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LES REMPARTS ET LE CHATEAU DE DINAN EN 1693

(d'après l'ingénieur Garengeau)

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DINAN, ville d'origine féodale, située dans un site admirable, sur un coteau escarpé et dominant la profonde et pittoresque vallée de la Rance, était incontestablement, au moyen âge, avec Nantes, Rennes, Saint-Malo, l'une des principales places fortes de Bretagne. C'est surtout après sa réunion définitive au domaine ducal, en 1283 [Dom MORICE, Preuves pour servir à l'Histoire de Bretagne, t. I, col. 1066 et 1067], que la forteresse dinannaise atteignit son maximum de développement et de puissance. Considérée à juste titre par les ducs de Bretagne comme une citadelle de très grande importance pour la défense du duché, elle fut pourvue alors de tous les moyens militaires offensifs et défensifs les plus récents et les plus perfectionnés [Note : Les remparts actuels sont certainement des XIVème et XVème siècles ; quelques rares parties peuvent remonter au XIIIème siècle. Malheureusement, comme nous avons pu le constater au cours de nos patientes recherches historiques, entreprises pendant plus de trente ans afin de recueillir les documents originaux nécessaires pour écrire l'histoire de notre ville natale, nous n'avons découvert aucun acte authentique donnant des détails très précis sur la construction des anciens remparts de Dinan, sauf, bien entendu, les pièces originales relatives au donjon (1382-1383), publiées par L. Odorici et A. de la Borderie].

Le roi Henri III donna Dinan, en 1585, à la Ligue pour place de sûreté. Le duc de Mercœur en fit, après Nantes, sa principale place d'armes. Il répara et renforça les anciennes murailles de la ville, exécuta d'importants travaux de défenses au château, et construisit plusieurs ouvrages avancés pour y mettre de l'artillerie. Mais la place fut livrée par ruse, avec la complicité des Malouins, aux troupes royales, en février 1598.

En 1635, Dinan est encore réputée « bonne ville de guerre » [« Dinan en 1635 », notice descriptive, extraite du ms. fr. 223217, f 50 de la Bibliothèque Nationale, publiée par A. de la Borderie, dans la Revue de Bretagne, de Vendée et d'Anjou, 1890, tome IV, p. 139] mais déjà certaines parties de ses remparts semblent être en assez mauvais état. La seule amélioration notable apportée à l'enceinte, dans la première moitié du XVIIème siècle, fut la construction, en 1620, de la porte Saint-Louis, œuvre de Thomas Poussin, ingénieur et architecte du Roi, à Dinan [Note : Nous trouvons aussi quelques petits détails intéressants sur Dinan, pendant le règne de Louis XIII, dans : DUBUISSON-AUBENAY : Itinéraire de Bretagne en 1636, publié par Léon Maître et Paul Berthou, Nantes, 1898, tome I p. 50 ; — A. JOUVIN DE ROCHEFORT : Le Voyageur d'Europe... Paris, 1672, tome I, p. 239].

Sous le règne de Louis XIV, des prisonniers de guerre furent enfermés dans plusieurs tours de l'enceinte ; des jardins cultivés par des particuliers existaient sur certaines de ces tours, et il y en avait aussi dans les fossés, bien avant 1693 [Note : Registre de la réformation du Domaine de Dinan (1683-1685). Archives de la Loire-Inférieure, B 1320].

Alors que le célèbre Vauban s'occupait surtout de fortifier, ou d'améliorer les défenses des places frontières, ports de guerre et littoral du royaume, un de ses ingénieurs, Garengeau [Note : Siméon Garengeau, ingénieur et architecte du Roi, à Saint-Malo, donna les plans de l'église paroissiale de Brest (1687) ; le devis des réparations à faire au château de Saint-Malo (1693) ; le dessin du maître-autel de l'église Saint-Sauveur de Dinan (1718), etc. Son acte de décès que nous avons retrouvé dans les registres paroissiaux de Saint-Malo, est ainsi rédigé : « Ecuïer Siméon Garengeau, chevalier de l'Ordre militaire de St-Louis, capitaine au régiment de Champagne, Directeur des fortifications de la Haute-Bretagne, originaire de Paris, âgé d'environ 94 ans, mort le 25 août 1741, et inhumé, le 26, dans l'église cathédrale et paroissiale, par moi curé soussigné, en présence des soussignez : François-Marie Rouxel de Lescouet, de Vauborel, Thumbrel, curé »], résidant à Saint-Malo, vint inspecter les fortifications de Dinan, en 1693, sans doute en prévision d'une descente possible des Anglais sur nos côtes [Note : La flotte anglaise attaqua, en effet, mais vainement, Saint-Malo, du 26 au 30 novembre 1693]. Il rédigea soigneusement un important mémoire, daté du 6 juillet 1693, indiquant l'état des réparations qu'il était urgent de faire aux fortification de Dinan « pour mettre celles-ci hors des insultes et empêcher un coup de main ». A ce mémoire est joint le « Plan de l'enceinte de la ville et chasteau de Dinan, en Bretagne, et d'une partie de ses environs », à l'échelle de 150 toises, et signé aussi Garengeau [Note : Archives d'Ille-et-Vilaine, C 492. — C'est, à notre connaissance, le plus ancien plan des fortifications de Dinan conservé de nos jours. Mais ce plan, quoique signé Garengeau, est-il bien de lui ? Voir, en effet la mention suivante qu'on a essayé d'effacer : « Fait et levé par Picot, ingénieur... 1693 »].

