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CAHIER DE DOLÉANCES DE LOPERHET EN 1789

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Subdélégation de Landerneau. — District de Landerneau, arrondissement de Brest, canton de Daoulas.
POPULATION. — 200 feux (Procès-verbal). — 1.300 habitants (OGÉE) ; 196 feux et. 1.151 habitants en 1794.
CAPITATION. — 191 cotes (3 l. et au-dessous : 73 ; au dessus : 118). Total 1.118 l. 13 s. 7 d. (capitation, 763 l., 21 deniers p. l. 66 l. ; milice, 101 l. ; casernement, 186 l.).
VINGTIÈMES. — 1.500 l. 18 s.
FOUAGES. — 11 feux 1/3. — Total : 401 l. dont. 240 l. 17 s. 2 d. pour f. ext.
CORVÉE. — Route Landerneau-Le Faou, 560 toises. Dist. 7 kilom. Cap. 1,215 l.
La cure est présentée par l'ordinaire et un chanoine de Daoulas On y remarque des terres très fertiles et quelques cantons de landes. (OGÉE).
C'est en Loperhet, au village de Kersanton, sur la rivière de Daoulas, que se trouvaient les belles carrières de granit bleu, dit de « Kersanton », employé depuis le moyen âge dans l'ornementation des églises de Basse-Bretagne.
RECTEUR. — Jannou, 1.200 l. à 1.380 l. — Jannou, maire de Loperhet en 1790, prêta le serment, puis se rétracta. Il fut en 1790 électeur du canton de Plougastel à l'assemblée du département où il fut élu membre du conseil général du Finistère. — Décimes : R. 67 l. F. 38 l. — Dîmes à l'abbaye de Daoulas.

PROCÈS-VERBAL. — Assemblée électorale, le 7 avril, au lieu ordinaire des assemblées, par devant Ollivier Le Gall, greffier de la paroisse. — Comparants : René Goubin de Kerdaniel, Claude Kerdraon, etc... (voir les signataires du cahier) « et autres qui ne savent pas signer ». — Députés : René Goubin (voir la note qui suit) et Claude Kerdraon.

Note : René Goubin, avocat, électeur du canton de Plougastel-Daoulas aux assemblées du département et du district de Landerneau en 1790 et 1791 ; président de ce district en 1791 ; maire de Loperhet, en l'an IX, ou il figure sur la liste des notabilités départementales.

 

Cahier des doléances, plaintes et remontrances des habitants, fermiers et laboureurs de la paroisse de Loperhet, du diocèse de Quimper, en Basse-Bretagne, dressé et rédigé au lieu ordinaire des assemblées de la dite paroisse.

Après une délibération libre et réfléchie et de l'avis général et unanime de tous les habitants convoqués, en vertu des ordres du roi portés par ses lettres données à Versailles...

1° — Demandent et sollicitent, les fermiers, laboureurs et habitants de Loperhet, l'extinction absolue de la corvée des grands chemins [Note : Les parties en italiques, dans les art. 1 à 6, sont empruntées à la lettre des députés de Tiers, à Rennes, du 5 janvier 1789], lesquels, jusqu'au moment actuel, sont tracés, faits et construits par les seuls habitants, fermiers et laboureurs des campagnes, à leurs frais et à celui de l'ordre du Tiers et qui retentissent depuis bien des années de nos gémissements.

Nous implorons, en conséquence, l'autorité royale et la justice de notre bienfaisant et tendre père Louis XVI, notre bon roi, et demandons l'intervention de l'ordre du Tiers aux Etats généraux pour l'obtention de tous les amendements justes et raisonnables dus, pour l'avenir, à nos travaux, sueurs, fatigues et dépenses considérables.

2° — Demandent et sollicitent, les dits laboureurs et fermiers de Loperhet, que l'imposition des fouages soit supportable par les trois ordres de la province de Bretagne, MM. du Clergé, de la Noblesse et du Tiers, et non à la charge seule du Tiers.

