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LES SEIGNEURS DE TIERCENT : LA MAISON DE RUELLAN

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Le 28 mars 1602, GILLES RUELLAN, rendant hommage au Roi pour ses terre et seigneurie du Tiercent, dit les avoir « achetées depuis six semaines d'avec les propriétaires (qu'il ne nomme pas malheureusement) partie conventionnellement et partie judiciellement » (Archives de la Loire-Inférieure, B, 1015).

Armoiries de Gilles Ruellan

Qu'était ce Gilles Ruellan dont les descendants conservèrent le Tiercent jusqu'en 1804 ? Tallemant des Réaux, dans ses Historiettes (Ed. Monmerqué, tome II, p. 34 à 37), nous fait connaître son origine ; quoiqu'il le fasse un peu longuement, nous croyons devoir reproduire ici cet article tout entier d'un contemporain :

« Rocher-Portail s'appeloit en son nom Gilles Ruellan ; il étoit natif d'Antrain, village distant de six lieues de Saint-Malo. Il servoit un nommé Ferrière, marchand de toiles à faire des voiles de navire, et ne faisoit autre chose que de conduire deux chevaux qui portoient ces voiles à une veuve de Saint-Malo, associée à Ferrière.

Il disoit que la première fois qu'il mit des souliers à ses pieds (il avoit pourtant de l'âge), il en étoit si embarrassé qu'il ne savoit comment marcher. Comme il étoit naturellement ménager, il épargnoit toujours quelque chose, et son maître ayant pris une sous-ferme des impôts et billots de quelque partie de l'évêché de Saint-Malo, lui et quelques-uns de ses camarades sous-affermèrent quelques hameaux. Il n'avoit garde de se tromper, car il savoit, à une pinte près, ce qu'on buvoit en chaque village de cette sous-ferme, soit de cidre, soit de vin.

Son maître vint à mourir. Lui se maria en ce temps-là avec la fille d'une fruitière de Fougères, femme de chambre de Mme d'Antrain. La veuve associée de ce maître, considérant que M. de Mercœur tenoit encore la Bretagne et que M. de Mongommery, qui étoit du parti du Roi, avoit Pontorson, conseille à Gilles Ruellan de faire trafic d'armes et de tâcher d'avoir passe-ports des deux partis. Elle prend trois cents écus, qu'il avoit amassés, et lui donne des armes pour cela. En peu de temps, il y gagna quatre mille écus ; mais la paix s'étant faite, il fallut changer de métier. Il disoit en contant sa fortune, car il n'étoit point glorieux, que quand il se vit ces quatre mille écus, il croyoit, tant il étoit aise, que le Roi n'étoit point son cousin.

Il arriva en ce temps-là que des gens de Paris ayant pris la ferme des impôts et billots, on leur donna avis qu'il y falloit intéresser Rocher-Portail, qu'il connoissoit jusques aux moindres hameaux des neuf évêchés. Pour lui, il a avoué depuis ingénument qu'on lui faisoit bien de l'honneur ; qu'à la vérité, pour Rennes et Saint-Malo, il en savoit tout ce qu'on pouvoit savoir, et un peu de Nantes ; mais que pour le reste, il n'en avoit connoissance aucune. Il s'abouche avec ces gens-là :

" Vous êtes quatre, leur dit-il, je veux un cinquième au profit et non à la perte, mais je ferai toutes les poursuites à mes dépens ". Ils en tombèrent d'accord et s'en trouvèrent bien. En moins de quatre ans, il les désintéressa tous et demeura seul. Il eut ces fermes-là, vingt-quatre ans durant, au même prix, et, au bout de ces vingt-quatre ans, on y mit six cent mille livres d'enchère, qu'il souffrit sans les quitter. Regardez quel gain il pouvoit y avoir fait. Il fit encore plusieurs autres bonnes affaires, car il étoit aussi de tout. Il portoit toujours beaucoup d'or sur lui, et avoit toujours quatre pochettes. Il récompensoit libéralement tous ceux qui lui donnoient avis de quelque chose.

Avec cela il étoit heureux. En voici une marque. Il alla à Tours où le Roi étoit. A peine y fut-il, que des gens de Lyon le viennent trouver, lui disent qu'ils pensoient à une telle affaire, qu'ils n'ignoroient pas que, s'il vouloit y penser, il l'emporteroit, mais qu’il leur feroit un grand préjudice, et, pour le dédommager, ils lui offroient dix mille écus. La vérité est qu'il n'y pensoit pas ; mais il feignit d'être venu pour cela à la cour, et ne les en quitta pas à moins de trente mille écus.