Nous ne pouvons donner ici le texte complet de ce long devis de l'ingénieur Garengeau qui contient parfois des détails techniques destinés aux entrepreneurs des travaux, ne présentant aucun intérêt archéologique. Afin d'abréger un peu, nous supprimerons, ou résumerons, quelques petits passages du mémoire, moins intéressants. Nous respecterons, autant que possible, l'orthographe, assez mauvaise et souvent bizarre, de cet important document original ; mais nous supprimerons aussi, certaines abréviations qui rendraient sa lecture assez pénible.  

Dinan : plan de l'enceinte et du château de Dinan en 1693

Nota : Les lettres des renvois indiqués dans le texte du présent mémoire sont celles du plan signalé ci-dessus et dont nous donnons la reproduction photographique.

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« ESTAT DES PLUS URGENTES RÉPARATIONS A FAIRE A LA VILLE DE DINAN, EN BRETAGNE, POUR LA METTRE HORS D'INSULTE ET EMPÊCHER UN COUP DE MAIN ». '9'

« La ville de Dinan est scituée à 5 lieues de St-Malo ; elle a une petite rivière qu'on nomme Rance qui passe au pied de ses murs, et par le dehors, depuis la porte de St-Louis (A) jusques en celle de Gersüal (Q), et va se décharger dans la mer, laquelle de maline (Haute marée) monte jusque au moulin du pont Perin (ou Pontperrin), qui est à un quart de lieue au-dessus de lad. ville, où les gabarres de 25 tonneaux montent de pleine mer. « Cette place estoit très fort avant l'usage du canon, étant close de murs, au-devant de partie desquels règne une fausse braye, sçavoir, depuis la porte de l'Hôtellerie (I) jusques à celle de St-Malo (0), revêtus de murs de maçonnerie percés de créneaux à 2 étages, le premier voûté en forme de corridor, un bon fossé sec et fort au devant de ses murs, flanqués de bonnes tours, très bien bâties, et la plus part voûtées à 2 et 3 étages, et percées de créneaux et embrasures ; elle est commandée à la portée du canon, depuis le Donjon (D) jusqu'à la porte de St-Malo (0) [Note : Erreur dans la mémoire ; il faut lire : porte de l'Hôtellerie, la grande Haye étant située à l'ouest de la ville], par un coteau qu'on nomme la Grande Haye, et à la portée de 2 bons mousquets, par une motte de terre opposée à la tour du Connétable (G), sur laquelle [Note : C'est-à-dire, sur laquelle motte de terre est bâti..] est bâti le moulin de Beaufort. Il est à remarquer qu'en toute cette partie de ville, le terrain du dedans est aussy haut et du même niveau que le dessus des murs de son enceinte qui sert de chemin des rondes et qu'il n'y a que le parapet au-dessus qui couvre.

Il n'est pas possible d'empêcher ces commandements, mais il est aisé de leur opposer des batteries qui leur soint supérieure, ou de niveau, en voûtant premièrement le donjon (D), à hauteur des machicolis, et y fesant un bon parapet comme il sera cy après expliqué, et une platte-forme sur la tour du Connétable du niveau du dessus de la voûte, et aussy un parapet à l'entour et par le devant.

Il y a encore une autre hauteur nommée la montagne de la Haute-Voye, ou de Lanvalay [Note : Lanvallay, commune limitrophe de Dinan, à l'est ; ancienne enclave du diocèse de Dol dans celui de Saint-Malo. Dinan dépendait de ce dernier diocèse], de l'autre costé de la rivière, opposée à la partie de la ville vers la tour nommée du Petit Rampart (A) [Note : Tour Sainte-Catherine actuelle], à un quart de lieue de distance, qui commande dans cette partie, mais le dessus de la voûte de lad. tour étant de niveau de lad. hauteur, on y peut faire une platteforme pour du canon et un bon parapet, au devant, percé d'embrasures ; on a même voulu autrefois opposer une batterie dans lad. ville, supérieure à cette montagne, par le moyen des chapelles de l'église St-Sauveur qui sont au-derrière du coeur, lesquelles ont esté voûtées exprès pour porter du canon, ayant par dessus une bonne platteforme de pierre de taille [Note : Dubuisson-Aubenay, en 1636, op. cit., en signalant cette intéressante particularité, fait erreur : « St-Sauveur, où il y a un portail très antique, le reste de l'église, qui est le choeur n'estant achevé, et estant de deux voûtes l'une sur l'autre (sic), commandans sur le costé de la ville oriental et sur le costeau qui, comme j'ay dit, la commande du dehors ; en sorte que ceste double voûte est comme expressément faite pour batre sur ledit costeau ; mais est-elle foible pour porter canons, et n'y a pas d'escalier ni passage à y monter ». Il s'agit bien, comme le dit Garengeau, des chapelles absidiales, « lesquelles ont esté voûtées exprès pour porter du canon » et non de la voûte du choeur], mais depuis 40 ans on a changé cette destination en fesant des combles de charpente sur ces chapelles, à cause, dit-on, de l'humidité, laissant touttefois la platteforme en l'état qu'elle étoit, de manière qu'il seroit aisé de supprimer les combles en cas de besoin.

Cette place, bien loin d'avoir esté entretenue, depuis un tems, a non seulement esté négligée, mais ruynée et dégradée par un chacun ; on a laissé faire des jardins sur touttes les tours, pour quoy on a raporté  3 à 4 pieds de terre sur les voûtes, puis planté des arbres dont les racines s'étant insinuées dans les joints des pierres les ont, en grossissant, séparées les unes des autres, et ces terres ayant retenu les eaux et bouché leur conduitte, sont restées imbibées et ont endommagé et les voûtes et les murs, à quoy il est nécessaire de remédier incessamment, pour empêcher leur ruine totale, en rasant ces jardins et déblayant les terres affin de laisser le cours libre à l'eau.

