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Le 9 novembre 1799, nouvelle forme du gouvernement ; constitution de l'an VIII. Pillet organise un collège secondaire dans la propriété des Capucins, achetée par lui. Cette école est reconnue et officiellement autorisée par les Consuls.

Au cahier des procès-verbaux des séances du Temple décadaire à Landerneau, on lit, à la date du 21 novembre 1799 :

Ce jour 30 brumaire an 8 de l'ère républicaine, les autorités constituées tant civiles que militaires se sont transportées au temple décadaire accompagnées de la garde nationale et des troupes de ligne, où, étant arrivées, il a été donné lecture des lois portées au n° 317 ,du bulletin décadaire n° 4, du décret du Conseil des Anciens du 18 brumaire, suivi de l'adresse aux Français, de la proclamation du général Buonaparte et de l'arrêté de l'Administration centrale du Finistère du 24 de ce mois qui ordonne la publication de toutes ces pièces.

Il a été aussi donné lecture de la loi du 19 de ce mois qui supprime le Directoire exécutif et nomme une commission consulaire composée des citoyens Sieyès, Roger Ducos et Buonaparte et de l'arrêté du dit Conseil,.

Ensuite de quoi l'agent municipal de la commune du chef-lieu a donné lecture des naissances et des décès qui ont eu lieu pendant la décade et a donné sa démission...

Le 10 frimaire suivant, il y a encore une séance ordinaire et enfin, le 20 frimaire, c'est la dernière séance, pendant laquelle toutes les autorités, nouvellement constituées, viennent prêter serment ; on y célèbre un dernier mariage, celui de Bernard Gourvès et de Marie Françoise Le Gorroc de cette commune et l'on décide que la maison commune suffira désormais pour tenir les assemblées décadaires.

Les trois Consuls tinrent leur première réunion le 20 brumaire (11 novembre), Bonaparte y fit si bien sentir la supériorité de sa volonté à ses deux collègues que Sieyès, désappointé, s'écriait : « Nous avons un maître qui sait tout faire, qui peut tout faire, qui veut tout faire ». Sieyès avait comme toujours une nouvelle Constitution toute prête, Bonaparte la remania de fond en comble et rapidement, car, le 15 décembre, sous le nom de Constitution de l'an VIII, elle était soumise à l'approbation du peuple ; nous n'avons pu trouver les résultats du plébiscite à Landerneau, mais l'Histoire dit que trois millions de suffrages contre un million cinq cent mille la ratifièrent.

Le pouvoir exécutif était exercé par 3 Consuls, élus pour 10 ans et rééligibles ; l'un d'eux portait le titre de 1er Consul, c'était Bonaparte, qui d'ailleurs se hâta l'année suivante de remplacer Sieyès et Roger Ducos par Cambacérès et Lebrun : il avait à promulguer les lois, à nommer les ministres, les ambassadeurs, les officiers de terre et de mer, les membres des administrations en un mot, c'était un véritable souverain, un dictateur.

Le pouvoir législatif était exercé par trois assemblées : le Conseil d'Etat qui proposait les lois, le Tribunal qui les discutait et le Corps législatif qui votait sans discussion. Le suffrage universel était rétabli, mais soumis à des conditions qui le rendaient inoffensif. Les électeurs choisissaient un dixième d'entre eux qui étaient dits notables communaux ; ces derniers élisaient un dixième d'entre eux qui étaient dits notables départementaux ; ces notables départementaux élisaient un dixième d'entre eux, c'étaient les notables nationaux. Alors les Consuls nommaient eux-mêmes les conseillers municipaux, et les juges de première instance parmi les notables communaux, les fonctionnaires du département parmi les notables départementaux et les membres des Corps législatifs étaient choisis parmi les notables nationaux. A la tête de chaque département, il y avait un préfet, assisté d'un Conseil de préfecture et d'un Conseil général et à la tête de chaque arrondissement, un sous-préfet assisté d'un Conseil d'arrondissement.

