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OBSERVATIONS DES DÉPUTÉS DU PAYS DE LÉON ET DE LA PARTIE DE TRÉGUIER, EN BASSE-BRETAGNE.

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Sur la fixation du chef-lieu de département à Landerneau (1789).

C'est à regret que nous nous sommes déterminés à porter au comité de constitution, et à soumettre à l'assemblée nationale des contestations qui n'auroient pas dû sortir du sein de la députation de Bretagne.

Cette province, qui peut se flatter d'avoir eu une grande part à la conquête de la liberté, d'avoir puissamment contribué à la révolution, par l'union et l'énergie de ses mouvemens patriotiques, ne dut jamais se voir divisée dans la personne de ses représentans. Heureusement, nous pouvons assurer que leur parfaite intelligence pour le soutien de la cause commune, n'est point altérée par les difficultés relatives à la division de son territoire.

L’assemblée nationale a décrété que la France seroit divisée en département dont elle a fixé le nombre de soixante-quinze à quatre-vingt cinq. Chaque département doit contenir environ trois cents vingt-quatre lieues ou dix-huit sur dix huit ; chaque lieue entendue de deux mille quatre cents toises, et d'après cette règle de procéder, la province de Bretagne, qui contient 1660 lieues de superficie, ne doit fournir que cinq départemens, dont le comité de constitution a tracé le plan.

La députation de Bretagne a nommé des commissaires pour en faire l'examen. Ceux-ci ont appellé deux ingénieurs qui ont perfectionné le projet de division d'après les convenances locales, et ce travail a été plusieurs fois discuté dans les assemblées du comité de la province.

Alors il s'est arrêté à deux questions préliminaires : premièrement, quelle sera l'étendue de terrein que prendra le département de Nantes dans les marches communes de la Bretagne et du Poitou ? Ce premier point de démarcation étoit indispensable avant toutes choses, parce qu'il est nécessaire de former la masse, avant de procéder à la division ; on ne peut connoître l'étendue et la valeur d'un tout, qu'après avoir déterminé les parties qui doivent le composer. Il étoit donc essentiel de convenir avec la province du Poitou, du partage des marches communes, avant de pouvoir fixer celui de la Bretagne en cinq pontions égales [Note : Il vient de paroître un mémoire où les députés des Marches Communes demandent à porter la totalité de leur territoire dans le département de Nantes, ce qui aggraveroit encore l’inégalité de la division de la Bretagne].

Secondement, cette égalité doit-elle être entendue et exécutée, comme l'ont observé les ingénieurs dans leur plan de division, en assignant à chaque département un terrein de trois cents trente-deux lieues quarrées ? Cette égalité géométrique ne tendroit-elle pas à léser considérablement chacun des quatre autres départemens, s'il étoit vrai que celui de Nantes se trouvât avantagé d'un quart en sus, par sa population et par ses richesses ?

Tel étoit l'état des difficultés présentées au comité de la députation de Bretagne le 7 décembre. Messieurs les députés de Nantes reconnoissoient sans peine la supériorité de leur département, pour la fertilité du sol, pour les avantages incalculables que lui apportent les fleuves et les rivières qui l'encernent ou le traversent ; la Loire, la Vilaine, l’Erdre, le Doro, etc.

Mais ces mêmes députés n'avouoient pas également la disproportion non moins considérable de la population, quoiqu'elle soit presque toujours la suite naturelle de la richesse d'un pays, de la fécondité du sol, quoique la ville de Nantes seule ait environ 100.000 habitans. Ils sont allés jusqu'à vouloir persuader que leur département, tel qu'il étoit tracé, égal aux autres en étendue, l'étoit à peine en population. D'après une pareille assertion, il paroitra moins étonnant qu'ils ayent posé en principe, qu'au surplus les bases de la population et de la contribution sont parfaitement indifférentes à la distribution des départemens.

Quoiqu'il en soit, le résultat de l'assemblée du 7 Décembre fut, que MM. les députés de Nantes se concerteroient incessamment avec ceux du Poitou, pour la division préalable des marches communes, et qu'ils rendroient compte de cette conciliation à la prochaine assemblée, fixée au vendredi 11 décembre.

