Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

Landerneau : les assignats et les inventaires des églises.

  Retour page d'accueil       Retour " Ville de Landerneau "   

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Premières difficultés financières : les assignats et les billets de confiance : difficultés de rentrée des impôts. — Inventaires des églises ; prélèvements d'argenterie.

En décembre 1789, la Constituante avait cru trouver une source de richesse dans la création d'assignats. Ce papier monnaie fit son apparition à Landerneau à la fin d'août 1791 ; en vain, célébra-t-on les bienfaits de cette innovation, elle n'inspirait pas confiance, et le cours forcé de ces assignats devait logiquement en fausser la valeur. Ce fut à qui pourrait ramasser le plus de monnaie de métal. Les émigrés d'ailleurs, en partant, n'avaient garde de se charger de papier, et comme dans ce pays ils étaient les plus riches, ils causaient la rareté du numéraire en emportant leurs richesses, et en vendant de leurs biens contre monnaie sonnante ; si bien que l'or, l'argent et le billon ne tardèrent pas à devenir à peu près introuvables. De plus, les moindres assignats étaient de cinq francs, or la monnaie était nécessaire pour les transactions quotidiennes du petit commerce.

Dès le 4 mars 1792, le Conseil s'occupe de la question. Vu la rareté de la monnaie de billon, on demande au Département « d'envoyer 2 barils de cette monnaie pour être échangée sous la surveillance de la Municipalité contre les assignats de cent sous, dont les ouvriers et salariés seraient porteurs ». On prie l'Administration « de faire usage des cloches inutiles afin de multiplier les gros sous pour la commodité de la classe indigente et empêcher que la perte qu'on éprouve sur les assignats ne pèse sur elle ». Enfin on émet le voeu que l'Assemblée nationale décrète la Création d'assignats au-dessous de 5 livres. Pour donner l'exemple, le Conseil décide de faire descendre 3 des 5 cloches que possède chaque église ; à Saint-Thomas, on conservera les 2 cloches dites la 2ème cloche et la cloche anglaise ; à Saint-Julien, les 2 plus grosses cloches ; à Saint-Houardon, on descendra la 3° et la 4° cloche ainsi que celle de la Chapelle des Agonisants. On décide de faire les inventaires de Saint-Julien, de Saint-Houardon, de la Chapelle de Saint-Roch, de la Chapelle des Anges ; on y laissera ce qui est strictement nécessaire pour le culte ; le reste, linges, métaux d'or et d'argent, sera mis à la disposition de la nation. Et comme tout cela n'apporte pas de monnaie courante, encouragé par l'exemple de l'Assemblée nationale et celui de plusieurs villes du royaume, le Consell de Landerneau crée à son tour du papier-monnaie sous le nom de Billet de confiance. Le 1er juillet 1792, la ville émet 12.000 livres de ces billets, soit 6.000 livres en billets de 5 sols, 4.000 livres en billets de 10 sols, 2.000 livres en billets de 20 sols., MM. Kérébel et Léyer sont priés de se rendre à Brest pour faire imprimer ces billets sur le modèle de ceux de Brest, et on demande à Brest de vouloir accepter dans cette ville les billets émis par Landerneau, comme Landerneau accepte ceux émis par Brest. Dans cette voie d'inflation fiduciaire on va vite ; le 25 juillet, on décide de porter la somme des billets émis de 12.000 à 15.000 livres ; le 16 août, de 15.000 à 25.000 livres; dans la 3ème émission, il y a des billets de 7, 3 et 2 sous, comme on peut s'en rendre compte par la reproduction ci-jointe.

Landerneau (Bretagne) : un billet de confiance de 3 sous.

Pour ceux qui savent lire, la valeur est portée deux fois, au centre en toutes lettres, dans les coins en chiffres ; pour tous les autres, elle est désignée par des petits ronds qu'il suffit de savoir compter pour en savoir la valeur, à condition d'avoir de bons yeux.

L'exemplaire figuré ici n'a pas servi, la Convention, en effet, devra arrêter cette prodigalité fiduciaire, le 4 décembre, sous peine de banqueroute ; les billets qui ont servi portent en plus une marque à froid et la signature d'un Municipal.

Pendant qu'on se débat dans les questions de monnaie, il faut aussi faire rentrer les impôts. Dès le 29 novembre 1791, le Procureur prend la parole à ce sujet au Conseil général de la commune : « Messieurs, dit-il, je vais vous parler de contributions publiques. Je vous en parlerai souvent, car je trouve un rapport intime entre le Crédit des finances et le succès de notre Révolution : c'est aux finances que nos ennemis nous attendent. Le Crédit, la santé publique e dépendent du paiement des impôts.