Il n'y a point de canon dans cette place autres que 3 mauvaises pièces de fer, sans affûts, touttes celles de fonte, qu'il y avoit, en ayant esté enlevées il y a environ 20 ans, par ordre du Roy ; il n'y a non plus aucunes autres armes, mèche, poudre, ny plomb, et si Sa Majesté ne jugeoit à propos d'envoyer quelques pièces de canon de fer, en veüe de se servir seulement d'harquebuses à croc pour la deffence de cette place, on pourroit laisser les tours en l'état qu'elles sont, supprimer tousiours les jardins, et se servir de leurs platteformes comme elles ont esté faittes, et des embrasures et créneaux de chaque étage, rétablissant seulement les parapets dégradés et fesant les joints des pierres qui couvrent ces voûtes, avec bon cyment ; mais comme il y en a qui sont avantageusement scituées, principalement celles de Coaquin (B), du Connétable (G), du Bignon (P) et des Sillons (X), pouvant commander partout j'estime qu'elles ne devroint pas estre négligées mais au contraire accomoder leurs platteformes à l'usage du canon, n'y ayant pas suffisamment de recul quant à présent ; la moitié du profil de la tour de Coaquin, en suitte, fait voir en quel estat sont ces tours, et l'autre moitié, les ouvrages à y faire, pour y mettre du canon, que j'ai colorés de jaune.

Dinan : profil de la tour de Coetquen

L'estat auquel est actuellement cette place demanderoit beaucoup de tems et de dépense pour y faire les ouvrages nécessaires, mais les plus pressés se peuvent réduire, comme ceux de Dol, en se contentant de proffiter des flancs des tours, y fesant les réparations et augmentations devant dittes, à reffaire les brèches des murs, les parapets au-dessus et autres ruynés ; reffaire, aussy à neuf, touts les ponts dormants qui traversent les fossés dont la pluspart ont esté remplis de terre pour éviter l'entretien, les ponts-levis et leurs bascules, qui sont pourris et cassés, et de bonnes portes, touttes ces fermetures estant absolument de nulle valeur, le tout comme il sera expliqué ».

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Nous trouvons, maintenant, dans le mémoire, l'état des différentes parties des fortifications, les travaux à entreprendre et, pour chacune de ces parties, les dépenses relatives à leur exécution, en commençant par la porte Saint-Louis (A) et en se dirigeant, d'abord, vers l'ouest de l'enceinte [Note : L'exposé de ces détails est divisé en 68 articles].

Il n'y a pas de fossés devant cette porte [Note : Sur la façade extérieure de la porte Saint-Louis, outre le millésime sculpté de 1620, se trouvaient. avant la Révolution, trois écussons représentant, au milieu, les armes de France et Bretagne ; plus bas, à droite, celles de Dinan, et, à gauche, celles de M. de Molac, gouverneur de Dinan, à cette date] ; il faut au moins faire un pont-levis, avec bascule à flèches, pour le hausser et baisser ; remplacer les deux portes, en bois de chêne ; refaire les couvertures des deux corps de garde, occupés par des particuliers, dont l'un est situé à l'entrée de la porte Saint-Louis, et l'autre au-dessus de celle-ci.

« Entre lad. porte et la tour de Coaquin (B), le petit parapet de la courtine est ruyné » sur 80 pieds de long et 2 pieds de haut.

Lad. tour de Coaquin (B) [Note : La tour de Coëtquen tient son nom de l'illustre famille de Coëtquen dont plusieurs de ses membres furent gouverneurs de Dinan] est belle et grande et bien sçituée, a 3 étages l'un sur l'autre, voûtés et percés de créneaux et embrasures qui peuvent servir de bons flancs, bouchant les ouvertures inutiles. Ces étages servent présentement à loger des prisonniers de guerre ; le dessus de cette tour n'est point fait en platteforme à cause de la dernière voûte qui est cause qu'on ne peut y mettre du canon, ny s'en servir en l'état qu'elle est que pour de la mousqueterie, en déblayant tout à fait la terre qu'on a raporté dessus, ainsy qu'il a esté dit.

Pour acommoder le dessus de cette tour à l'usage du canon, il foudroit relever la maçonnerie des murs d'environ 4 pieds, y faire un parapet au-dessus de 6 pieds de haut et autant d'espais, y observant des embrasures de 15 pieds en 15 pieds ; faire les angles, jouées et plongées de pierre de taille, et le surplus de moilon, le tout avec chaux et sable ; citerner le dessus desdits murs et partie de voûte, avec chaux et cyment, donnant la pente nécessaire pour l'écoulement des eaux, puis pour la platteforme avec pierre de taille, aussy à cyment, avec pente de neuf pouces, du derrière au devant, pour remettre plus facillement le canon en batterie ; démolir les parapets du costé de la ville, et les réduire à 3 pieds d'espais, se servant de la pierre de la démolition à la nouvelle construction.

Au passage à la suitte alant au donjon du château (D) rétablir le dessus du petit parapet du costé de la campagne en 64 pieds de long et 2 pieds de haut, et à celuy du costé de la ville, arraser et chaperoner de neuf le dessus seulement et paver le dessus du passage avec pierre du lieu... Rétablir pareillement les parapets au-dessus des petittes tours de Lambaudaye en la longueur de 66 pieds et 3 pieds de haut, y observant des créneaux de 10 pieds en 10 pieds, et à ceux du costé de la ville, les chaperoner seulement par le haut, et paver le dessus de ces tours avec pierre platte...

