient les navires. Aussi Morlaix comptait-elle 165 cabarets, 42 dans la ville close et le reste dans les faubourgs, 165 cabarets qui lui rapportaient 1,045 livres par année ; aussi la communauté payait-elle un médecin pour panser les gens n'ayant de quoy, et voyait-elle ses billots pris à bail par son gouverneur » [Note : Notice historique sur Morlaix, par M. F. Gouin .(Annuaire de Brest, 1838, p. 186)].

Devenue reine de France, la bonne duchesse resta, comme dans tout son ancien duché, véritablement idolâtrée à Morlaix, et le lui rendit bien. En 1506, elle vint à Morlaix, où elle fut reçue au couvent des Dominicains, probablement parce que le château était alors en réparations : la communauté lui fit don d'un petit navire emblématique en pierres précieuses et d'une hermine apprivoisée, portant un beau collier au cou. On rapporte que ce petit animal, au moment où on le présentait à la reine, lui sauta brusquement au cou, et qu'elle se recula avec un mouvement de frayeur involontaire : alors Pierre de Rohan qui l'accompagnait, lui dit : « Que craignez-vous, madame ? ce sont vos armes! » mot qui lui plut beaucoup, ajoute l'auteur qui rapporte cette anecdote (Ogée, v. Morlaix).

La duchesse laissa à sa bonne ville des souvenirs plus durables que toutes ces fêtes. Elle fit construire dans le port de Morlaix, cette belle Cordelière à deux batteries, montée par douze cents hommes, et qui fut le premier vaisseau remarquable de la marine française. En 1513, la Cordelière, réunie à quelques autres navires, et montée par Hervé de Portzmoguer, que les Français nommaient Primaudet, attaqua une forte escadre anglaise et la battit. L'amiral ennemi s'adressa à la Cordelière et l'incendia, et Portzmoguer, pour ne pas périr seul, s'accrocha à l'Anglais, le couvrit de feu, et sauta avec lui à la vue des deux flottes épouvantées.

En 1522, un capitaine de Morlaix nommé La Trigle, avertit les Anglais, avec lesquels il entretenait des intelligences, que la ville se trouvait en ce moment sans milice et sans garnison, et qu'une surprise nocturne la leur livrerait infailliblement sans coup férir : il leur offrait en même temps son secours et celui de ses hommes. En conséquence de cet avis, une escadre anglaise forte de soixante voiles, vint mouiller dans la rade (Hanterallen, disent les relations), à l'entrée du Dourduff, dans les derniers jours de juin : une partie de l'équipage fut mise à terre, et déguisés en paysans et en marchands, les Anglais se dirigèrent vers la ville, où ils furent reçus sans défiance. Comme l'avait annoncé La Trigle, la noblesse s'était rendue à la montre (Revue militaire) de Guingamp, la bourgeoisie à la foire de Noyal-Pontivy [Note : Foire célèbre de Bretagne, fondée par la maison de Rohan. Ogée donne (v. Noyal Pontivy) d'intéressants détails sur les usages féodaux particuliers à cette foire]. Les étrangers se glissèrent dans le château, dans les faubourgs, d'autres se cachèrent dans les bois du Styvel. Leurs pataches avaient reçu ordre de remonter le chenal avec la marée du soir, et de s'approcher du quai pour recevoir le riche butin que l’on espérait : mais les paysans avaient pris l'alarme et barré la rivière avec dix à douze gros arbres coupés dans les rabines de Cuburien, de sorte qu'arrêtés court par cet obstacle, les hommes qui montaient ces embarcations mirent pied à terre et s'avancèrent vers Morlaix (4 juillet).

Cependant la ville reposait, insoucieuse et ignorante d'un danger aussi imminent, lorsque vers minuit un signal fut donné, l'ennemi s'empara des portes et occupa la ville sans éprouver de résistance. Le recteur de Ploujean, chapelain de Notre-Dame-du-Mur, leva le pont de sa porte Notre-Dame, monta dans la tour armé d'un mousquet, arquebusa bon nombre de pillards du haut de sa citadelle improvisée, et périt après une défense héroïque.

Dans une maison de la grand'rue, (celle qui porte en 1846 le n° 18), une chambrière était restée seule, ses maîtres s'étaient sauvés comme tous les autres : elle rassembla quelques jeunes filles déterminées comme elle, ouvrit la trappe d'une cave remplie d'eau, et les pillards en voulant entrer en foule se poussant les uns les autres dans cet abîme que l'obscurité les empêchait d'apercevoir, quatre-vingts environ s'y noyèrent. La maison n'en fut pas moins forcée, les femmes, qui s'étaient réfugiées dans les étages supérieurs de la maison, furent saisies, et la chambrière qui avait monté le coup fut précipitée sur le pavé de la rue.

