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HÔPITAL GÉNÉRAL DE CHÂTEAUBRIANT

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J’ai signalé en leur endroit les établissements hospitaliers ouverts aux lépreux et aux pauvres à Châteaubriant ou dans les environs, j’ai cité en ville, Saint-Antoine, à l'Est Saint-Michel, au Nord Saint-André. J’ajoute aujourd’hui Saint-Mathurin de la Malorais, à l'Ouest sur la route de Saint-Aubin-des-Châteaux. J’aurais pu en indiquer un cinquième, si l’occasion s’en était présentée, celui de la Trinité, dont les commencements remontent, comme le couvent du même nom, à l’année 1252.

Pour se conformer aux pieuses intentions de leur fondateur, Geoffroy IV, baron de Châteaubriant, les Trinitaires entretenaient près de leur maison conventuelle un hôpital orné d’une chapelle dans lequel les pauvres passants de tout âge et de tout sexe recevaient le logement et la nourriture sous la garde d’un religieux spécialement préposé à cet office.

Leur dévouement à cette mission charitable se soutint si longtemps qu’au milieu du XVIIIème siècle, le souvenir des services rendus dans le passé n’était pas effacé. La meilleure preuve qu’on puisse en donner, c’est le procès qui fut intenté en 1753 au ministre Sainthoran quand il essaya d’anéantir les restes de l’hôpital en faisant raser les murs de l’édifice et de la chapelle. Le procureur fiscal de la baronnie sut fort bien lui rappeler que les Trinitaires étaient tenus, par leur règle et par le titre de leur fondation, de subvenir aux besoins des pauvres passants. L’injonction fut si pressante que le ministre fut obligé de rétablir l’hôpital dans les conditions prescrites par le baron Geoffroy (Histoire de Châteaubriant, par M. l’abbé Goudé, p. 427. – Histoire des Ordres religieux du P. Hélyot, t. II, p. 310).

De cet ensemble de renseignements, il résulte que les asiles destinés aux maladies contagieuses et aux étrangers ne manquaient pas plus à Châteaubriant qu’ailleurs, mais on ne voit pas, en parcourant les archives municipales, que cette ville ait été pourvue au Moyen-Age, comme les autres centres importants de population, d’une aumônerie intérieure pour recueillir les habitants atteints de maladies ordinaires. L’hôpital actuel, dont il me reste à retracer l’histoire, ne remonte pas, en effet, au-delà du XVIIème siècle ; il appartient par ses origines à la nombreuse classe d’établissements charitables qui doivent le jour à l’apostolat de Saint-Vincent de Paul. La première pensée de sa création est née au sein de la confrérie des dames de charité qui s’était formée à Châteaubriant en 1654, sous l’inspiration de M. de Beauvau, évêque de Nantes, pour assister à domicile les malades des familles honteuses de leur pauvreté. Une nombreuse assemblée de dames s’était empressée d’accueillir l’envoyé de l’évêché, l’abbé Lévesque, et de mettre en pratique ses exhortations. Après avoir nommé une supérieure, une assistante et une trésorière pour diriger leur conduite, elles se partagèrent la ville afin qu’aucune misère ne leur échappât. Non contentes de porter des secours à domicile, elles recherchèrent les moyens de se procurer un logement pour traiter les malades les plus abandonnés. « Cette assemblée, nous dit le doyen Blais témoin de leurs bonnes oeuvres, faisoit beaucoup de bien et donnoit beaucoup de consolations et de soulagement aux pauvres malades dans leurs maisons, mais pas autant qu’il eut été à souhaiter, parce qu’il n’étoit appuyé et n’avoit d’autre ressource que les aumônes que ces bonnes dames donnoient pendant leur vie et celles qu’elles leur ordonnoient à leur mort » (Histoire de Châteaubriant, p. 441).

L’une de ces dames mérite bien une mention spéciale pour sa généreuse initiative ; c’est Julienne Houssaie qui, en laissant à la fabrique, en 1672, un legs de 40 livres de rente, exprima le voeu formel que ce fonds fut consacré à payer le loyer « de quelque logement suffisant pour la retraite des pauvres les plus nécessiteux de la ville » (Archives de l’hôpital, série B). Deux chambres situées près des murailles de la ville furent louées sans retard et employées comme elle le souhaitait.

