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Landerneau : le 1er consul signe le Concordat.

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Le 1er Consul signe le Concordat ; retour des prêtres fidèles. Pillet adhère au Concordat mais ne rétracte pas son erreur. La Municipalité craignant de le voir nommer curé de Landerneau écrit au Ministre. L'évêque agit dans le même sens. En 1804, c'est M. Jannou qui est nommé curé de Landerneau. Constitution de l'an X.

Le Consulat à peine proclamé, le bruit circule en France et à l'étranger que Bonaparte a pressenti la Cour romaine au sujet d'un Concordat possible. Les prêtres exilés franchissent les frontières et les prêtres fidèles, restés en France, sortent de leurs cachettes. C'est en vain que Fouché, Ministre de la police, déclare, presque au lendemain du 18 brumaire, par une circulaire du 22 avril 1800, que les lois de 1792 et 1793 restent en vigueur, les magistrats ferment les yeux. A Landerneau particulièrement, les catholiques s'affichent ouvertement, car on vient d'apprendre que M. de Roujoux, l'ancien maire, nommé par Bonaparte membre du Tribunat, fait partie de la Commission des Sept membres chargée par le premier Consul de la rédaction d'un Concordat. Ils écrivent à leurs anciens prêtres et ceux qui ont survécu à la tourmente s'empressent d'accourir.

Le premier qui arrive, c'est M. Roussel, le recteur de Beuzit ; vaillant avant la Révolution, il n'est plus qu'un vieillard ; l'exil l'a usé avant l'âge. Au moins aura-t-il la consolation de mourir recteur de Beuzit, car le Concordat ne sera pas encore appliqué lors de son décès au début de 1803. M. Joquet, l'ancien vicaire de M. de La Rüe, arrive lui aussi ; le recteur étant mort, c'est à lui qu'incombe l'administration de la paroisse Saint-Houardon. L'église est occupée par la manutention militaire ; mais des paroissiens, en attendant de pouvoir acquérir l'église ont acheté les chapelles des Agonizants et de Saint Sébastien et c'est là que le culte s'exerce dès le milieu de 1800. D'ailleurs toutes ces restaurations ne se font pas sans ordre ; M. Péron pour le Haut-Léon et M. Henry pour le Bas-Léon publient les instructions précises de Mgr. de Lamarche ; ce prélat attend encore à Londres que se confirment les espérances auxquelles on se laisse aller.

A la même époque, une députation des habitants de la paroisse Saint-Thomas, conduite, dit le cahier des Délibérations, par les citoyens Gabriel Le Floc'h, Guillaume Dumaine, Louis Cornec, Jean Le Normand et Joseph Le Meur, vient demander qu'on leur cède l'église Saint Thomas pour y exercer leur culte. La municipalité qui a transporté à la mairie les séances décadaires, la leur concède. Mais. M. Bodénez, le recteur est mort, M. Marc, arrêté après Fructidor, n'est pas encore libéré. M. de L'archantel, qui administre le diocèse de Quimper depuis septembre 1791 avec le titre de vicaire apostolique, confie la paroisse à M. Leissègues de Légerville qui vient de rentrer d'Espagne et demeure chez son père à Landerneau. Ce dernier ouvre aussitôt un cahier de baptêmes et de mariages qui débute par l'acte suivant :

Guillaume Mével, fils légitime de Joseph et de Anne Traonvaez, né à Kersioch en cette paroisse le 19 décembre 1800, a été solennellement baptisé par moi soussigné. Les parrain et marraine ont été Guillaume Traonvoez et Marie Kermarec. FRANÇOIS-MARIE LEISSEGUES LÉGERVILLE, Curé provisoire de la paroisse Saint-Thomas.

M. Leissègues signe au registre jusqu'au 13 avril 1801 ; à cette date, il est appelé à Quimper et remplacé par M. Graveran qui signe « curé d'office » jusqu'en mai 1802. Alors réapparait M. Marc, l'ancien vicaire, qui signe curé d'office de Saint-Thomas jusqu'à l'application du Concordat.