3° — Demandent, les mêmes habitants, l'abolition du tirage des canonniers garde-côtes ou que, dans le cas que le gouvernement ne jugeât pas à propos d'abolir ce tirage, nous demandons et sollicitons pour eux la solde et nourriture requises et convenables, pour tous les temps et circonstances qu'il serait jugé à propos de se servir de cette troupe toujours infiniment plus utile aux travaux de l'agriculture qu'avantageuse au gouvernement dans les camps, forts ou batteries (voir la note qui suit).

Note : La milice garde-côtes, plusieurs fois réorganisée XVIIème siècle et XVIIIème siècle, notamment par l'édit et le règlement du 28 janvier 1716, est recrutée par la voie du sort, dans les paroisses voisines des côtes. Toutes les paroisses des sénéchaussées de Quimper et de Concarneau y sont assujetties, à l'exception de Briec, Trégourez, Laz, Coray, Landrévarzec, Scaër et Tourch (Arch. du Finistère, B 4268). Depuis l'ordonnance du 13 décembre 1778, les miliciens appelés « canonniers-garde-côtes » sont, en Bretagne, au nombre de 10.000, répartis en compagnies de 50 hommes. La durée du service est de cinq ans. L'évêché de Quimper fournit, à lui seul, près du quart de cet effectif (2.219 h.) et contribue à la dépense entraînée par la garde-côtes pour 14.201 l. (Cf. CARON, op. cit., pp. 188 et sqq : H. BOURDE DE LA ROGERIE, Invent. sommaire des Archives du Finistère, t. III, Introduction, pp. XXVII à XLIX).

4° — Demandent et sollicitent que la capitation en Bretagne, à la charge du Tiers, portée à un excès exorbitant et surtout la contribution de la paroisse de Loperhet par son voisinage avec l'évêché de Léon. Il est de la justice de notre bon roi d'ordonner que la contribution de cette imposition, en Bretagne, soit commune aux trois ordres, proportionnellement aux facultés des individus des trois ordres et que cette imposition soit assise par un seul et même rôle. Qu'il soit ainsi à l'avenir pour toutes impositions, sans division, partage, ni levée particulière en faveur d'aucun des trois ordres.

5° — Réclament et sollicitent les dits habitants de Loperhet, la justice de Sa Majesté royale pour qu'il lui plaise de commander, ordonner et faire connaître que sa volonté est qu'à l'avenir les députés du Tiers aux Etats de la Bretagne, pour y pouvoir librement prendre les intérêts de leur ordre, en défendre les droits, seront en nombre égal aux députés réunis de MM. du Clergé el de le Noblesse et qu'ils y voteront par tête et non par ordre et qu'ils soient aussi en même nombre que les deux premiers ordres, ecclésiastiques et nobles, dans toutes les commissions intermédiaires des neuf évêchés de Bretagne et dans toutes autres assemblées et que les députés du Tiers soient élus tant des habitants des campagnes que des villes.

6° — Se plaignent encore les mêmes habitants, des sommes considérables qui se distribuent, dans la province, en pensions à beaucoup de MM. de la Noblesse et en entretien des maisons d'éducation pour les deux sexes du même ordre. En conséquence, ils demandent que cette dépense énorme ne soit plus prise sur l'ordre du Tiers, mais seulement sur la Noblesse, si elle juge à propos de continuer cette prodigalité, et sur l'ordre du clergé, si sa grande opulence le portait à se prêter au partage de cette généreuse et bonne œuvre.

7° — Remontrent et sollicitent les mêmes habitants de Loperhet, la justice et l'autorité de Sa Majesté pour les faire décharger du charroi des bagages des troupes qui passent par la ville de Landerneau, de la manière dont ils ont joui de tous les temps, jusqu'à l'époque de la fin de la dernière guerre qu'ils ont été recherchés seulement par les maires de la communauté et ville de Landerneau.