Les bases de l’institution une fois posées, l’idée de la développer fit d’elle-même son chemin et s’imposa à tous les esprits soucieux du bien public. En 1677 toute hésitation était dissipée quand le conseil de ville s’assembla pour étudier la question des voies et moyens de fonder un asile municipal ; les délibérants donnèrent leur assentiment au projet et convinrent que des démarches seraient tentées près de toutes les personnes riches et aisées pour solliciter le concours de leurs offrandes. M. Chotard, intendant du prince de Condé, M. Mathurin Doultremer, sieur de Belestre, qui ambitionnait l’honneur de diriger l’entreprise, et M. Hébert se chargèrent de quêter dans la ville et les faubourgs. Le produit de leurs collectes fut assez abondant pour couvrir les frais des constructions qui furent élevées de 1676 à 1680 sur le terrain qu’on avait acquis près de la porte de Couëré (Histoire de Châteaubriant, p. 449). Le prince de Condé, pour sa cotisation, permit de prendre dans ses forêts le bois de chêne de la principale charpente et d’extraire des fossés du château la pierre nécessaire à la confection des murs (Comptes du miseur, 1er cahier. - Archives de l’hôpital).

On allait entrer en possession du bâtiment et terminer les escaliers des chambres qu’on destinait aux malades quand le bruit se répandit que la ville de Châteaubriant était mise en demeure d’établir un hôpital général selon les prescriptions de l’édit de 1662. En effet, le duc de Chaulnes, gouverneur de la province, informé de l’état d’avancement des constructions, saisit cette occasion de rappeler les ordres du roi et pressa la municipalité de seconder les efforts du missionnaire auquel il avait commis le soin de donner l’impulsion à toutes les volontés indécises ou mal éclairées. Le révérend père Chaurand, jésuite qui avait déjà parcouru une partie de la Bretagne, en communiquant partout les ardeurs de son zèle, arriva à Châteaubriant le 21 septembre 1680 (Archives de l’hôpital. — Histoire de Châteaubriant, p. 450). Dès le lendemain le corps de ville tint une assemblée dans laquelle il manifesta son adhésion complète aux desseins du roi, en procédant de suite à l’élection de douze directeurs choisis dans le clergé, la magistrature et le commerce. Dans une autre réunion tenue le 26, les administrateurs élus se partagèrent les fonctions à remplir et créèrent les offices suivants :

Un distributeur du pain au dehors.

Un distributeur à la passade.

Un directeur des pauvres honteux.

Un directeur des malades.

Un directeur des troncs.

Un directeur des habits.

Le même jour, il fut arrêté qu’aucun pauvre ne serait reçu s’il n’avait plus de neuf ans et s’il n’était domicilié à Châteaubriant depuis 5 ans au moins. Quant aux quêtes, elles devaient se faire au commencement de chaque mois dans la ville et quatre fois l’an dans la campagne des environs. Ces dispositions, comme celles qui furent adoptées dans les séances postérieures étaient en grande partie inspirées par les règlements de l’hôpital de Lyon que le P. Chaurand avait déposés, comme modèle, sur le bureau.

Lorsque ce missionnaire eût présidé à l’appropriation de tous les logements intérieurs, à l’installation du réfectoire, des celliers, des dortoirs, de la lingerie et de la chapelle provisoire, il se mit en devoir de quêter les objets les plus indispensables à l’ameublement. Les habitants de Châteaubriant répondirent si bien à ses exhortations qu’ils lui remirent jusqu’à des bijoux pour contribuer aux frais d’ornement de la chapelle. Son activité fut telle qu’en moins d’un mois, tous les préparatifs de l’entreprise étaient terminés et le 10 octobre 1680, il eût la joie de voir la procession des pauvres habillés par leurs protecteurs de justaucorps et de bonnets bleus, défilant pour se rendre de la chapelle Saint-Nicolas, lieu de rendez-vous, à l’hôpital général (Archives de l’hôpital. — Histoire de Châteaubriant, p. 450).

Ce succès, satisfaisant à divers points de vue, ne comblait pas les voeux des personnes charitables qui avaient jeté les fondements de la maison avec l’espérance de venir en aide aux malades. Les mécontents, qui avaient un moment gardé le silence, ne tardèrent pas à exprimer tout haut leur opinion et à battre en brèche l’oeuvre du père Chaurand par des critiques très vives. Leurs insinuations soufflèrent la révolte dans l’établissement et entraînèrent parmi les filles des désertions que les directeurs réprimèrent en janvier 1682 en décidant que les portes seraient fermées avec vigilance (Livre des délibérations, f° 65).