On l'appela Rocher-Portail, du nom de la première terre qu’il acheta et où il fit bâtir. Il acquit aussi la baronnie du Tiercent et la terre de Montaurin. Il laissa deux garçons et plusieurs filles, toutes bien mariées. La dernière eut cinq cent mille livres en mariage et épousa M. de Brissac. Il mourut un peu avant le siège de la Rochelle. C'étoit un homme de bonne chère et aimé de tout le monde. Le Pailleur, à qui Rocher-Portail a conté tout ce que je viens d'écrire, dit que cet homme, malgré toute son opulence, avoit encore quelque bassesse qui lui étoit restée de sa première fortune ; car dans une lettre qu'il écrivoit à sa femme qu'elle donna à lire au Pailleur (Rocher-Portail n'avoit appris à lire et à écrire que fort tard, et il faisoit l'un et l'autre pitoyablement), il parloit d'un veau qu'il vouloit vendre, et d'autres petites choses indignes de lui ».

Nous venons de voir que Gilles Ruellan portait habituellement le nom du Rocher-Portail, première terre importante qu'il acheta en 1596 ; il est donc convenable de dire ici quelques mots de cette seigneurie [Note : Vers le même temps que le Rocher-Portail, Gilles Ruellan acquit aussi les deux seigneuries du Plessix-Séneschal et des Renaizières, en Saint-Mard-le-Blanc].

Située dans la paroisse de Saint-Brice, la terre du Rocher-Portail [Note : Appelée aussi le Rocher-Séneschal, parce qu'elle appartint pendant plusieurs siècles à la famille Le Séneschal] jouissait d'une haute justice et relevait partie de la baronnie de Fougères et partie du marquisat de Saint-Brice. En certain cas, son possesseur devait au sire de Saint-Brice un lévrier blanc de deux ans. Comme le dit Tallemant des Réaux, Gilles Ruellan construisit avec beaucoup de goût le château actuel du Rocher-Portail, orné d'une belle galerie dans le style de Louis XIII. Cette intéressante habitation seigneuriale vient d'être artistement restaurée et meublée par son propriétaire actuel, M. le comte de Boutray. Gilles Ruellan avait laissé le Rocher-Portail à sa fille Vincente, femme de Jacques Barrin, seigneur de la Galissonnière ; leur fils, autre Jacques Barrin, marquis de la Galissonnière, le vendit en 1653 à François de Farcy, dont la famille conserva cette seigneurie jusqu’en 1754, époque à laquelle elle la revendit à Anne-Gilles Guérin, marquis de Saint-Brice.

Malgré la basse origine de Gilles Ruellan et la rapidité de sa fortune, il ne faut pas considérer ce personnage comme un vulgaire aventurier. C'était un homme de valeur qui sut se faire connaître et apprécier de nos rois. « Il rendit de grands services à Henri IV, par la part qu'il eut à la réduction des villes de Dinan et de Fougères à son obéissance ; et ce fut le motif qui lui mérita de ce monarque des lettres de noblesse, au mois de septembre 1603 ». Il reçut pour armoiries : d'argent au lion de sable, armé, langué et couronné d'or (D'Hozier et de Carné, les Chevaliers bretons de Saint-Michel, 382).

Ce fut aussi « en considération des services rendus au Roi » que le même Henri IV érigea, l'an 1608, en baronnie, les terres du Tiercent et du Rocher-Portail, que Gilles Ruellan avait achetées, et que la reine Marie de Médicis l'exempta en 1609, 1611 et 1612, du paiement des droits de lods et ventes dus par suite de ses acquisitions des seigneuries de la Mézière, de la Motte-au-Vicomte et du Plessix-Channé (Archives de la Loire-Inférieure, B. 122).

Henri IV témoigna encore sa reconnaissance à Gilles Ruellan en le nommant « membre d'épée de ses conseils d'état et privé et gentilhomme ordinaire de sa Chambre » ; enfin, par lettres du 22 mars 1610 ce bon roi le créa chevalier de l'Ordre de Saint-Michel et le fit recevoir, le 28 du même mois, par le Maréchal de Brissac, chevalier des Ordres de sa Majesté. Gilles Ruellan demeura même en faveur près de Louis XIII ; ce roi lui écrivit, le 4 août 1613, pour qu’il eût à se trouver aux Etats de Bretagne convoqués à Redon, et il lui accorda, le dernier jour de février 1622, des lettres patentes érigeant en marquisat sa terre de la Ballue [Note : D'Hozier et de Carné, les Chevaliers bretons de Saint-Michel, 382. — Gilles Ruellan avait déjà pris part aux Etats de Bretagne en 1598, mais simplement comme bourgeois de Fougères et représentant cette ville. (Maupillé, Histoire de Fougères, 186)].