Elle fut peu nombreuse ; on savoit qu'on n'y agiteroit que ce rapport particulier, et qu'on s'occuperoit ensuite de la lecture de l'adresse au peuple Breton, dont l'examen fut long. Après cela, les signatures devant occuper le reste de la séance, plusieurs membres qui y étoient, se retirèrent.

MM. les députés de Quimper saisirent ce moment opportun pour demander à mettre en délibération le choix du chef-lieu du département, composé de toute la partie basse de la Bretagne, vers l'océan. Les deux députés, présens de l'évêché de Léon, et l'un des députés de Tréguier, s'opposèrent, parce qu'il étoit déjà heure de clore la séance, parce que leurs collègues étoient absens, et sortirent sans délibérer.

M. Bodinier, commissaire pour la sénéchaussée de Rennes, parfaitement désintéressé dans la délibération proposée, crut devoir observer qu'elle n'avoit pas été annoncée, qu'il n'étoit ni régulier ni convenable de dé libérer sur un objet non prévu, et en l'absence des confrères qui devoient y prendre part. On lui répondit que la désignation du chef-lieu, en faveur de Quimper, importeroit peu aux autres villes, qui probablement demanderoient à alterner ; ce projet, qui paroissoit déjà concerté, fut donc délibéré.

Les auteurs de cet arrêté ne se crurent pas exempts de blâme, et changeant de systême pour se conformer à ce qui avoit été pratiqué par les départemens de Nantes et de Vannes ; ils se ravisèrent pour convoquer une assemblée au 14 décembre, où le département de Saint-Brieu, également appellé, feroit séparément le choix de son chef-lieu.

Réunis avec nos collègues de département en comité particulier, le lundi 14, nous dûmes leur faire observer que leur intention, dans cette nouvelle convocation, étoit sans doute de regarder comme non-avenu ce qui avoit été fait en la dernière assemblée, et on en demeura d'accord. Il fut procédé à un premier scrutin, où les voix se trouvèrent partagées entre Landerneau et Quimper ; un treizième suffrage que M. de Kvenlengan dit être le sien, étoit porté à la ville de Morlaix.

D'observation, qu'il n'y avoit pas dans le premier scrutin, une voix pour la ville de Brest, qui sembleroit cependant réunir plus de motifs qu'aucune autre, pour exercer cette prétention. L'un de ses députés plaça cette remarque, et déclara que quel que pût être l'événement de la délibération actuelle, (qu'il signeroit cependant, comme on en étoit convenu) il n'entendoit pas y tenir, et se réservoit de soumetrre à l'assemblée nationale les griefs particuliers de sa ville, et les réclamarions communes aux quatre autres département contre la prépondérance de celui de Nantes.

Cette déclaration excita beaucoup de clameurs ; M. de Kveuleugan les fit cesser, en observant avec beaucoup de calme combien il étoit important dans les circonstances actuelles, que les députés de la Bretagne s'accordent sur leur division ; il obtint que la décision du second scrutin faisoit la règle irrévocablement ; il s'attendoit qu'il seroit conforme à ses vues, et devoit l'espérer d'autant plus, que le comité n'étoit composé que de treize membres : dont six de l'évêché de Quimper, cinq de celui de Léon, et deux du diocèse de Tréguier.

Cependant l'intérêt bien réfléchi de la commodité publique en décida autrement ; la majorité absolue des voix, se déclara pour la ville de Landerneau. Cetre délibération fut arrêtée et signée : quatre seulement, du nombre des six votans de Quimper, se retirèrent sans l'avoir souscrite.

Elle a été connue de toute la Bretagne, et y a reçu une approbation générale, si l'on excepta une partie, peut-être, de l'évêché de Quimper. Pendant huit jours, et même dans une assemblée de la province, tenue le 21, les députés de cette ville n'avoient fait aucune réclamation. La détermination du chef-lieu, à Landerneau, ainsi prise pour constante, on s'étoit occupé de la composition des districts de ce département.