Le seul moyen de faire taire les plaintes, c’était d’ajouter un quartier de plus à l’établissement pour y loger les malades : telle fut la pensée du recteur de Châteaubriant, le doyen Blais (ou Blays) et celle qu’il s’efforça de réaliser, non-seulement en réclamant sans se lasser le concours des personnes charitables, mais encore en puisant le plus souvent dans sa bourse. Ce vénérable prêtre mérite certainement d’être inscrit en tête de la liste des bienfaiteurs de l’hôpital de Châteaubriant, à côté de Julienne Houssaie et du P. Chaurand. Il commença d’abord par élever en 1686, l’édifice de la chapelle qui fut en état d’être livrée au culte le 25 novembre 1687, et presque en même temps, il fit travailler aux murs d’une nouvelle salle qui fut achevée à la fin de l’année 1688. Pendant les quatre années suivantes il recueillit assez d’aumônes pour construire le logement des soeurs et la cuisine.

Le jardin qui manquait à l’établissement fut acheté au moyen d’une somme de 300 livres, que le même doyen voulut bien donner, le 15 mars 1694, à la charge seulement d’un obit annuel, puis agrandi par l’addition du jardin, d’un autre bienfaiteur, le prêtre Pierre Delalande, qui consentit à céder ses droits de propriété, moyennant quelques messes de requiem (Archives de l’hôpital, série B).

Une portion de ce dernier terrain servit d’emplacement pour le corps de logis que le doyen Blais fit  bâtir en 1695, près de la chapelle et dont il enrichit l’hôpital en lui imposant seulement l’obligation de nourrir, jusqu’à la fin de ses jours, une de ses nièces idiote. Il couronna son oeuvre en ordonnant à ses frais un portail en pierres de taille avec un mur de clôture en 1698, et sur la façade de la rue, qui se trouvait favorable au commerce, il éleva deux petites maisons, dont le trésorier sut tirer avantage pour grossir les revenus fonciers.

C’est encore aux largesses d’un prêtre, l’abbé Claude Simon, que les pauvres de Châteaubriant doivent les agrandissements qui furent exécutés en 1783. Tous ces bâtiments tombent en ce moment pour faire place à des constructions d’un aspect somptueux. En remplaçant les créations de l’ancien régime par des salles plus confortables, les administrateurs actuels reconnaîtront que leur devoir est de sauver de l’oubli les actes de leurs prédécesseurs. Il sied bien aux institutions charitables de prêcher la reconnaissance et de graver sur le marbre, comme on l’a fait à Nantes et à Blain, les noms des bienfaiteurs qui leur ont fourni les moyens de soulager les souffrances humaines.

La population intérieure, composée de malades, de pauvres valides et d’orphelins, était répartie au début dans quatre salles, qui contenaient ensemble une quarantaine de lits. Ceux qui étaient en état de travailler tissaient de grosses étoffes de serge, peignaient ou filaient de la laine sous la conduite d’un chef peigneur, salarié pour leur apprendre son métier (Livre des délibérations de 1746, f° 85). Si le règlement défendait d’admettre des enfants âgés de moins de 9 ans dans la maison, il laissait toute liberté de les assister à domicile. En 1761, un secours fut accordé au père de deux enfants qui tombaient du haut mal. En 1763, une fille mère recevait 50 sous par mois pour l’aider à élever son enfant de 3 ans (Ibidem, f° 142). A la même date, l’hôpital mit au rabais le prix de la pension d’une fille de 2 ans et trouva une nourrice pour 4 livres par mois. Une mère de deux enfants estropiés recevait un secours de 3 livres par mois en 1767.

Les hôpitaux ne furent obligés de recevoir les enfants trouvés qu’après 1770, lorsque le roi leur eut transféré la franchise d’impôt, dont jouissait auparavant le roi du papegault ou des arbalétriers [Note : Le jeu de l’arbalète, de l’arc et de l’arquebuse, était un passe-temps favori encore au XVIIIème siècle. Il fut supprimé parce qu’il engendrait des querelles parfois tragiques et des orgies]. L’hôpital de Châteaubriant retirait 240 livres de ce privilège. La charge qu’on lui imposait en retour, aurait mérité une plus forte compensation, aussi, les administrateurs ne manquaient-ils jamais de rejeter le fardeau sur le père présumé de l’enfant ou sur la paroisse d’où la mère était partie, quand l’occasion s’en présentait. En 1768, l’hôpital n’avait pas moins de 40 enfants, garçons et filles, à nourrir. Dans les temps ordinaires, les garçons étaient placés en apprentissage à 16 ans et les filles à 15 ans, mais comme l’encombrement était à redouter, il fut arrêté qu’on offrirait dans les campagnes, comme valets de ferme, ceux qui auraient 12 ans accomplis. Avis en fut donné par bannies dans toutes les paroisses rurales des environs (Livre des délibérations).

Le médecin chargé de visiter les pauvres à leur entrée, fermait la porte aux incurables. Les écrouelles, en 1737, étaient un cas d’exclusion. Quelques galeux reçurent des soins en 1773, mais sans doute par exception (Livre des délibérations).