Ce n'est pas assez d'avoir conquis la liberté par son courage, il faut encore que chaque citoyen en achète la jouissance en versant dans le Trésor national cette portion de sa propriété qui doit être le gage de toute association politique. L'Assemblée nationale a senti vivement cette vérité et elle en a fait l'objet de sa sollicitude. Les Ressources de la France sont plus qu'équivalentes à ses besoins, mais elle doit prendre des mesures sévères pour le paiement exact des impositions, si elle ne veut pas laisser perdre la riche hypothèque des Domaines nationaux et se précipiter dans la banqueroute et les suites affreuses qu'elle entraînerait.

Que les municipalités travaillent sans relâche à orgamiser les impôts et qu'elles poursuivent ce malheureux égoïsme qui voudrait la Liberté sans sacrifices et elles sauveront l'Etat et la Constitution.

La patrie est dans un danger éminent à cet égard, puisque, suivant le rapport fait à l'Assemblée nationale législative au nom du Comité des dépenses publiques, il constate que les impositions qui doivent s'élever à 40 millions par mois, ne se sont élevées, du 18 mai 1789 au 31 octobre 1791, c'est-à-dire pendant 30 mois, qu'à 11 millions 500.000 livres par mois, ce qui présente dans les recettes ordinaires un déficit de plus de neuf cent millions. Dans ce moment où toutes les Administrations de la France sont particulièrement occupées des impositions, à peine de forfaiture, nous ne devons pas rester inactifs sur cette partie importante de l'administration.

Je demande donc et requiers :

1°) Que vous nommiez des commissaires pour établir le rôle des contributions foncières.

2°) Que vous nommiez des commissaires pour établir le rôle des contributions mobilières.

3°) Que la municipalité tienne une séance par semaine pour examiner les déclarations.

4°) Que vous fassiez rentrer les impôts non rentrés de 1791.

5°) Que vous exigiez les droits de patentes.».

Le Conseil, conformément à la demande du Procureur, partage la ville en cinq sections et nomme des commissaires pour chacune. Les 5 sections sont: Saint-Houardon ville et Saint-Houardon campagne, Saint-Julien, Saint-Thomas ville et Saint-Thomas campagne ; Pillet est nommé commissaire pour Saint-Houardon campagne, et son vicaire Léyer, commissaire pour la section de Saint-Julien. Par prônes, affiches et sons de caisse, les propriétaires sont invités à faire la déclaration de leurs propriétés. « Mais des campagnes, dit Pillet au Conseil, personne ne vient s'inscrire ». On décide alors de nommer des experts : MM. Tugdual Bodros, Joseph Le Meur, Jean-Marie Cessou et Louis Castel, qui seront salariés à raison de 6 livres par jour par les propriétaires en défaut d'avoir fait leurs déclarations, et qui établiront la valeur des propriétés. De là des réclamations innombrables dont le cahier des délibérations se remplit alors. Réclamations d'autant plus acerbes que les réclamants ne comprennent pas qu'il faille payer les impôts pour 1791 et pour 1792. La liberté du commerce proclamée a fait surgir quantité de marchands, qui, payant par ailleurs des impôts, ne s'expliquent pas pourquoi on en prélève un spécialement pour chaque différente chose mise en vente. Enfin, le peuple commence à s'apercevoir que rien n'a changé. On a bien modifié le nom des diverses impositions : la taille est devenue la contribution foncière, la capitation, la cote personnelle, etc. Mais au total les charges ne sont que plus lourdes.

C'est au milieu de toutes ces difficultés qu'eurent lieu les inventaires des églises. Celui de Beuzit ne fut qu'un pillage en règle, car, vases sacrés, ornements, reliques, tout fut enlevé et transporté à la maison commune. Dans cette église on conservait le chef de Saint Conogan, patron de la paroisse. M. du Rosel, habitant le manoir de la Petite Palue, en Beuzit, proposa vainement à la Ville de recueillir cette relique insigne dans sa chapelle particulière. Il alla jusqu'à écrire à Expilly à ce sujet : l'évêque constitutionnel transmit sa lettre à la Municipalité. Celle-ci, dans une délibération à laquelle prit part l'intrus de Saint-Houardon, déclara que « cette relique étant une propriété publique, un objet de dévotion, il n'y a pas lieu de la transférer dans la chapelle domestique du sieur Rosel.. ». Et ainsi se perdit cette relique importante du successeur de saint Corentin sur le siège de Quimper, une des plus gracieuses fleurs de sainteté éclose dans l'antique Armorique.

