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SUPPRESSION DE LA COLLEGIALE SAINTE-ANNE DE LESNEVEN

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On se souvient que l'ancienne église de Saint-Michel, à Lesneven, se composait de deux nefs égales, dont l’une servait à la paroisse, l'autre étant affectée à la Collégiale de Sainte-Anne. Cette disposition, qui avait bien ses avantages, puisque l'institution d'un Chapitre avait eu pour but de venir en aide au clergé de la ville, pouvait aussi présenter des inconvénients, et créer des situations d'une délicatesse et d'une complexité tout à fait imprévues. Il en fut ainsi, par exemple, lors de la reconstruction de l'église Saint-Michel, vers le milieu du XVIIIème siècle (Archives Départementales, E. 471, 472, 473 et Archives de Saint-Michel, Lesneven).

En Janvier 1753, quelques corniches du dessous du lambris étant tombées dans la nef paroissiale, on démolit le lambris au bas de l'église et on constata la vétusté et mauvais état de la charpente. Le 29 Juillet, le général de la paroisse arrêta qu'on ferait venir, pour examiner l'édifice, le sieur Saffrey, architecte entretenu par le Roi au port de Brest. Il n'y put venir que le 26 Août. Son avis fut qu'il fallait abattre l'édifice et le reconstruire suivant un plan qu'il fit parvenir au mois de Novembre suivant.

[Note : C'est ce même sieur Saffrey qui, en 1757, faisait reconstruire l'église de Trébabu sur un devis de 5.960 livres]. Pour Lesneven, le devis qu'il présentait se montait à 34.000 livres. Plans et devis furent soumis au corps politique, le 2 Décembre.

La ville n'était guère riche pour entreprendre de pareils travaux. Ses ressources disponibles, en effet, ne dépassaient pas 5.000 livres. Il y avait bien, à ce moment, dans le coffre-fort de l'hôpital, une somme équivalente, grâce à l'excellente gestion d'un économe qui avait trouvé moyen, dans un établissement qu'il avait été pourtant question d'abandonner faute de ressources, de laisser à sa sortie de charge, le 8 Janvier 1751, un reliquat de plus de 5.300 livres. Mais le sieur de Kerno, fondateur de l'hôpital, représentait, non sans raison, que cet édifice ayant tout autant que l'église, besoin d'être rebâti, il se refusait à se dessaisir de la dite réserve.

Quelque peu mécontents, les habitants se décidèrent toutefois à se tourner d'un autre côté ; une requête qu'ils soumirent au Parlement le 8 Mai 1754, leur obtint de pouvoir emprunter 10.000 livres.

Les travaux furent aussitôt mis en adjudication. Un sieur Antoine Maindorge, perruquier, obtient le marché après enchères, pour la somme de 21.853 livres.

Mais ce n'était pas avec ses « 30 ou 35 pistoles de mauvaise rente » qu'il pouvait fournir caution suffisante. Aucun, du reste, des entrepreneurs de la région, Lesneven, Landerneau, ou Saint-Paul, n'était à même de le faire.

L'expérience pourtant n'avait que trop appris, au sujet des dernières églises reconstruites dans l'Evêché de Léon, combien il fallait ou tenir à cette caution, ou renoncer, ainsi qu'on venait de le faire à Plabennec, Plonévez, Guissény, Plouguerneau, Tréflez, Kersaint, etc., à cette sorte de marché par adjudication unique. C'est pourquoi la construction se ferait à Lesneven « par économie », le général s'en chargeant par quelques-uns de ses membres.

Jusqu'ici, les Chanoines de Sainte-Anne pouvaient envisager démolition et reconstruction d'un oeil assez indifférent. Ils ne demandaient qu'à se tenir à l'écart. Leur nef, disaient-ils, ne menaçait pas ruine. Elle était de construction plus récente que la nef paroissiale, et donnait l'impression de pouvoir durer encore plusieurs siècles. De plus, le Collège venait depuis peu de restaurer clocher, chapelle et sacristie.

Seulement, chose qui n'avait pas été prévue, une fois la partie paroissiale démolie, la nef et le choeur de la chapelle Sainte-Anne se trouvèrent à leur tour compromis pour être un peu trop découverts du côté du Midi, et les Chanoines eurent à se plaindre d'être obligés de psalmodier et d'officier sous les intempéries de l'hiver. Il sembla, à ce moment, que le mieux serait, pendant qu'on y était, de refaire également la partie de l'édifice affectée aux sieurs Chanoines. Malheureusement, cela n'allait pas sans soulever des difficultés juridiques, financières et autres.

Rien d'enchevêtré comme la situation qui allait résulter de ces projets de reconstruction totale. Tout d'abord, il y avait — inévitablement — une question de prééminences. Le fameux contrat du 15 Mars 1589, dont il a déjà été question, disait que les sieur et dame de Chemillé se réservaient la collation, fondation et présentation du collège des chanoines, comme autant de droits qui devaient demeurer en leur maison du Châtel. Cette réserve eût été incompréhensible et inutile, diront plus tard les seigneurs de Lescoet, si la fondation avait appartenu en soi à cette terre du Châtel que conservaient les sieur et dame de Chemillé. Donc, originairement tout au moins, cette fondation ne devait pas être un droit inhérent à cette dite terre. Mais alors à quelle autre seigneurie eût-elle appartenu ? Evidemment, on ne pouvait la rattacher qu'à la maison de Lescoet, si richement possessionnée à Lesneven. Les seigneurs de Kerno, en effet, y avaient deux maisons nobles ayant fiefs, les seules qui ne fussent sujettes ni aux moulins ni aux fours du roi ; et il était d'autre part dû à ces seigneurs des rentes censives sur presque toutes les maisons de la ville, avant le don qui en fut fait à la fabrique de Saint-Michel. Mais alors, « si le titre de fondateur du Collège établi dans l'église de la paroisse appartenait de droit à la terre de Lescoet, il est clair que la terre de Lescoet était aussi fondatrice de la paroisse, puisque église et chapelle des chanoines sont sous le même toit et enceintes des mêmes murs ».