Les premières servantes qui prirent la direction intérieure de l’hôpital de Châteaubriant furent, comme dans les autres villes du diocèse, des filles pieuses, pleines de charité et de désintéressement. Les demoiselles Alix et Guignard, ainsi que les deux servantes qu’on leur adjoignit, ne demandèrent que leur entretien et leur nourriture en échange de leurs services. Après cinq ans d’exercice, leur courage était épuisé ; elles se démirent de leurs fonctions. Le doyen Blais crut qu’en rappelant à ses paroissiens les récompenses promises par Dieu, à ceux qui pratiquent les oeuvres charitables, la place ne serait pas longtemps vacante, ses exhortations ne rencontrèrent aucun écho, même dans la partie la meilleure de son troupeau. C’est de la paroisse de Rhétiers (aujourd'hui Rétiers), évêché de Rennes, que vint la demoiselle qui se présenta avec une servante, au mois de mai 1686 (Mémoire du doyen Blais. – Histoire de Châteaubriant, p. 458 et 459). Au mois de janvier 1689, celle-ci ayant à son tour averti qu’elle allait se retirer, les protecteurs de l’hôpital, au lieu de s’exposer à de nouveaux embarras en employant des filles de bonne volonté, prirent le sage parti de s’adresser à des religieuses, liées par un voeu au gouvernement des hôpitaux. La Société des demoiselles de Saint-Thomas-de-Villeneuve, alors très répandue en Bretagne et dans les provinces voisines accueillit favorablement la demande que lui fit le doyen Blais et envoya Mlle Marie du Temple, accompagnée d’une soeur servante, pour prendre la direction de l’hôpital de Châteaubriant.

Le traité qui fut conclu le 22 octobre 1690, entre la congrégation et les administrateurs, porte en substance que la demoiselle gouvernante sera logée et nourrie à l’hôpital, soignée dans ses maladies et pourvue de gros linge, que sa servante sera de plus vêtue de tout ce qui lui sera nécessaire, qu’elle apprendra aux femmes les ouvrages de leur sexe et veillera sur l’éducation et l’instruction des petites filles renfermées, qu’elle et son assistante administreront les remèdes aux malades et qu’elles prendront soin toutes deux de la cuisine et de la lingerie (Histoire de Châteaubriant, p. 457-459).

Les engagements inscrits dans ce contrat furent si fidèlement observés par les deux parties, que rien ne vint troubler les bons rapports établis entre la congrégation des filles de Saint-Thomas et les administrateurs, pendant un siècle. Elles étaient au nombre de trois soeurs, quand on voulut les obliger à prêter le serment civique. Le refus qu’elles opposèrent fut la seule cause du renvoi qui les frappa le 16 septembre 1791. Après la révolution, la même congrégation est rentrée dans l’hôpital de Châteaubriant et à la fin du XIXème siècle (vers 1880) encore, ces religieuses continuent l’oeuvre commencée en 1690 par la soeur Marie du Temple.

Si maintenant nous ouvrons les livres de comptabilité de la maison, nous verrons les mêmes sources de revenus que dans tous les autres hôpitaux généraux de France. Quelques monopoles tels que la vente de la viande de carême, la fabrication des châsses des défunts, l’assistance des pauvres aux enterrements, le droit de langueyage des porcs, la location des tentures formaient le contingent du casuel avec le produit des amendes de police, de la manufacture et des quêtes [Note : Le langueyage des porcs consistait dans la perception d’un sou par porc vendu à Châteaubriant].

Il y a une progression curieuse à noter dans le rendement de l’impôt mis sur le débit de la viande pendant le carême, parce qu’elle est la résultante du relâchement qui envahissait déjà la société chrétienne jusque dans les moindres villes. Cette taxe qui ne produisait, en 1681, que la maigre somme de 6 livres, rapportait, en 1721, 75 livres ; en 1779, 120 livres et en 1789, la somme de 213 livres.

La fabrication des cercueils qu’on affermait à un menuisier 22 livres en 1681, procurait un bénéfice de 80 livres un siècle plus tard. On constate la même marche ascendante au chapitre des revenus fonciers. En moins d’un siècle, de 1710 à 1790, ils s’élevèrent de 77 livres à 1.583 livres.

Les quêtes donnaient des résultats très variables. Au début elles furent la principale ressource de l’établissement. Pendant cinq années, de 1680 à 1685, nous dit le doyen Blais, les habitants de Châteaubriant les plus aisés donnèrent si largement à l’hôpital qu’on ne manqua jamais de rien. Ils se firent inscrire sur un registre, en prenant l’engagement de fournir au moins un jour par an, la nourriture nécessaire aux pauvres, ce qui ne les empêchait pas de continuer leurs aumônes habituelles.