L'exemption des paroissiens de Loperhet avait été trouvée juste et fondée en raison par MM. les Commandant et Intendant de la province pour les charrois des bagages des troupes de la ville de Landerneau (voir la note qui suit) :

Note : Le maire (ou le syndic) du lieu d’étape reçoit, chaque année, le tableau de recensement des chevaux et harnais des paroisses de la subdélégation. Lors du passage des troupes, « il fait connaître à chaque syndic son contingent ; le syndic doit le repartir au turne entre les contribuables » (A. DUPUY, op. cit., chap. II, dans Annales de Bretagne, t. IV, p. 553).
Pendant que Loperhet essaie de se faire exempter, la paroisse de Kersaint-Plabennec, dans la même subdélégation, « remue ciel et terre pour se faire attacher au département de Brest », plus favorisé. « Un mauvais département, en effet, est celui de Landerneau, où se croisent plusieurs routes et où s'arrêtent toutes les troupes qui vont à Brest ou en reviennent. Les réquisitions y sont continuelles et accablantes » (Ibid., p 554).

a) Parce que deux ou trois bras de mer des rivières de Châteaulin et Landerneau coupent les terres de la paroisse en plusieurs endroits et interceptent le passage des charrettes en plusieurs endroits, dans les temps des marées, et il est alors nécessaire et d'obligation que les voitures fassent un grand circuit. Aussi leur faut-il pour l'ordinaire deux jours et deux nuits pour l'aller et le revenir, surtout et principalement pour les charrois à Morlaix, distant de douze lieues de leur domicile ;

b) D'ailleurs, il paraît encore un autre motif d'exemption pour la paroisse de Loperhet et qui déterminera sans doute l'autorité à la lui accorder. C'est que cette paroisse fournit souvent des voitures par ordonnance de M. l'intendant de Brest, tant pour le transport des bois de construction qu'autres fournitures pour le service de ce port et que, de plus, le quart des habitants, agriculteurs, sont employés au service de la marine comme patrons de gabarres, tant du roi que des particuliers, matelots de cette petite navigation el de celle des vaisseaux de guerre. Elle ose donc espérer de la bonté et justice du roi qu'elle jouira, comme au passé, de l'exemption des charrois des troupes qui passent à Landerneau, n'étant pas juste qu'ils servent le roi, de terre et de mer en même temps.

8° — Remontrent encore les mêmes habitants, qu’il est de notoriété publique et connu généralement de tous les cultivateurs éclairés, patriotes, humains, judicieux et politiques, que le plus grand bien et le plus grand avantage qu'on peut accorder aux habitants et fermiers des campagnes, ce serait de faire observer rigoureusement par les greffiers, en général et, particulièrement par ceux des basses juridictions, les ordonnances de nos rois et les arrêtés et règlements de notre cour souveraine. Car il est incroyable combien sont vexatoires les perceptions illégales qu'ils extorquent et enlèvent des campagnes pour les inventaires, ventes et partages, et que ces hommes portent pour le moins à la moitié plus qu'il ne devrait leur revenir pour vacations, s'ils suivaient les lois qui leur sont prescrites (1). Mais partout ils font des marchés avec les parties qui sont obligées de se servir de leur ministère, tantôt forcément et par menaces de prolongement de journées, tantôt parce qu'il est de l'intérêt des parties, soit des tuteurs ou veuves, que les inventaires ne soient pas bien exacts. Aussi les marchés une fois convenus et payés, c'est le tuteur ou la veuve ou un homme à eux qui font les inventaires et le greffier ne paraît plus que pour la vente qui se fait pour l'ordinaire, quand il y a marché, dans un jour.

Note : Le tarif des vacations des officiers des juridictions seigneuriales fut fixé par un arrêt de règlement du Parlement de Bretagne, du 13 août 1744. Ces officiers recevaient 4 l. « pour leurs journées en commission et 8 l. quand ils étaient hors commission » (SÉE et LESORT, op. cit., p. 128). — Ces vacations furent portées à 5 l. 6 s, et 10 l. 12 s. en 1786. Mais, en fait, les tarifs n’étaient pas appliqués. D’autres part, les greffiers prolongeaient indûment leurs opérations, en réduisant chaque vacations à de très courtes séances. Sur ces abus, voy. GIFFARD, Les justices seigneuriales en Bretagne, pp. 105 et 271.