Le premier préfet du Finistère fut M. Charles Didelot, tôt après remplacé par M. Rudler, et le sous-préfet de l'arrondissement de Brest, M. Lapaquerie.

Suivant la nouvelle Constitution, une liste dite civique des électeurs de la commune de Landerneau fut dressée ; elle comptait 641 « citoyens qui ont le droit de voter ». Ces citoyens élurent 64 notables, dits notables communaux, à savoir :

René Le Bihan, Goury fils aîné, Salomon Féburier, Taylor, J.-M. Duthoya, J. Robert, Lacaze aîné, Joseph Bazin, Radiguet, Kerros, Onfrey, Hacbec, Lagrange, Bouroullec, Crespy, Le Bris, Jacolot, René Bazin, Kérébel, Brichet, Thomas Le Gall, Ch. Leroux, P. Duthoya, P. Mazurié, Le Meur, Adam, Gineste, By. Bazin, Gillart, Floc'h, J. Cosson, Foullioy, F. Cosson, R. Poisson, Mazurié, père, Goury ingénieur, Dumaige, Réal, Guiastrennec, T. Leroux, Leyer, M. Bazin, Rousseaux, Le Gris-Duval, Cruzel, Tréaudet, 0llivier père, Le Guen, L. Renault, Guy Croc, Denatre, Benoît Barbier, Robert (de Kerlaran), Goudiguen, Le Bègue, 0llivier aîné, Davy, Keraudy, Pierugues, Julien Bazin, Le Normand, G. Cornec, Kérouanton.

Les notables communaux réunis à ceux des autres communes, élurent à leur tour des notables départementaux au nombre de 802.

Parmi les élus départementaux il y avait 15 notables de Landerneau, à savoir :

Le Bourg père, Le Bihan, Le Bourg fils, Le Bris-Duremain notaire, Brichet notaire, Février, Le Gall marchand, Kerros négociant, Lacaze négociant, Lagrange chirurgien et 0llivier fils.

Ces notables départementaux élurent à leur tour 80 notables nationaux pour le Finistère ; parmi les élus, un était de Landerneau, c'est Le Bourg père, jurisconsulte.

Suivant la Constitution, c'est parmi les notables communaux que le préfet nommait le maire, son adjoint et les conseillers municipaux.

Le 12 février 1800, M. Goury aîné, nommé ainsi maire de Landerneau, réunissait à la Mairie le nouveau Conseil municipal, pour lui faire prêter serment, comme on lit dans le Cahier des Délibérations.
Le 23 pluviose, Monsieur Goury aîné maire réunit le Conseil municipal à 9 heures du matin ; il donne lecture de la lettre du préfet du 19 de ce mois et l'arrêté du 13 qui nomme pour composer le conseil municipal les citoyens Kerros, Taylor, Radiguet, Launay Onfrey, Gineste, Lagrange, Cruzel père, Joseph Cruzel, Guillou, Kervoalen, Mazurié père, Le Guen, Joseph Bazin, Le Meur, Tréaudet et René Poisson. il prête lui-même serment en ces termes : « Je promets fidélité à la Constitution », les conseillers mtmicipaux ont pareillement prêté individuellement le même serment.

Si déjà, sous le Directoire, les attributions de la Municipalité avaient été restreintes, maintenant elles le sont à l'extrême, car si de 1789 à 1799, on compte comme Registres des Délibérations de grands cahiers in folio A. B. C. D. E. F. ; désormais un seul cahier d'une centaine de pages renfermera les procès-verbaux des séances de 1800 à 1809 et quatre fois sur cinq il n'y est question que de dispositions à prendre pour la conscription militaire.

Tout l'intérêt à Landerneau se porte à ce moment sur le collège que Pillet vient de fonder. D'après un acte de vente, c'est le 22 janvier 1799 que Pillet acheta la propriété de l'ancien couvent des Capucins. Nous avons dit que Pillet fut agent d'affaires, sous la Convention et le Directoire ; ce métier lui procura une grosse fortune et il sieyait à l'intrus de consacrer cette fortune à l'achat de biens ecclésiastiques.