En 1724, lors de la banqueroute désastreuse de Law, l’hôpital n’aurait pas pu subsister s’il avait fallu renoncer aux quêtes, car un grand nombre de rentes avaient été amorties par les débiteurs, à l’aide de ces nombreux billets qui circulaient dans toute la France. Le contre-coup de la faillite se fit non moins sentir dans les hôpitaux que chez les particuliers. Dans la réponse au questionnaire adressé par l’intendant de la province en 1724, les pères des pauvres de Châteaubriant attestent le fait en disant que leurs revenus sont réduits à 525 livres, par suite du discrédit des billets (Fonds de l’intendance, C 1290. – Archives d'Ille-et-Vilaine). Dès 1726, le chiffre des recettes est monté à 1.716 livres. En 1744, le prince de Condé aida la maison à se relever en lui cédant huit actions de la Compagnie des Indes, qui valaient 1.200 livres de rente, et quelques années après, le marquis de Coulanges laissait une somme de 11.900 livres. L’établissement étant parfaitement assis désormais, grâce à ces générosités, le roi voulut bien, en 1759, lui accorder des lettres-patentes de confirmation qui lui permirent de jouir en paix de tous ses privilèges jusqu’à la Révolution. Il possédait en 1760 2.155 livres de revenu fixe. Cette somme était bien faible pour traverser sans inquiétude les années de disette qui survinrent à la fin du règne de Louis XV, et la subvention de 150 livres qu’accordaient les Etats de la province était un appoint bien léger, en comparaison de la détresse à soulager. Pourtant, Mlle Villemain, soeur de Saint-Thomas, chargée de la direction des ouvrages manufacturés, déployait dans le même temps tout son zèle pour augmenter les bénéfices et elle réussissait si bien que le trésorier constatait une amélioration très sensible de ce côté (Délibérations, f° 168 et 170).

En 1768, l’administration fit publier qu’elle continuerait de recevoir des malades, mais que les invalides seraient refusés. Réduit à la plus grande pénurie, le trésorier déclara qu’il était impossible de pourvoir à la subsistance des pauvres, sans des secours extraordinaires et que la cherté des vivres en mettant le comble à son embarras, tarissait aussi la source des charités publiques. Les années qui suivirent ne furent pas meilleures. En 1770, l’hôpital avait 80 bouches à nourrir au lieu de 40, pendant que la disette désolait le pays, que le commerce languissait et que l’argent était rare. Le prince de Condé auquel on s’adressait toujours, quand les nécessités étaient pressantes, envoya un secours de 200 livres. Avec les souffrances de la faim apparut la crainte des épidémies qu’entraînent souvent après elles les privations excessives : on fit face au danger en multipliant les quêtes à Châteaubriant et dans les environs (Délibérations, f° 184).

Il faut dire à l’honneur des bienfaiteurs de ce pays qu’ils ne se sont pas lassés de donner, ils ont tout à la fois atténué les misères du moment et constitué des ressources, en vue de l’avenir. En 1777, les comptes accusent un revenu fixe de 3.246 livres, c’est-à-dire 1.100 livres de plus qu’en 1759, et à la veille de la Révolution, il y a une nouvelle progression. Le produit annuel des loyers, des rentes et du casuel se chiffrait par un total de 4.027 livres.

Quand le bruit se répandit en 1780, que les Ursulines de Saint-Sauveur, de Châteaubriant, devaient être transférées au couvent de la Davrais, près d'Ancenis, la direction de l’hôpital conçut immédiatement le projet de réclamer pour les pauvres les domaines devenus inutiles aux religieuses et des instances, en vue d’obtenir une annexion, furent faites à l’évêché. La requête demeura sans suite, cependant, elle pouvait aboutir à un succès, car dans bien des cas le chef du diocèse avait approuvé des réunions de bénéfices qui étaient avantageuses aux hôpitaux. Les directeurs se retournèrent alors du côté du roi qui voulut bien, en 1785, leur accorder un secours de 2.500 livres, et l’année suivante, par arrêt du 4 mars 1786, le Parlement les autorisa à quêter pendant les offices paroissiaux, afin d’accroître leur casuel.

Les évènements de la Révolution n’ont pas plus épargné la ville de Châteaubriant que les autres. En l’an VI, l’hôpital se plaignait d’éprouver, chaque année, une réduction de 2.955 livres dans ses revenus. Le remplacement ordonné par la loi réparatrice de l’an V ne combla qu’une partie du déficit, puisqu’en l’an XII le trésorier accusait encore une perte annuelle de 1.031 livres, sans parler du remboursement des journées de militaires et d’orphelins dont l'Etat différait sans cesse le paiement (Liasses des hôpitaux. – Archives départementales, série X).