9° — Sollicitent encore les mêmes habitants de Loperhet, la bonté paternelle dit roi pour jouir de la liberté de mouture des grains, laquelle bien examinée ne préjudicierait pas réellement aux propriétaires des moulins, mais seulement aux meuniers qui moudraient mal le blé comme ils le font généralement aux mouteaux assujettis à leurs moulins.

10° — Sollicitent et demandent les habitants, fermiers et laboureurs de la paroisse de Loperhet, qu'il plût à Sa Majesté de rendre et promulguer une loi qui défendît rigoureusement à tous fermiers et habitants des campagnes d'assigner en justice, à l'avenir, pour raison d'injures verbales ou dommages causés par chevaux, bêtes à cornes ou autres animaux, sans que préalablement les plaignants n'aient exposé leurs griefs devant les douze délibérants de la paroisse où les faits seraient passés ou de six hommes de chaque paroisse, connus par leur grande probité et désintéressement, qui seraient nommés et choisis par chaque paroisse, qui s'emploieraient pour pacifier et arranger les difficultés (voir la note qui suit). A défaut de pouvoir y parvenir dans les délais de trois semaines, du jour des faits arrivés, les dits pacificateurs feraient un rapport par écrit des moyens et propositions d'accommodement par eux faits aux parties et qu'ils remettraient aux juges devant qui les parties seraient assignées. Cette loi bienfaisante et bien digne de la bonté de notre roi pour ses peuples épargnerait aux agriculteurs des sommes immenses. ll est notoire et connu de tout le monde qu'on a vu et qu'on y voit journellement compter en frais à des fermiers des quarante et cinquante écus, parce que leurs animaux auraient dans un champ, pré ou garenne de leurs voisins, brouté une heure ou même moins de temps et occasionné peut-être 20 ou 30 sols de perte. Il est encore connu dans les campagnes qu'il y existe des habitants qui font le métier de gagner de l'argent aux dépens de leurs voisins, en mettant les chevaux et les bêtes de ces derniers, nuitamment, dans des terres de leurs dépendances, etc…

Note : Il existait, en Basse-Bretagne, un usage trés ancien, le « lamp-goal », qui déterminait la procédure à suivre en cas de dommages causés par les bestiaux, « Le plaignant devait, avant d’actionner en justice l’auteur du dommage, le mettre en demeure, devant témoins, de choisir un estimateur pour fixer la valeur du dommage, contradictoirement avec l’estimateur nommé par le plaignant. En cas de discord, les estimateurs prenaient un tiers de leur choix et l’indemnité ainsi arbitrée était acceptée comme juste et souverainement appréciée. — L’on s’en tenait généralement au dédommage. L’action en justice était refusée au demandeur qui ne justifiait pas l’accomplissement de la formalité préalable de l’estimation. Les exploits pour dommages de bestiaux étant devenus rares, les huissiers jetaient les hauts cris » (LIMON, Usages et règlements locaux du Finistère, p. 425). — Cf. POULLAIN-DUPARC, Grande Coutume, p. 742.

11° — Autorisons nos députés, électeurs à l'assemblée de Quimper, d'ajouter aux présentes doléances, plaintes, remontrances et représentations, toutes celles, arrêtées par la communauté de ville de Quimper et autres paroisses des campagnes, non portées ni mentionnées par les présentes, en tous les articles qu'ils trouveront convenables et opportuns.

Fait, au lieu ordinaire de nos assemblées, avec toutes les formalités prescrites, ce jour, 7 avril 1789.

Goubin de Kerdaniel, Claude Kerdraon, Joseph Gourvès, François Gall, Jérôme Le Bot, Urbain Kerléau, Yves Le Brenner, Alain Gourmelon, Jean Keromnès, Joseph Brenner, François Le Moal, Mathieu Brenner, Joseph Prigent, Claude Kervella, Michel Calvez, Paul Kerdraon, Yves Sanquer, Ollivier Le Gall [Note : Ollivier Le Gall fut électeur du canton de Plougastel-Daoulas aux assemblées du département et du district de Landerneau en 1792], greffier de la paroisse de Loperhet.

(H. E. Sée).

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