Entre lesd. tours et le donjon reffaire les parapets qui sont tombés en 112 pieds de tour et 3 pieds de haut ; les construire comme a esté dit, y observant de semblables créneaux.

Ce qu'on appelle le château comprend la partie de la place commençant par la tour de Coaquin (B), les tours de Lambaudaye (C), le donjon (D) et la Gueritte (E). Il y a en toutte cette partie, même jusques à la porte de St-Louis, un bon fossé sec, mais fort proffond du costé de la ville, couppé d'un pont dormant et pont-levy, pour l'entrée du château ; on a fait dans partie de ces fossés depuis lad. porte St-Louis jusques à la tour de Coaquin, un jardin qui se loue à des particuliers, pour lequel on a comblé partie des fossés ; dans les murs de toutte cette partie, au rez-de-chaussée des fossés, on a observé un corridor voûté, percé d'embrasures et créneaux, qui règne depuis la tour de Coaquin (B) jusques à la gueritte (E), et de bons parapets par le haut percés d'embrasures, et à l'épreuve du costé de la place [Note : Ces défenses du côté de la ville, furent exécutées par le duc de Mercoeur, pendant la Ligue].

Le Donjon (D) a esté très proprement et solidement baty, les pare­ments de ces murs estants de pierre de taille dedans et dehors, le tout par assises. Il est composé de 2 tours jumelles jointes ensemble formant un ovale de 78 pieds de diamètre, sur 48, élevée (sic) de 5 étages carrés y compris les 2 étages qui font partie dans le haut du fossé, et un grenier au-dessus, avec une galerie qui règne à l'entour, et un petit parapet porté sur consoles de 5 assises, avec des machicolis entre deux ; chaque étage distribué les 1ers en 3 pièces et les autres à 4, touttes à cheminée ; un bel escalier à visse qui monte de fond et communique partout, et de petits escaliers de dégagements, dans l'épaisseur des murs, et autres petittes commodités, le tout aussy proprement baty que s'il venoit d'estre fait. Ce donjon a esté autrefois couvert de charpente et ardoise dont il ne reste aucun vestige, seulement de quelque portion de planchers dont les poutres restent encore, mais qui sont pourries et prêtes à tomber [Note : En 1636, Dubuisson-Aubenay, op. cit., signalait, ainsi, cette toiture du donjon : « ce n'est qu'une seule très grosse tour et masse de pierre, à double sommet en pointes couvertes d'ardoises »]. Il n'y a plus aussy ni portes, ny fenestres, et, journellement, on emporte quelques barreaux des grilles de fer restées ; le dessus de ce Donjon estant bien voûté avec bonne maçonnerie de 4 pieds d'espais, non compris les reins, un citernement par dessus, et une platteforme de pierre de taille, un parapet à l'entour de 6 pieds de haut et autant d'espais, percé d'embrasures, serviroit merveilleusement bien pour une baterie supérieur aux commandements devant dits, les murs étant plus que suffisants pour la porter, et en fesant des planchers, portes et fenêtres, il y auroit un beau logement pour le gouverneur, et un autre pour le lieutenant de Roy ; la communauté de ladite ville pourroit faire l'avance de la dépense nécessaire pour tous les ouvrages de ce donjon, au moyen de laquelle on l'exempteroit du paye­ment des 600 l. qu'elle donne par chacun an pour le logement du gouverneur.

Depuis le Donjon jusques à la Gueritte (E), les murs et parapets sont en bon état.

La porte de menuiserie de l'entrée du château est de nulle valeur, aussy bien que le pont-levy, sa bascule et la plus grande partie de la ferrure ; il est nécessaire de refaire à neuf tous ces ouvrages...

Depuis la Gueritte (E) jusqu'à la tour du poulalyer (Tour du Poulailler, appellation populaire) ou du Connétable, les murs et parapets, au-dessus, sont en assés bon état, à la réserve qu'il est nécessaire de les chaperonner de neuf en 392 pieds de long et 2 pieds de haut, et d'y percer des créneaux de 10 pieds en 10 pieds, bouchant la plus grande partie des regards dont on fera des créneaux.

Ladite tour du Connétable (G) est avantageusement scituée, à cause du commandement sur la campagne opposée qui commande dans la ville ; elle est bonne et bien bâtie, a 3 étages voûtés, l'un sur l'autre, percés de créneaux et embrasures ; le dessus de cette tour est sans platteforme comme celle (B) devant dite, mais seulement remplie de terre, sur laquelle on a fait un jardin, qu'il faut supprimer, et y faire les parapets, platteforme, et autres ouvrages contenus en l'article (6) concernant la tour de Coaquin.

Depuis cette tour (G) jusqu'à la tourelle, en suitte, sur Cocherelle (H), les murs et parapets sont en assés bon état...  Il est nécessaire de les chaperonner à neuf, en 432 pieds de long, et de convertir partie des regards en créneaux, et en percer d'autres, de 12 pieds en 12 pieds ; boucher un égout dans le mur, ne lui laissant que 6 pouces d'ouverture, en hauteur.  

A la tour sur Cocherelle (H) [Note : Cocherel, nom du vallon longeant les fossés de l'enceinte, à l'ouest] qui est voûtée à 2 étages, supprimer le jardin qu'il y a dessus, et y faire une platteforme et un petit parapet percé de créneaux.

