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NOTRE-DAME DE LOCMARIA

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Au moment où l'on se dispose à ériger à Notre-Dame de Loc-Maria un piédestal vraiment digne de la vénérée Protectrice de Quimper, peut-être n'est-il pas sans intérêt de jeter un regard vers le passé et de rappeler quels antiques et pieux souvenirs sont attachés à son sanctuaire, le plus ancien dont il soit fait mention dans l'histoire du pays.

Locmaria-Quimper : L'église de Loc-Maria (Bretagne).

I. — Les origines.

Si l'on en croit les traditions les plus dignes de foi, confirmées par les faits, Loc-Maria, faubourg actuel de Quimper, occupe la place de l'ancienne civitas Aquilae, ou Aquilonia. En effet, « le sol de ce quartier, dit M. de Blois N. DE BLOIS. De quelques antiquités de la ville de Quimper, est tout jonché de débris de tuiles romaines sur une surface assez étendue ; on y rencontre même des traces reconnaissables de constructions romaines, tandis qu'à peine on a pu trouver des vestiges de cette nature dans l'emplacement de la cité moderne [Note : M. LE MEN (Monographie) dit qu'on a trouvé des fragments de tuiles romaines sur l'emplacement de Bourlibou. Loc-Maria et Bourlibou étaient autrefois réunis par un pont]. Enfin, c'est vers ce centre que convergent les anciennes voies que l'on a pu suivre dans nos environs. Là était la principale agglomération, le lieu des réunions politiques .... ».

Jusqu'à l'arrivée de saint Corentin, « c'était, suivant toute probabilité, dans la principale agglomération, c'est-à-dire à Loc-Maria que se trouvait l'église où se réunissaient les fidèles. C'était, sans doute, le pauvre temple érigé dès le temps de saint Clair, et, comme aux premiers siècles on ne changeait pas sans de graves motifs l'emplacement d'une église qu'il fallait reconstruire, non plus que le vocable sous lequel elle avait été érigée nous avons tout lieu de croire que Notre-Dame est honorée à Loc-Maria depuis la prédication de la foi en Armorique, c'est-à-dire depuis les premiers temps du christianisme.

« Ce serait dans ce vieux sanctuaire de la Mère de Dieu que saint Corentin aurait pris possession de son siège épiscopal c'est là qu'il aurait célébré solennellement les saints mystères, jusqu'au jour où il consacra l'église, plus vaste et plus belle, élevée par ses soins » (M. le chanoine THOMAS. Saint Corentin).

Cette opinion se trouve confirmée par un très ancien martyrologe d'Usuard, moine du IXème siècle, qui donne à saint Corentin le titre d'episcopus civitatis Aquilae, rappelant ainsi par cette « qualification que sa chaire était placée non pas à Quimper, mais à Loc-Maria ».

Lorsque « saint Corentin, dit Albert-le-Grand, prit possession de son siège et célébra pontificalement la messe, Grallon vint à l'offrande et offrit à Dieu et au saint Prélat son palais qu'il avait dans Kemper et grand nombre de terres et possessions... Ce pieux prince, non content des dons qu'il avait faits au saint évesque, fonda la cathédrale et, pour laisser la ville libre à saint Corentin, il en retira sa cour et la transporta en la fameuse ville d'Is ».

Aquila, où d'antiques traditions plaçaient la demeure des anciens comtes de Cornouaille, se trouva-t-elle immédiatement abandonnée après le départ du roi et de l'évêque ? M. de Blois ne le pense pas. « Les vieilles traditions qui nous enseignent que Grallon fit abandon à saint Corentin du palais qu'il possédait entre les deux rivières, pour y fonder le monastère où il résidait, ne doivent pas être prises à la lettre. Il y a apparence que ce palais n'était pas autre chose que l'ancien castellum [Note : M. LE MEN dit aussi qu'un oppidum y avait été établi, dès l'époque gallo-romaine, par les habitants d'Aquila]. Le clergé insulaire qui vint à la suite de l'émigration bretonne vivait sous la discipline monastique d'un institut fort austère. Ces prêtres fuyaient la demeure des villes et recherchaient la solitude. Saint Corentin dut préférer ce séjour à celui de la cité d'Aquila. Il lui suffisait d'en être assez rapproché pour veiller aux besoins spirituels de ses habitants et pour aller célébrer, dans son temple, les grandes solennités du Christianisme ».

Il est donc probable qu'il en fut ainsi à l'origine. Mais de nombreuses habitations ne tardèrent certainement pas à venir se grouper autour du palais, transformé en monastère, et de l'église qu'y fit construire saint Corentin, et le centre de la vie s'y trouva transporté insensiblement: de sa situation au confluent des deux rivières, l'Odet et le Steyr, la nouvelle ville tira le nom sous lequel elle sera désormais connue, Kemper, confluent [Note : Ce palais n'était pas la seule habitation existant alors au confluent ; car nous savons que des Corisopites émigrés de la grande Bretagne, et auxquels devaient appartenir les parents de saint Corentin, s'y étaient fixés vers le IVème siècle, ce site leur rappelant le pays natal : de là le nom de Corisopitum, donné dans certains actes à la nouvelle bourgade qu'il ne faut pas confondre avec la cité gallo-romaine, Aquila].