En conséquence, Messire Claude-Alain Barbier, chevalier, comte de Lescoet, seigneur de Kerno, se croyait, à la date du 4 Août 1757, en droit de revendiquer le titre de fondateur de l'église de Saint-Michel.

Il y avait bien eu le contrat de 1686, par lequel l'aïeul paternel du dit seigneur Comte avait cédé de ses droits à Mme la Duchesse de Portsmouth, et avait consenti à partager avec elle les marques de prééminence en l'église Saint-Michel. Cet acte portait que les trois écussons des du Châtel en la maîtresse vitre, au côté de l'Evangile, demeureraient en l'état, « si mieux n'aime ladite Duchesse y mettre ses armes particulières, et au lieu des autres qui sont en pareil nombre de l'autre côté, libre au seigneur de Kerno de les ôter pour y mettre celles de Lescoet, soit pleines, soit en alliance avec du Châtel ; et aux autres endroits de l'église ledit seigneur ne pourra mettre ses armes qu'au côté senestre ou au-dessous de celles du Châtel ». Mais le seigneur de Lescoet n'entendit pas pour cela abandonner le titre de fondateur de l'église paroissiale, où, par suite, il se croyait fondé à prétendre de multiple marques d'honneur. A ce propos, nous allons rapporter ici deux pièces qui nous renseigneront en partie sur les prééminences à Saint-Michel.

Pour ce qui est des tombes, nous savons bien que les Chanoines pouvaient se faire enterrer dans leur choeur collégial ; mais les listes tant soit peu complètes nous manquent à ce sujet. Dans l'église paroissiale proprement dite, il y avait de nombreuses rangées de tombes. Bien que leur énumération soit d'une époque antérieure (procès-verbal dressé, en Septembre 1632, par Guillaume Le Clerc, sieur de Goasquellen, fabrique), on jugera peut-être qu'elle peut offrir un certain intérêt [Note : Archives Départementales, E. 472. — Guillaume Le Clerc, sieur de Gousquellen, avocat, procureur du roi en 1647. Fabrique de Saint-Michel en 1632 ; un des fondateurs du Rosaire à Lesneven ; administrateur de cette confrérie en 1638. Avait épousé, le 23 Août 1654, Jeanne Lesguern, dame de Trézel, fille aînée de la maison de Lescoat, en Kerlouan, et en secondes noces, Guillemette Dirop. Cette dernière légua 10 livres de rente à Notre-Dame, sur une maison à Brest].

Au premier rang :

Sous l'arcade, entre le choeur et la chapelle de Mme Sainte-Anne, tombe élevée à Jacques Barbier, seigneur de Kerno, avec de part et d'autre, deux pierres tombales armoyées de ses armes : « une fasce à 3 pigeons ».

Plus un escabeau au-dessous et joignant deux autres tombes à lui appartenant.

Item, du côté de l'Epître, un autre escabeau et une autre tombe élevée dans la muraille costière, avec une fenêtre à deux panneaux armoyée des armes dudit seigneur.

Plus, au premier rang des tombes joignant le marchepied du grand autel, du côté de l'Evangile, trois tombes s'entrejoignant, aux héritiers de défunte demoiselle Anne Kermarrec, armoyée d'une fasce et un lion naissant, qui sont les armes d'écuyer François de la Fitte, sieur de la Pallue, conseiller du Roi et son bailli à Lesneven (maître ès arts) [Note : De Courcy, d'après Guy Le Borgne, donne comme armes à cette famille de François de la Fitte, sieur de la Pallue, bailli de Lesneven en 1632 : « d'arpent à une branche de myrte de sinople en pal »].

Jouxte lesdites trois tombes, à même rang, autre tombe qu’écuyer Guy Faillart, sieur de Kerligounan, se portant procureur spécial d'écuyer Claude Kerbic, sieur de Kerrault, a maintenu lui appartenir, avec autre tombe joignant.

Jouxte ladite tombe, à même rang, du côté de l'Epître, autre tombe qu'on dit appartenir au sieur du Cleuzmeur, armoyée « de macles et d'un lion en chef » [Note : D'après de Courcy : Du Cleuzmeur (paroisse de Pleumeur-Bodou) « Losangé d'argent et de gueules, au chef d'or chargé d'un léopard de gueules »].

Jouxte ladite tombe, une autre, armoyée de frette et de 3 chevrons en alliance, appartenant aux enfants de feu écuyer Jean du Goazmoal, sieur dudit lieu [Note : D'après de Courcy ; Goazmoal, en Ploudiry, « d'argent fretté d'azur », comme Kerguern], maître ès arts.

Jouxte, à même rang, une pierre tombale joignant la muraille costière, sous le banc des prêtres, avec une fenêtre armoyée de Morizur.

Au deuxième rang :

Une tombe au bout de l'autel de Saint-Jean-Baptiste, au côté de l'Evangile, aux enfants de François Le Ciet, sieur de Mescaro.

Jouxte, une tombe à Sébastien Le Borgne (peintre, maître ès arts).

Autre tombe à maître Yves Le Guen, sieur de Kerradennec, joignant d'un bout à la table de l'offrande, armoyée des armes dudit sieur et mademoiselle sa compagne, Françoise de Coetnempren.

Une tombe à Jean du Bois, sieur de Goazvennou [Note : Mort le 3 Avril 1634. — Ecuyer Christophe du Bois de Goazvennou, mort le 24 Mars 1641. — Françoise Coatquelven, dame de Goazvennou, décédée le 21 Novembre 1653. Armes : « d'argent à un rameau de palmier de sinople, accompagné de 3 quintefeuilles de gueules », fondu dans du Poulpry (de Courcy). Il y avait, à la sacristie de Saint-Michel, une chasuble de velours bleu et rouge portant les armes des Goasvennou], conseiller du Roi et son lieutenant à Lesneven (de 1617 à 1634).