Aux honneurs Gilles Ruellan joignit une grande fortune territoriale. Par suite d'acquisitions successives, il se trouvait à la fin de sa vie en possession des terres suivantes : le marquisat de la Ballue en Bazouge-la-Pérouse, la baronnie du Tiercent, les vicomtés de la Mezière, en la paroisse de ce nom, et de Kerambourg, en Landaul, — les châtellenies de Montorin, en Louvigné-du-Désert, de Texue, en Pacé et de la Lande, en Rennes, — les seigneuries dit Rocher-Portail, la Motte-au-Vicomte, la Bouexière, la Rivière, la Galesnaye, la Branche, Larrie, la Sénéchaussière, la Chapelle Saint-Etienne, etc.

Le 19 août 1622, Gilles Ruellan choisit sa sépulture dans la chapelle de Notre-Dame au haut de l'église des Grands Carmes de Rennes ; il y fit construire pour lui et pour sa femme, Françoise Miollays, un enfeu prohibitif à tout autre, du côté de l'évangile ; il y fonda à l'autel de la Vierge une messe basse quotidienne et deux messes chantées avec prières sur les tombes aux jours anniversaires de son décès et de celui de sa femme. Pour honoraires de ces messes, il assura aux religieux Carmes de ce monastère une rente de 300 livres, assise sur sa terre de la Lande, en Saint-Martin de Rennes (Archives d'Ille-et-Vilaine, 20 H. 4).

Cinq ans plus tard, Gilles Ruellan faisait son testament. Par cet acte, en date du 18 mars 1627, le baron du Tiercent ordonnait la fondation d'un hôpital à Rennes, au delà des ponts Saint-Martin, et obligeait ses héritiers à le faire bâtir et meubler en entier et à le doter d'une rente de 10.000 livres tournois (Archives municipales de Rennes, n° 447). Quelques jours après Gilles Ruellan mourait à Paris. Son corps fut apporté en Bretagne et déposé, le 31 mars 1627, dans l'enfeu qu’il s'était préparé en l'église conventuelle des Grands Carmes de Rennes, « soubs une petite arcade, près la muraille, tout au bas de dégrés de l'autel de Nostre-Dame ». Ses entrailles furent placées dans l'enfeu du Rocher-Portail ; au chanceau de l'église paroissiale de la Celle-en-Coglais.

La veuve et les enfants du baron du Tiercent refusèrent d'effectuer la fondation d'hôpital qu'avait ordonnée le défunt. Il s'en suivit de longues procédures entre eux et la Communauté de ville de Rennes, procédures terminées seulement en 1659 par la transaction suivante que suggéra l'évêque de Rennes : les petits-fils du testateur, MM. de Ruellan, de Coëtlogon et Barrin de la Galissonnière versèrent à la Communauté de Ville une somme de 55.000 livres et renoncèrent à tout droit de fondation d'hôpital. La somme versée fut placée à intérêts et la rente de 40.000 livres fut affectée aux besoins des pauvres de l'Hôpital Général de Rennes, tandis que celle des 15.000 livres restant fut attribuée aux pauvres de l'hôpital Saint-Yves de cette ville (Archives du Parlement de Bretagne, 22ème reg. fol. 81).

Gilles Ier Ruellan avait épousé d'abord Gillette Nicolas, dont il ne laissa pas d'enfants, puis Françoise Miollays, qui lui survécut plusieurs années (D'Hozier et de Carné, les Chevaliers bretons de Saint-Michel, 382) ; de cette seconde union naquirent neuf enfants, savoir :

1° Gilles II de Ruellan, baron du Tiercent, qui suit.

2° Pierre de Ruellan, vicomte de la Mezière, seigneur de Montorin et de Texue, maître des requêtes, épousa N... Maupéou et mourut en 1652 sans postérité. La vicomté de la Mezière et la seigneurie de Texue passèrent à sa soeur, Vincente de Ruellan, femme de Jacques Barrin, seigneur de la Galissonnière ; la châtellenie de Montorin échut à son autre soeur, Jeanne de Ruellan, femme de Thomas du Guémadeuc.