L'église de Saint-Thomas possédait aussi des reliques de saint Corentin et de saint Blaise. La Chapelle de la Fontaine-Blanche surtout avait un riche trésor de reliques : à savoir, une côte de saint Constantin, martyr ; la majeure partie du crâne de sainte Clémence, martyre ; un os brachial de saint Juste, martyr ; une relique insigne et un bras de saint Théodore, martyr ; dans le reliquaire qui les conservait, il y avait des certificats de Rome attestant leur authenticité et une pièce signée Pierre, évêque de Léon, le 25 juillet 1689, authentiquant le tout et permettant de vénérer les reliques. Ces certificats existent encore, mais que sont devenues les reliques de Saint-Thomas et de la Fontaine-Blanche ? Nul ne le sait. La religion constitutionnelle, entre autres caractéristiques, eut celle de ne pas aimer le culte de ces restes vénérés... Voici l'acte d'inventaire de Saint-Julien. Inventaire fait à Saint-Julien, le 9 mars 1792, devant MM. Salomon Féburier fils et Y. Le Gall, trésorier et frabriques :

« Dans la sacristie, 3 armoires d'attache : 1° dans l'armoire au levant, argenterie : 6 chandeliers d'autel, 1 lampe, 2 encensoirs, 6 croix : 1 d'autel et 5 de procession, 3 plats ronds pour la quête, 1 autre oval avec deux burettes, un saint Julien et un saint Joseph, 1 reliquaire, 1 boîte pour les fonds renfermant 1 coquille, 4 bâtons de croix garnis en argent, 1 navette.

2° dans l'armoire au midi, à 7 tiroirs, ornements : 13 ornements blancs complets avec tunique et dalmatique, 8 chapes blanches, 4 chapes noires, 8 ornements noirs complets, 5 ornements verts, 6 ornements rouges et 3 chapes rouges [Note : Chose curieuse, dans aucun des actes d'inventaire que nous avons lus, nous n'avons vu citer des ornements violets].

3° dans l'armoire au couchant, 6 calices d'argent, dont 2 sans patène, 7 missels dont 2 neufs, 17 aubes, 7 amicts, 17 cordons, 14 nappes de communion, 22 corporaux, 5 douzaines de purificatoires, (5 surplis, 2 aubes fines et 6 communes, 4 nappes garnies chez Féburier pour faire blanchir), 1 couverture brodée pour le pupitre, 17 nappes d'autel, 10 serviettes, 4 cordons, plus un calice avec patène.

Dans le coffre-fort, 2 sacs de toile dont l'un contient 6 livres et 100 pistoles en piles de 3 livres et l'autre, 1.411 livres 13 sols et 3 livres de petite monnaie.

Dans la sacristie il y a en plus 3 robes de choristes, 1 tableau, 2 mauvais miroirs, 2 lanternes à bâtons, 1 chandelier triangulaire en bois pour Ténèbres, 1 assiette, 3 bonnets de choristes, 1 fontaine de plomb, 3 pupitres à missel, 1 réchaud.

Les archives comprennent 4 cahiers de comptes, 7 de délibération, 14 liasses de titre, 3 liasses de baux, 14 de procédure, 12 de comptes, 5 de papier minute.

Dans l'église, comme mobilier, il y a sur les autels 13 chandeliers de cuivre et 2 pupitres, 2 prie-Dieu, 3 tabourets, 1 marchepied, 14 grands pots de fausses fleurs, 7 moyens, 8 petits, 3 cadres d'autel encadrés, 4 pommettes pour le dais, 1 couronne en argent, 1 lampe de cuivre, 200 chaises. Dans le clocher, 5 cloches.

Signé : Duthoya, Féburier, Y. Le Gall, Dumaige et Pillet, curé de Landerneau.

Envoyé au District : 1 boîte aux saintes huiles, en argent et sa coquille, 4 calices, 2 patènes, 3 croix, 2 pieds de croix, le surplus étant laissé pour le service de l'oratoire. Signé : les mêmes ».

Ces inventaires éclairent admirablement les persécuteurs ; à cause d'eux, rien n'échappera au vandalisme. Tôt après, les cloches, sont descendues ; le quai de Léon se couvre de cloches amenées des chapelles et des églises désaffectées ; les neuf cloches de Landerneau destinées à faire du billon y viennent à leur tour attendre les marteaux qui doivent les mettre en pièces ; en particulier, deux magnifiques cloches de Saint-Thomas, bénites en 1737 par le recteur Jacques Mottays ; l'une portait l'inscription : « SIT NOMLN DOMINI BENEDICTUM, LAUDO DEUM VERUM, POPULUM VOCO, CONGREGO CLERUM, TEMPLA DECORO, FUGO FULGURA. FESTA COLO ».

L'autre : « J'APPELLE LE PEUPLE AU SAINT LIEU. ET LE CLERGÉ POUR LOUER DIEU. J'HONORE L'ÉGLISE ET SES FÊTES ET METS EN FUITE LES TEMPÊTES. JE SERS DIFFÉRENTS ACCORDS POUR LES VIVANTS ET POUR LES MORTS. AD MAJOREM DEI GLORIAM ! ».

Adieu, vieux carillons dont Landerneau était si fier ! C'étaient jours de liesse quand jadis vos quinze cloches sonnaient en même temps ; mais le temps de la joie est passé. Une nouvelle calamité, en effet, vient combler la mesure de tous les maux de la Révolution, la guerre ! (L. Saluden).

 © Copyright - Tous droits réservés.