Le 23 décembre, la députation de la province est encore assemblée, pour prendre connoissance de la pétition de la ville de Saint-Malo, qui demande à passer du département de Rennes à celui de Saint-Brieu ; et parce que cette réclamation ne paroissoit pas porter sur l'intérêt général de la députation ; de soixante-six membres qui la composent, il ne se trouva à cette assemblée que trente-neuf.

Quand on a eu ajourné l'objet des députés extraordinaires de Saint-Malo, parce que leur mémoire n'étoit pas prêt, on a vu avec surprise un député de Saint-Brieu faire la motion de révoquer la délibération particulière du 14, qui avoit fixé le chef-lieu de notre département à Landerneau, et de remettre cet article en délibération.

Cette motion fut bientôt accueillie par tous ceux qu'on avoit intéressés dans la coalition, que l'un de nous ne put se retenir de ne pas qualifier de son nom propre. Il fallut aux autres beaucoup de modération, pour observer froidement combien il étoit extraordinaire, qu'un député de Saint-Brieu, qui ne nous avoit pas appellés sur la délibération relative à son département, fût chargé de contrarier le règlement de nos intérêts particuliers.

Nous nous prévalûmes de l’arrêté, pris et signé dans l'assemblée du département, le 14 ; Nous objectâmes qu'il n'y avoit plus lieu à délibérer à ce sujet ; et que, si les députés de Quimper, qui ne s'étoient pas encore expliqués, avoient à se plaindre de la fixation du chef-lieu à Landerneau ; ils devoient se pourvoir directement devant le comité de constitution et adjoints préposés pour vuider ces discussions, et en faire le rapport à l'assemblée nationale. Nous terminions par cette réflexion, que la motion étonnante du député de Saint-Brieu n'avoit pas été annoncée par la convocation, et que dans le cas où elle auroit été admissible, il seroit de la loyauté de ne la délibérer qu'en présence des 27 députés absens, ou dûment avertis d'y prendre part. D'après ces protestations recommandées par la raison, par la franchise bretonne ; nous nous fimes un devoir de laisser le champ libre au parti que nous voyons formé dans l'assemblée, et qui a entrainé vingt-cinq voix pour mettre au néant la délibération libre et régulière du 14, et pour accorder à Quimper le chef-lieu.

Il faut croire que les démarches qui ont amené cette résolution inattendue, n'ont pas été capables de mouvoir un plus grand nombre dans la députation de Bretagne, puisqu'elles n'ont gagné que ving-cinq suffrages, de soixante-six membres qui la composent, ou du moins de soixante-quatre, parce qu'il y a deux démissions qui n’ont pas été remplacées ; et sous ce raporr, la délibération est loin de la majorité.

Nous regrettons d’avoir été forcés d'entrer dans ce récit des faits, qui peuvent paroître indifférens à MM. du comité de constitution, et à l'assemblée nationale. Mais il n'est pas indifférent pour nous de rendre à notre province un compte exact de tout ce qui s'est passé, relativement à cette discussion.

Tout se rétablit devant le tribunal de la nation, qui pesera dans sa sagesse les intérêts respectifs, qui jugera s'il est dans l'esprit de ses décrets que la circonscription des départemens soit déterminée, sans autre considération, par la règle unique d'égalité de terrein ; s'il n'est pas juste d’y faire concourir à certains égards, la proportion de population et de richesse, pour assurer en même temps l'égalité de la représentation ; enfin, s'il n'y a pas de nécessité de rappeller au principe, quand il est évident que le département de Nantes, réunissant à une égalité parfaite de territoire la prépondérance de sa population et de sa richesse, jouiroit de l'avantage de nommer aux législatures onze à douze députés, quand chacun des autres départemens de la Bretagne, ne donnera que huit à neuf. Ce grief est commun à toute la députation, et doit la réveiller sur un intérêt aussi pressant.