Rétablir la portion de mur, en suitte, dont le parement extérieur est tombé et qui menace la ruine totale, ainsi qu'une portion de parapet, à la suite, en 256 pieds de long et 4 pieds de haut. La continuation du même parapet, jusqu'à la porte de l'Hôtellerie, est éboulé en la hauteur de 2 pieds et 282 pieds de long. Il faut le rétablir, convertir des regards en créneaux, et en percer d'autres où il en manque ».

Entre la guéritte (E) et la porte de l'Hôtellerie (I) toutes les maisons des particuliers ont des portes pour sortir sur le rempart, « lesquelles il faudroit faire condemner à cause qu'elles servent de décharges à leurs maisons, et que ces particuliers mettent leur fumier sur les murs de la ville, qui retenant l'eau des pluyes et l'empêchant d'avoir son cours libre, pourrit les murs et les gaste, ou du moins obliger ces particuliers de paver en droit soy chacun, au devant de leurs maisons, pour faciliter l'écoulement de l'eau ».

« A la porte de l'avancé de l'Hôtellerie », faire à neuf le pont-levis, sa bascule et sa grande porte de menuiserie ; « déblayer environ 30 toises cubes de terre du fossé, au-dessous du pont-dormant, qui est comblé, et faire à neuf ledit pont-dormant ;... chaperonner le parapet au-dessus de ladite porte, et l'exaucer d'environ 3 pieds de haut, réduits en 192 pieds de tour, et le percer de créneaux ».

« A la 2ème porte, il n'y a point de fossés au devant ; il est nécessaire d'en faire un, auquel on donnera 66 pieds de long, 32 pieds de large et 12 pieds de proffondeur ; le revêtir d'un mur de maçonnerie, à mortier de chaux et sable, le couper par un pont dormant, et pont-levy, porté sur des pilles de maçonnerie.., et observer une pente douce le long des murs, à gauche en entrant dans la ville, pour la descente de l'abreuvoir ».

« Les deux tours de ladite porte (I) sont couvertes d'ardoise, coupées en 4 étages par des planchers ; le dernier, au rez-de-chaussée, percé de créneaux, le tout en assés bon état, étant occupées à l'usage des prisons de la ville » [Note :  Le porte de l'Hôtellerie, dite aussi porte de Brest, tenait son premier nom de sa proximité avec l'ancien Hôtel-Dieu de la ville, qu'on nommait aussi l'Hôtellerie. Cette belle porte, la plus importante de l'enceinte, et qui était un remarquable spécimen d'architectures militaire du moyen âge, fut démolie en 1880 pour une cause de soi-disante utilité publique, comme gênant la circulation. Les pouvoirs publics d'alors sont responsables, devant la postérité, de cet acte de vandalisme inqualifiable].

« Refaire une portion de parapet joignant ladite tour, en 50 pieds de long et 6 pieds de haut, et le percer de créneaux... refaire pareillement le parevement extérieur du mur au-dessous qui est ruyné, en ladite longueur, 15 pieds de haut et 2 pieds d'espais... » ; rétablir ensuite, jusqu'à la tour St-Julien, le parapet, qui est tombé, en 240 pieds de long et 6 pieds de haut, et y observer des créneaux.

« La tour de St-Julien (K) est à ciel ouvert ; elle a esté autrefois couverte et servoit de magazin à poudre, mais le feu, y ayant pris, fit sauter les planchers et comble, et fractioner les murs [Note : Pendant la Ligue, la tour St-Julien servait de magasin à poudre, « mais à la réduction de la ville en l'obéisance du Roy, le capitaine La Planche, qui s'estoit réfugié dans cette tour, en sortant pour se retirer au chasteau, laissa un bout de mesche allumée qui mist le feu aux poudres, creva et entrouvrit la terre par divers endroicts jusques aux fondemens, et emporta la superficie et la couverture de telle violence, qu'il ne resta aucune ardoize, chevron ny autre pierre entière ». (Bibliothèque Nationale, ms, f r. 22-327, f. 50)] ; comme cette tour est bien placée, que ses murs ont 12 pieds d'espais, et qu'elle peut servir à la déffence de la place, j'estime qu'il faut commencer par remblayer de 4 pieds le vuide de cette tour, pour se pouvoir servir commodément des créneaux quy y sont ; revoûter les deux embrasures qui sont à la hauteur des consoles des machicolis, avec pierre de taille et mortier de chaux et sable ; démolir ce qui reste des corbeaux de pierre de taille, et faire le parapet à l'entour de 8 pieds de haut et 2 pieds d'espais, y observant les créneaux nécessaires ; faire un mur pour servir de garde corps à l'extrémité du dedans de ladite tour, pour empêcher qu'on ne tombe dans le vuide ; un escalier pour y monter du chemin des rondes ; boucher les fractions qui sont dans les murs de la tour, tant par le dedans que par le dehors, observant les liaisons nécessaires.

Au devant de ladite tour de St-Julien (K), où est un ravelin [Note : Ouvrage détaché de la place, construit en forme d'éperon, par le duc de Mercoeur], lequel n'a jamais esté finy, les faces qui restent encore sur pied, ont chacune 128 pieds de long et 16 de haut, revêtus de maçonnerie ; le surplus s'est ruiné par la suitte des tems ; les faces de cet ouvrage estoynt flanquées par les tours de l'Hôtelerie (I) et de Lesquen (L).