3° Jacques de Ruellan, conseiller en 1627 au Parlement de Metz, dont nous ne savons pas autre chose.

4° René de Ruellan, baptisé à Saint-Sauveur de Rennes, le 1er janvier 1608, par Mgr l'Evêque de cette ville et tenu sur les saints fonts par René, sire de Coëtlogon, et Vincente de Ruellan, dame de la Galissonnière. Cet enfant dut mourir sans postérité et probablement jeune.

5° Gillette de Ruellan épousa, le 9 octobre 1606, René sire de Coëtlogon ; elle mourut en 1622 et fut enterrée la première de sa famille dans l'enfeu que son père fonda à cette occasion en l'église des Grands Carmes de Rennes.

6° Barbe de Ruellan épousa vers 1600 Gabriel marquis de Goulaine elle vivait encore en 1614, quoique certain généalogiste l'ait fait mourir avant la consommation de son mariage.

7° Vincente de Ruellan s'unit en 1604 à Jacques Barrin, seigneur de la Galissonnière.

8° Jeanne de Ruellan, femme de Thomas du Guémadeuc, seigneur dudit lieu et de Québriac, gouverneur de Fougères, accusé de trahison et décapité en place de Grève à Paris, le 27 septembre 1617 ; Mme du Guémadeuc se retira au Carmel de Paris et se trouvait en 1627 sous-prieure de ce monastère.

9° Guyonne de Ruellan s'unit, le 21 février 1621, dans l'église collégiale de la Guerche avec François de Cossé, duc de Brissac et pair de France. Tallemant des Réaux lui a consacré quelques lignes dans ses historiettes : « Le feu duc de Brissac étoit une grosse bête. On appeloit sa femme le duc Guyon ; elle se nominoit Guyonne ; c'étoit elle qui faisoit tout » (Ed. Monmerqué, II, 118).

On avait chansonné les Cossé-Brissac, à l'occasion de ce mariage, parce qu'on leur prêtait la bizarre prétention de descendre de l’empereur Cocceius-Nerva :

En bonne foi, vous avez bien raison

De tant vanter votre illustre maison ;

De cette histoire on sait tout le détail,

Et comme on va

De Cocceius-Nerva

Jusqu'à Rocher-Portail

(Ed. Monmerqué, II, 37).

II

GILLES II DE RUELLAN, fils ainé de Gilles Ier et de Françoise Miollays, porta du vivant de son père le titre de vicomte de la Ballue et fut reçu conseiller au Parlement de Bretagne le 19 janvier 1613. Il épousa vers le même temps Marie d'Argouges qui lui donna un fils unique l'année suivante. Devenu baron du Tiercent et marquis de la Ballue, il mourut encore jeune et fut inhumé dans l'enfeu de sa famille en l'église des Grands Carmes de Rennes, le 19 avril 1630.

III

GILLES III DE RUELLAN, fils de Gilles II et de Marie d'Argouges, fut baptisé le 2 avril 1614, en l'église de Toussaints de Rennes et tenu sur les saints fonts par son grand-père, Gilles Ruellan, baron du Tiercent, et par sa tante, Barbe de Ruellan, marquise de Goulaine. Qualifié d'abord vicomte de la Mézière, il fut, à la mort de son père, placé, à cause de sa jeunesse, sous la tutelle de Claude d'Argouges, abbé de Saint-Quentin. A cette époque, du reste, sa grand'mère, Françoise Miollays, vivait encore et jouissait même, paraît-il, de la seigneurie du Tiercent, pour laquelle elle fit hommage au Roi en 1639 (Archives de la Loire-Inférieure, B. 1011).

Devenu baron du Tiercent et marquis de la Ballue, Gilles III se fit recevoir conseiller au Parlement de Metz et devint « conseiller du Roi en tous ses conseils d'Etat et privé et maître ordinaire des requestes de son hôtel ». Il habita ordinairement Paris et parfois le château de la Ballue. Mais, outre cette seigneurie et celle du Tiercent, il posséda plusieurs autres belles terres, car en 1653 il fit hommage au Roi pour les seigneuries de Boulande, en Bazouge-la-Pérouse, le Rozel, en Pleine-Fougères, la Chattière, en Antrain, la Bouexière, en Sougeal, etc. (Archives de la Loire-Inférieure, B. 1011 et 1034).