Une tombe aux héritiers de Yves Balaznant et Marguerite Loumenven.

Une tombe, sans armes, non réclamée, et adjugée à écuyer Jean Bohier, sieur de Kerferré.

Au troisième rang :

Devant l'autel de Saint-Jean-Baptiste et joignant le choeur des Chanoines, une tombe avec escabeau, au sieur de Goazvennou avec ses armes.

Autre tombe à demoiselle Marie Coatnempren, dame de Kermerchiou.

Une tombe à Hamon Le Dall [Note : Voir Donation à la Confrérie du Rosaire, par le dit Hamon Le Dall. Il fut procureur syndic des habitants et maire, en 1631 et 1648. Sa femme, Marguerite Cabon, testa le 31 Mars 1668. Lui-même avait testé le 3 Avril 1659, léguant 60 livres de rente à l'église Saint-Michel. Le 24 Décembre 1676, nous trouvons réunis, pour traiter de la question de cette rente : Guy Le Dall, sieur de Kervistin, demeurant à Saint-Pol, marié le Dimanche 9 Octobre 1651, à Brest, à une demoiselle de Saint-Renan ; Nicolas Le Dall, sieur de Kerduiez, demeurant à Landerneau (où il avait épousé, le 18 Janvier 1649, en l'église Saint-Houardon, Marie Le Cholennec, dame de Penquer) ; Jérôme Le Dall, sieur de l'Estang, demeurant à Lesneven ; Gillette Le Dall, dame de Crechennou, demeurant à Landivisiau ; Louis Le Rouge de Guerdavid, faisant pour son fils aîné, écuyer François Le Rouge, issu de son mariage avec Françoise Rodellec, fille de Michel de Rodellec, sieur de Pencharo et de Marie Le Dall, le dit Louis Le Rouge de Guerdavid, demeurant au manoir de Kergoat, en Poullaouen ; Ecuyer François Gouzabatz, seigneur du Plessix (de la paroisse du Tréhou), et sa femme Adelice-Anne Le Dall, dame de Coatedern (qu'il épousa à Lesneven, le 1er Septembre 1659), demeurant au manoir de Penantraon, en Plouvien ; Dame Claude Le Dall, douairière de Beaurepos, femme de Hervé Le Mercier, sieur de Beaurepos (le mariage fut célébré à Lesneven, le 4 Mars 1658, par Miss. Hervé Tréguer, recteur de Plourin et Prieur de la Forest), les dits époux demeurant au manoir de Beaurepos, en Guipavas ; Tous héritiers de Hamon Le Dall et Marguerite Cabon ; lesquels, pour s'acquitter, transportent à la fabrique une maison en Goulven. Mais nous trouvons, dans un acte du 29 Février 1788, que la rente est acquittée sur le manoir et métairie nobles de Tromilin, en Kerlouan, par Charles-Guy-Joseph Le Borgne de Coetivy, seigneur du Boisriou, de Tromilin, etc., demeurant à Tréguier, paroisse. de Saint-Sébastien. C'est probablement en 1722, qu'un des enfants de Jérôme Le Dall, précédemment cité, Mathieu-Jean Le Dall, sieur de Tromelin, mousquetaire du roi, demeurant à Brest, paroisse de Saint-Louis, faisant pour lui et son frère, le sieur de Cheff de Lestang Le Dall, aura ainsi transporté de Goulven Kerlouan, l'assiette de la rente].

Une tombe à défunt écuyer, Gabriel Keranguen, « sieur de Traongurun, armoyée de ses armes, d'argent à 3 tourteaux de gueules ». Devise : « Laca evez », et appartenant depuis aux héritiers de défunte Marie de Keranguen, dame de Kerigoual.

Autre tombe aux héritiers de Yves Balaznant et Marguerite Loumenven.

Autre tombe, où est inhumé ledit sieur de Traongurun, avec trois autres emplacements de tombes, au même rang.

Au quatrième rang :

Devers l'Epitre, un grand escabeau avec petite fenêtre en la muraille costière, audit sieur de Traongurun, avec ses armes.

Dans la grande nef, devers l'Epître, une tombe dans une arcade en la muraille costière, avec une vitre, un autel, un escabeau armoyé des armes d'écuyer Jean de Kerguelen, sieur du Mendy, avec tombes de jouxte [Note : De Courcy : Kerguelen, sieur du Mendy, paroisse de Plabennec ; « écartelé aux 1 et 4 : d'or au houx arraché de sinople, qui est Kerguelen ; aux 2 et 3, échiqueté d'argent et de gueules », qui est Mendy].

A l'entrée du choeur, une tombe à Jean Guiomar, sieur de Saint-Laurant. Armes : « un chevron brisé, 3 coquilles et une rose ».

Trois tombes près de l'autel de Saint-Sébastien, à Guy Le Roux et Catherine Bozec, sieur et dame du Reuniou, avec leurs armes.

Au deuxième rang, à commencer vers l'Epître :

Une tombe, près de l'autel du sieur de Kergouniou, à Hervé Tribara, sieur de Mesquernic, avec ses armes (De Courcy : « De sable au chevron d'or accompagné de 3 besants de même »). Une tombe à maître Yves Larvor.

Deux tombes à François Menou, du Conquet.

Une tombe à écuyer Jacques Desportes, sieur de Pontriny, et demoiselle Jeanne de Kerlech, sa compagne.

Jouxte le tronc, à l'entrée de l'arcade, une tombe au sieur du Cleuzmeur, avec escabeau, devant le premier pilier de la nef.

Autre tombe au sieur et dame de Pontriny.

Au troisième rang, commençant devers l'Epître, près de la chaire du prédicateur :

Trois tombes, un autel, un escabeau, jusque derrière l'autel des Saints Cosme et Damien, et une vitre aux armes du sieur de Kergouniou.

Une tombe avec escabeau au sieur du Cleuzmeur.