Faire le parapet de la courtine, en suitte, qui est éboulé en 226 pieds de long et 5 de haut, et y observer les créneaux nécessaires.

La tour de Lesquen (L) est à ciel ouvert, n'ayant jamais esté finie ; elle est percée d'embrasures, a 3 étages ; on peut se servir de ses flancs bas, en l'état qu'elle est, et du dessus ; l'espaisseur de ses murs estant suffisante pour l'usage de la mousquetterie, il faudroit seulement rétablir son parapet en 104 pieds de long et 3 de haut, y compris le chaperon ; vuider les terres qu'on a raportées sur ces murs pour en faire un jardin, et y faire une bonne porte de menuiserie, garnie de ses ferrures nécessaires ».

Entre cette tour et la suivante, refaire le haut du parapet de la courtine, sur 320 pieds de long et 4 pieds de haut, avec des créneaux, et le parement intérieur du gros mur, au-dessous, qui est éboulé, en 260 pieds de long et 4 de haut.

« La tour de la Rue-Neuve (M) [Note : Cette tour, aujourd'hui détruite, se trouvait à l'entrée de la rue de la Garaye actuelle] est bien voûtée, a 2 étages percés de créneaux et embrasures où l'on peut mettre du canon ; le dessus est remply et sert de jardin ; il est nécessaire de les déblayer et de refaire les joins dégradés, avec cyment, pour empêcher la transpiration des eaux, et de refaire à neuf le parapet, en 132 pieds de tour et 4 de haut, qu'on percera de créneaux, et les portes de menuiserie, avec leurs ferrures nécessaires.

Rempietter le mur de cette tour, à hauteur du chemin des rondes, du costé de la ville, en 40 pieds de long, 3 de haut, et 2 d'espais ;... rétablir le parapet de la courtine entre ladite tour (M), et celle en suitte, en 154 pieds de long, et 2 pieds de haut, boucher cinq regards, et les réduire en créneaux, et en ouvrir 6 autres, en égale distance ».

« La tour de l'Aloué (N) [Note : Tour de l'Alloué (ou tour Beaumanoir). L'alloué était le nom donné au second juge de la Cour royale de Dinan. Cette belle tour ainsi que les tours de Coëtquen et du Bignon (ou du Gouverneur), a conservé toute sa hauteur. On remarque encore, au bas de la courtine voisine, à l'ouest, le passage adventif casematé, avec ses meurtrières étroites, édifié par le duc de Mercoeur, de ce côté des remparts] est à ciel ouvert, mais fort belle et grande, et dont les murs ayant 20 pieds d'espais, peuvent servir de platteforme à 8 pièces de canon ; il y a présentement un jardin sur ces murs dont jouit le sr. aloué ; un bon parapet au pourtour, mais pas suffisant, percé d'embrasures. Il est nécessaire d'en avoir 4 dans l'intervalle des autres, puis rétablir tout le dessus dudit parapet, et les jouuées qui en ont besoin ; faire aussy tous les joints que les racines des arbres ont ruinés, et faire un pavé de pierre de taille posé sur cyment, sur lesdits murs, pour empêcher la transpiration des eaux ; remettre 12 pierres qui manquent à la galerie qui est en saillie, au-dedans de ladite tour, portée sur consoles, et qui communique dans 16 casemattes ou embrasures voûtées, 8 de chaque costé, et deux étages, l'un sur l'autre ; déblayer d'environ 3 pieds, les terres du dedans de ladite tour, pour se pouvoir servir du premier étage des casemates ou embrasures, au-dessus de celles devant dites ; faire les 3 portes de menuiserie, de bordage de chesne bien barrées, garnies de leurs penteures, gonds et ferrure nécessaire ».

Entre cette dernière tour et la porte St-Malo (0) refaire le parapet « dont la plus grande partie est tombée, en 330 pieds de long et 4 de haut réduits ; y observer les créneaux nécessaires, et refaire le parement intérieur du mur d'enceinte, au-dessous du parapet, qui est éboulé et ruiné, sur 230 pieds de long et 7 de haut. Faire de neuf le petit parapet au-dessus des tours de la porte St-Malo (0), en 66 pieds de tour et 6 de haut ; le percer de créneaux à l'ordinaire, et reffaire pareillement le mur de garde fol, par le dedans, qui est éboulé, en 18 pieds, et les mesmes 6 pieds de haut. Faire de neuf l'appenty qui couvre la machine qui sert à lever la herse de fer de ladite porte, et le couvrir d'ardoise, et faire de neuf les 2 roues, et l'arbre pour lever ladite herse, à la place de celles qui sont pourries, et par morceaux ; faire à neuf la porte de menuiserie, le pont-levy avec sa bascule, avec touttes les ferrures nécessaires ; jointoyer les faces des murs des 2 petittes tourelles ; ... faire de neuf le parapet de la porte de l'avancé, en 160 pieds de tour et 8 de haut réduits, y observant des créneaux à l'ordinaire ; déblayer le fossé, au-devant de ladite porte, en 56 pieds de long, 15 pieds de large, et 9 de haut ; faire de neuf la menuiserie de la porte qui est toutte rompue le pont-levy avec sa bascule... ».

Entre la porte St-Malo (0) et la tour du Bignon (P), refaire le haut du parapet qui est ruiné sur 208 pieds de long et 3 de haut.