Nous nous renfermons ici dans notre tâche particulière, qui est de prouver que le chef-lieu de notre département doit être placé dans la ville de Landemeau. Des autres villes qui se sont mises sur les rangs, comme Morlaix, Carhaix, Quimper et Brest, celle-ci seule pouvoit disputer la préférence en raison de sa population, de ses forces, et de sa contribution.

L'enceinte de Brest, coupée par le port de mer, renferme plus de trente mille ames, et dans ce nombre on ne comprend pas les troupes de la garnison. Le projet déjà tracé de l’agrandissement de cette ville, la nécessité d'en suivre l'exécution pour favoriser le service, et assurer la défense de ce port, qui est le premier du royaume, lui assigne un nouveaux rang, et la place déjà dans la classe des villes du second ordre. Brest est sans contredit le principal entrepôt des forces publiques, sur lesquelles reposent la sûreté du commerce, la prospérité de l'état, et l'honneur des armes de la nation. Il est d'une extrême importance d'accroître la considération politique attachée à cette ville, de faciliter les approvisiomiemens de son arsénal, et d'y fixer l'opinion publique qui a pris dans cette importante cité une faveur, peut-être étonnante, en une ville de guerre.

La somme de sa contribution triple, celle des autres villes de cette partie de la province. Cette source précieuse du secours public, prend encore de nouvelles forces dans le patriotisme de ses habitans. Une preuve digne d'en être mise sous les yeux de l'assemblée nationale, est dans la déclaration des sept Brestois qui se sont présentés les premiers pour exécuter son décret sur la contribution du quart ; leur soumission s'élève à 20.900 liv.

Il est possible que l'assemblée nationale se détermine par le concours de tant de motifs de prépondérance à assigner le chef-lieu du département dans la ville de Brest. Elle verra cependant avec soumission, accorder la préférence à celle de Landerneau qui n'en est distant que de quatre lieues, et qui alors doit s'approprier toutes les raisons, toutes les considérations qui réclament pour Brest, parce qu'on ne peut en écarter l'application, parce qu'on ne peut, sans constituer en souffrance cette première place du royaume, fixer loin d'elle le siège de l’administration publique.

Avec cet avantage supérieur que la ville de Landerneau trouve dans la proximité de Brest, elle pourroit se dispenser d’invoquer ceux de sa situation locale, dont elle a fourni le détail dans une adresse à l'assemblée nationale.

La petite ville du Faou est géométriquement le point central du département. Landerneau n'en est éloigné que de quatre lieues, et se trouve précisément la seule ville approchante du centre, capable de comporter un gouvernement d'administration en chef. Autour de Landerneau vient se former un cercle nombreux de villes, Brest, S. Renan, le Conquet, Lannilis, Lesneveu, Plouescat, S.-Paul de Léon, Roscof, Landivisiau, Morlaix, le Faou, la Feuillée, Crauzon, Locronan, Douarnené et Chateaulin, dont les plus éloignées ne sont que de sept à huit lieues. Les villes les plus distantes, comme Carhaix, Château-Neuf et le Quirnper, sont de onze à douze lieues ; Quimperlé seul, qui forme une pointe à l'extrémité du département, sera à la distance d'environ vingt lieues [Note : On continue toujours de raisonner par la lieue de 2400 toises].

Landerneau vient après Brest et Morlaix, pour sa population, pour la quotité de contribution, et pour la commodité de ses établissemens. La certitude de son accroissement futur, est dans ses relation avec Brest, dont elle est en temps de guerre l'entrepôt pour les apprivisionnemens de toute espèce, pour les mouvemens et le séjour des troupes destinées à être embarquées. Les magasins et le port de Landerneau ont toujours servi à décharger celui de Brest, du regorgement de ses munitions de guerre et des vaisseaux de transport ; son commerce est encore un objet important.

Cinq grandes routes aboutissent à Landerneau, et toutes offrent des relais de poste commodes, excepté sur celle qui conduit à Carhaix. Les établissemens de l'hôtel-de-ville sont assez étendus pour recevoir, sans aucune nouvelle dépense, tous les bureaux d’administration ; et la maison des dames Ursulines qui a été prise, pendant la dernière guerre, pour hôpital de la marine, et qui sûrement sera supprimée par l'effet de la réunion de cette communauté à celle de Lesneveu, double la facilité du choix à faire, pour placer les bureaux de départemens.

