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LANDERNEAU SOUS LA REVOLUTION 

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Dans les documents que nous avons publiés touchant la Révolution, ce que nous avons dit de Landerneau montre avec quelle rigueur ce District exécuta les lois contre le clergé fidèle, réservant toutes ses sympathies pour les Constitutionnels ; aussi, lorsqu'en 1794, les membres du Conseil général payèrent de leur tête leur attachement aux Girondins, Quimper étant considéré comme un foyer de réaction, ce fut à Landerneau que l'on transféra l'administration centrale du département. Nous ne reviendrons pas sur tous ces faits, nous contentant de donner ici une courte notice sur les prêtres de Landerneau à cette époque.

A la tête de la paroisse de Saint-Houardon, se trouvait un vénérable ecclésiastique, Joseph-Marie La Rue, originaire de Landerneau, où il était né en 1730 ; il avait fait partie de la Compagnie de Jésus, supprimée en 1762 ; il s'employa dans le diocèse, parmi le clergé séculier, et fut nommé curé de Saint-Houardon, en 1781 ; il se refusa à la prestation du serment, en Janvier 1791, et fut successivement détenu à Audierne, à Kerlot et aux Capucins de Landerneau, d'où il fut relâché, étant infirme et âgé de 66 ans. Il mourut avant le Concordat. 

Il avait pour vicaire Alexandre-Marie Joguet, né à Saint-Paul, le 8 Juin 1761, à Saint-Houardon dès 1790 ; il refusa également le serment. Au Concordat, nous le retrouvons curé de Daoulas, puis de Ploudiry, où il mourut le 16 Novembre 1812. 

A Saint-Thomas, Pierre-Marie Bodénès, chanoine de Daoulas, prieur recteur, refusa le serment, fut interné au château de Brest, puis à Audierne et aux Capucins de Landerneau, d'où il fut relâché en Juillet 1794 ; il était âgé de 71 ans. Il demeura à Landerneau, où il mourut à l'époque du Concordat. 

Son vicaire, Germain-Charles-Marie Marc, né à Landerneau en 1753, imita son Recteur en refusant le serment. Voici ce qu'en dit M. de Troërin, dans sa correspondance avec l'Evêché.

« M. Marc, vicaire à Saint-Thomas, logeait chez Mme Kerleno. Il émigra en Angleterre, où il apprit l'anglais et gagna un peu d'argent en donnant des leçons de français. Il revint en France et passa 18 mois à Saint-Thomas, jusqu'à la clôture de cette église, prise pour magasin à fourrage ; il y était desservant provisoire, respecté et chéri du peuple, n'ayant jamais un sol, tout ce qu'il avait était pour les pauvres. Prêtre de grand exemple, très instruit, un peu vif dans son zèle, cependant jamais indiscret ; bon prédicateur breton et français, il expose les principes avec une netteté et exactitude très grande ; c'était un des excellents sujets du diocèse de Quimper ».

Nommé recteur de Plouvien en 1804, puis de Gouesnou en 1806, il mourut le 14 Août 1809.

Comme on le voit, les prêtres des paroisses de la ville donnèrent le bon exemple de la fermeté. Malheureusement, il ne fut pas imité par le vicaire de Saint-Julien, trêve de Ploudiry, mais faisant partie de la ville. Le prêtre qui en avait la charge était Emmanuel-Claude-François Pillet, né à Saint-Julien même, le 17 Octobre 1758. C'est le type des prêtres constitutionnels corrects et intelligents — ils n'étaient pas très nombreux, — mais les surpassant par cette caractéristique commune à tous, un entêtement invétéré. Il se peint lui-même, dans une sorte d'autobiographie qu'il adressa à Mgr. Dombideau, le 7 Août 1806, et dans laquelle il fait son apologie, sans fausse modestie. 

« A l'Age de 23 ans et demi, je fus nommé à la succursale de Saint-Julien, dépendante alors de la paroisse de Ploudiry ; j'y ai exercé le ministère pendant neuf ans, et tout le monde sait, quelque jeune que je fusse, la considération dont je jouissais. Je fus élu à la cure de Landerneau, sans aucune participation de ma part, et bien à mon insu ; les larmes, les prières des habitants, ne me laissèrent pas la liberté de refuser, et malgré le dessein que j'avais formé, à la vue des troubles naissants, de me retirer du ministère, je me vis forcé d'accepter. Aussitôt, se manifesta une allégresse générale. 

J'ai exercé, jusqu'à mon remplacement, mon ministère avec toute la dignité qu'il comportait : mes adversaires ne sauraient me faire des reproches sur cet article. Les églises que je servais étaient, malgré les criailleries, très fréquentées, et la pratique des sacrements éprouva peu de diminution. Aidé d'un clergé assez nombreux, nous pouvions faire face à tout. Je me suis opposé avec fermeté à l'avilissement des ministres sacrés, et voilà le crime qui m'a attiré la haine de certains personnages en place, qui, profitant des malheureuses circonstances de ces temps désastreux, ont travaillé avec fureur et sans déguisement au dépouillement total des églises, à la ruine entière de Saint-Houardon, pour en faire un temple de la Raison. Les registres de la commune attesteraient au besoin ce que j'avance, et feraient connaître leurs noms. Je les vois aujourd'hui, ces hommes, et ils savent que je les connais bien, s'efforcer de réparer cette église qu'ils ont fait vendre [Note : Ce n'est qu'à la Toussaint 1806 que M. Jannou put reprendre l'exercice du culte à Saint-Houardon. L'office, jusque-là, se faisait en l'église Saint-Julien] avec le presbytère, contre le voeu de la loi et malgré les réclamations du corps municipal, pour favoriser l'acquéreur et supprimer le culte. 