« La tour du Bignon (P) est voûtée, a 2 étages percés de créneaux ; il y a aussi un jardin sur sa platteforme, qu'il faut supprimer ; son parapet est d'ancienne construction, percé de 6 espèces d'embrasures ; comme cette tour flanque 2 portes, celles de St-Malo (0) et du Gersüal (Q), j'estime qu'il y faut faire une platteforme de pierre de taille pour servir de lit au canon ; faire enfin les portes de menuiserie, avec les ferrures nécessaires. Reffaire le parement intérieur du mur de ladite tour du costé de la place, en 24 pieds de long et 4 de haut.

Entre ladite tour (P) et la porte du Gersüal (Q), la parapet sur le mur d'enceinte est abattu et ruiné en 240 pieds de long et 6 de haut, qu'il faut refaire à neuf, observant les créneaux nécessaires. Dans le mur, au-dessous du parapet, il y a plusieurs portions éboulées qui causeront la ruine entière, si on n'y remedie promptement, sçavoir : une de 50 pieds de long et 16 de haut, dans les parements intérieurs ; 2 autres portions aussi aux deux costés de la porte, aussy par le dedans, dont l'une sous le piédroit de l'arcade au-dessus de la porte pour laquelle rétablir, il faudra receinter ladite arcade, et étayer le jambage... Refaire le parapet sur la tour où est ladite porte du Gersüal [Note : La porte du Jerzual, assez singulièrement percée à la base d'une tour demi-circulaire, est la porte la plus remarquable des remparts subsistants. Sur sa face extérieure, on remarque encore l'emplacement où se trouvait un superbe bloc en granit, sculpté au XVIIème siècle, représentant les armes en alliance de France et Bretagne. Ces armes furent placées, en 1852, sur la façade de la mairie de Dinan], en 64 pieds de tour et 6 de haut..., paver le dessus de la voûte de ladite porte avec pierre de taille posée en cyment pour empêcher la transpiration des eaux qui percent la voûte et la gâtent. Faire à neuf les 2 roues de charpente et le treuil pour la machine servant au levement de la herse de fer, à la place de l'ancienne qui est par morceaux, et le rétablissement des marches de pierre qui montent sur le chemin des rondes, dont partie sont ruinées, et mettre 2 grandes pentures neuves et une ferrure à la porte de l'avancé [Note : Porte Saint-Sébastien, construite pendent la Ligue, devant la porte du Jerzual, et démolie en 1771 (Archives d'Ille-et-Vilaine, C 496)].

Depuis cette tour jusques à celle du Petit Rempart (R), reffaire le parapet en 326 pieds et 5 de haut, et le percer de créneaux. Cette tour (R) est voûtée, il faut en supprimer les jardins, y faire un parapet à l'entour percé de créneaux, et les joints de cyment sur la platteforme de la voûte... A la courtine, entre ladite tour et le corps de garde sur le mur devant St-Sauveur, refaire ce parapet en 296 pieds de long et 6 de haut ; depuis le corps de garde jusqu'à la tourelle, continuer la même réfection en 272 pieds de long, et les mesmes 6 pieds de haut, observant partout des créneaux à l'ordinaire.

La tourelle de Ste-Catherine est voûtée, a un étage percé de créneaux ; on a fait une latrine, au-dessus, qu'il faut supprimer ; y faire un parapet à l'entour, en 66 pieds de long, percé de créneaux, et paver le dessus de la voûte avec pierres plattes, posées en cyment.

A la courtine, à la suitte, est une brèche dans le mur, de la moitié de son épaisseur, ou environ, et par le dehors, en 27 pieds de long, 12 de haut, et 5 d'espais, qu'il faut reffaire de pareille construction qu'est le mur à la suitte. Refaire le parapet au dessus et à la suitte, en 27 pieds de long, 6 1/2 de haut, et 3 d'espais.

La tourelle du Bois-Haroüal (T) [Note : Tour du Bois-Harouard, détruite en 1781], est voûtée, a un étage seulement ; rétablir le parapet de cette tour, en 64 pieds de tour, et 3 de haut ; faire les joints du dessus de la voûte, avec chaux vive et cyment, et ceux des murs en parement, en toutte la hauteur et pourtour. Refaire le parapet, à la suitte, qui est éboulé et tombé jusqu'à la tour Longue, en 470 pieds de long et 6 de haut, y observant des créneaux.

Dans le mur d'enceinte au-dessus de ce parapet est une brèche par le dedans de 18 pieds de long, 15 pieds de haut et 4 d'espais qu'il faut rétablir comme le reste dudit mur.

La tour Longue (V) est creuse, et couverte d'ardoise ; elle est coupé en 2 par un plancher qui estoit en nature, il y a 2 ans, à ce qu'on m'a rapporté ; il en reste encore les poutres, touttes les planches ayant esté dérrobées ; le plancher rétably donneroit lieu de se servir des flancs de cette tour, mais tout le costé, depuis la porte de Gersüal, jusqu'à cette tour [Note : Plus exactement, jusqu'à la tour des Sillons], n'est guères insultable, à cause de la rivière, et de la hauteur des murs bâtis sur des rochers fort escarpés ; on peut cependant faire le plancher, les réparations de la couverture du comble, et boucher les fractions qui sont au pignon, attendu que cette tour est destinée pour un corps de garde [Note : Cette petite tour doit son nom à sa position très avancée sur un rocher saillant, et dominant ainsi que la tour des Sillons, les précipices de la vallée de la Rance. Elle servait uniquement de corps de garde pour surveiller la rivière].

Depuis la dite tour (V) jusqu'à celle des Sillons, refaire à neuf le parapet qui est tombé, en 60 pieds de long, et chaperoner le surplus.