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Aquila cependant conservait encore au XIIème siècle une certaine importance ; car on trouve son église qualifiée Sancta Maria in Aquilonia civitate, dans un acte de Budic, mort en 1022, et Ecclesia Beatae Mariae in Aquilone, dans une charte de Henri II, roi d'Angleterre, de l'an 1172 [Note : Dans une charte du duc Conan IV (1156-1169), une maison des Frères Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, située à l'entrée de la rue Vis, est appelée Hospitale quod est inter duos Kemper : à cette époque la rivière baignait les rochers du Frugy et les communications entre ces deux agglomérations rivales se faisaient par le pont de Loc-Maria et un petit hameau qui, à cause de sa situation, fut nommé Bourg-lez-Bourgs].

Il est donc permis de croire, avec M. de Blois, que le « déplacement eut lieu à la suite des irruptions des Normands, aux IXème et Xème siècles. Dès la première apparition de ces barbares, le peuple et le clergé de la Cornouaille furent frappés d'une si grande terreur, que l'on songea à mettre à l'abri ce que l'on possédait de plus précieux…….. On peut présumer que leurs hordes dévastèrent la cité d'Aquila ……… ». Ses habitants, après avoir cherché un refuge dans la nouvelle ville, d'une défense plus facile, continuèrent sans doute à y habiter après la retraite des Normands [Note : Aquila n'était pas entièrement dépourvue de moyens de défense : elle était dominée par trois postes militaires établis sur la hauteur occupée aujourd'hui par les Likès, dans les champs qui bordent l'ancienne route de Douarnenez, à l'Ouest du Sacré-Cœur, et sur le mont Frugy, à Parc-ar-Groas].

Aquila appartint, pendant toute la période qui s'étend du IVème siècle aux débuts du XIème siècle, à la mouvance des évêques de Cornouaille. En se retirant de la ville, au moment de l'intronisation de saint Corentin, Grallon dut, en effet, lui en laisser l'administration temporelle. On ne peut douter que ce pieux monarque tint à honneur d'assurer à son saint ami une situation au moins analogue à celle qu'avaient alors les autres évêques des cités gallo-romaines : or, à cette époque, l'évêque était généralement choisi par les populations comme defensor civitatis, et détenait en même temps la puissance religieuse et la puissance civile.

Un document où il est dit qu'Alain Canhiart reprit à son frère Orscant, évêque de Cornouaille, locum Sanctae Mariae qui prius erat Corisopitensis episcopi, vient à l'appui de cette opinion.

Mais la vieille cité ne demeura pas longtemps en la possession du comte de Cornouaille ; peu après, celui-ci en faisait donation au monastère où sa fille Hodierne se consacrait à la vie religieuse.

Aquila est devenue, comme on vient de le voir, locus Mariæ. Désormais, Loc-Maria est bien réellement « le lieu », la propriété de Marie. C'est à la vénération dont la Mère du Sauveur continue à y être l'objet, c'est au monastère fondé à l'ombre de son vieux sanctuaire qu'il est redevable du peu de vie qui lui reste.

Locmaria-Quimper : L'église de Loc-Maria (Bretagne).

II. — Le monastère.

Ce monastère était une fondation faite par les rois, confirmée et enrichie par les comtes de Cornouaille et leurs successeurs devenus ducs de Bretagne ; il existait donc avant 874, date de la mort du dernier roi, Salomon.

C'est ce qui résulte d'un acte de 1152, dans lequel l'évêque Raoul qualifie ce monastère donum regale ab antiquis Britannorum ducibus scilicet Cagnardo, Hœllo, Alano, Conano instructum et juste confirmatum, et de trois donations qui lui furent faites par Budic, évêque et comte de Cornouaille, mort en 1022, et par Alain Canhiart, son fils, décédé en 1050.

Budic donnait Sanctæ Mariæ in Aquilonia civitate des dîmes à Gourlizon, un territoire compris entre la borne mæn Tudi, la croix près la montagne Chuchi (Frugy), la fontaine Pabi et le fleuve Oded, en présence de Gurchi, gubernante locum.

Lors des deux donations, faites, peu après, par Alain Canhiart, Sanctæ Mariæ et filiæ suæ Hodiernæ abbatissæ de diverses terres, En Chillio (Le Quilliou),... de dîmes à Ploaré, d'un moulin dans la Forest de Fuinant, de la moitié du bourg où est situé le monastère, dimidiam villam ubi monasterium est, nous voyons figurer comme témoins, pour la première, Gurchi abba cum clericis suis : pour la seconde, Hisoch abbas, Gurloen, capellanus et Orduthal monacha, et Fredeburga, et Lisoia, et Milesindis et Maria.

Ces actes, outre qu'ils nous font connaître des terres et héritages demeurés jusqu'à la Révolution en la possession du prieuré, sont importants parce qu'ils prouvent qu'il existait à Loc-Maria : 1° au moment de la fondation de Budic et de la première donation d'Alain Canhiart, un monastère de religieux gouvernés par un abbé, Gurchi, gubernante locum, Gurchi abba cum clericis suis ; 2° lors de la seconde donation, un double monastère, l'un de religieux gouvernés par un abbé, Hisoch abbas, sans doute le successeur de Gurchi, l'autre de religieuses gouvernées par une abbesse, Hodiernœ abbatissæ, Orduthal monacha, avec un chapelain Gurloen capellanus.

Ce monastère de religieux devait remonter à l'époque où les évêques abandonnèrent Aquila : ne peut-on supposer, en effet, qu'ils tinrent à ce que la vieille église continuât, après leur départ, à être dignement desservie ?

Quant au monastère de religieuses, il semble avoir été fondé par Alain Canhiart pour sa fille Hodierne, qui en aurait été la première abbesse.

Un siècle plus tard, en 1120, Conan III, le Gros, donnait l'abbaye de Loc-Maria à Marie, abbesse de Saint-Sulpice de Rennes. Ce don, ratifié en 1124 par Robert, évêque de Cornouaille, était confirmé en 1152 par son successeur, Raoul.