Jouxte le grand pilier, un escabeau de Kerno avec les enfeux au-dessous.

Au dernier rang, vers l'Epître :

Une chapelle sortant de la nef, dédiée aux Saints Cosme et Damien, avec une vitre à deux panneaux, aux anciennes armes des Danaille, « Une croix pattée d'argent en champ de sable ».

Pour ce qui est des fenêtres et vitres armoyées, à l'époque de la démolition, voici ce qu'on trouve dans le procès-verbal de 1754.

Maîtresse vitre : armes du Roi en supériorité.

Côté de l'Evangile : armes de la ville [Note : L'armorial de 1696 dit : « d'or au lion de sable qui est Léon, couronné de même et tenant dans ses pattes de devant un guidon d'azur chargé d'une fleur de lys d'or ». A en juger d'après les armes qu'on voit actuellement à l'Hôtel de Ville de Lesneven, on pourrait dire « lion rampant de sable, lampassé et armé de gueules »] en alliance avec France et Bretagne.

Côté de l'Epître : un écusson de Bretagne, en plein.

Dans deux soufflets immédiatement au-dessous : armes de du Châtel, et Barbier en alliance avec Lescoet.

Au-dessous, quatre écussons en ligne droite, en quatre diverses alliances dont l'une paraît bien être avec Lescoet : les armes qui s'y trouvent sont de sable à la fasce d'argent chargée de 3 molettes percées de sable, et les armes de Lescoet sont, suivant autre procès-verbal du 4 Août 1757, de sable à la fasce d'argent chargée de 3 quintefeuilles de sable percées. (Les différences peuvent ne provenir que de la faute du peintre).

Au-dessous, autres écussons aux armes pleines de du Châtel, ou en alliances.

Dans la muraille Sud, cinq fenêtres vitrées : la première, c'est-à-dire la plus proche du sanctuaire, aux armes de Morizur ou Coatanfao.

La deuxième, remplie des armes de Lescoet.

La troisième, aux armes de Penmarch en alliance.

La quatrième, aux armes de Mendy.

La cinquième, aux armes de Hellez-Touronce.

Puis vient la chapelle de Trégouinec, à MM. de Penhoat et de Kerellon, d'environ 10 pieds de profondeur, et s'étendant hors de la nef, vers la rue des Récollets.

Au côté dextre du maître-autel, joignant les balustres « si bien que quand même il serait seul fondateur de l'église il ne pourrait rien demander au delà, alors que cependant la terre de Kerno à laquelle il rapporte toutes ses prééminences anciennes, est une terre sans fief et sans juridiction, et que le chef-lieu de la terre de Lescoet est dans la paroisse de Languengar et non en celle de Lesneven ».

En réalité, « aucun des seigneurs ayant prééminences à Saint-Michel ne peut s'en prétendre fondateur. Car cette église et toute la ville sont dans le proche fief du Roi » d'ailleurs, à en croire du moins les habitants, « tous les droits d'un fondateur haut justicier s'éteignent lorsque l'église est rebâtie à neuf » [Note : M. de Gontaut-Biron pourtant protestait contre cette dernière assertion et invoquait un arrêt du Parlement de Paris, du 2 Mars 1584, sur procès évoqué de Bretagne, rapporté par Ferrière, « Des Droits de Patronage », où il est dit que « les tombes élevées et les épitaphes peuvent être rétablies lorsqu'une église a été ruinée et est reconstruite »].

Décemment, le seigneur de Penmarch ne pouvait se tenir à l'écart d'un conflit où tous les instincts chicaniers allaient pouvoir s'en donner à coeur joie. Louis François de Penmarch, chef de nom et d'armes, chevalier, seigneur marquis dudit lieu, ancien banneret de Bretagne, trouva, lui aussi, qu'on lui avait fait tort dans ses prééminences qui étaient, dans le pignon susain et au côté septentrional : deux fenêtres avec ses armes ; plus une châsse, un escabeau et un banc dans l'église ; plus, dans le cimetière, devant la principale porte d'entrée, une croix de pierre avec ses armes en bosse  [Note : Dixième et dernier baron de Penmarch, né le 22 Mai 1728 (Kerdanet, Vie des Saints). Epousa successivement Marie-Marthe de Botloy ; Françoise-Thérèse de Kerguennech ( ?) ; et Innocente-Charlotte-Sévère-Louise-Yvonne de Kermel. Décédé sans postérité à Penmarch, le 23 Février 1804. La branche aînée des Penmarch se trouva fondue dans Huon, par le mariage à Tréguier, au 1er Juillet 1748, de Renée-Gabrielle Guyonne de Penmarch, soeur aînée de Louis-François, dernier du nom, avec Jean-René Huon, seigneur de Lesguern et de Kérézélec. A propos du nom de Botloy cité plus haut, qu'on nous permette de rapporter la lettre suivante écrite de Tréguier, le 8 Juin 1702, au Prieur des Carmes de Saint-Paul de Léon : « La paix de Jésus soit avec nous et notre force. Je crois, avec votre permission, qu'il est à propos de vous faire savoir la mort de Madame du Bislo de Botloy, la douairière, âgée de 75 ans, qui, depuis 48 ans ou plus, a toujours vécu dans une vie exemplaire, pénitente, pauvre, dévote, communiant tous les jours tant qu'elle a pu se faire porter à l'église, disant le bréviaire nombre d'années. Quoiqu'elle fût (elle-même) sourde, elle était l'appui et la consolation de toutes sortes de personnes. C'était une femme d'un grand mérite personnel, admirée partout, un bel esprit, un grand sens, génie, belle mémoire, un jugement solide et grande capacité. Elle était parfaite en tout, et cependant avait cherché à s'humilier, à changer cette grande beauté et son grand air par tout ce qu'elle avait pu et par les macérations et pénitences. Il n'y a pas encore deux ans, elle jeûnait trois fois la semaine, étant [pourtant] depuis quatre ans travaillée de continuelle et fréquente maladie qui la réduisait nombre de fois à l'extrémité et obligeait à lui donner les derniers devoirs. Elle a souffert tous ces temps des maux très sensibles et très pénibles dans une patience à ravir le ciel et la terre. Ces souffrances lui ôtèrent l'usage du marcher et des mains. Mais la tête et le jugement [demeuraient] toujours admirables. Dans sa maison elle faisait exactement ses dévotions, toujours en oraison étant seule. Fut à la grand messe le jour de l'Ascension. Le samedi se trouva tout à coup malade. Le soir on lui donna l'extrême-onction. Le lundi 29 Mai, mourut à 10 heures comme un ange et devint admirable. On l'habilla de votre saint habit. Monseigneur l'Evêque de Tréguier, le clergé, toute la noblesse de la ville et environs, une affluence de monde et peuple, par dévotion, estime et vénération, assistèrent à l'enterrement et depuis, on court à son tombeau pour l'implorer et la prier. Je vous supplie de lui procurer le repos éternel au plus tôt comme à votre soeur, et d'annoncer sa mort à toutes vos maisons et à votre ordre pour procurer les suffrages des prières à une de leurs soeurs du Tiers-Ordre des plus zélées et de mérite, professe depuis de longues années ». Le nom de la signataire de cette lettre a disparu. Sur le dos, le Prieur a écrit : « Soeur Anne Le Hildry, dame du Bislo de Botloy, a pris l'habit à Saint-Paul, le 21 Juillet 1674 » (Archives Départementales, H. 228)].