La ville fut pillée, saccagée et brûlée, ainsi que les églises : l'hôtel de ville fut mis en cendres avec presque toutes les archives de la ville. Le lendemain matin, les Anglais, gorgés de vin et ployant sous le faix de leur butin, retournèrent à leur escadre par le quai de Tréguier, le seul qui fût alors praticable : six ou sept cents traînards s'égarèrent dans le bois du Styvel et furent taillés en pièces par les gentilshommes du pays, qui prévenus trop tard, s'étaient hâtés d'accourir avec les seigneurs de Laval à leur tête.

Les morts furent, à ce qu'il parait, ensevelis aux Capucins, dans le voisinage du champ de bataille : les indications de l'histoire et l'absence de vestiges de sépulture dans les bois du Styvel, confirment cette opinion. Le combat n'eut du reste pas lieu près de la fontaine qui a porté depuis le nom traditionnel de Fontaine des Anglais, mais bien près d'une fontaine alimentée par le même cours d'eau, et appelée par suite de cette sanglante boucherie la Fontaine rouge, Un peu plus haut que celle dont nous venons de parler [Note : Dans les terres de M. de Tromelin, à Coëtserho. Les titres de cette propriété contiennent quelques éclaircissements intéressants sur cet événement].

La vengeance était tardive, car la ville était complètement ruinée, et resta dix ans dans le même état : les principaux commerçants qui s'y étaient trouvés au moment du pillage avaient été emmenés en Angleterre, où ils restèrent longtemps (Mss. Daumenil, ch. I). La ville se rebâtit lentement, aussi sale et aussi malsaine qu'auparavant : un second sac, qui eut lieu vers la même époque, ralentit encore ce faible mouvement de réorganisation.

La réforme religieuse gagnait rapidement, et elle comptait de bonne heure des adhérents dans le pays. En 1538, Alain Guézenncc, réformé, dans un de ces accès d'enthousiasme intolérant auquel les calvinistes de cette époque étaient sujets, se rua sur un prêtre officiant dans l'église Saint Mathieu, lui arracha l'hostie et la foula aux pieds. Il fut condamné à être brûlé vif (Ogée, v. Morlaix). La réforme ne prenait guère à Morlaix, pas plus que dans tout le reste de la Bretagne : et pendant que les évêchés de Rennes, de Nantes, de Saint Malo fournissaient de nombreux prosélytes à l'hérésie, que l’évêque de Nantes assiégeait dans une maison du Croisic dix-neuf religionnaires, et leur tirait cinq cents coups de canon sans pouvoir les réduire, que des synodes calvinistes donnaient un mot d'ordre et une direction à la réforme en Bretagne, Morlaix choyait ses religieux et élevait dans le quartier Saint Martin l'église de Notre-Dame-des-Vertus (1541).

Nous parlerons plus tard, en leur lieu, de quelques pièces importantes qui se rattachent à cette époque, comme la fondation du Taureau et les documents relatifs au commerce de la ville. Hâtons-nous d'arriver à l'événement le plus important de cette partie de notre histoire locale, l'organisation municipale définitivement constituée par la création d'une municipalité moins dépendante. Jusques-là l'autorité civile avait été exclusivement représentée par trois magistrats étroitement subordonnés à l'autorité militaire des capitaines gouverneurs : c'étaient le procureur de ville, le syndic miseur et le controlleur, nommés dans l'origine par lettres ducales, et plus tard par une assemblée de notables dont la présidence était attribuée aux gouverneurs, aux lieutenants et aux juges royaux. Ces trois magistrats avaient des jurats, dont le nombre fut fixé à douze, par règlements des 5 et 23 février 1544, et qui avaient comme eux voix délibérative : tous ces divers actes, comme élections, délibérations, etc., avaient lieu devant notaire. Les fonctions de procureur étaient analogues à celles des maires actuels : ils avaient la haute main dans les affaires de la communauté, dans les convocations, dans les confections de travaux. Le miseur était le chargé de la comptabilité communale, et le contrôleur avait l'Inspection des opérations du miseur. Cette organisation paraît dater de l'affranchissement de la communauté, ou du moins de la confirmation de cet acte, en 1450 : du moins est-ce la première trace que nous en ayons dans nos annales. Nous avons déjà vu, et nous aurons plus d'une fois occasion de le remarquer, le soin que mirent les rois de France, surtout ceux de la maison de Valois, à ajouter de nouveaux perfectionnements à nos institutions municipales, si tardives et si grossièrement ébauchées durant l'autonomie bretonne.