En même temps, d'autres prêtres, originaires de Landerneau, rentrent au pays ; tels MM. Colle, de Troërin, Bodros. Dès leur arrivée, ils se rendent à la mairie pour régulariser leur situation.

Réduit, dit M. Bodros, par la loi de 1792 à l'alternative ou de faire un serment qui répugnait à ma conscience ou de sortir du territoire français, je me décidai avec chagrin à ce dernier parti et, conformément à la loi, j'en fis la déclaration à la municipalité de Plounéventer et obtins à Roscoff un permis de m'embarquer. Dès que j'eus appris que la France respirait sous un régime plus doux, mes regards se sont tournés vers ma patrie et j'ai ressenti plus vivement que jamais le désir de la revoir qui ne m'avait jamais quitté, j'ai revolé à la maison paternelle et n'y ai retrouvé de mes auteurs qu'une mère âgée et infirme dont je désirerai rester consoler les vieux jours. Je déclare donc être dans l'intention d'établir mon domicile à Landerneau. Je ne suis autorisé ni par certificat ni par carte de sûreté, toute ma confiance est dans les magistrats de ma commune à la surveillance desquels je viens me livrer en leur demandant la permission d'exercer les fonctions du culte catholique.

Les magistrats acquiescèrent à tout et si ces prêtres ne restèrent pas à Landerneau, c'est que l'administration épiscopale les appela ailleurs pour combler les vides nombreux créés par la Révolution.

Quant à la paroisse Saint-Julien, elle devient la paroisse de tous les constitutionnels de Landerneau, qui, par esprit de contradiction, se rangent avec une ferveur de néophytes sous la houlette de Pillet, directeur de l'Ecole secondaire et curé-archiprêtre de Landerneau.

Pendant que les constitutionnels de Saint-Thomas et de Saint-Houardon ne veulent les sacrements que du ministère de Pillet ou de ses acolytes, les catholiques de Saint-Julien vont suivre l'exercice de leur culte dans les autres églises. Ici on réhabilité les mariages bénits par Pillet, comme l'atteste l'acte suivant choisi entre plusieurs du même genre :

Je soussigné, prêtre et curé d'office de cette paroisse, certifie que le 12 juin 1802, j'ai réhabilité le mariage constitutionnellement contracté entre François Le Guen, veuf majeur d'Anne Signard, et Marie Tréguer, veuve majeure de Jean-Marie Brélivet, de cette paroisse et ce en présence de Jean-Louis Duhot, de Jacques Prédour, de Claude L'Orloéach, de Noël Le Meur, de Yves-Marie. Abautret. Ont signé : les nouveaux mariés, les témoins et G. Ch. M, Le Marc, curé de Saint-Thomas de Landerneau.

C'est donc le schisme et la lutte religieuse à Landerneau, à cause de la présence et de l'obstination de Pillet. Mais voici que le Concordat, signé le 10 septembre 1801, est publié le 10 avril 1802. Alors aussi paraît le décret érigeant l'évêché de Quimper. Le Pape, sous la pression du Premier Consul, a demandé à tous les anciens évêques de donner la démission de leurs sièges. C'était là chose inouïe dans l'histoire de l'Eglise ; le Pape avait longtemps résisté avant de prendre cette décision, craignant d'avoir l'air de désavouer des prélats qui avaient été des confesseurs de la foi ; mais quand un de ses cardinaux lui eut montré que par cette décision il allait ruiner à jamais la vieille hérésie gallicane, le Pape n'hésita plus. Hélas ! pourquoi fallut-il que le saint et digne évêque de Léon, Mgr de Lamarche, refusât d'obtempérer à la demande du Pontife ? Il soulignait par son refus le péril du gallicanisme et justifiait par sa conduite la mesure du Pape.