Fondée, en 1112, par Raoul de la Fustaye, disciple de Robert d'Arbrissel, cette abbaye suivait la règle de Fontevrault, dont la particularité consistait en l'existence simultanée de « deux monastères, l'un de religieuses gouvernées par une abbesse, supérieure de tout l'établissement, et l'autre de religieux soumis aux religieuses, en souvenir de l'obéissance de saint Jean à la Sainte-Vierge retirée chez lui ».

Loc-Maria, devenu simple prieuré, en passant sous la dépendance de Saint-Sulpice, dut se ranger sous la même règle ; mais les documents que nous venons de voir ne nous permettent-ils pas de supposer que la règle sous laquelle vivaient autrefois les deux monastères de Loc-Maria ne devait pas en différer beaucoup ?

Quoi qu'il en soit, il continua à y avoir, après l'annexion, un double monastère. Dans « une sentence de 1182, Barthélémy, archevêque de Tours, fait, en effet, mention du prieur et des religieux de Loc-Maria, reverendum priorem et fratres de loco Mariæ, et des religieuses du même monastère, moniales ibidem Domino servientes, et il distingue ces religieux du prêtre ou curé de la paroisse qui ne portait pas l'habit de leur ordre, clericus non habens habitum religionis illius ibidem constitutus, lequel il déclare soumis à l'autorité et à la juridiction de l'archidiacre » (Mémoire, présenté pour la Prieure Jeanne de Talhouët, par Julien Lelièvre-Duval).

Dans divers documents de 1347 à 1486, « il est question d'un Prieur et d'une Prieure à Loc-Maria avec ses religieuses ; mais on ne parle plus de religieux vivant sous la conduite d'un Prieur. Il est donc probable qu'au XIIIème siècle le monastère d'hommes [Note : Ce monastère, dédié à saint Colomban, s'élevait dans le champ connu encore aujourd'hui sous ce nom. Dans un aveu de 1689, il est fait mention « d'une ruine et vestige d'un vieux monastère et chapelle dédiée à saint Colomban »] disparut et le Prieur, comme dit un mémoire de 1750, fut un religieux bénédictin faisant près les religieuses l'office de chapelain » (M. le chanoine PEYRON. Bulletin Archéologique).

« Selon arrêt du 9 Juillet 1731, il a été reconnu, dit ce mémoire, que la paroisse de Loc-Maria, unie au prieuré, avait été desservie premièrement par des bénédictins choisis par la prieure et que, dans la suite, elle s'était servie de prêtres séculiers auxquels elle donna d'abord la nourriture, et après une portion congrue sur son prieuré. Mais maintenant elle est exempte de payer cette portion congrue. Car en 1495 les curés étaient payés par la prieure parce qu'ils étaient en même temps aumôniers du prieuré et chapelains amovibles ; mais depuis que. Loc-Maria est érigée en paroisse, le vicaire est perpétuel et le prieuré a son aumônier particulier qui, lui, est payé comme les chapelains en 1495. Depuis qu'il y a des vicaires perpétuels, la communauté leur a abandonné tous ses droits rectoriaux de dimes, neufmes et pension, et dès lors n'est pas tenue à leur payer une portion congrue, n'ayant retenu de sa qualité de recteur primitif que le droit honorifique de présentation ».

Donner une liste détaillée des abbesses et des abbés, des prieures et des prieurs, des chapelains et vicaires perpétuels qui, pendant près de huit siècles, se sont succédé à Loc-Maria, depuis l'abbesse Hodierne jusqu'à la prieure Marie-Anne Le Rouge de Guerdavid, ne serait-ce pas s'écarter du but de cette notice ?

Citons cependant [Note : Ces renseignements sont pris dans une notice manuscrite de M. le chanoine PEYRON, qui nous l'a communiquée avec son obligeance connue] : Clémence Martin (1463) fait constater que « toutes fois que icelle prieuresse fait venir bûches pour la provision du prieuré par mer ou rive en la rue Vis, le dit prieuré le fait notifier par ses sergents o le son de ses campanes et fait injonction aux paroissiens de venir porter la buche en la cour à l'heure indiquée ».

Andrée de Belloneau (1492-1498), Gabrielle de Morais (1577), furent élues et bénites abbesses de Saint-Sulpice dans le but de faire rentrer Loc-Maria sous la dépendance de l'abbaye.

Péronnelle Milon (1499-1534), « pour conserver le droit du prieuré, fit mettre ses armes en bosse sur plusieurs endroits de la chapelle du Pénity », construite sur l'emplacement d'une croix qui servait de borne au fief du prieuré [Note : Elle fit planter, dans ce même but, une rabine de Loc-Maria au Pénity].

Françoise de Beauce, nommée prieure en cour de Rome (1555) sur résignation de Françoise Landays, prit possession par procurateur qui « entré dans l'église baisa l'autel, toucha les fonts baptismaux, sonna la cloche, ouvrit les portes de l'église et du prieuré ».

Michel Le Nobletz se fit entendre à Loc-Maria pendant le carême de 1614, et le Père Maunoir, sous Marie de Bourgneuf, dame de Cucé, en 1631 et 1633 [Note : La clôture établie en 1632 ne devait pas être rigoureuse, car Françoise de Talhouët assistait à la consécration de l'église du Calvaire (1667)].

Marguerite de Bréhant (1648-1659) intervint dans un curieux procès relatif au parcours de la procession Tro an Minihy, qui se faisait à Loc-Maria, jusque vers la fin du XVIIème siècle, le dimanche du Sacre, après vêpres, pour marquer les limites où s'exerçait le droit d'asile dont jouissait le Prieuré.