Les habitants lui rappelèrent que la croix de pierre n'était pas en cause ; quant aux fenêtres, la maison de Penmarch avait, une soixantaine d'années auparavant, accepté qu'on bouchât l'une d'elles. Pour l'autre, le seigneur de Penmarch n'avait qu'a participer aux frais de la réédification, au lieu de se désintéresser de ses prééminences, comme à Notre-Dame, où il laissait tomber en ruines la chapelle qu'il y possédait près du choeur, au côté de l'Evangile.

Quoi qu'il en soit, d'ailleurs, de l'apparition de la figure un peu falotte de ce seigneur de Penmarch dans le chassé-croisé des appels et des instances, on allait avoir pour compliquer les affaires autre chose que des questions de pures prééminences. Abattre et rebâtir la nef et choeur des Chanoines, oeuvre peut-être pas bien nécessaire. Ces derniers, toutefois, y consentiraient bien ; ainsi auraient-ils une chapelle un peu moins obscure. En attendant, ils iraient à la chapelle Saint-Yves, pour leurs offices et cérémonies. Mais ils soutenaient n'être en rien tenus aux frais, et d'ailleurs ne le pouvoir aucunement, le fonds de leur mense ne rapportant qu'à peine les honoraires de la desserte de la fondation.

Faisant droit à cette requête, les habitants promirent d'indemniser les Chanoines, ne leur demandant que leur simple consentement pour rebâtir le tout aux frais de la fabrique et du sieur de Gontaut-Biron qu'on y obligerait. Mais, observaient en outre les sieurs Chanoines, le Général de la paroisse n'a pas le droit de reconstruire absolument à sa guise, et il ne doit point séparer la nef paroissiale de celle du Chapitre, car ce serait contraire aux intentions des fondateurs de 1477 et de 1485.

Enfin, un autre genre de difficultés provenait de la nécessité qui s'imposait d'agrandir l'église projetée. En longueur, cela ne semblait guère possible. Car il y avait au Couchant beaucoup de maisons, notamment l'hôtellerie des Trois-Rois. Devait-on alors avancer au Nord dans le cimetière, vis-à-vis de la place, ou du côté Sud, vers la rue des Récollets ? Ce fut à ce dernier parti qu'on s'arrêta.

Toutefois, le plan du sieur Saffrey n'eut pas l'air de plaire longtemps aux habitants. On s'adressa, en Janvier 1755, « à Monsieur de Fresier », et le 14 Avril suivant, les notables de Lesneven, sur le vu de son plan et devis, le priaient « de recevoir un million de remerciements de l'obligation qu'ils lui ont de leur procurer une aussi jolie église ».

Frézier critiquait le projet précédent fait par « un appareilleur qui se donne pour architecte. L'objet de l'appareilleur n'étant que l'exécution ou imitation servile de ce qu'il a vu ».

Une des principales défectuosités signalées par Frézier était le défaut de lumière. A quoi il proposait de remédier en éclairant les deux bouts du berceau de la nef par des vitraux placés au-dessus de ses naissances, comme il l'avait fait à l'église de Saint-Sauveur de Recouvrance. « Si j'étais le maitre, ajoutait-il, j'éclairerais la nef par 12 vitraux le long de la voûte découpée en lunettes dans le berceau, comme l'on fait ordinairement dans toutes les belles églises, ceux que je fais aux deux bouts n'étant pas suffisants pour y répandre une belle lumière ».

« La simplicité d'une église, écrivait-il encore, en augmente la majesté. La multiplicité des petites dévotions accessoires fait tort à la principale, et détourne du culte dû à la présence du Saint-Sacrement. Je sais bien que le clergé intéréssé aux offrandes est bien aise d'y donner occasion par différents motifs. Mais les gens de bien pensent comme saint Jérôme dans sa lettre à Népotien, qui disait qu'étant l'homme du Seigneur, il se contenterait de la nourriture et du vêtement, d'où je conclus en juge désintéressé, que les deux chapelles demandées d'augmentation sont inutiles » [Note : Archives Départementales, E 472, en date du 1er  Mars 1755. On trouve dans le même dossier les dimensions des cloches à installer dans le clocher ; la première, de 4 pieds 2 pouces ; la deuxième, 3 pieds 1 pouce ; la troisième, 2 pieds 9 pouces ; la quatrième, 2 pieds 5 pouces 6 lignes].

On ne s'attendait guère à trouver saint Jérôme en cette affaire, et par la plume de M. Frézier.