Le baron du Tiercent mourut à la Ballue le 29 février 1676 ; son corps fut transféré et inhumé le lendemain dans son enfeu, en l'église paroissiale du Tiercent.

Gilles III de Ruellan avait contracté deux unions : de la première, avec Françoise Le Maistre, il eut deux filles, Marie et Françoise ; de la seconde, avec Claude de Netz, il eut trois garçons, Gilles, Claude et Guillaume. Parlons successivement de chacun d'eux :

1° Marie de Ruellan se maria trois fois ; elle épousa : 1° Antoine, marquis d'Argouges, 2° le sieur de Nouville, 3° Hyacinthe de Quatrebarbes. Son second mariage déplut tellement à son père, que le baron du Tiercent la déshérita, par acte notarié du 6 juin 1674, de ce qu'elle pouvait attendre de lui et de sa défunte mère (Archives d'Ille-et-Vilaine, Tabellions : Bretin). Son troisième mari fut mieux accueilli, car c'était un personnage de quelque importance : Hyacinthe de Quatrebarbes, marquis de la Rongère, chevalier de l'Ordre du Roi et chevalier d'honneur de S. A. R. la duchesse d'Orléans, était né en 1644 et avait d'abord épousé en 1662 Françoise du Plessix-Châtillon ; devenu en secondes noces époux de Marie de Ruellan, il perdit cette dernière en 1699 et mourut lui-même le 22 décembre 1703 à Paris, où il fut inhumé dans l'église des Grands-Augustins, près le Pont-Neuf.

2° Françoise de Ruellan naquit à la Ballue et fut baptisée le 28 janvier 1647 en l'église de Bazouge-la-Pérouse ; elle y eut pour parrain et marraine Pierre Artur et Raoulette Ory.

3° Gilles IV de Ruellan, baron du Tiercent, qui suit.

4° Claude de Ruellan, né vers 1650, prit aussi le titre de baron du Tiercent, quoiqu'il ne semble pas avoir joui de cette seigneurie appartenant à son frère aîné. Par contrat judiciel du 27 avril 1709, Claude de Ruellan acheta la terre et la seigneurie du Plessix-Chesnel ou Plessix-Chalonge, saisie sur Anne Beccard, dame de la Rairie, et située en la paroisse de Pleine-Fougères. Claude y fixa sa résidence, et trois ans plus tard, le 15 juin 1715, épousa non loin de là, dans la chapelle du manoir du Chastellier, au Vieuxviel, Anne-Thérèse du Breil, fille de René du Breil et d'Anne-Thérèse de Bréhant, seigneur et dame du Closneuf. De cette union sortirent quatre enfants : Claude de Ruellan, né le 22 mars 1713, officier dans le régiment Royal-Cravates et tué à la bataille de Fontenoy le 11 mai 1745, — Judes de Ruellan, né le 20 novembre 1715 et décédé le 3 février 1717, — Augustin-René de Ruellan, seigneur du Plessix-Chesnel, appelé alors Plessix-du-Tiercent, marié en 1750 à Françoise-Magdeleine de la Moussaye, et décédé à Rennes sans postérité le 17 mars 1782 ; sa veuve vivait encore pendant la Révolution, — Renée-Magdeleine-Angélique de Ruellan, née le 19 janvier 1719 (Abbé Paris-Jallobert, Revue historique de l'Ouest, III, 137).

Claude de Ruellan, seigneur du Plessix, âgé d'environ 75 ans, mourut le 10 mai 1725 et fut inhumé, d'après ses dernières volontés, dans le cimetière de Pleine-Fougères. Anne-Thérèse du Breil, sa veuve, se retira au couvent des Bénédictines de la Victoire, à Dinan, où elle mourut, âgée de 60 ans, le 5 juillet 1749.

5° Guillaume de Ruellan, né vers 1653, embrassa la vie religieuse dans la Congrégation des Génovéfains de l'abbaye de Rillé, près de Fougères. Devenu en 1697 prieur-recteur de Saint-Ouen-des-Alleux, il fit l'année suivante enregistrer ses armoiries : d'argent au lion de sable, couronné d'or. Ce chanoine régulier fut rappelé en 1724 par son abbé au monastère Saint-Pierre de Rillé, où il décéda, âgé de 73 ans, au mois de janvier 1726.