La tour des Sillons (X) [Note : Nous savons, par le registre de la réformation du Domaine de Dinan (1683-1685), que des prisonniers de guerre furent enfermés dans la tour des Sillons, appelée vulgairement, à cette époque, tour du Père-Renaud, du nom d'un religieux de l'ordre de Saint-François, qui avait alors un jardin à fleurs, avec tonnelle, sur la plate-forme de la tour. Dans quelques actes, elle est encore désignée sous ce dernier nom, au XIXème siècle ; mais, à la fin du XVIIIème siècle, et sur le plan cadastral, elle est nominée tour Penthièvre. Elle n'a plus que deux étages, et fait partie de notre propriété de la Maison de la Tour, avec la courtine, vers l'est dont le chemin de ronde fut transformé en une agréable terrasse, lors de la création de la propriété], est très bien voûtée, a 3 étages percés de créneaux et embrasures, avec un parapet pour le haut ; il y a présentement un jardin dessus, qu'il faut raser, et y faire les mêmes réparations expliqués dans l'article concernant la tour de Coaquin (B).

Entre ladite tour et la porte St-Louis (I), refaire le parapet qui est ruiné en 64 pieds de long et 6 de haut, chaperoner le dessus de la continuation à la suitte, et rétablir pareillement le parement extérieur du mur d'enceinte, au-dessous, en 8 toises carrées, ou environ ».

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« Les ouvrages contenus cy dessus, montant à 37.418 l. 10 s. sont tous absolument nécessaires, si Sa Majesté veut faire mettre du canon sur les tours qui se trouvent avantageusement scituées à cet effet, et si elle veut mettre cette place en bon état ; si, au contraire, elle juge le canon inutile, et qu'elle veuille, d'ailleurs faire le plus de ménagement qui se pourra, se contentant des flancs des tours pour la mousqueterie, il suffira de déblayer les terres qui forment les jardins, et de faire de simples parapets où il en manque, qu'on percera de créneaux, et rétablir ceux qui en ont besoin, fesant soigneusement les joints dégradés et ruinés, avec bon cyment, pour empêcher la transpiration des eaux au travers des voûtes. On peut aussy surseoir le rétablissement des ouvrages du Donjon (D), article 12, et des portes et ponts de son entrée, 14 ; les articles 15, 17, 20 et 21, concernant le rétablissement des parapets, celuy, 23, concernant les ponts et portes de l'avancé de l'Hôtellerie, l'article 25, concernant les fossés au-devant de la deuzième porte ; se contenter de faire les ponts et portes, retrancher les parapets à la suitte de la tour St-Julien, 31 ; idem de ceux de l'article 33, 34, 39 et 40, les ponts et portes de l'avancé de St-Malo, article 43, les parapets sur les murs à la suitte, articles 50, 51, 55, 58, 63 et 64, lesquels retranchements montant à 27.594 l. 9 s. resteroit à faire fonds de 9.824 l. 1.s. A St-Malo, le 6 juillet 1693. GARENGEAU ».

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Après avoir lu attentivement cet important mémoire de l'ingénieur Garengeau, pour bien se rendre compte de l'état de nos fortifications, en 1693, il suffit d'examiner soigneusement le plan de l'enceinte de la ville et château de Dinan, et d'une partie de ses environs, joint au devis. Ce plan original donne de précieux détails non seulement sur les remparts mais aussi sur leurs abords, à cette époque. Remarquons, par exemple, certaines parties des fortifications aujourd'hui détruites : ouvrages avancés de trois portes de la ville ; défenses extérieures du château [Note : Voir le plan du château de Dinan, daté de St-Malo, le 2 mai 1711, et signé aussi par Garengeau (Archives d'Ille-et-Vilaine, C 492). En 1693, le donjon, comme nous venons de le voir, était sauf ses épaisses murailles, dans un état vraiment lamentable. On ne pouvait y pénétrer que par la petite porte, du côté Est, donnant sur la basse-cour, au niveau du fossé, et par une porte située du même côté, au deuxième étage, et communiquant avec la courtine voisine, dans laquelle se trouvait un escalier à vis permettant d'accéder à la cour supérieure. L'entrée actuelle du donjon, par la chapelle, fut ouverte par Garengeau, d'après un autre devis fait par lui, en date du 12 octobre 1703, pour réparer le donjon et la tour de Coëtquen, afin d'y loger les prisonniers de guerre de la marine (Archives d'Ille-et-Vilaine, C 492)] ; ouvrages détachés de la place, édifiés pendant la Ligue.

Enfin nous voyons encore, sur ce plan, depuis la porte de l'Hôtellerie, jusqu'à la porte Saint-Malo, la double enceinte composée d'une ligne de casemates, avec meurtrières, au bas de laquelle se trouvaient de larges et profonds fossés, inondés qu'accidentellement. Ce supplément de défenses avait été jugé indispensable dans cette partie nord et nord-ouest de l'enceinte qui ne comportait pas, comme partout ailleurs, de défenses naturelles.

Les nombreux endroits des remparts indiqués sur le mémoire de Garengeau comme étant en mauvais état, et à réparer, figurent en jaune sur le plan original (Archives d'Ille-et-Vilaine, C. 492).

Il semble que toutes les réparations et améliorations proposées dans son devis, par cet ingénieur distingué, furent entreprises peu de temps après, car un marché fut passé entre ce dernier et le sieur Vial, de la paroisse de Saint-Cast, pour l'exécution de ces travaux. Ceux-ci sont encore assez facilement reconnaissables au château, plus qu'ailleurs (R. Richelot).

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