Malheureusement à de grandes qualités se mêlait chez Mgr de Lamarche, une certaine naïveté, comme le témoigne une lettre de M. de Troërin, ci-devant premier dignitaire de Léon, adressée à M. Boissière : Des maux incalculables seront la suite de cette non démission ; je dis dès lors, malheur à nous !... Je suis sûr qu'à Londres on le berne lui et ses adhérents avec le même ridicule que de notre temps... Je trouve étonnant qu'ils ne voient pas qu'on veut se moquer d'eux et s'en servir pour occasionner des troubles dans la France ; j'en suis humilié pour eux...

Heureusement qu'après une hésitation compréhensible chez MM. Henry et Péron, vicaires généraux de Mgr de Lamarche, ces deux prêtres se rallièrent au Concordat ; grâce à eux, les maux incalculables, redoutés par M. de Troërin, furent moindres ; mais pendant deux ans au moins, le clergé de l'ancien diocèse, de Léon va se trouver dans une grande perplexité, jusqu'à ce que MM. Henry et Péron obtiennent de Mgr de Lamarche une délégation pour l'évêque nommé à Quimper lors de l'application du Concordat. Le 9 mai 1802, en effet, Mgr Claude André, nommé au nouvel évêché de Quimper, était sacré dans l'église Saint Roch de Paris par l'archevêque de Rouen, Mgr Cambacérès. A ce moment là M. de L'Archantel perdait ses pouvoirs, mais Mgr André le prenait comme vicaire général avec l'assentiment du gouvernement. Dans ses relations avec le légat ou nonce du Saint-Siège, Mgr André va désormais être appelé « modernus episcopus Corisopitensis » et cela par précaution.

Quelle besogne écrasante attend l'évêque et M. de L'Archantel ? Tout est à pourvoir, il faut nommer vicaires généraux, chanoines, curés et le Concordat n'a pas seulement bouleversé les diocèses, il a bouleversé les paroisses.

Ainsi à Landerneau, des quatre paroisses d'autrefois, il n'y en aura désormais qu'une seule. Or quelle sera la paroisse et par là même quelle sera l'église conservée ? Dans chacune des paroisses, il y a ceci qui surtout rattache les paroissiens à leur église, ce sont les parents enterrés dans cette église ou dans ïe cimetière qui l'entoure ? De plus, quels éléments le nouvel évêque aura-t-il pour pourvoir aux paroisses ? N'aura-t-il que les prêtres insermentés, confesseurs de la foi dans le pays ou en exil ? Ceux-là, les catholiques les acceptent avec empressement. Mais voici que le Concordat admet les prêtres constitutionnels, moyennant, non une rétractation formelle, mais la simple déclaration suivante : « J'adhère au Concordat et je suis dans la Communion de mon évêque nommé par le premier Consul et institué par le Pape ».

Les prêtres jureurs, habitués à prêter tous les serments qu'on voudra, n'hésitent pas à signer cette bénigne déclaration et dans le registre conservé à l'évêché, une des premières signatures que l'on voit sous la formule précitée, c'est la signature de Emmanuel Pillet prêtre ! Le Coz, évêque intrus d'Ile et Vilaine, moyennant la même déclaration, a été nommé archevêque de Besançon, Pillet ne va-t-il pas être nommé curé de Landerneau ? Tout semble menacer la ville de ce malheur, car Pillet a la faveur du préfet, M. Rudler et celui-ci, dit Pillet, me l'a promis ! La population de Landerneau est alors dans un trouble inexprimable ; heureusement que la Municipalité, comprend l'intérêt de la paix dans la commune et va s'opposer de toutes ses forces à la nomination de Pillet.

Tout d'abord, dans le rapport qui lui est demandé sur les édifices du culte à proposer comme églises paroissiales, elle écarte l'église Saint-Julien, l'église de Pillet.

L'église Saint-Houardon, dit le rapport, demande des séparations urgentes ; mais elle a été achetée par la majorité des paroissiens et remise entre les mains du Gouvernement et de l'Evêque, à la condition absolue qu'elle serait conservée comme église curiale de Landerneau.