« Toutes les terres enclavées sous le tour de cette procession étaient exemptes de dîmes. Dès lors, Crec'h-Maria huelaff étant compris dans ce tour de procession ne devait pas la dîme. Cette raison eût été excellente si..., depuis quelque temps, le parcours de la procession n'avait pas été modifié, à cause du mauvais état du chemin traditionnel en certains endroits ».

Voici, d'après le procès-verbal des notaires qui suivirent la procession du 2 Juin 1652, quel en était l'itinéraire : « laquelle procession sortie de l'église aurait pris sa routte tout au long de la rue et chemin qui conduit à la chapelle Notre-Dame de Pénity, où estans un peu avant d'entrer soulz les rabines elle aurait monté en la montagne de Frugny, continué au long d'icelle jusqu'au bout nort du parc menez, dépendant de Créac'h Maria huelaff, puis entrée en un petit chemin au long et au costé du levant du mesme parc an justiçou et prins son détour au bout d'iceluy, et continué le mesme chemin tout du long du parc an justiçou, des parc an lan et an tirien bras, dépendant du dit Cree'h-Maria et puis entre les terres de Penarstang et Kerdrezec jusques au parc an Gourinou, dépendant du dit Kerdrezec jusques au fossé d'iceluy du costé de l'occident jusques au grand chemin conduisant du dit Locmaria à la chapelle Saint-Laurent, et de là estans rendus en la Croas Minihy elle aurait pris le chemin au gauche de la dite croix pour se rendre à Crec'hbustull et puis continuer sa route ordinaire par Poulguinan pour se retourner au dit Loc-Maria ».

Ce droit d'asile s'exerçait, on le voit, sur un territoire assez étendu : ce fait n'était pas rare chez les Bretons qui fournissaient ainsi au réfugié des moyens d'existence sur le sol où il trouvait un abri.

Jeanne de Talhouêt (1684-1703) fit rédiger par Julien Le Lièvre-Duval un long mémoire destiné à prouver les origines et l'indépendance du Prieuré, et rendit en 1689, un aveu détaillé des droits et privilèges de Loc-Maria.

Malgré les efforts de Jeanne-Thérèse de Freslon de Saint-Aubin (1719-1729) la communauté de ville refusa de rétablir le pont qui reliait Bourlibou à Loc-Maria : c'était couper en deux le fief et la paroisse [Note : Le 28 Août 1360, il y eut près de ce pont une assemblée des habitants de la ville, où il fut convenu que Charles de Blois s'abstiendrait de faire battre monnaie dans la ville, avant d'avoir obtenu l'autorisation de l'évêque].

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Le Prieuré de Loc-Maria, il est intéressant de le remarquer, est le seul monastère de religieuses qui ait existé avant le XVIIème siècle dans le diocèse de Quimper et dans celui de Léon.

Si à cette raison on ajoute « l'ancienneté du prieuré remontant au IXème siècle ; la dignité des pieux fondateurs rois et ducs ; le choix que les filles les plus considérables du pays ont toujours fait de ce monastère pour lieu d'asile, la communauté ayant toujours été composée de filles de naissance ; l'heureuse éducation qui y était donnée » [Note : Requête adressée au Roy par la prieure Renée Françoise Marigo (1732-1762)], on s'expliquera facilement quelle était l'importance du Prieuré de Loc-Maria et les nombreux droits et privilèges dont il jouissait.

La Prieure prenait le titre de « Prieure du Prieuré ducal et royal du grand Locmaria et du Quilliou [Note : Le Quilliou dépend de Plonévez-du-Faou depuis 1790].

Elle avait droit à haute, moyenne et basse justice ; — privilège du chanceau pour elle et ses religieuses y être inhumées, clef sur le dit chanceau et dedans banc et accoudoire, tombe élevée du côté de l'Evangile ; — de percevoir les offrandes qui se font au chanceau et chœur, lesquelles elle laisse de grâce aux fabriques pour être employées aux réparations de l'église ; — de présentation et nomination du vicaire perpétuel de Locmaria et de Gourlizon, des fabriques de Locmaria ; — divers droits et dîmes sur Quéven [Note : « 8 venées de froment à la Saint-Michel, 3 moutons à la Saint-Mathieu, 3 fouasses à la Saint-Pierre, 3 gélines en Janvier et 60 oeufs à la Quasimodo »], en Pouldergat ; Saint-Philibert de Kerven, en Trégunc ; Elliant [Note : « Droit de dîme à la 66ème gerbe sur les seigles et avoines, accordé par les anciens ducs à charge de faire célébrer chaque année une messe à chant et deux messes basses le jour de Saint-Gilles ». La Prieure était aussi « tenue tous les jours avec ses religieuses faire oraisons pour le repos des âmes des anciens ducs et de celles de leurs successeurs, et faire dire 3 messes par semaine, une à chant le dimanche et deux autres basses le mercredi et le vendredi »] ; — d'avoir ses écussons sur la maîtresse vitre de Gourlizon, au premier soufflet ; — de percevoir sur les personnes qui font nopces à Locmaria, les poissonniers du dit Locmaria ; — sur bâtiments et barques qui viennent au port de Quimper ; — de permettre à ses dits paroissiens et sujets de pêcher en mer, de poser pierres tombales en l'église ; — four à ban et moulin à mer ; — d'obliger les habitants de garder les religieuses, en temps de guerre….

La paroisse était exempte de dîme, taille, fouage et toute autre imposition.