S'ils l'ont fait racheter, toute mauvaise qu'elle est, c'est pour faire annuler Saint-Julien, que j'ai fait rouvrir en l'an III et où s'est opérée la réunion, malgré de fortes oppositions ; aussi, que de procès-verbaux contre cette dernière et dont je démontrerais victorieusement le faux, si j'y avais le plus léger intérêt. Ces hommes veulent un triomphe, peu importe quelles en seront les suites. Le très petit nombre qui dirige cette intrigue fait murmurer tout le monde ; ces êtres remuants veulent deux choses, fermer et vendre Saint-Julien ; il doit y avoir des soumissions à cet effet au département ; et m'exclure de la ville, comme étant pour eux un objet de trouble, ma présence leur pèse ; et par conséquent faire tomber un établissement [Note : M. Pillet avait acquis la maison des Capucins et venait d'y établir les classes d'une école d'instruction secondaire], qu'ils voient avec peine prospérer, et y placer des religieux. 

J'ai travaillé en chef jusqu'à l'arrivée du pasteur actuel [Note : M. Jannou, nommé curé, en Septembre 1803], au risque de me faire mettre au château de Brest, je l'ai échappé quatre fois. J'ai assisté, au grand étonnement de mes adversaires, à l'installation de notre Curé, avec le dévouement qui caractérise un ecclésiastique qui n'a d'autre intérêt que celui de la religion. Et pour donner l'exemple de la soumission au pasteur que la Providence nous envoyait, depuis ce jour, mes collègues et moi, nous cessâmes d'avoir part aux rétributions. Nous étions quatre, et nous eûmes le désagrément d'être regardés comme non existants ; la distinction de deux clergés parut dans une malheureuse évidence, seulement on ne le dit pas. 

M. le Curé ne tarda pas à faire une visite générale, et il vit comme on l'avait trompé à mon sujet ; aussi fut-il forcé d'avouer qu'il ne trouvait que des personnes en pleurs, ou que des portes fermées, et que pas une âme ne lui avait témoigné qu'on fût aise de l'avoir pour pasteur. J'ai travaillé à le faire respecter, j'ai forcé nombre de personnes exaspérées à se présenter à la Pâque et à suivre Saint Houardon. Ce qui me donne la consolation de voir que les fidèles que j'administre sont les plus fidèles aux offices de la paroisse. On l'a fait remarquer à notre pasteur, plusieurs personnes sont mortes de douleur de me voir frustré d'une place à laquelle j'avais été désigné de l'accord des deux puissances. Que de peines à remettre les têtes qui furent dérangées ! Ce sont ici des faits publics. 

Si j'ai obtenu beaucoup de confiance malgré toutes les menées, c'est que je n'ai point témoigné de ressentiment contre ceux qui m'ont fait le plus de mal. Je n'en ai jamais voulu à ceux qui pensaient différemment que moi ; jamais, pendant la Révolution, je n'ai engagé personne à suivre mon opinion, je n'ai ni approuvé ni désapprouvé ceux de mes collègues qui ont rétracté leur serment ; si je ne les ai pas vus aussi fréquemment après, c'est qu'on leur défendait expressément de me voir. Au tribunal, j'ai suivi exactement les règles prescrites, quoiqu'on eût voulu donner à entendre que j'étais trop faible. J'aurais été ecclésiastique sans égal dans ce pays, si j'avais voulu rétracter mon serment. Ce système règne encore... 

J'aurais été bien aise d'avoir eu des élèves à vous présenter pour la prêtrise ; j'en avais quelques-uns qui m'auraient fait honneur et dont la conduite répondait aux talents, mais on leur a fait entendre, et je sais bien qui, qu'ils n'eussent pas été reçus au Séminaire, s'ils s'y présentaient venant de chez moi. Aussi, je me décidai à ne plus recevoir aucun qui prétendît à la prêtrise. Mon projet est, toutefois, de reprendre cette partie. J'ai l'honneur d'être, avec le plus profond respect, Monseigneur, de Votre Grandeur, le très humble et très obéissant serviteur. PILLET, prêtre. Landerneau, le 7 Août 1806 »

M. Pillet continua à tenir son école jusqu'à l'époque de la Restauration. Le Grand-Maître de l'Université lui retira alors toute autorisation d'enseigner. Mais M. Pillet continua à résider à Landerneau, où il mourut en 1836, revenu, espérons-le, de ses illusions passées.

(Archives du diocèse de Quimper et de Léon).

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