IV

GILLES IV DE RUELLAN, né vers 1649 et fils aîné de Gilles III et de Claude de Netz, portait en 1670 le titre de marquis de la Ballue, du vivant même de son père, qui se contentait de se faire appeler baron du Tiercent, quoiqu'il résidât à la Ballue. Gilles IV, nommé conseiller-commissaire au Palais de Rennes le 20 novembre 1676, se fit recevoir le 21 janvier suivant conseiller au Parlement de Bretagne. Héritier, à la mort de son père, de la baronnie du Tiercent et du marquisat de la Ballue, il vit cette dernière seigneurie saisie par ses créanciers et mise judiciairement en vente au mois de juin 1689. Elle fut adjugée à sa soeur consanguine Marie de Ruellan, alors femme séparée de biens d'Hyacinthe de Quatrebarbes, marquis de la Rongère. Cette dame vint habiter la Ballue, où elle fit plusieurs fondations pieuses. A sa mort, arrivée en 1699, Gilles IV rentra en possession du marquisat de la Ballue pour lequel il fit aveu au Roi le 5 janvier 1700 (Archives d'Ille-et-Vilaine, E).

Le baron du Tiercent se maria tardivement comme son frère Claude ; il avait 50 ans quand il épousa le 31 mai 1701, dans la chapelle du manoir de la Haye, paroisse de Saint-Hilaire-des-Landes, Renée-Roberte du Louet de Coëtjunval, âgée seulement de 24 ans et nièce de Louise de Canaber, dame de la Haye-Saint-Hilaire. Le mariage fut célébré par Guillaume de Ruellan, prieur de Saint-Ouen-des-Alleux, en présence de Claude de Ruellan, autre frère du marié et qualifié seigneur du Tiercent, tandis que Gilles IV est dit marquis de la Ballue.

Gilles IV de Ruellan mourut à Rennes, en son hôtel de la rue Hux, paroisse de Saint-Pierre-en-Saint-Georges le 29 mai 1721. Son corps fut transféré et inhumé le 1er juin, en l'église paroissiale du Tiercent, « dans le tombeau de ses ancestres ». Sa veuve, Renée du Louet, prit possession de la baronnie du Tiercent, « en remplacement de ses deniers dotaux aliénés par lui et en vertu d'un acte passé entre eux deux le 31 août 1720 ». Aussi fit-elle hommage au Roi pour cette terre le 9 janvier 1731 (Archives de la Loire-Inférieure, B. 1035). Elle décéda en son hôtel, près la Motte-à-Madame, à Rennes, en Saint-Pierre-en-Saint-Georges, le 1er juillet 1750, et fut inhumée dans l'église de cette paroisse le 3 de ce mois.

De l'union de Gilles IV de Ruellan avec Renée du Louët de Coëtjunval naquirent treize enfants :

1° Charles-Jean de Ruellan, né à Rennes le 16 avril 1702, baptisé le lendemain en l'église de Saint-Pierre-en-Saint-Georges, et tenu sur les saints fonts par Charles Le Meneust, marquis de Bréquigny, et Jeanne de Muzillac, comtesse du Gué de Servon. Cet enfant mourut à La Ballue le 6 avril 1708.

2° Mauricette-Pauline de Ruellan, née à Rennes le 23 avril 1703 et tenue sur les fonts baptismaux de Saint-Pierre-en-Saint-Georges, par Paul, comte de Robien, et Mauricette de Canaber de Kerlouët ; elle épousa en 1724 René-Georges Saget, seigneur de la Jonchère et d'Eancé, comte de Coësmes ; elle le perdit le 30 avril 1733 et décéda comme lui au manoir du Boisfeillet, en Martigné, le 23 septembre 1748 ; ils furent inhumés l'un et l'autre dans l'église de Martigné.

3° Joseph-René de Ruellan, baron du Tiercent, né en 1704, qui suit :

4° 0llivier-Claude de Ruellan, né à Rennes et baptisé le 5 juin 1705 en l'église Saint-Pierre-en-Saint-Georges ; il eut pour parrain Mgr. Jégou de Kervillio, évêque de Tréguier, et pour marraine Jeanne du Louët de Coëtjunval. Cet enfant devint lieutenant de vaisseau et mourut en 1746.

5° François-Auguste de Ruellan, né à Rennes et baptisé le 31 janvier 1708, en l'église Saint-Pierre-en-Saint-Georges, tenu sur les saints fonts par François de Brécheu et Jeanne du Louët ; il mourut jeune et fut inhumé au Tiercent, le 16 mai 1711.