Les gages de procureur, originairement de. dix livres monnaie, et ceux des deux autres magistrats, de vingt chacun, furent triplés en 1489. En 1552, ceux du procureur avaient monté à cinquante, et probablement les autres à proportion (Mss Dauménil, ch. II, p. 15-16, et ch. III, p. 31-51).

Voici la liste bien incomplète, comme elle nous est parvenue, des procureurs, miseurs et contrôleurs de Morlaix.
1450. Bernard Le Bihan, miseur, nommé par acte passé devant Marrec, passe : Pierre de Kersulguen, contrôleur à dix livres pour six mois, Philippe de Coetquis, procureur à vingt, également pour six mois.
1451. Jean de Quelen, miseur, à vingt livres : Pierre de Tuonmelin, controlleur, idem : Philippe de Coetquis, procureur, idem.
1452. Jean du Quenquisou, miseur.
1453. Goulfen de la Boyssière, miseur.
1454. Le même, miseur : Pierre de Tuonmelin, controlleur (lettres patentes de Pierre II).
1455-1462. Le même, miseur (lettres patentes du duc Arthur III, 11 novembre 1457). Pierre de Tuonmelin, contrôleur, et Jeau Tasser, son lieutenant par luy commis (1460). Les billots donnés à ferme par le miseur (1462).
1465. Chrestien Le Garrec, procureur, fut cette année aux états de Bretagne.
1466. G. de La Boyssière, miseur : Jean de Tuonmelin, contrôleur.
1470. Le même, miseur.
1471 et 1473. Le même, miseur : Ollivier de La Forest, contrôleur : Christophe Parthevaux, procureur.
1474. Le même, miseur, meurt dans l'exercice de ses fonctions, remplacé par Ollivier de La Boyssière, son fils aîné et principal héritier noble, qui rend pour lui les comptes de l'année.
1475. Thomas Calloet, miseur par élection des bourgeois rassemblés au Mur après vêpres (15 janv.).
1476-1477. Le même, miseur.
1478-1470. Hervé Guégou, miseur.
1480 (12 octobre). Richard Quintin, miseur ; Ollivier de La Forest, contrôleur.
1483. Bizien Meryan, miseur ; Christophe Le Garrec, son lieutenant : Olivier de La Forest, controlleur ; Jean Le Mignot, procureur
1484. Guillaume Calloet, miseur.
1487 (20 octobre). Ollivier Le Gluëdic, miseur (acte passé devant Du Queilen et Du Roudour, passes). Ollivier de La Forest, controlleur ; Auffray Perrot, son lieutenant ; Jean Le Noir, procureur.
1488 (22 octobre). Pierre Le Garrec, miseur ; Auffray Perrot, procureur de ville.
1489 (22 octobre). Yvon Le Borgne, miseur : Ollivier de La Forest, controlleur ; Jean Le Mignot, procureur.
1491-1492. Jean Le Borgne, par avis du lieutenant du capitaine de Morlaix : Ollivier de La Forest, contrôleur plusieurs années de suite (1490-1496 ?) —Lacune. —
1521. Ollivier Le Gac, procureur et miseur.
1522. Dominique Calloet : sa maison fut brûlée par les Anglais.
1530. Jean Forget.
1532. Jean Le Galeou. Jurats, nobles homs Guy de Lesmais Sgr dudt lieu, Pierre Le Cozic, François de Goasbriant.
1533. Jean Le Levyer (et les deux années suivantes), procureur syndic, Pezron Coroller, miseur à vingt livres.
1537 (6 mars). Jean Penzornou, procureur syndic et miseur.
1538. Etienne Marrec.
1541. Philippe de Cremeur, Sr de Lonneuguy.
1543. Jacques Peuzornou, syndic ; Jean Régollé, miseur.
1544. François Geffroy, syndic ; Jean Le Jeune, miseur.
1549. Ollivier Le Gac, miseur.
1551. Philippe Kerret, syndic.
1552. Jacques Tournemouche.
1553. Pierre de Cremeur.
1554. Yves Nouel, Sr de Trohoat.
1561. Auffray Coail, procureur syndic et premier maire. Cette année, le roi Charles IX rendit l'ordonnance suivante :
« Charles par la grâce de Dieu roy de France, à tous présents et à venir salut. Nos chers et bien amez les manans et habitans de notre ville de Morlaix en Bretagne nous ont en nôtre conseil privé presanté requeste contenant que ladite ville, qui est sittuée et assise sur un port et havre de mer est grande et bien peuplée, et se fait en icelle grand traffic de marchandises, nous supplyant très humblement pour le bien, décoration, augmentation et entretenement de la ville leur accorder un corps de ville composé d'un maire, deux echevins et douze jurats pour la police d'icelle : laquelle requeste dès le jour de feuvrier dernier nous aurions renvoyé a notre très cher et très amé cousin le duc d'Estampes gouverneur et notre lieutenant general aud, pays pour nous envoyer son avis sur le contenu en icelle, ce quil aurait fait : SAVOIR faisons qu'après avoir de rechef fait voir en notre conseil privé ladite requeste et avis et afin que ladite ville qui est l'une des principales de notre dit pays de Bretagne, bien peuplée et habitée de bons et notables