L'église Saint-Julien n'est guère meilleure que celle de Saint-Houardon, quoique les réparations à y faire soient moins urgentes. Quoique parée des dépouilles des deux autres églises, il lui manque bien des choses. Sa charpente et son toit demanderant sous peu à être relevés à neuf. De plus cette église est considérée par une certaine classe d'habitants comme église curiale constitutionnelle. Elle est humide et malsaine. La rivière baigne l'un de ses côtes dans presque toute sa longueur ; l'eau s'élève dans les grandes marées au niveau du pavé de l'église.

L'église Saint-Thomas a été acquise par les habitants de cette ancienne paroisse ; ils y ont fait pour cent louis ou mille écus de réparations. Des trois églises, c'est celle qui est en moins mauvais état et les habitants de cette ancienne paroisse sont généralement restés fidèles aux bons principes.

Enfin les deux églises de Saint-Thomas et de Saint-Houardon ont un fort beau clocher, en bon état. Celui de Saint-Julien est très bas, menace ruine et ne peut contenir qu'une ou deux très petites cloches qu'on ne peut pas entendre de toutes les parties de la ville.

Provisoirement les quatre paroisses sont maintenues, mais le préfet traite Pillet comme curé de Landerneau. C'est ainsi que, en 1803, le jour du Sacre, transféré par le Concordat au dimanche qui suit le jour de la Fête du Saint Sacrement, le préfet a envoyé des ordres pour que sorte la procession, mais la procession devra être unique et tous les desservants des autres paroisses devront s'entendre avec Pillet pour l'organisation du cortège. Les clergés de Saint-Thomas et de Saint-Houardon refusent de reconnaître la suprématie de Pillet. Le préfet immédiatement fait fermer les églises de Saint-Thomas et de Saint-Houardon et il ne reste d'ouvert au culte que le temple de Pillet, l'église Saint-Julien. Sur la demande de l'évêque, les églises sont rouvertes le 11 décembre. Mais le préfet a manifesté ses intentions. Pillet s'en prévaut, et, fier de la faveur gouvernementale, il rêve, vieux rêve chez lui, de rétablir dans ses églises (sic) la messe de minuit. Mais l'autorisation dépend ici de la Municipalité et voici ce qu'elle répond à la demande de Pillet :

Maire au citoyen Pillet, curé à Landerneau. 3 nivôse an onze. S'il est reconnu que les rassemblements nocturnes sont toujours inquiétants pour la tranquillité publique, il est évident que ceux qui auraient lieu aujourd'hui le seraient plus que de tout autre temps. Il est donc du devoir des personnes chargées de la police et sur les soins desquelles se reposent les citoyens de prévenir que le bon ordre ne soit troublé. D'après ces considérations, je vous invite à faire fermer vos églises et à n'y permettre aucun rassemblement pendant la nuit. Ceux qui autrefois avaient lieu tous les ans à minuit à cette époque n'étaient avantageux qu'aux voleurs, aux libertins et aux ivrognes. Salut !

P. S. — Je n'agis que comme le maire a agi à Brest, où il a refusé la même demande.

En même temps la Municipalité écrit à l'Evêque pour le prier et le supplier de ne pas nommer Pillet. Hélas ! le pauvre évêque ne peut que se plaindre des vexations du préfet. « J'ai dû, dit-il, proposer deux ecclésiastiques pour la cure, et je crains que le préfet n'obtienne que M. Pillet, un des proposés par lui, ne soit nommé ; adressez-vous directement à M. de Portalis, peut-être aurez-vous plus de succès que moi ». La Municipalité alors s'adresse directement au ministre.

Réclamation du Conseil général de la commune de Landerneau à son Excellence Portalis, conseiller d'Etat, chargé des affaires ecclésiastiques.