6° Anne-Marie de Ruellan, née à la Ballue et baptisée à Bazouge le 15 septembre 1711, tenue sur les fonts baptismaux par Joseph Tuffin, comte de la Rouairie, et Thérèse Le Prestre, dame de Bréhant ; elle mourut le 13 décembre suivant.

7° Achille-Louis de Ruellan reçut les cérémonies, baptismales le 29 décembre 1712 à Bazouge, des mains de son oncle, Guillaume de Ruellan, prieur de Saint-Ouen-des-Alleux ; il eut pour parrain Jacques de Robien, vicaire général de Vannes, et pour marraine Louise de Robien, fille du président au Parlement. Achille de Ruellan, reçu en 1727 chevalier de Saint-Jean de Jérusalem, fut tué au mois de mai 1734 en revenant de Malte en France.

8° Gilles-Thomas de Ruellan, baptisé à Bazouge le 23 février 1716, habitait la Ballue quand, simple acolyte, il fut pourvu de la commande de l'abbaye de Beaulieu, en Mégrit ; il en prit possession le 16 septembre 1739 et fut fait sous-diacre le 19 du même mois. Il mourut en 1748, étant aussi chanoine et vicaire général de Saint-Brieuc.

9° Jean-Marie de Ruellan fut tenu sur les fonts baptismaux de Bazouge, le 15 février 1717, par Jean de Rosnyvinen et par Anne du Breil, dame du Plessix du Tiercent, sa tante ; devenu seigneur du Rozel, en Pleine-Fougères, il décéda, après 1733, sous-lieutenant au régiment de Rosnyvinen.

10° Angélique-Marie de Ruellan, baptisée à Bazouge le 16 mars 1719, mourut en 1741.

11° René de Ruellan, décédé en 1734.

12° Joseph de Ruellan, décédé en 1741.

13° Thérèse-Gabrielle de Ruellan, mentionnée en 1721.

V

JOSEPH-RENÉ DE RUELLAN, fils de Gilles IV et de Renée du Louët, naquit à Rennes le 18 mars 1704 et fut baptisé le lendemain en l'église Saint-Pierre-en-Saint-Georges ; son parrain fut Jacques-Renaud de la Bourdonnaye, seigneur de Blossac, et sa marraine Renée Le Borgne de Lesquiffiou, comtesse de Béthune. Reçu, le 26 août 1723, conseiller commissaire aux requêtes du Palais, à Rennes, il acheta en 1727 l'office de conseiller non originaire au Parlement de Bretagne, vacant par la mort de Robert Denyau, seigneur du Tilleul. Marquis de la Ballue et baron du Tiercent, il n'entra en jouissance de cette dernière seigneurie qu'en 1750, après la mort de sa mère. Il fit alors hommage au roi pour ces deux terres.

Joseph-René de Ruellan épousa le 26 avril 1733, en l'église de Toussaints de Rennes, Hélène-Modeste de Lambilly, née en 1707 de Pierre-Joseph, comte de Lambilly, et d'Hélène Magon de la Lande. Il emmena de suite sa femme à la Ballue, où réception solennelle lui fut faite : « Le samedi au soir, jour Saint-Marc, 25 avril 1733, le messager de Bazouge à Rennes arriva sur les 6 heures du soir à Bazouge, et à peine eut-il déchargé sa voiture, qu'il se mit à battre le tambour, avertissant les bourgeois de se mettre le lendemain sous les armes pour faire honneur à la nouvelle dame que M. du Tiercent nous amenoit. Le lendemain matin on donna encore les mêmes avis. Peu à peu les hommes capables de porter les armes s'assemblèrent en grand nombre et marchèrent jusqu'à Saint-Remy-du-Plain, avec M. de Saint-Germain qui les conduisait, tenant la place du sieur de la Croix-Morel, ancien lieutenant de la milice bourgeoise. Tous les officiers de la juridiction de la Ballue montèrent à cheval et se dirigèrent vers Saint-Remy et tous ensemble arrivèrent à Bazouge sur les 6 heures et demye du soir ; M. du Tiercent, accompagné de son cousin M. du Plessix, à cheval, et les dames en litière, tambour battant, le fusil à l'épaule et au son de trois cloches qui sonnèrent un temps assez considérable ; et tout ce peuple conduisit M. du Tiercent et sa compagnie jusqu'à son château de la Ballue ; et ils ont reçu de fréquentes visites de tous les gentilshommes voisins et des bourgeois » [Journal ms. de Berthelot, curé et maître d'école de Bazouge (Notes ms. de l'abbé Paris-Jallobert)].