Les paroissiens de Saint-Fiacre du Faouët étaient du fief de Locmaria….

…….. « Soutient la dite dame que sa procession est en droit de passer par le chœur de la cathédrale (Quimper), le dimanche de la Trinité avant qu'on commence l'évangile de la grand'messe, et là pendant qu'on chante l'évangile, le sergent de chœur doit présenter la patène au vicaire de Locmaria qui fait faire l'offrande à ses paroissiens.

Que ses prédécesseuses étaient anciennement en droit, et elle par conséquent, de donner franchise à toute personne prévenue de crime qui se serait réfugiée au dit Locmaria sous la cloche.

Appartient à la dite dame d'avoir une foire par an, à chaque 16 Août, en la ville de Locmaria, avec faculté d'établir des halles pour la commodité des marchands sur la grande place.

Ses prédécesseuses, elle et ses successeuses ont droit d'obliger le seigneur évêque à son avènement à l'épiscopat de Quimper de venir en habit de pèlerin frapper à la porte de la dite abbaye ou prieuré demander à loger ; auquel l'abbesse ou prieure doit ouvrir la porte, lui doit ôter son manteau et ses gants, et son procureur fiscal prendre son cheval qui lui doit demeurer, et appartenir à la dite dame le manteau et les gants, laquelle lui doit laver la tête et les mains, lui donner logement, un charlit et de la paille fraîche, du pain de seigle et de l'eau, et le lendemain avant de sortir doit laisser à la dite dame sa bougette et ce qui est dedans [Note : Voir dans Évêché et ville de Quimper, de M. DU CHATELLIER, le curieux procès-verbal de l'entrée solennelle de Guy du Bouchet en 1480. François Milon le reçut au prieuré de Loc-Maria, en qualité de Prieur commandataire].

Les confins de la paroisse donnent d'Orient sur le vieux chemin par où passait autrefois la procession nommée Trominihy ; d'Occident, sur le chemin qui mène de Quimper au Calvaire, et sur une venelle qui va du bout du Pont au couvent des Capucins ; du Midy au ruisseau d'eau qui dévalle de la fontaine de Pratmaria jusqu'au petit Poulguinan qui sépare le fief de Locmaria de celui des Reguaires ; et du Nord à la fontaine près la chapelle N.-D. du Pénity et coin de parc aux patibulaires sur le haut de la montagne Cuchi ou Frugy, et le sentier qui sépare le fief de Loc-Maria de celui de Saint-Laurent ».

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Marie-Anne Le Rouge de Guerdavid (1766-1792), était prieure lorsque, le 16 Février 1791, la municipalité de Loc-Maria vint inviter les 22 religieuses qui composaient la communauté à se choisir une supérieure et une économe, en conformité des décrets des 13 Février et 14 Octobre 1790.

Toutes les religieuses signèrent le procès-verbal constatant leur refus formel de s'y conformer.

Les administrateurs du département leur retinrent leur pension tant qu'elles ne seraient pas constituées.

Le 8 Février 1792, elles y consentaient, sous cette condition que les élections se feraient au grand parloir et qu'elles se rendraient à la grille.

Les commissaires n'accédant pas à ce désir proposèrent « de former l'assemblée dans leur réfectoire, dans leur chœur et si elles aimaient mieux dans leur église extérieure, ce qui devait entrer dans leurs vues, parce que les portes de leur maison resteraient closes ».

Les Bénédictines restant inébranlables dans leur résolution, les commissaires durent se retirer. Mais le lendemain, sur les instances de leurs supérieurs ecclésiastiques, elles se soumettaient cependant et les élections avaient lieu.

Cette concession ne devait éviter aucun désastre : à la fin du mois de Septembre, elles étaient expulsées, en même temps que les Calvairiennes.

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M. Lalau, aumônier des Bénédictines et recteur de Loc-Maria, avait été « autorisé par le Département à donner aux personnes de ce quartier les secours spirituels; mais comme il refusait le serment, Expilly et ses vicaires ne cessaient de le menacer, lui défendant de recevoir dans son église la foule qui s'y rendait de la ville et de la campagne pour y entendre la messe, se confesser et recevoir la sainte communion. Le recteur ne voulant, et ne pouvant, quand il l'aurait voulu, empêcher cette affluence, on mit des gardes, les dimanches et fêtes, afin de s'opposer à l'entrée des étrangers. Cela dura ainsi jusqu'au moment où la municipalité de Quimper envoya, la nuit, des gens armés pour arrêter M. Lalau... » [Note : M. le chanoine TÉPHANY : Histoire de la Persécution religieuse dans les diocèses de Quimper et de Léon]. Averti par des amis, il put se mettre à l'abri et passer en Espagne.

Plusieurs Bénédictines de Loc-Maria demeurées à Quimper promirent de vivre soumises aux lois civiles et politiques de la République, mais refusèrent de prêter le serment de haine à la Royauté, exigé par le décret du 17 Fructidor an V pour toucher la petite pension que leur accordait l'Etat en échange de leurs biens confisqués [Note : Du CHATELLIER : Le Finistère et la Persécution religieuse après le 18 Fructidor an V].

Le monastère et l'église, devenus biens nationaux, furent transformés en magasins ; la statue de Notre-Dame, œuvre du XVème siècle, ne put être soustraite aux profanations ; elle fut brisée [Note : Le 13 Décembre 1793 probablement, par la bande qui, sous la conduite de Dagorn, avait saccagé la cathédrale, la veille] en deux tronçons, et ces tronçons, ainsi que la tête de l'Enfant Jésus, furent ensuite gravement mutilés. Ces débris purent être recueillis et pieusement conservés dans la paroisse, par les soins de Mme de la Hubaudière, jusqu'au rétablissement du culte à Loc-Maria.