Citoyen conseiller d'Etat, .... Landerneau, comme presque toutes les villes de France, a été partagée d'opinions religieuses. Lors de la réunion du clergé opérée avec beaucoup de peine par les soins de l'autorité locale et le zèle de M. l'Evêque, on demanda comme grâce spéciale à ce chef de l'Eglise du Finistère de vouloir bien, quand il ferait la désignation des sujets à présenter au Gouvernement pour remplir les places de curés et de vicaires, ne porter pour curé à Landerneau aucun des prêtres qui y étaient, on le pria de vouloir bien nommer un étranger à la ville, on ne voulut même pas se permettre de lui en indiquer, on s'en rapportait entièrement à son choix.

Nous apprenons avec le plus grand étonnement que dans le travail qui vous a été servi, on a indiqué pour curé de Landerneau M. Pillet, ancien curé constitutionnel. C'est absolument là favoriser un parti au détriment de l'autre. Dans ce moment même où on charge les communes des ameublements des églises et presbytères, où on les engage à traiter convenablement les ministres des autels, il semblerait qu'alors on devrait donner à ceux qui les paient sinon des hommes à leur choix, au moins des prêtres qui puissent leur être agréables. Nous réclamons dans cette circonstance, citoyen conseiller d'Etat, votre puissante protection près du Premier Consul ; nous ne voulons que la paix et la tranquillité qui sont le bonheur de la vie.

Pour l'obtenir nous ne demandons qu'une faveur, qui montre combien nous sommes modérés et ennemis de tout parti : c'est de ne nommer à la cure de Landerneau aucun des prêtres qui y sont actuellement ; tous ont leurs partisans et ceux de celui qui ne serait pas nommé en voudraient à celui qui aurait obtenu la préférence.

Pour tout conclure, nous demandons comme grâce spéciale en particulier qu'on nous donne un étranger au choix de l'évêque et du préfet ou de tout autre qu'il plaira au gouvernement. Il peut être assuré, quel qu'il soit, d'être accueilli favorablement et traité aussi bien qu'il sera possible. Ont signé : tous les membres de la Municipalité.

De son côté l'Evêque se plaint près de M. de Portalis et de Mgr Bernier de toutes les tracasseries que lui crée le préfet ; les prêtres ont ici ou là chanté la messe les jours de fête supprimés par le Concordat et les fidèles ont chômé ; les mandements restent sans être approuvés par le préfet ; des religieux ou des religieuses sont rentrés dans telle ou telle paroisse ; les prêtres n'ont ni le même bréviaire, ni le même missel ; que voulez-vous que j'y fasse, dit en substance l'Evêque, ils sont de quatre diocèses différents, et on n'a pas encore eu le temps d'unifier la liturgie, dont le souci est secondaire en ce moment pour moi ; mais la grande difficulté vient des nominations aux cures. Le préfet réserve toutes ses faveurs aux constitutionnels.

« Voyez à Landerneau, écrit l'évêque à Mgr Bernier, j'ai dû proposer deux ecclésiastiques pour la cure. L'un, prêtre constitutionnel, s'appelle Pillet. a beaucoup de partisans surtout dans la classe du peuple; les autres n'en veulent pas, le 'Conseil de Commune a adressé là-dessus une pétition. à M. de Portalis_ Cette 'nomination qu'on aurait supportée dans des temps orageux et qui n'aurait été approuvée que par les révolutionnaires serait à présent regardée comme un malheur, une marque de faibiesste; on nie l'imputerait, le perdrais la confiance... ».

Et il supplie le prélat d'intervenir pour écarter cette nomination. Bien plus, Mgr André écrit à M. de Portalis dans le même sens.

M. Pillet a son école secondaire ; qu'il s'en occupe s'il était curé ou son école ou la paroisse souffrirait. De plus il a eu pendant la Révolution des actes de sévérité qu'on ne lui a pas pardonnés à Landerneau. Le préfet est pour lui ; c'est pour satisfaire les haines et jalousies de ce prêtre constitutionnel que le préfet vient tout récemment de faire fermer les églises de cette ville ...