Que peut mettre en parallèle la ville de Quimper, pour soutenir la concurrence [Note : Quimper-Corentin, où l'on sait que le destin conduit les gens quand il veut qu'ils enragent. LA FONTAINE] ? Rien, qui au moins s'accorde avec l'avantage public et la commodité du département.

On rappelle pour Quimper une importance antique et parfaitement ruinée, qui dans des temps éloignés fut le motif d'y placer un présidial. Mais dès avant la naissance de la discussion, nous avons proposé à nos collègues de Quimper d'y conserver le siège d'une présidialité ou tribunal de département. Pour soulager la médiocre existence de ses habitans en général, nous avons même consenti à ce que la cour supérieure soit transférée à Quimper, dans le cas où les rapports économiques permettent d'en créer deux en Bretagne. Quelle condescendance ! Et comment pourrions-nous en rendre raison à nos commettans ?

En effet, l'importance de cette ville, soit dans le commerce, soit dans l'ordre politique est notoirement nulle. Sa population est au-dessous de huit mille âmes. Sa contribution comparative dans le paiement des impôts n'égale pas, à beaucoup près, celle de Brest, Morlaix, Landerneau, etc. La situation de Quimper le place à une extrémité de la côte, sous la distance de trois lieues et demie de la grande mer, dans un point à 4, 5 et 6 lieues, et par-tout ailleurs, une pointe seulement dite le Bec-du-Rat, se prolonge sur la côte jusqu'à la distance de dix lieues. L'inspection du plan démontre l'exactitude de ce tableau.

Si on consulte le grand motif, la raison décisive, l'incommodité de la très-majeure partie du département, on voit que la ville de Quimper est à vingt, vingt-deux et même vingt-six lieues de la côte de Léon, la plus populeuse du royaume, et qui, prenant à la pointe de Saint-Matthieu, se prolonge sur la Manche par un demi-cercle de vingt-cinq lieues, pour atteindre l'extrémité du département dans l'évêché de Tréguier. Les habitans de cette dernière contrée ne peuvent se rendre à Quimper, qu'en faisant un circuit très-considérable pour venir prendre Landerneau, ou en se jettant dans les montagnes d'Arré, impraticables dans le tems indiqué aux assemblées de départemens, et qui, dans toutes les saisons, offrent les dangers les plus effrayans. La liste des personnes qui périssent tous les ans dans les neiges en traversant ces montagnes, ou qui, échappées aux voleurs, deviennent la proie des bêtes féroces, présenterait une image trop affligeante. Mais, abstraction faite de ces inconvéniens, faudra-t-il que trois cents mille habitans de Léon en aillent chercher cent mille, perdus en quelque sorte au milieu des montagnes et des bois infestés de brigands ? Faudra-t-il que le grand nombre rassemblé dans un évêché moins étendu, mais fertile, et distribué en plusieurs villes, soit attiré au loin par le petit nombre, pendant qu'il existe un lieu de département, moralement central et commode à tout le monde ?

On croira avec peine que nos collègues de Quimper ayent osé hasarder cette prétention. Et sur quels fondemens encore ? Rendons leurs allégations.

Ils ont dit que Quimper a besoin de se relever de sa détresse ; qu'on y trouve les établissemens d'une neuvième commission intermédiaire, qui recevoit les ordres de celle principale de Rennes ; que ces établissemens sont disposés sans nouveaux frais, pour une administration de département, et demeureroient en pure perte, s'ils n'étoient pas employés à cette destination. Ils font sonner bien haut que leur ville est épiscopale ; qu'on y trouve une église cathédrale, un séminaire et un collège.