« Pillet acquit les Capucins le 3 pluviose an VII de M. Brichet au nom et mandataire de Toussaint Léon Treverret auquel cette propriété avait été vendue par l'Etat aux droits du Clergé supprimés (28 frimaire an VI), acte enregistré à Quimper, le 29 nivose an VI ».

Aussitôt Pillet réunit dans son Collège 37 élèves, dont 14 de Brest, 13 de Landerneau, les autres étant de Versailles, Quimper, Crozon, Port-Launay, Guipapas. Il emploie 6 professeurs : le citoyen Thomas Détourelles enseigne les Mathématiques, les citoyens Raoult et Surzur enseignent la Grammaire française ; lui-même Pillet et un de ses vicaires Rabby enseignent le latin, le citoyen Borcourt enseigne l'écriture, et, dit Pillet dans son prospectus :

« De tous les arts, c'est l'écriture, le plus utile ; c'est l'âme du commerce, le tableau du passé, la règle de l'avenir, le messager des pensées, en un mot, la clef des arts et des sciences ; aussi cet art est-il enseigné avec soin : on y étudie les proportions de la ronde, de la bâtarde, de la coulée ; on apprend la distance que l'on doit garder entre les lettres qui composent un mot, entre chaque mot, entre chaque ligne ».

Borcourt enseigne le dessin avec l'écriture et Surzur ajoute à son enseignement des leçons de musique, car dit le prospectus :

« La musique et le dessin sont deux arts d'agrément qui font une diversion trop nécessaire aux études sérieuses pour qu'il soit permis de les négliger ».

Les élèves sont ou pensionnaires, ou demi-pensionnaires, ou chambriers ou externes. Le prix de la pension, blanchissage compris, pour ceux de 1re instruction (basses classes) est 400 francs, et 500 francs pour être quitte de tout mémoire, sauf l'augmentation qu'exigerait le renchérissement des denrées. Pour les élèves de 2ème instruction, le prix de la pension est
500 francs et 600 francs pour être quitte de tout mémoire.

Le prix devra être payé d'avance par trimestre, le mois des vacances (mois d'août) n'étant pas compté dans le prix.

La première année scolaire, commencée en février 1799, s'acheva le 19 février 1800 par la distribution solennelle des prix dans une des salles de l'établissement, l'ancien réfectoire des Capucins.

Nous avons le palmarès ; il est formé d'une grande feuille intitulée : « Distribution solennelle des prix à la suite de l'exercice littéraire du 30 pluviôse an VIII de la République française. — Maison d'éducation du citoyen Pillet, à Landerneau ».

Les parents des élèves, les municipaux de la ville avaient été tous invités. La cérémonie débute par un discours du citoyen-curé Pillet, où il explique le sens et le but de l'exercice littéraire. Les enfants vont être interrogés devant leurs parents sur les diverses branches des matières enseignées, et les invités auront eux-mêmes à voter pour déterminer le prix ; laissons-le d'ailleurs parler lui-même :

« L'exercice littéraire que nous présentons aujourd'hui au public n'est que l'essai de ce que mous nous proposons de faire dans la suite ; mais il suffit qu'il puisse être utile à l'avancement de nos élèves, pour que nous ne croyons pas devoir nous en dispenser. Nous avons jugé, en effet, que le meilleur moyen de les tenir toujours en haleine, et de les rendre plus attentifs à nos leçons, était de leur présenter sans cesse le public, leurs concitoyens, comme devant être les témoins et les appréciateurs de leurs progrès. Dans cette vue, nous n'avons rien négligé pour faire naître en eux le désir de mériter des éloges publics, et de faire paraître des talents naissants, avant-coureurs d'un avenir flatteur. La crainte de ne pas réussir, qui leur a fait jusqu'ici surmonter les difficultés qui naissent sans cesse sous leurs pas encore mal assurés, les aurait infailliblement rebutés, si nous n'avions pris à tâche de leur apprendre à vaincre, par une hardiesse raisonnable, cette timidité si naturelle à leur âge et dont le moindre inconvénient est de rendre la vertu difficile à pratiquer dans bien des circonstances.