Seulement, « la simplicité » visée par l'ingénieur faisait disparaître le choeur et nef des Chanoines. Bien que ces derniers fussent en droit, d'après une consultation d'avocats de Rennes, d'en exiger le rétablissement, ils acceptèrent pourtant, ainsi que M. de Gontaut-Biron, la nouvelle disposition de l'église. La solution imaginée (19 Janvier 1755), pour leur donner satisfaction fut d'établir deux autels adossés ; l'un, celui de la paroisse, placé à la romaine près de la balustrade de communion, et tourné vers la nef ; l'autre, devant servir aux chanoines avec une sorte d'arrière-choeur de 12 pieds de profondeur, où serait réédifié le mausolée des Du Châtel. On leur assurait aussi leur sacristie et leur clocher propres.

Il semblait donc que les travaux fussent désormais sans obstacles. Mais la disposition précédente contraignant à avancer les autels vers la grande nef, tout en laissant moins de place pour le choeur proprement dit, était aussi de nature à léser le seigneur de Lescoet dans ses prééminences, en raison de l'emplacement de tombe qu'il possédait à l'endroit où allait être posé le nouveau maître-autel. Evêque et grands vicaires jugeaient de leur côté, défavorablement, cette exiguïté du choeur.

M. de Lescoet avait donc la partie belle pour travailler à modifier le nouveau plan. A en croire les avocats des Gontaut-Biron, le seigneur de Kerno avait ses hommes d'affaires qui s'employaient de leur mieux à peser sur les décisions des habitants. « Il y a en tout ceci, est-il écrit, un faiseur et défaiseur de plans qui cherche à jouer les habitants ». Un sieur de Kerhor, agent de M. de Lescoet, aurait conduit le Général dans toutes les opérations. D'un autre côté maître Jacques Miorsec, sieur de Kerdanet, administrateur de la fabrique de Saint-Michel, est accusé d'imposer (toujours pour M. de Lescoet), ses volontés au corps politique, et d'avoir entraîné dans une cabale le plus grand nombre des habitants. Un factum de la même époque prétend que « les lois concernant l'administration de la fabrique et de la ville, sont toutes violées à Lesneven. Il y a des habitants qui ont trouvé le secret de se faire maintenir dans le corps politique, dix, douze ans, et plus. Il y en a un qui y exerce un empire absolu, et est en possession d'écrire toutes les délibérations sur le cahier, sans consulter les autres délibérants qui signent à l'aveugle pour ne pas lui déplaire, et il garde ensuite chez lui ordinairement le dit cahier. Il y a aussi des marguilliers et trésoriers sortis de charge, depuis plus de vingt ans, sans avoir rendu leurs comptes et versé leur reliquat, et d'autres débiteurs qu'on ne poursuit pas par complaisance ».

Observons, par contre, que le seigneur de Lescoet, continuant toutes ses traditions de générosité, ne contribua pas peu à la reconstruction de l'église. Tandis que les habitants reprochaient à M. de Gontaut-Biron, si jaloux de ses prééminences, de n'avoir rien donné pour le nouvel édifice, ils n'hésitaient pas à reconnaître que M. de Lescoet, seul, ou presque, avait prodigué ses largesses, si bien que, « sans lui, il n'y aurait point eu d'église neuve ». Sans ses libéralités en bois, particulièrement, il aurait fallu aller en chercher à grands frais à Port-Launay.

Une première fois, il donnait 50 pieds d'arbres de son bois de Kerno, lesquels estimés à 3.000 livres furent laissés à la fabrique pour 2.000.

Le 16 Février 1755, il fournit 30 arbres estimés 300 livres. — Une autre fois, 62 pieds estimés 3.600 livres, mais qui ne furent payés que 2.600. Le 27 Mars 1757, le seigneur de Kerno devait encore faire présent de 12 pieds pour 600 livres au lieu de 864. De telles générosités étaient d'autant plus méritoires que, à cette époque, le château de Monsieur de Lescoet fut détruit par un incendie.

Ces dons lui donnaient bien naturellement certains droits de protestation contre les dispositions d'un plan par lequel il s'estimait lésé. C'est pourquoi nous assistons à un nouveau remaniement du projet qui avait valu à M. Frézier de si chaleureux remerciements.

On allait essayer de réserver aux sieurs Chanoines la chapelle construite dans le bas-côté Nord de l'église, mais sans leur fournir de sacristie distincte, ni de clocher, « ce qui était une ruine générale des droits et fonds de la Collégiale et des seigneurs du Châtel ». C'est alors qu'on imagina de leur donner en partie satisfaction, en construisant deux sacristies dont l'une leur serait accordée. Idée malencontreuse, s'il en fut. Car ces sacristies étaient séparées de l'église par une venelle, ce que tout le monde trouvait ridicule ; si bien que les sacristies neuves furent démolies à peine élevées, et remplacées un peu après par une sacristie en sapin, établie provisoirement sous les orgues, en attendant qu'on eût des fonds pour faire mieux. La fausse manoeuvre avait tout simplement englouti les 5.800 livres que possédait la fabrique !

Les Chanoines présentaient un autre grief. La chapelle qu'on leur destinait dans le bas-côté Nord n'ayant que 11 pieds de large, au lieu de 15, ils ne pouvaient songer à y placer leurs doubles stalles et l'ancien mausolée des du Châtel. Force était donc de rechercher quelque autre combinaison. Paroissiens et Chanoines réussirent alors à s'arranger sur ces nouvelles bases : le maître-autel servirait aux membres du Collège et aux prêtres de Saint-Michel, à condition, bien entendu, de fixer leurs offices à des heures différentes, comme cela, d'ailleurs avait lieu par le passé.