Eh bien ! toutes ces petites considérations se trouvent dans la ville de Saint-Paul de Léon, siège épiscopal, cathédrale plus à la moderne, bureau de commission intermédiaire, séminaire, et, par- dessus tout, un collège dont l'édifice vient de coûter quatre cents mille livres. Cependant la ville de Saint-Paul ne demande pas un chef-lieu de département. On ne pourra même pas y placer un district, ni l’indemniser de la perte d'une jurisdiction de l'évêque et du chapitre, dont le ressort étoit fort étendu.

Saint-Paul de Léon cède à la rigueur du principe, qui veut que l'intérêt particulier ou local soit sacrifié à l'intérêt public et général. Pourquoi la ville de Quimper ne subiroit elle pas la même loi ? Pourquoi ne feroit-elle pas de très-légers sacrifices à la commodité publique ? La convenance générale est la base de toutes les déterminations propres aux établissemens de l'administration civile, et cette base, dans l'hypothèse présente, indique pour siège de département, la ville de Lauderneau, comme la plus voisine du centre, la plus rapprochée de la grande population.

S'il étoit utile d'accumuler d'autres considérations, on feroit remarquer, par exemple, le danger connu du transport des fonds publics à Quimper, la convenance d'en approcher le dépôt de Brest, où l'acquittement direct de l'impôt trouve un moyen prompt et facile de s’exécuter.

Tout se réunit donc en faveur des réclamations de Landerneau. La raison tranchante est dans la situation ; et en nous attachant à la défense de cette ville contre Quimper, nous nous sommes si peu livrés à aucune propension particulière que nous adopterions Morlaix, comme chef lieu de département, comme la ville centrale, dans le cas où par un mouvement général dans les départemens de Bretagne, sollicité par Saint-Malo, le nôtre dût comprendre tout l'évêché de Tréguier.

Nous exprimons devant l'assemblée nationale le vœu du bien public, et nous sollicitons ses décrets sur une disposition déjà prévue par sa sagesse. Il est entré dans ses vues de disperser les différens établissemens, pour en communiquer les avantages aux principaux lieux de chaque département ; et c'est pour arriver à cet ordre de distribution, avec la plus scrupuleuse équité, que nous sommes chargés de demander :

1°. Que la ville de Landerneau soit le chef-lieu du département et le siège de son administration.

2°. Que le siège d'une cour supérieure, s'il est décidé qu'il y en ait deux en Bretagne, soit fixé en la ville de Quimper, qui, en tout cas, seroit le tribunal de département.

3°. Que, dans la supposition première ci-dessus, le tribunal de département soit accordé à la ville de Brest, et que dans tous les cas elle soit autorisée à établir un consulat terrestre et maritime.

4°. Que l'évêché soit conservé à la ville de S. Paul de Léon, même en supposant qu 'il n'y ait qu'un siège épiscopal dans le département.

Le Gendre, Moyot, Expily, Dom Verguet, le Guen de Kerangall, Keraugon, le Lay de Grantugen, Mazurié de Pennannech.
Arrêté du 14 décembre 1789.

Députés présens et votans.
Leé Guen de Kerangall, de l'évêché de Léon.
De Leissegues, de l'évêché de Quimper.
Expily, de l'évêché de Léon.
Le Lay de Grantugen, de l'évêché de Tréguier.
Mazurié de Pennannech, de l'évêché de Tréguier
De Kveuleugan, de l'évêché de Quimper.
Le Déan, de l'évêché de Quimper.
Clermont, de l'évêché de Quimper.
Legendre, de l'évêché de Léon.
Moyot, de l'évêché de Léon.
Le Golias, de l'évêché de Quimper.
De Keraugon, de l'évêché de Léon.
Billete, de l'évêché de Quimper.

Sept voix pour la désignation du chef-lieu de département à Landerneau, contre six voix pour Quimper. 14 décembre 1789.

Signatures de l'arrêté.
Expily, Keraugon, Legendre, Moyot, le Guen de Kerangall, le Lay de Grantugen, Mazurié de Pennannech, de Leisseigues, le Golias.

Voir   Ville de Landerneau (Bretagne) " Mémoire des électeurs du district de Brest sur la fixation définitive du chef-lieu du département du Finistère ". 

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