Nous avons aussi pour but de rendre compte aux parents du degré d'instruction auquel sont parvenus leurs enfants. En nous les confiant, ces dignes objets de leur tendresse, ils nous ont chargés du soin, de former leurs esprits aux sciences et leurs coeurs aux vertus ; ils jugeront si nous avons commencé à remplir leurs intentions.

Nous regrettons de ne pouvoir présenter tous nos élèves. On eut vu avec intérêt des enfants en bas âge donner déjà de flatteuses espérances ; mais leur nombre et le temps ne nous le permettent pas ».

L'exercice littéraire débuta par les Mathématiques : huit élèves furent interrogés. A chacun on posa une question de cours et un problème ; le programme comprenait suivant les trois classes, l'Arithmétique, l'Algèbre et même les progressions et logarithmes. Soit un exemple :

Qu'est-ce qu'un carré, un cube ? Comment procède-t-on à l'exaltation de ces puissances, à l'extraction de leurs racines ?

Problème : Une personne, ayant joué à quitte ou double contre une autre, a perdu 6 fois de suite ; elle avait joué 3 livres la première fois, que perd-elle après la sixième ?

Puis vint l'exercice de langue française. Ici tous les élèves furent interrogés l'un après l'autre. Voici quelques-unes des questions posées :

Titres qu'on donnait aux grands dans l'ancien régime ? Titres qui distinguent les têtes couronnées d'Europe ? Le titre citoyen remplace-t-il avantageusement toutes les expressions de l'esclavage ?...

Ensuite ce fut l'exercice latin. Au bout d'une seule année de latin on ne peut demander que les déclinaisons et conjugaisons et expliquer les Selectae e veteri testamento historiae. Cinq élèves furent appelés à expliquer un passage de ce recueil.

Tous les élèves furent interrogés, après cela, sur la morale dont le manuel était le Catéchisme dit de Léon.

Cet exercice littéraire, commencé à 9 heures du matin, prit fin à 11 heures et les assistants furent invités à voter un prix à celui des élèves qu'ils jugeaient avoir le mieux répondu : le scrutin ne devait être dépouillé que dans l'après-midi. A 2 heures du soir, en effet, les invités de Pillet se réunissaient de nouveau aux Capucins. Cette fois la séance débuta par une pièce de musique jouée par les élèves. Pillet donna lecture du Palmarès, après avoir publié la liste des primautés (croix) obtenues par les élèves pendant l'année scolaire. Voici un extrait de ce palmarès :

Langue latine
Professeur le citoyen Rabby
Seconde classe.

1er prix, François Raoult de Quintin ; Silvestre-Marie Canivet de Brest.
2ème prix, Paul Kerrien de Landerneau ; Hilarion Touët de Landerneau ; Marc Loussaut de Pol-de-Léon.
Ont approché, Jean-Marie Gestin de Brest ; Louis-Alphonse Dehault de Versailles ; Claude-Etienne Boutibonne de Quimper
.

Enfin on proclama l'élu du matin, Joseph Helloco, d'Uzel, qui recevait son prix des mains du Président de l'Administration. Un coup de musique et Pillet déclarait la séance terminée en annonçant que le lendemain commençait l'année scolaire suivante.

Cette année 1800-1801, le nombre des élèves a plus que doublé ; il y a 15 pensionnaires, 5 demi-pensionnaires, 11 chambriers, 57 externes (au total 88 élèves). La distribution des prix eut lieu cette année là le 4 Septembre.