bourgeois de toutes qualités et fréquentée de bons marchands tant étrangers que circonvoisins et regnicoles, soit doresnavant bien regye, poliçée et gouvernée ainsy que plusieurs autres de notre royaume et que lesdits habitans sont plus enclins et diligens à la garde, tension et défense d'icelle ; auxdits habitans de notre dite ville de Morlaix avons en suivant ladite requeste et avis donné, concédé, accordé et octroyé et par la teneur de ces présentes donnons, concédons, accordons et octroyons pour eux et leurs successeurs demeurants en ladite ville un corps, collège et communauté en icelle ville : voulons et nous plait que par la fondation, soutenement et entretenement d'icelle ils puissent tous les ans au premier jour de janvier ou autre quils aviseront, élire, avoir et choisir entreux un maire qui sera le cheff et premier de la ville, deux echevins qui seront ses accesseurs et lieutenans et douze juratz pour leur conseil, lesquels ne pourront être continués plus longtemps qu'un an fors et excepté que du nombre desdits douze juratz qui auront été de la dernière élection en demeurera six avec les six autres que l'on élira de nouveau pour l'année suivante, afin quil y aye toujours six anciens desdits juratz nouris aux affaires de ladite ville, par lesquels maire echevins et jurats ou six desdits jurats voulons et nous plait que doresnavant toutes les affaires de la ville soient conduites, régies, dirigées traitées gouvernées et policées : et pour ce faire leur avons donné et donnons pouvoir, puissance et autorité de faire statuts et ordonnances pour le fait de la police, régime et gouvernement de ladite ville et leursdits statuts et ordonnances faire inviolablement garder, observer et entretenir mottes et établir prix aux vivres, denrées et marchandises qui seront apportées en ladite ville, faire vizitations pour éviter aux abus et punir les délinquants tant par amandes pécuniaires que peines corporelles, lesquelles amandes, condamnations, jugements et sentences nous voulons être exécutées reallement et de fait nonobstant oppozition ou appellation quelquonque ; et à cette fin leur avons donné et attribué, donnons et attribuons toute jurisdiction et connaissance et de tous différens qui interviendront pour ce fait a ladite police, ensemble de tous procez et différens qui interviendront entre marchands tant forains et circonvoisins que de ladite ville pour raison du fait et trafiq des marchandises, sans que nos juges officiers desds lieux et autres s'en puissent doresnavant imminser ny entremettre, ny pareillement aux affaires de ladite ville, mesme d'être elus auxdicts Etatz de maire, echevins et juratz ; ce que leur avons très expressément inhibé et défendu, inhibons et défendons par ces présentes ; leur avons en outre donné et donnons pouvoir et puissance de faire créer et établir officiers de ville tant par le fait de leur jurisdiction que pour le régime de ladite ville, les casser, depozer et en établir d'autres en leur lieu en cas de malversation, ordonner et disposer de tous leurs deniers communs patrimoniaux et d'octrois, les recevoir ou faire recevoir par leurs mains ou bailler à ferme, contraindre leurs receveurs et fermiers à leur en tenir bon compte et reliquat, et finalement voulons et nous plaît qu'ils jouissent et uzent de tous et tels autres privilèges, pouvoir, autorité et jurisdiction dont ont accoutumé de jouir et uzer les autres maires et echevins des autres villes de notre royaume : CY DONNONS EN MANDEMENT à nos améz et feaux conseillers les gens tenant notre cour du parlement de Bretagne, etc.... Donné à St Germain en Lay au mois de VIIbre 1561 et de notre règne le premier ».

Nous n'avons rien à ajouter à ce précieux document qui clot d'une manière si décisive le laborieux enfantement d'une Communauté bretonne au moyen âge. On a vu dans cette rapide esquisse par quelle suite d'événements, amenés par l'action plus ou moins directe mais toujours intelligente de la royauté française, notre Commune arriva rapidement à une organisation si parfaite que la constituante ne trouva rien de mieux à faire que de la copier de point en point. Il n'est pas moins curieux d'étudier, dans les périodes suivantes, l'étroite opposition d'une nationalité provinciale qui voyait dans ces libertés nouvelles autant d'atteintes à la séculaire inviolabilité de ses constitutions féodales.

(Guillaume Marie Lejean).

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