 

BIENFAITEURS DE L’HOPITAL DE CHATEAUBRIANT.

1672-1685.

Julienne Houssaie, rente de 40 livres.

Le doyen Blais, recteur de Châteaubriant, un jardin, un bâtiment et 480 livres.

M. du Val, garde du prince de Condé, 300 livres.

François Riollan, 100 livres.

Françoise de Meza, veuve Lasse, 200 livres.

Mme Henri de la Chesnaie, 814 livres.

Ambroise Guesnier, avocat, 1.300 livres.

Mme de la Coquerie, 45 livres.

Le sieur Pihan, 100 livres.

Julien Duclos, 150 livres.

M. de la Chevrolais, 1.300 livres.

M. G. du Breil de la Dauphinaie.

Nicolas Barré, un petit jardin.

P. Delalande, marchand, 200 livres.

Math. Bellanger, 200 livres.

Renée Charron veuve Camus, le champ de Beré.

M. Dreux, un terrain.

 

1685-1700.

Adrienne Fourché, veuve Baguet, 300 livres.

L. Brossais, veuve Felot, 220 livres.

Anne M. Brossais, 400 livres.

Ernoul de la Maffrière, 200 livres.

Jul. Lebreton, veuve Bouchard, 200 livres.

Les Etats de Bretagne, 125 livres.

P. Delalande, prêtre, un jardin et rente de 16 livres.

Etienne Guenier du Sauzay, 200 livres.

L. Guibourd, veuve de la Touche, 40 livres et 10 boisseaux de blé.

 

1700-1709.

Jean Coffin, 15 livres.

Math. Bodin, 20 livres.

Mme Moulin, 100 livres.

Perrine Brossais, veuve Tullier, 200 livres.

M. et Mme Blandin, 60 livres.

M. Boucault, prêtre, 18 livres.

Et. Leray, prieur de Saint-André, 300 livres, ses bestiaux et les revenus de ses bénéfices.

 

1709-1724.

Le prince de Condé, 310 livres.

Jeanne Aubin, 150 livres.

M. Derouet, grand chantre de la cathédrale de Rennes, 400 livres, 12 robes de chambre, 4 ballots de toile et 13 couvertures.

Mlle de Faradon, 125 livres.

Julien Buché, prêtre, 20 livres.

Mme Chotard, 400 livres.

Le sieur de la Gohorais, 40 livres.

Le sieur du Val, 100 livres.

M. et Mme Jamaut, 60 livres.

M. de la Bothelière, 125 livres.

M. de la Salmonnais, 27 livres.

M. du Gué, 30 livres.

Mme Lusse, 25 livres.

Mme de Clisson, 50 livres.

M. de Pacé, 100 livres.

Lancelotte Alix, la métairie de Carentesche et une rente de 20 livres.

M. de Saint-Prix, 200 livres.

Mme Febis, 100 livres.

Mlle de Lourmel, 33 livres.

M. Lenormant, 50 livres.

M. de Bray, 100 livres.

 

1722-1728.

M. l’abbé Bosquen, 264 livres.

La veuve Langlois, 100 livres.

Mme de Vauguérin, 50 livres.

Le prince de Condé, 300 livres.

Louise Delalande, veuve Mousset, le pré de Maubuisson.

Le prince de Condé, 300 livres.

Mlle de Lépinay, 60 livres.

J.-B. Brossay du Perray, avocat, 1.660 livres.

 

1729-1737.

Victoire Barbarin, une chambre avec grenier, rue Dosdane.

M. du Pin du Bourgneuf, 100 livres.

Mme de la Ville-Roux, 50 livres.

M. Hamel, 100 livres.

M. des Tertres, 50 livres.

Mlle Lavigne, 50 livres.

M. de Bray, 150 livres.

Mlle Cossé, 21 livres.

M. de la Chauvière, 30 livres.

M. Paluel Luette, 150 livres.

Mme Margat, 23 livres.

L’abbé Denis Leray de la Lortière, prêtre, 1.200 livres.

 

1738-1748.

M. de Lavau, 100 livres.

L’abbé de Lourmel, prêtre, 224 livres.

L’abbé Derouin, prêtre, 150 livres.

Mlle du Margat, 100 livres.

Henri de Bourbon, prince de Condé, 8 actions de la Compagnie des Indes, soit 1.200 livres de rente.

Le même, 1.500 livres.

Jacques Briard, une maison et 255 livres.