Nous avons sous les yeux le « Programme de l'exercice littéraire qui aura lieu les 16 et 17 fructidor an 9, dans la maison d'éducation du citoyen Pillet, à Landerneau ». Il porte en exergue les mots « Vertu et Science ». L'exercice est fixé à 3 objets seulement : la langue latine, la langue française et les mathématiques. Plus de morale, cette fois. Mais avant le programme de chaque matière il y a des considérations curieuses. Voici ce qui précède l'exercice latin :

La langue latine si négligée de nos jours, et peut-être regardée comme inutile, forma dans les siècles précédents les grands modèles dont il semble qu'on voudrait s'écarter. Nos grands orateurs, nos poètes célèbres, nos philosophes profonds, tous nos meilleurs écrivains durent leur succès à l'étude profonde des chefs-d'oeuvre d'Athènes et de Rome qui ont pu échapper à la voracité du temps. D'où vient cette maigreur de style qu'on aperçoit dans nos écrivains modernes ? D'où vient qu'à la place de cette force, de cette véhémence, de ces tours nobles et délicats qui enlèvent, qui emportent comme malgré nous notre admiration, nos sentiments, on ne voit presque plus aujourd'hui que de l'élégance, que des efforts de style, qui plaisent au premier abord et dont on a peine à soutenir une seconde fois la lecture ? Ne pourrait-on pas dire que notre langue dépérit parce qu'on l'enlève en quelque sorte à ses premières sources ? ... Les plus grands génies de Rome ne rougirent pas de fréquenter les écoles d'Athènes, pourquoi ne ferions-nous pas revivre la langue de l'ancienne maîtresse du monde ?...

On a dépassé le Selectae, et les élèves ont à expliquer les Fables de Phèdre et le discours de Cicéron pro Ligario, « ce chef-d'oeuvre d'éloquence, qui, dit Pillet, fit tomber des mains de César la sentence qui devait condamner Ligarius ».

Le programme de l'exercice français est de même précédé d'une considération sur l'art de la parole :

Cet art qui procure à l'homme les jouissances des plus délicieuses, qui trace si bien la ligne de démarcation entre lui et les autres animaux, a été cruellement défiguré de nos jours, pendant les orages de la révolution. Tout le monde sait que les mots aristocrate, fédéraliste ont fait conduire à l'échafaud des milliers de Français. Tout le monde a senti les maux qu'a causés à la France l'assemblage de ces termes hétérogènes gouvernement révolutionnaire... Tout cela n'aurait pas eu lieu, si l'on avait attaché une idée nette à ces mots. Voici en faveur de ce que nous avançons un exemple frappant tiré de l'Histoire romaine. César se présente dans la place publique dans l'intention de se faire couronner, et les Romains, parce qu'ils n'attachaient pas une idée précise au mot royauté, lui accordent sous le nom d'imperator la puissance qu'ils lui refusent sous le nom de rex.

Donc Pillet enseigne surtout la précision des mots ; la grammaire qu'il emploie est celle de Lhomond. Ses modèles, dit-il, on été les Condillac, les Dumarsais et les Sicard.

Les Mathématiques qui comprennent, outre l'Arithmétique et l'Algèbre, la Géométrie et la Trigonométrie, ont pour préambule de leur programme une parole de Juvenel de Carlencas : « Les nombres et les lignes sont peut-être les seules connaissances certaines qui aient été accordées à nos lumières naturelles ».

Bonaparte s'occupa peu de l'enseignement primaire qu'il laissa à l'initiative des communes. Son attention se porta spécialement sur l'enseignement secondaire, qui lui tenait plus au coeur, parce que c'était la clientèle de cet enseignement qui devait lui fournir ses futurs officiers et futurs fonctionnaires. Il créa le monopole de cet enseignement dès l'an XI (1802). Il établit 29 lycées et fixa le nombre des écoles secondaires qui pourraient préparer aux 6.400 bourses crées pour ces lycées. C'est ainsi que, par arrêté des Consuls du 30 vendémiaire an XI (2 octobre 1802), l'école de Pillet à Landerneau était érigée en école secondaire officielle.

Dans le Cahier de Correspondance, on lit cette lettre du maire à Pillet :

Vous trouverez ci-joint une expédition de l'arrêté des Consuls du 30 vendémiaire an XI qui érige en école secondaire celle que vous avez établie en cette ville.