Enfin, au début de 1804 le curé de Landerneau était nommé ; c'était François Damien Jannou. Né à Quimper le 22 octobre 1752, ordonné prêtre en 1777, M. Jannou était recteur de Loperhet au moment où éclatait la Révolution. Il avait été d'abord sympathique aux idées nouvelles, avait accepté de participer à l'élection de l'évêque constitutionnel, y avait même été élu secrétaire du bureau, puis fut nommé membre de l'Administration du Département. Mais en janvier 1791, quand on demanda le serment à la Constitution civile, il s'arrêta devant le schisme, refusa le serment, et confessa la foi en prison puis en exil.

Tôt après, le 13 octobre 1804, le Gouvernement approuvait la donation de l'église Saint-Houardon faite par les propriétaires à leurs concitoyens pour le culte et cette église devenait l'église curiale. Hélas ! M. Jannou aura besoin de faire appel à la générosité de ses paroissiens pour garnir ou restaurer cette église ; la Municipalité se contente d'inscrire à son budget 200 francs pour le banc des autorités à l'église et 500 francs pour le logement du curé. Mais, c'est en vain qu'il quêtera dans les anciennes paroisses de Saint-Thomas et de Saint-Julien ;

« L'attachement à une ancienne église paroissiale est sans doute louable, mais on pousse cela trop loin ici, écrit M. Jannou à l'évêque. Il est impossible de faire entendre raison aux femmes. L'incertitude où elles continuent à rester du sort de leurs églises respectives tient toutes les bourses liées ; cependant nous avons grand besoin d'argent... Aussi, Monseigneur, laissez ouvertes les églises Saint-Thomas et Saint-Julien... ».

Et voici qu'à toute cette effervescence religieuse s'ajoutait une agitation politique même dans le clergé. Après le complot de la machine infernale (24 décembre 1800) Bonaparte avait fait organiser un plébiscite sur le consulat à vie. Ce plébiscite eut lieu en juillet 1802 ; les soldats eux-mêmes votèrent.

« Camarades, disait un général, il est question de nommer le général Bonaparte consul à vie. Les opinions sent libres, entièrement libres. Cependant je dois vous prévenir que le premier d'entre vous qui ne votera pas pour le consulat à vie, je le fais fusiller à ta tête du régiment. Vive la liberté ! » (Girardin-Souvenirs).

Et sur 3.577.259 votants, 3.568.185 votèrent ainsi le consulat à vie ; ce qui donna l'occasion de publier une nouvelle Constitution dite de l'An X. De nouveaux complots éclatant, le Tribunat proposa un plébiscite pour nommer Bonaparte empereur héréditaire. Ce coup-ci il y eut de la résistance. Le maire de Landerneau, M. 0llivier, qui depuis le 30 juin 1803 avait été nommé à la place de M. Goury, refusa ouvertement de voter l'hérédité. Il fut arrêté et dirigé sur Paris. Quant au clergé il s'agita également, comme nous le montre cette lettre de M. de Troërin :

L'évêque a au nom de son clergé répondu oui pour l'hérédité, mais des prêtres ont dit non, par exemple, Poulpiquet, recteur de Plouguerneau, offre sa démission plutôt que de voter oui... Avez-vous vu jamais un bas-breton de cette tête-là ? Honnête homme, excellent prêtre, plein de mérites... Enfermé et retiré dans ses rochers de Plouguerneau, il n'en démordra pas, aurait-il tous les canons de la Bastille braqués sur lui.

Pourtant ce M. de Troêrin, ancien chanoine de Léon, réside à Landerneau en qualité de vicaire général pour le Léon, afin de faire l'union entre les deux parties du diocèse qui ne se soudent pas sans peine ; il parcourt les paroisses, priant et suppliant de voter oui. « L'hérédité, dit-il, éviterait le retour à l'anarchie ».

Comme il réussit à gagner à la cause M. Péron, l'hésitation dura peu, sauf chez M. de Poulpiquet qui resta inébranlable et que le Gouvernement n'osa déplacer.

Et maintenant nous arrivons au premier Empire, le Consul Bonaparte est devenu l'empereur Napoléon. (L. Saluden).

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