Ajoutons que c'est dans le cimetière, qui n'existe plus, que furent enterrés l'abbé Raguénès, vicaire à Landudec, mort en odeur de sainteté sur l'échafaud, le 13 Avril 1794, et A. Nédélec, le chef des révoltés de Fouesnant.

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Ce qui précède nous donne une opinion assez exacte sur Loc-Maria, monastère et paroisse, sur leur fondation, sur leur situation respective, sur les usages et les privilèges dont ils jouissaient au cours des siècles passés.

Aussi combien doit-on regretter l'absence de documents sur la dévotion et le culte dont la statue de Notre-Dame était l'objet !

Sans aucun doute, les habitants de Quimper qui, dans leur piété pour Marie, élevaient dans cette ville les églises de Notre-Dame du Pénity et de Paradis, qui plaçaient les délibérations de leurs édiles sous la protection directe de Notre-Dame du Guéodet, en faisant de sa chapelle leur Hôtel de ville, n'oubliaient pas le vieux sanctuaire de Notre-Dame de Loc-Maria.

Autrefois, comme aujourd'hui, ils la considéraient comme la Protectrice de la Cité, et avaient recours à sa puissante intercession dans les grandes calamités et dans certaines circonstances particulières.

Nous n'en voulons pour preuve que les cérémonies qui eurent lieu les 4 Septembre 1768, 8 Juillet 1782 et 6 Mai 1785.

« Les pluies ayant été très abondantes, et ne permettant pas de ramasser la moisson, sur une requête présentée par MM. le Maire et échevins de Quimper, après avoir fait déjà trois processions, les trois jours précédents, pour obtenir de Dieu un temps favorable, le jour suivant qui était un dimanche... on procède, en présence du chapitre, du bas choeur, du clergé, des prêtres de Saint-Mathieu, des Cordeliers et des Capucins, du Présidial et de l'Hôtel-de-Ville, à la descente du Bras de Saint-Corentin.

Pendant huit jours, ... la relique resta exposée ; ... tous les jours on fit la procession, ... tous les corps y assistèrent ...

Le dimanche suivant, on fit la clôture de cet octave par une procession générale. La veille dès midi, on annonça cette cérémonie par le son de toutes les cloches, également que le soir à sept heures, et lendemain à midi. Ce jour donc, à l'issue des complies, se fit la procession solennelle à l'église paroissiale de Loc-Maria. Kerfeunteun et Loc-Maria y furent invités, outre ceux qui avoient assisté aux précédentes processions. On arriva à Loc-Maria dans le même ordre et M. l'Evêque, qui officioit à la procession, y donna la bénédiction du Saint-Sacrement. On revint ensuite à la cathédrale, où rendus, on chanta les prières ordinaires, et ensuite on remit la relique en sa place ordinaire, en chantant Pange solemnes » (Titre de la fabrique de Saint-Corentin.).

 

III. — La paroisse.

Seul des divers sanctuaires dédiés par Quimper à la sainte Vierge, celui de Loc-Maria subsiste aujourd'hui.

Après le rétablissement du culte, M. Lalau, recteur de la paroisse avant 1790, y avait repris ses fonctions, le nouveau propriétaire lui ayant conservé la jouissance du presbytère, vendu révolutionnairement ; par suite de cette circonstance, ce ne fut qu'à sa mort, survenue vers 1810, que les habitants de Loc-Maria se trouvèrent privés de tout ministère religieux efficace. Les administrateurs de la chapelle nommés par Mgr Dombideau de Crouseilhes, lorsque, sur ses vives instances, l'église fut évacuée par la Marine et rendue au culte en 1816 [Note : La chapelle Sainte-Barbe, située contre la grande église, à son Levant, fut démolie à cette époque. Elle était en ruines], pouvaient, en effet, à grand peine assurer une messe dite chaque mois par un vicaire de Saint-Corentin et des catéchismes faits, les jeudi et dimanche, par des abbés du séminaire.

Le conseil de fabrique, institué le 4 Octobre 1847 par Mgr Graveran près la chapelle de Loc-Maria, comptait dans son sein M. Aymar de Blois, député à l'Assemblée nationale, archéologue distingué et que le culte des souvenirs du passé passionnait à juste titre.

Chrétien en même temps que savant, il pensa, avec raison, que la présence d'un prêtre était nécessaire au milieu de cette population ouvrière de 400 âmes, privée de tout enseignement religieux, à cause de son éloignement de l'agglomération paroissiale.

Il conçut alors le projet, non seulement d'obtenir l'érection en paroisse de l'église qu'il préservait ainsi de la destruction qui la menaçait, mais encore de faire une restauration aussi complète qu'il serait possible de ce monument, curieux Spécimen de l'architecture romane.

La tâche était ardue ; mais les difficultés n'étaient pas faites pour arrêter M. de Blois.

Vivement encouragé par Mgr Graveran et fermement appuyé par la municipalité, il obtenait en 1854, Dieu sait au prix de quelles peines, le classement de l'église de Loc-Maria comme monument historique, et la cession par l'administration de la guerre du transept Sud de l'église, du chœur des religieuses et du terrain nécessaire à la construction d'un presbytère.

Le principal obstacle se trouvant ainsi écarté, Loc-Maria fut érigé en succursale, par décret de Napoléon III, du 25 Avril 1857, et en paroisse, le 29 Juin suivant, par acte canonique de Mgr Sergents.