L’abbé Maugars du Brossay, doyen de Châteaubriant, ses biens meubles.

Le marquis de Coulange de Mondragon, 11.900 livres.

Anne Desbois de la Valette de Tremaria, supérieure de l’hôpital, 200 livres, une tasse et une écuelle d’argent.

 

1749-1774.

M. Lorette fils, 300 livres.

M. de la Brossellière, 501 livres.

M. Brossais, 1.600 livres.

L’abbé Claude Simon, 1.000 livres.

Anne Luette, veuve Lebastard, 200 livres.

L’abbé Landais, vicaire de Beré, 300 livres.

M. de la Ferrière, 500 livres.

Joseph Lemaître, 54 livres.

Agnès Fouché, 150 livres.

Gabrielle Rotureau, 200 livres.

Le prince de Condé, 200 livres.

Mme du Chatellier, 600 livres.

L’évêque du diocèse, 120 livres.

M. Bimont, 500 livres.

 

1774-1786.

M. Rotureau, 364 livres.

Mlle Derouin de la Motte, 600 livres.

Mme veuve Buchet, 50 livres.

Mlle Derval, 184 livres.

L’abbé Simon, pour la construction du nouveau bâtiment, 2.656 livres.

M. Dutreil, 120 livres.

M. de la Pinsonnais, 24 livres.

M. Vimont, 49 livres.

Mlle Besnier, 140 livres.

Mme Logé, 300 livres.

L’évêque du diocèse, 100 livres.

M. Vissault, 160 livres.

Mme de Goyon, 5.700 livres.

Mlle Tardivel de l'Ecottay, 300 livres.

Un anonyme, 4.000 livres.

Anne Ernoul de la Provôté, 500 livres.

Le Trinitaires, 300 livres.

 

PIÈCES JUSTIFICATIVES.

LETTRES PATENTES DE CONFIRMATION DE L'HÔPITAL DE CHÂTEAUBRIANT.

Louis, par la grâce de Dieu, roy de France et de Navarre, à tous présens et à venir salut :

Notre très cher et très amé cousin Louis de Bourbon, prince de Condé et les administrateurs de l’hôpital de Châteaubriant, nous ont fait exposer que cette maison doit son commencement à l’édit du mois de juillet mil six cent soixante deux, portant qu’il seroit établi des hôpitaux dans toutes les villes et gros bourgs du royaume, où il n’y en avoit point et l’exécution en ayant été différée jusqu’en 1678, le curé de la paroisse de cette ville et les plus aisés des habitans, en jettèrent alors les premiers fondemens. Ils achetèrent un fond pour y construire la maison et un jardin assez considérable, chacun d’eux contribuant suivant ses facultés, mais on ne parvint à finir les bâtimens de cet hôpital et à les meubler, que par les libéralités de nos très chers et très amés cousins les princes de Condé, par celles de la communauté de la ville qui abandonna pour cet établissement une partie de ses octroys et par les questes que l’on fit au mois de novembre 1680 ; les pauvres commencèrent à y être reçus, ils y sont actuellement au nombre de cinquante et un, tant malades qu’orphelins, qui occupent 39 lits et sont servis par deux filles et deux soeurs de la Société de Saint-Thomas de Villeneuve et quelques domestiques.

Cet hôpital n’a d’abord subsisté que par les aumônes qu’on recueilloit toutes les semaines chez les habitans, aujourd'huy il jouit d’un revenu fixe de 2.155 livres 4 sols 4 deniers en argent et de 40 boisseaux de seigle, outre ce qu’il retire d’une petite manufacture de serge et de laines tirées au peigne, qui fournit du travail aux pauvres valides et aux enfants orphelins : ses charges extraordinaires ne sont point fortes, elles ne consistent que dans la rétribution d’environ 150 messes fondées pour les bienfaiteurs de la maison.

Dans la distribution des bâtimens on a veillé égallement à la décence et à la commodité : ils sont composés de deux salles d’infirmerie, l’une pour les hommes, l’autre pour les femmes, de deux autres salles pour les pauvres valides des deux sexes, d’un réfectoire et d’une chapelle. Notre très cher et très amé cousin le prince de Condé s’est déclaré, à l’exemple de ses ancêtres, le protecteur de cet hôpital et les administrateurs en sont nommés conformément à la déclaration de 1698.

Enfin, la situation de cette maison augmente son utilité. Les hôpitaux de Nantes et de Rennes, distans de 10 lieues, en sont les plus voisins ; d’ailleurs, Châteaubriant se trouve sur les routes d'Angers à Rennes, de Nantes en Normandie et d’autres villes, comme Redon, la Guerche et Ancenis, toutes éloignées. Ce sont ces considérations qui ont engagé les exposans à nous demander les lettres patentes qui leur sont nécessaires.