Pendant quelques années le baron du Tiercent partagea son temps entre la Ballue et Rennes. Il habita plusieurs hôtels en cette ville : d'abord, avant son mariage, dans la rue Hux, puis en 1742 dans la rue de Volvire, paroisse de Toussaints, enfin en 1780 sur la place Saint-Pierre, en Saint-Etienne. C'est dans cette dernière maison qu'il mourut, âgé de 77 ans, le 4 avril 1781 ; son corps fut inhumé le lendemain dans l'église paroissiale de Saint-Etienne, à Rennes.

Sa veuve, Hélène de Lambilly, mourut pendant la Révolution en Saint-Sauveur de Rennes, rue du Griffon [Note : Dans le même hôtel qu'habitait son mari avant de mourir ; cet hôtel avait des entrées sur la place Saint-Pierre et sur la rue du Griffon ; il faisait naguère partie de la maison de l'Oratoire de Rennes et portait encore le nom d'hôtel du Tiercent ; l'écusson des Ruellan s'y trouvait sculpté sur la porte de la rue du Griffon], le 21 juin 1791 ; son corps fut transféré au Tiercent et inhumé dans l'église de cette paroisse le 23 juin (Registre des sépultures de la paroisse du Tiercent).

De René-Joseph de Ruellan et d'Hélène de Lambilly naquirent quatre enfants :

1° Renée-Laurence-Modeste de Ruellan, née et ondoyée à Rennes le 21 février 1734 ; les cérémonies du baptême lui furent suppléées le 28 du même mois en l'église de Toussaints et elle fut nommée par son grand-père, le comte de Lambilly, et sa grand'mère, la douairière du Tiercent. Elle épousa, dans la chapelle du château de la Ballue, le 20 juin 1752, Charles-Paul-Auguste de Musuillac, enseigne de vaisseau et fils du seigneur de Pratalo, en Cléden-Poher. De cette union naquit une fille, Renée-Marie-Modeste de Musuillac, morte au berceau le 2 juillet 1753. Mme de Musuillac ou Muzillac vivait encore à Paris en 1810.

2° Céleste de Ruellan, née à la Ballue le 23 février 1736 et décédée au même château le 26 octobre 1639. Elle fut inhumée le lendemain dans la chapelle prohibitive du seigneur de la Ballue en l'église de Bazouge.

3° Louis-Charles de Ruellan, baron du Tiercent, né en 1741 et dont nous parlerons à l'instant.

4° Marie-Céleste de Ruellan dont nous ignorons la date de naissance, ne contracta pas d'alliance. Elle vécut à Rennes, s'occupant de bonnes oeuvres ; en 1785 elle se trouvait l'une des six dames de charité dirigeant avec les religieuses de Saint-Thomas de Villeneuve la maison de l'Enfant-Jésus ou Hôtel des Demoiselles ; elle vivait encore en 1796.

VI

LOUIS-CHARLES DE RUELLAN, fils unique de René-Joseph et d'Hélène de Lambilly, naquit à Rennes le 16 juillet 1741 et fut tenu le même jour sur les fonts baptismaux de Toussaints par Charles, chevalier de Lambilly, et Louise de Robien, dame de Châteaugiron. D'abord capitaine de cavalerie et fait chevalier de Saint-Louis, il devint, à la mort de son père, marquis de la Ballue et baron du Tiercent ; il fit hommage au roi pour ces deux seigneuries le 5 août 1784 (Archives de la Loire-Inférieure, B, 993). Antérieurement au 9 août 1781, il épousa Marie-Josèphe de Lavaulx, veuve de Louis-René Saguier, marquis de Luigné ; ils habitaient Paris en 1781, en leur hôtel de la rue de Tournon, paroisse de Saint-Sulpice.

Le baron du Tiercent se trouvait en Bretagne en 1788 et y signa alors l'adresse au roi envoyée par la noblesse de la province pour demander le rétablissement du Parlement de Rennes.

Louis-Charles de Ruellan perdit sa femme avant la Révolution. Il prit part à l'émigration et vit sa fortune confisquée et vendue nationalement. Il mourut sans enfants et dernier de son nom, âgé de 78 ans, le 4 juin 1819, exilé à Essen près de Dusseldorf, au royaume de Prusse, chez le baron de Sousfeld qui l'avait généreusement accueilli au temps de son émigration. (Guillotin de Corson).

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