Ce fut un beau jour, et dont on conserve encore le souvenir, que celui du 12 Juillet 1857 où l'on vit la double cérémonie de la prise de possession de la paroisse et de l'installation de son premier recteur, M. Robic [Note : Après Robic se sont succédé comme recteurs de Loc-Maria : MM. Berthévas, 1866 ; Guillou, 1870 ; Le Guével, 1872 ; bourg, 1874 ; Rospars, 1891 ; Robinaud, 1896], présidée par un enfant de Loc-Maria, Mgr François-Marie Pellerin, évêque de Biblos, vicaire apostolique de la Cochinchine septentrionale. Obligé d'interrompre le cours de son apostolat par une violente persécution, l'évêque missionnaire s'était trouvé comme conduit par la Providence pour rehausser de sa présence la première manifestation religieuse dont était l'objet, depuis la Révolution, le vieux sanctuaire près duquel s'étaient écoulées son enfance et sa jeunesse.

L'église était alors dans un état de délabrement à peine concevable et qui s'explique : pendant plus de vingt ans, elle avait servi de magasin à la Marine ; la toiture était en si mauvais état, qu'il devenait impossible de la réparer sans la refaire à neuf ; les séminaristes qui faisaient le catéchisme ne pouvaient y demeurer, tant les vitraux du Nord étaient en ruines ; les autels de Saint-Pierre et Saint-Antoine étaient inondés par la pluie ; le transept Sud et le chœur des religieuses, cédés par la guerre, avaient servi de « logis de four et de dépôt des fagots et ajoncs employés comme combustibles de ce four » (Archives de la Fabrique de Loc-Maria).

Tout manquait : avec un en-caisse de 645 fr. 96, il fallait pourvoir à tout ! Un appel adressé par le conseil de fabrique fut entendu au delà de toute espérance ; dons en nature et en argent lui parvinrent, et il se mit à l’œuvre pour parer au plus pressé.

De passage à Rome, Mgr Pellerin obtenait de Pie IX, le 16 Novembre 1857, de précieuses indulgences perpétuelles. Le 27 Juin 1858, une mission bretonne et française, prêchée par MM. Levicomte et Quéré, renouvelait l'esprit de foi de la population et se terminait par l'érection, sur les bords de l'Odet, d'une croix en pierre, simple et élégante.

Grâce au concours de la municipalité, qui dans la suite ne sera jamais vainement sollicitée par Loc-Maria, le presbytère fut construit en 1860, et le bras de croix méridional entièrement dégagé.

On pouvait donc aborder la grande question de la restauration de l'église, vaste construction de 40 m. 40 sur 14 m. 45 (M. le chanoine ABGRALL : Livre d'or des églises de Bretagne) qui remonte au XIème siècle, si ce n'est même au IXème siècle « Il est probable, dit M. Mérimée (Notes d'un voyage dans l'Ouest de la France), frappé de son apparence d'antiquité, que l'église de Loc-Maria a été bâtie au XIème siècle sur les ruines d'une église beaucoup plus ancienne ; et il serait possible que les piliers de la nef appartinssent à cette première construction ».

M. Abgrall ne croit pas « cette supposition inadmissible ; car l'église de Loc-Maria offre dans sa structure certains points communs avec Saint-Philibert-de-Grand-Lieu qui est de 815 et 835, la petite église de Germigny-les-Prés, aussi du IXème siècle... ».

Bâtie en forme de croix latine, la vieille église, par l'élégance de ses proportions et par le caractère élevé qui règne dans la simplicité rudimentaire de ses travées et des transepts, aurait présenté, dans son ensemble, un type des plus curieux et des plus intéressants de diverses périodes de l'architecture romane, sans les mutilations qui la déparaient et dont la plus frappante, celle qui en dénaturait le plus l'aspect, était l'altération de l'abside correspondante à la grande nef.

Cette abside, reconstruite au XVIIème siècle dans le style ogival par les Bénédictines, était immense, informe et hors de proportion avec le reste de l'église ; l'absidiole Sud avait été démolie pour faire place au chœur des religieuses ; un mur, qui allait du sol à l'arcature, isolait complètement de l'église le transept Sud ; le pavage était détruit ; les toitures dans un état pitoyable...

Aussi peut-on juger quelles difficultés, presque insurmontables, comportait une semblable entreprise, surtout avec le peu de ressources dont on disposait.

Le chœur aurait pu être réparé à peu de frais : mais nous l'avons dit, ce que désirait M. de Blois, ce n'était pas une simple mise en état de la vieille église ; il voulait une véritable et intelligente restauration de ce monument réputé le plus ancien du diocèse.

Un plan de restauration générale était soumis par M. Bigot, le 10 Janvier 1859 : le devis se montait à 23,763 fr. 02. Comment se procurer une somme aussi élevée ? Il n'importe !

Le 6 Avril 1865, le préfet, M. le baron Richard, autorisait une loterie de 9,600 billets, devant produire 4,800 fr. : ce fut le premier fonds.

Après de longues et pénibles démarches, la fabrique parvenait à réunir 6,300 fr. ; la municipalité lui assurait 3,000 fr. ; le Département, 1,000 fr.; les Monuments historiques, 6,700 fr. ; le Ministère des Cultes, 6,000 fr. ; la fabrique prenait à sa charge le complément, 763 fr. 02. Les travaux commençaient aussitôt, en Février 1868.

Détail à noter : consulté par M. Bigot sur les proportions qu'il convenait de donner à l'abside, le savant jésuite, le P. Tournesac, eut une inspiration : sur ses indications, on perce les fouilles et l'on retrouve les fondations romanes de la première abside...