A ces causes, voulant contribuer de notre part à un établissement aussi avantageux, de l’avis de notre Conseil et de notre grâce spéciale, pleine puissance et autorité royale, nous avons confirmé et autorisé, confirmons et autorisons par ces présentes, signées de notre main, l’établissement dudit hôpital de la ville de Châteaubriant, voulons qu’il jouisse des prérogatives, privilèges, franchises, exemptions et immunités dont jouissent les autres hôpitaux de notre royaume établis, en conséquence de notre édit de 1662, validons et autorisons toutes les acquisitions en fond et autres qu’il a pu faire et l’acceptation des legs, dons, aumônes et libéralités qu’il a reçus, voulons qu’il puisse continuer de recevoir tous dons, legs, aumônes et libéralités, pourvu néantmoins que ce soient des biens et effets de la nature de ceux qu’il est permis aux maisons de mainmorte de recevoir et acquérir suivant notre édit du mois d’aoust 1749.

Si donnons en mandement à nos amés et féaux conseillers, les gens tenans notre Cour de Parlement à Rennes, et à tous autres nos officiers et justiciers qu’il appartiendra, que ces présentes ils ayent à faire enregistrer et de leur contenu jouir et user ledit hôpital pleinement, paisiblement et perpétuellement, cessant et faisant cesser tous troubles et empêchemens contraires. Car tel est notre plaisir... (Archives de l’hôpital, A 1, n° 12). Donné à Versailles le mois de may, l’an de grâce 1759 et de notre règne le quarante-quatrième, signé : Louis. Par le roy : Phelypeaux.

 

ÉTAT DES BIENS DE LA MAISON D'HUMANITÉ DE CHÂTEAUBRIANT.

fait par nous Ballain, agent national, et Carpentier, officier municipal de ladite commune, comme suit, ce 2 des sans culottides de l’an II de la République (Inventaires de titres et de meubles. – Archives départementales, Q).

Savoir :

1° Une maison située au faubourg de Couerré, affermée à Jean Bourdeaux la somme de quarante-cinq livres.

2° Une autre maison, faubourg de Couerré, affermée à la citoyenne veuve Bimon, avec un jardin au derrière, cent trente livres par an.

3° Une autre maison audit faubourg, affermée aux citoyennes Delaunay pour deux cents livres par an, avec jardin au derrière.

4° La maison principale dudit Humanité, avec cour, jardin et ses dépendances, dont jouissent les malades, évaluée six cents livres de revenu.

5° La maison au haut de la grande rue, affermée à différents particuliers la somme de 270 livres.

6° Une maison, rue Rigalle, affermée à Julien Robert soixante-quinze livres.

7° Une autre maison, rue Rigalle, affermée 20 livres.

8° Une maison, rue Dos-d'Ane, affermée 21 livres.

9° Une maison, sur la place de la Liberté, affermée 36 livres.

10° Une autre maison, même place, affermée 36 livres.

11° Une maison, à la Barre, avec un jardin, affermée 50 livres.     

12° Un autre jardin à la Barre, affermé 5 livres 10 sols.  

13° Une pièce de terre en friche, joignant l’étang de Choisel, contenant environ deux journaux, dont jouissent les malades, prisée de revenu quarante livres.

14° Un jardin, près le rempart Saint-Michel, affermé pour quinze livres dix sols.

15° Une métairie, nommée la Caranthèle, commune du Petit-Auverné, affermée pour quatre cent quarante livres.

16° Quatre constituts sur les Etats de Bretagne, montant ensemble à la somme de sept cent quatre-vingt-neuf livres de rente.

OBSERVATIONS.

La ferme des châsses produisait ordinairement quatre-vingt livres par an.

Le droit de papegault produisait deux cent quarante livres.

La boucherie du carême produisait deux cent treize livres par an.

La rente foncière du prieuré de Beré, de 40 boisseaux de blé seigle, pesant quatre-vingt livres.

Une rente de cinq livres en argent.

Rente foncière sur la maison de la Tannerie, portant quarante livres de revenu.

Une autre rente foncière sur la maison de la Croix-Verte et sur celle de Pierre David, 130 livres.

Une rente foncière sur un jardin situé place du Champ-de-Mars de 2 boisseaux et demi de seigle.

Rente sur la Compagnie des Indes de neuf cents livres par an.

Rente sur les Tailles de Paris, trente livres.

Indemnité d’inondation de quelques terres dépendant de la métairie de Carataiche, que paie la forge de Moisdon, à raison de 16 livres par an. (L. Maître).

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