Cette disposition exigeait qu'on reculât l'autel jusqu'au fond et qu'on l'adossât au pignon oriental. Moyennant cet arrangement, les Chanoines étaient tenus quittes pour l'avenir de toutes réparations ; leur ancien revenu de 15 pistoles par an s'en trouverait augmenté, et les offices, avec un clergé plus nombreux (il y avait alors 14 ecclésiastiques à Lesneven) n'en seraient que plus beaux. A cette solution, tout élégante qu'elle fût, allait manquer l'élément capital : l'exécution.

Pour ce qui était du différend au sujet des prééminences, voici ce que nous trouvons. Un sieur Joseph Lunven, sieur de Kerbernard, procureur fiscal de du Châtel, à Brest, ayant la direction générale des terres du Châtel dans le Léon, parlait, à la date du 12 Novembre 1757, d'un essai de conciliation entre Lescoet et du Châtel. Le 16 Juillet 1758, un projet fut dressé à ce sujet par les avocats rennais, Boudoux et du Parc Poullain, mais sans résultat. « L'illustre magistrat » Le Pelletier de Rosambeau ne fut pas plus heureux, et le 10 Octobre, M. de Lescoet en donnait la raison, c'est que le plan sur lequel on reconstruisait l'église n'était plus celui de 1755.

Comment démêler la vérité et le droit dans ces divergences d'intérêts, et quels étaient au juste tous les mobiles des « faiseurs et défaiseurs de plans » ?. Il serait malaisé de le dire. Ce qui est certain, c'est qu'un nouvel architecte allait surgir, mandé par le sieur de Lescoet qui, depuis longtemps, cependant, ne mettait plus les pieds en cette église paroissiale dont la reconstruction l'occupait si fort.

« Claude-Alain Barbier, comte de Lescoet, chevalier de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare, s'était, en effet, il y avait dix-neuf ans, retiré au couvent des Récollets de Lesneven, vivant de la vie commune des frères et leur prodiguant ses libéralités, entre autres, un habit neuf chaque année. Il devait y mourir le 17 Août 1763, pleuré de tous les religieux » (Kerdanet, Vie des Saints, p. 106).

Son testament, rédigé au dit couvent le 5 Août précédent, nous apprend les dernières dispositions d'humilité et de charité de ce véritable homme de bien. Il y déclare :

« Vouloir être inhumé en l'église des dits Religieux, dans le caveau qu'il a fait rétablir, et où sont les reliques de son père [Note : M. Le Guennec parle " de la profanation des restes des seigneurs de Lescoet, arrachés à leur caveau des Récollets où ils reposaient sous la dalle à effigie guerrière sculptée en 1638, par le bon artiste landernéen, Rolland Doré, enlevés à leurs cercueils de plomb, et enfouis à l'écart comme des débris d'animaux "], et cela sans aucune cérémonie dans les prières qui se feront pour le repos de son âme.

Il veut une messe quotidienne, pendant vingt ans, sur l'autel de la chapelle où est son caveau, messe suivie d'un De profundis, et pour cela il affecte les redevances du lieu de Mesnigoalen.

Il veut que tous les dimanches, pendant quatre-vingt-dix-huit ans, on donne aux pauvres 3 livres, dont 36 sous à la porte de l'église des Récollets, entre 8 heures trois quarts et 9 heures, par un domestique du couvent, et 24 sous aux pauvres honteux de la ville. Et pour ce, il affecte le lieu noble du Cosquer, au bourg d'Elestrec, plus le revenu de deux champs joignant l'enclos des Récollets.

Il demande qu'on donne 60 livres de rente viagère à Jacques Jort, surnommé la Montagne, garde-bois, ainsi qu'à la Roy, gouvernante à Kerno, et pour ce, affecte les deux lieux de Poulbriant à Lesneven. Plus, une année de gages à tous les domestiques qui se trouveront à son service à sa mort.

Veut que l'année qui suivra le paiement de son rachat, on diminue 100 livres à chaque fermier de métairie qui aura fait les corvées à Kerno.

Il déclare qu'il a acheté une tapisserie de Bruxelles à son oncle du Gage, pour 4.000 livres, dont il a payé les cinq sixièmes sur la recette des terres de son fils aîné (le sieur de Kerhorre ?).

Il donne 12.000 livres à chacun de ses cadets : le vicomte de Lescoet, capitaine de vaisseau ; le chevalier de Kerno, lieutenant de vaisseau ; l'abbé de Lescoet, comte de Lyon, et à sa fille du Lescoet qui n'est point en religion » (Archives Départementales, H. 327).

Durant tout le temps de son séjour chez les Récollets, soit par amour de la retraite, soit par autre motif, il avait cessé de paraître à la paroisse où pourtant on l'avait vu « fort assidu aux exercices du dernier jubilé ». Mais il ne s'en intéressait pas moins à la reconstruction de l'église, et ce fut lui qui fit venir aux Récollets, M. Cornec, recteur de Plabennec. Ils eurent ensemble une longue conférence, à la suite de laquelle ledit M. Cornec dressa d'accord avec un des Chanoines, et sur les indications de M. de Lescoet, un plan d'église à pans coupés qui fut par la suite définitivement suivi.

Les modifications furent-elles peu goûtées des habitants, ou bien M. de Lescoet outrepassa-t-il ses droits de prééminencier ?. Il se peut ; du moins, à s'en référer à un mémoire des habitants où on déclare « exorbitantes les nouveautés introduites par M. de Lescoet ainsi que ses prétentions, si bien qu'il emporte la moitié de l'église, sans compter qu'il nuit aux autres prééminences ou même les anéantit ». Par exemple, en ce qui concernait les marques d'honneur ; il avait, en Juin 1757, fait mettre dans les voûtes des deux fenêtres du bas bout de la nef, au dedans et au dehors, des pierres gravées à ses armes. Il fit aussi voûter « tout le sanctuaire même sous le maître autel, ainsi que le bout du bas-côté du Midi. La clef de cette voûte est au milieu du sanctuaire, et on descend dans ce souterrain par un degré en pierre de taille. On y a placé une tombe élevée entourée d'environ 15 petits caveaux séparés. Il avait fait faire, en outre, un deuxième caveau voûté dans le bas-côté donnant sur le Midi, depuis le haut jusqu'au troisième pilier, soit sur 25 pieds, à compter du deuxième pilier oriental. Le caveau est de la largeur du bas-côté et a trois rangs d'alvéoles, avec marches pour y descendre. Tous ces caveaux faits sur le modèle de ce qu'il y a de mieux dans ce genre dans les églises de Paris ».