Pendant trente ans, recteurs et fabriciens n'eurent d'autre souci que celui de compléter cette œuvre de restauration : c'est ainsi que furent successivement reconstruits les transepts Sud (1873) et Nord (1876), les absidioles Sud (1870) et Nord (1894), que les lambris et les pavages [Note : A signaler : dans le pavage du collatéral Nord, la tombe d'Alain de Penleu, prieur vers 1420 : dans le jardin du presbytère, trois arcades d'un cloître roman ; dans le cloître (XVIIème siècle), la croix romane qui surmontait le transept Nord, une statue d'évêque en pierre calcaire du XIIIème siècle ou XIVème siecle, une pierre tombale de prieure, 1656 ; la croix qui se trouvait dans le cimetière, se voit aujourd'hui au cimetière Saint-Louis] furent refaits, les fonts baptismaux remis à leur place naturelle (1894)...

La décoration de l'église n'était pas négligée : un chemin de croix (1860) et une chaire en chêne (1876), avec panneaux de faïence rappelaient l'industrie locale ; de nouveaux autels (1870), des confessionnaux (1894) étaient placés ; un vitrail (1898) rappelait l'ancien saint Christophe du bas de l'église, si connu de Quimper ; un autre vitrail, et une statue, destinée à conserver le souvenir de la mission de 1896, attestaient que le culte de saint Antoine, patron des potiers, est toujours en honneur [Note : Un vitrail, don de M Robic, représentant une Assomption, marque, au fond de l'abside, la place occupée autrefois par la statue de Notre-Dame de Loc-Maria].

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La dévotion dont Notre-Dame de Loc-Maria est l'objet ne se manifeste généralement pas par de grands mouvements de population : c'est isolément que l'on s'achemine, par les belles allées du bord de l'Odet, et que dans le calme et le silence de la vieille église, on vient confier à la bonne Vierge ses peines et ses espérances.

Les modestes et nombreuses offrandes déposées dans son tronc, qui ont permis d'orner son sanctuaire et de solliciter les concours publics pour le restaurer, plus peut-être que les ex-voto qui entourent son antique statue, témoignent que ce n'est pas en vain que l'on s'adresse en ce lieu à sa puissante intercession.

Aussi ne doit-on pas regretter la foule qui, au jour du 15 Août, envahissait autrefois la place et les alentours du vieil édifice. Le pardon de Loc-Maria, devenu aujourd'hui par extension celui de Quimper, se fait désormais sur les allées, et rienne vient plus troubler la prière des dévots pèlerins de Notre-Dame.

Trois fois par an, les portes de l'antique sanctuaire s'ouvrent devant la foule nombreuse qui s'y presse : depuis 1892 [Note : Cette imposante manifestation religieuse est due à l'initiative de M. le chanoine de Penfentenyo, curé-archiprêtre de la cathédrale], le 31 Mai, pour la clôture solennelle du Mois de Marie que viennent y faire les paroisses de Quimper ; pendant l'octave du Saint-Sacrement, pour les bénédictions du soir, suivies de temps immémorial par les Quimpérois, usage à peine interrompu pendant la période révolutionnaire ; et enfin le 15 Août, depuis le rétablissement du culte, pour la procession du voeu de Louis XIII, présidée par l'Evêque.

C'est Notre-Dame de Loc-Maria que, comme nos pères, nous venons implorer dans les malheurs de la patrie. Qui ne se souvient de ce grandiose pèlerinage du 31 Août 1873 ?

Spectacle inoubliable, en effet, que celui de cet interminable « défilé de 3 à 4,000 personnes pieuses appelant dans leurs chants expressifs la miséricorde divine sur l'Église et sur la France ». Le vieux sanctuaire, malgré ses vastes proportions, était trop petit pour contenir cette foule, et ce fut du haut d'une estrade dressée sur la place, que Mgr Nouvel dut « rappeler aux habitants de Quimper les titres qu'avait Notre-Dame à leur confiance la plus filiale » (Impartial, 3 Septembre 1873).

Les rangs de la procession défilèrent ensuite successivement devant la statue de Notre-Dame pour y déposer de superbes ex-voto : croix processionnelle, lustre, cœur...

Ces sentiments pour Notre-Dame n'ont pas varié : n'en sont-ils pas un récent et éclatant témoignage, le beau tapis, œuvre des dames de la paroisse et de la ville, qui recouvre le chœur aux jours de fête ; la riche bannière paroissiale, portant sur l'une de ses faces l'image de Notre-Dame et sur l'autre celle de saint Corentin, et cet autel, œuvre d'un habile artiste (M. Francois Jacquier, de Caen), que le zélé pasteur de la paroisse a entrepris d'élever à Marie pour remplacer le socle si modeste sur lequel reposait jusqu'ici sa statue vénérée ?

Ce sera encore un jour qui comptera dans l'histoire de la paroisse que celui où, entouré d'un nombreux concours de prêtres et de fidèles, Mgr Dubillard viendra en ce lieu sanctifié par saint Corentin, bénir le trône de Notre-Dame de Loc-Maria, de Celle que, du fond de la Franche-Comté, il choisissait déjà comme patronne de son épiscopat.

Qu'en ces temps incertains, où l'orage gronde à l'horizon et devient de plus en plus menaçant, Notre-Dame de Loc-Maria, Protectrice de la Cité, daigne agréer l'hommage de cet autel, non seulement comme l'ex-voto de notre profonde reconnaissance pour les bienfaits dont Elle ne cesse de nous combler, mais encore comme un appel, une instante prière de nous protéger à l'heure, peut-être prochaine, du péril !

(J. H.).

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