S'il est flatteur pour vous d'avoir obtenu cette faveur du gouvernement, elle est pour nous le garant des recherches que vous ferez pour vous procurer des maîtres qui possèdent l'art d'enseigner. Vous le savez mieux que moi, ce ne sont pas toujours les gens les plus érudits qui se font le mieux comprendre de la jeunesse ; la nature n'a départi cette faveur qu'à un très petit nombre d'hommes.

Dès cette année, trois des élèves de Pillet obtenaient une bourse pour le lycée de Mayence, à savoir : Crespy, Raoult et Murecey : les deux premiers acceptèrent leur bourse.

L'année suivante, par arrêté du 1er vendémiaire an XII (24 septembre 1803) le gouvernement établissait à Pontivy un lycée qui avait pour arrondissement les départements du Morbihan et du Finistère.

Le curieux de la méthode de Pillet était le classement des élèves. Ils étaient classés par matière, c'est-à-dire, qu'un élève pouvait être de la 1er classe en Latin, de la 3ème en Français, de la 2ème en Mathématiques. C'est plus rationnel, mais peu pratique. Plus rationnel, car en rhétorique, par exemple, le professeur n'était pas gêné par des élèves dignes au plus d'être en quatrième ; peu pratique, car si pour achever ses études, l'élève devait attendre qu'il fût de la 1ère classe pour la matière où ses progrès étaient lents, il était exposé à prolonger outre mesure son collège.

Mais cette méthode ingénieuse de Pillet ne fut appliquée que jusqu'en 1804. A ce moment, Bonaparte, devenu empereur, créa l'Université qui fut complètement organisée en 1806 et des programmes furent imposés que Pillet dut suivre. L'école de Pillet, fut, en effet, l'objet d'un décret impérial, communiqué au maire de Landerneau par une lettre du sous-préfet de Brest, en date du 11 vendémiaire an XIII (4 octobre 1804).

Le sous-préfet de Brest au Maire de Landerneau.

Monsieur, c'est avec satisfaction que je vous fais passer un extrait du décret impérial qui maintient en école secondaire celle de Monsieur Pillet ; je vous invite à lui donner connaissance.

J'ai l'honneur de vous saluer. Signé : la Paquerie.

Napoléon, empereur des Français, sur le rapport du Ministre de l'Instruction, décrète ce qui suit :

Article 1er. — Les maisons d'éducation particulière, ci-après désignées, sont seules autorisées à prendre ou à conserver le titre d'Ecoles secondaires dans le département du Finistère : à savoir :

L'école de M. Laurent à Lamibézellec,

Celle de M. Pillet à Landerneau,

Celle de M. Bourson à Brest.

Les élèves de ces écoles secondaires, seront admis à concourir aux places gratuites des Lycées.

Article 2. — Le Ministre de l'Intérieur est chargé de l'exécution du présent décret.

Signé : NAPOLÉON.

Par l'Empereur, le Secrétaire d'Etat, signé, Hugues.

Pour copie conforme, le Ministre de l'Intérieur par intérim. Signé : PORTALIS.

Pour ampliation, le Conseiller d'Etat, Directeur général de l'Instruction publique. Signé : FOURCROY.

La ville de Landerneau avait, depuis l'arrêté des Consuls, inscrit à son budget une somme de 1.200 fr. par an en faveur de l'école. Pillet lui-même, riche désormais d'argent et d'honneurs, céda à sa nature généreuse et reçut beaucoup d'élèves à pension réduite.

C'est désormais un fonctionnaire important dans la petite ville de Landerneau.

Hélas ! il n'usera de ce prestige que pour retarder la pacification religieuse de Landerneau. Sans lui, le Concordat eut vite amené la paix dans une population qui n'est plus en ce moment que de 3.500 âmes et, à cause de lui, jusqu'à la Restauration, ce sera la lutte, la plus pénible des luttes, la lutte religieuse !. (L. Saluden).

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