C'est que « beaucoup de personnes ont de la répugnance à être enterrées dans les cimetières. D'autre part, les arrêts et règlements de la Cour défendent d'inhumer dans les églises, à moins de caveaux souterrains bien fermés, arrêts exécutés en toute rigueur à Lesneven [Note : Cette docile observation des règlements était fort loin d'être générale ; bien au contraire]. M. de Lescoet a fait de nombreuses alvéoles où on peut placer des cercueils, moyennant son consentement et une redevance de 12 livres au profit de la fabrique.

M. de Lescoet n'agissait-il pas pour lui. N'avait-il pas un caveau aux Récollets, et, en différentes églises de Lesneven, une infinité de tombes et enfeux ?. Il n'avait pas lieu de craindre que les sépulcres manquassent à sa famille. Loin de lui toute idée de faste, d'ambition et d'usurpation. C'eût été le mal connaître. Le genre de vie qu'il avait embrassé et qu'il menait depuis des années dans l’obscurité d'un cloître prouvait, mieux que tout, qu'il était peu touché des vains honneurs du siècle. S'il fit placer ses armes dans les bas-côtés de la nouvelle église, c'est moins pour apprendre à la postérité qu'il avait beaucoup contribué à sa construction, que pour imposer à ses descendants une sorte d'obligation de pourvoir à l'entretien et à l'embellissement d'une église où leurs ancêtres firent dans tous les temps éclater leur zèle et leur piété, et bien que n'ayant pas encore (vers 1763) reçu le moindre sol sur ce qui lui était dû, il ne fit pas la moindre démarche pour cela ».

Quoi qu'il en fût des intentions de M. de Lescoet, vers le même temps, le Présidial de Quimper rendit la sentence suivante : Le seigneur de Lescoet pouvait conserver deux bancs dans le chœur ; trois écussons dans la maîtresse vitre ; un enfeu seulement dans le massif élevé sous le choeur ; les autres petits caveaux devant être bouchés, comblés ou supprimés. Dans la nef, M. de Lescoet pouvait garder le banc qu’il possédait, vis-à-vis de la chaire, à l'endroit du pilier où est l'autel de Saint-Eloy et de Sainte-Barbe. Mais il lui était défendu de placer une lisière en dedans ou en dehors, faute d'avoir suffisamment justifié ses titres à cette prétention. Le Général de Lesneven était débouté de ses prétentions envers MM. de Gontaut et de Lescoet.

Toutefois, cette sentence ne dut pas être le dernier mot en cette affaire, car à la date du 19 Août 1772, Messire Claude-Alexandre-Marie Barbier, chef de nom et d'armes, chevalier, seigneur comte de Lescoet, Châtel, de Kergo, de Kerno, de Lesquiffiou, vicomte de Coetmenech, seigneur du Rest et du Modest, accepta de prendre pour arbitrer les sieurs du Parc Poulain et Boylesve, avocats à la Cour, pour terminer le procès qu'il avait au Présidial de Quimper avec le Général de Lesneven, concernant ses prééminences. Mais nous ignorons ce qu'il advint de ce projet de transaction.

Au commencement de 1762, Monseigneur de Léon fit savoir que non seulement il ne bénirait pas personnellement la nouvelle église, mais qu'il refusait d'autoriser la cérémonie et de déléguer qui que ce fût. On a déjà vu qu'une des causes de mécontentement de l'Evêque était l'emplacement donné au maître autel. M. de Lescoet essaya d'obtenir des habitants qu'ils acceptassent une autre disposition. Il se rendit à l'assemblée du corps politique, le 29 Avril 1762, pour communiquer la lettre de Monseigneur de Léon et proposer un facteur d'orgues. Les habitants acceptèrent l'offre concernant le facteur d'orgues, le sieur Watrin, lequel s'engagea à tout remettre en état, moyennant 3.000 livres [Note : Mais lors du procès-verbal du renable des orgues, 6, 7 et 10 Septembre 1764, les experts délégués par le Général de Lesneven, François Verax, organiste de Carhaix, Hervé-Joseph Coustin, organiste de Landivisiau, et François Marquer, expert et facteur d'orgues à Saint-Mathieu de Quimper, estimèrent que le travail n'était pas satisfaisant et furent d’avis de diminuer le salaire du sieur Watrin de 1.350 livres].

Quant au déplacement de l'autel, les habitants refusèrent même d'en délibérer. Le Recteur de Lesneven, ayant voulu gagner quelque chose sur ce point et obtenir même quelques subsides pour couvrir les frais, se vit éconduit. Mais dès le lendemain, M. de Lescoet, d'accord avec le recteur, fit déplacer et adosser au pignon Est, l'autel litigieux, lequel n'était qu'un travail très léger en sapin. Il en coûta 12 livres à M. de Lescoet, père, et 6 livres  son fils, M. de Lesquiffiou.

Mis en présence du fait accompli, les habitants s'en accommodèrent. Le 6 Mars 1763, la communauté projeta de demander à Monseigneur de Léon, par manière de sommation, de venir bénir l'église, ou, en cas de refus, de signifier sa décision par écrit.

Le Prélat, quoique ayant bien des sujets de mécontentement du Général de Lesneven, accepte de venir consacrer l'église. La cérémonie eut lieu le 18 Décembre 1763. Il n'y avait plus, à proprement parler, de chapelle collégiale : jusqu'à la Révolution, les Chanoines officieront dans le choeur et nef de la paroisse.

(Archives de l'Evêché).

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