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Maudez-René COZANNET

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Maudez-René Le Cozannet est né à Langoat le 8 décembre 1666 et décède à Quemperven (Convenant Blanc) le 25 juillet 1720. Il s'agit d'un prêtre remarqué par ses contemporains pour ses vertus de simplicité, effacement et générosité. 

 

Maudez-René Le Cozannet, le prêtre d’élite dont j’entreprends de raviver la sainte mémoire naquit à Langoat, dans l’ancien diocèse de Tréguier, le 8 décembre 1666, et fut baptisé le lendemain en l’église paroissiale.

Il était le troisième des cinq enfants issus du mariage d'Yvon Le Cozannet et de Françoise Bodiou.

Puisque Notre-seigneur nous assure que pas un cheveu ne tombe de notre tête sans la permission de notre Père Céleste, n’est-il pas permis de voir, dans le jour du 8 décembre qui vit naître Maudez Le Cozannet, une délicate attention de la divine Providence ? Ne peut-on pas y admirer un présage de la virginale pureté qui devait distinguer le serviteur de Dieu, et comme un gage de la tendre dévotion dont il devait être animé envers la très auguste Vierge Marie ?

La cérémonie de son baptême fut elle-même entourée d’un éclat inaccoutumé qui contraste singulièrement avec la vie humble et pauvre qu’il s’est toujours efforcé de mener. Il fut, en effet, tenu sur les fonts baptismaux par les membres de la famille peut-être la plus distinguée de l’aristocratique paroisse de Langoat, les châtelains du Launay [Note : Ceux-ci possédaient, à l’église paroissiale, le droit de chapelle et d’autres notables prééminences, que seuls les de Trogoff du Goëllic partageaient avec eux. Il y avait pourtant encore, à cette époque, une dizaine de familles nobles résidant sur le territoire de Langoat. Cette famille était issue des de Villéon de Boisfeillet, seigneurs du Launay-Mur, à Mur-de-Bretagne ; d’où, sans doute, le nom du manoir qu’ils bâtirent au milieu de leurs terres de Langoat. La seigneurie de Launay-Mur parait avoir été la plus importante du pays de Mur (Archives départementales. Fonds de Langoat)]. Il eut pour parrain « Escuyer Maudez François de la Villéon du Boisfeillet », fils aîné du seigneur du Launay-Meur en Langoat, et pour marraine la mère de ce dernier, dame Renée de Trolong, dame du Launay-Meur, de la Touche. Il reçut au baptême le nom de Maudez-René, formé des prénoms de son parrain et de sa marraine.

Le sacrement de la régénération lui fut administré par le recteur de la paroisse, 0llivier Fouëson, entouré des quatre prêtres qui exerçaient alors le saint ministère à Langoat, lesquels ont tous signé, au registre, l’acte de baptême de cet enfant de bénédiction. Pareille solennité était, comme en témoignent les registres de l’époque, tout à fait exceptionnelle. Il paraît donc assez vraisemblable que tout ceci fut le résultat d’une mystérieuse action de la divine Providence, annonçant l’avenir de cet enfant, et plus d’un peut-être, à ce spectacle, prononça intérieurement la parole qui fut répétée par la foule à la naissance de saint Jean-Baptiste : « Que pensez-vous que sera cet enfant » qu’on entoure, dès son apparition en ce monde, de semblables marques de respect ?

Les parents de Maudez-René appartenaient à l’une de ces familles foncièrement chrétiennes qui pouvaient remercier Dieu de leur avoir donné, avec une foi vive, ce que le sage de l'Ecriture demandait à Dieu pour lui-même, une honnête aisance qui met à l’abri des privations extrêmes, sans exposer aux abus qui découlent si facilement d’une trop grande abondance.

Le père, Yvon Le Cozannet, paraît originaire de Langoat, village de Kervôt [Note : Des papiers, qu’on peut voir aux Archives départementales, fonds de la paroisse de Langoat, parlent d’un convenant Le Cozannet, situé au village de Kervôt : était-ce le lieu d’origine de la famille des Cozannet ?].

La mère, Françoise Bodiou, était native de Hengoat, ou plus exactement de la trève de Pouldouran qui n’avait alors qu’un curé, ou vicaire résidant, soumis à l’autorité du recteur de Hengoat. La maison paternelle de cette dernière, était Le Gernévez, modeste habitation de ferme, située exactement à la limite des deux paroisses de Hengoat et de Pouldouran.

Maudez-René Le Cozannet chérissait particulièrement ce lieu où habitait, avec sa femme Mauricette Le Coail, un frère de sa mère, François Bodiou, Ces époux, n’ayant point d’enfants, reportèrent toute leur affection sur leurs neveux et nièces [Note : En dehors des Cozannet, ils n’avaient d’ailleurs qu’un neveu, Pierre Le Bescond, fils unique de Raoul Le Bescond, commerçant à La Roche-Derrien, et de Yvonne Bodiou, soeur de François Bodiou], et, les sentiments de haute piété dont ils étaient animés, ne nous permettent pas de douter qu’ils n’eussent une spéciale prédilection pour Maudez-René, surtout depuis qu’il avait nettement manifesté son intention de devenir prêtre.

Une inscription placée au haut d’une fenêtre nous fait savoir que François Bodiou restaura, ou même fit rebâtir en 1683, la demeure de ses ancêtres [Note : Cette maison a sans doute subi quelques transformations depuis le XVIIème siècle. La toiture aujourd’hui en ardoises, était certainement jadis en chaume ou en genêt, car seuls les manoirs, à l’époque dont nous parlons, étaient couverts en ardoises. Les murailles, toutefois, et les grosses poutres en chêne paraissent être restées telles quelles].

Nous croyons reconnaître aux environs de cette maison un intéressant souvenir de Maudez-René Le Cozannet. Il s’agit d’une croix en granit, d’un modèle unique dans toute la région, qu’on voit au bord du chemin, en face de l’entrée du Gernévez, et dont le socle porte distinctement écrit, avec la date 1684, les noms de François Bodiou et de Mauricette le Coail. Cette croix présente, même au point de vue historique, un intérêt très particulier. Elle est, en effet, dédiée au Sacré-Coeur de Jésus. Or, si l’on fait attention que ce monument est de 1684, c’est-à-dire, élevé du vivant même de Marguerite-Marie, et quelques années seulement après, les premières apparitions du Sacré-Coeur à cette sainte, on devra reconnaître que le diocèse de Tréguier fut des premiers à adopter la grande dévotion. De plus les parents de Dom Maudez nous apparaissent comme des précurseurs qui, à l’appel de la messagère de Jésus, entrèrent avec empressement dans ses désirs, et s’efforcèrent, jusque par un monument public, de faire partager aux autres les mêmes sentiments [Note : Nous croyons que c’est encore la dévotion au Sacré-Coeur dont ils étaient pénétrés, qui porta François Bodiou et Mauricette Le Coail, vraisemblablement sous l’inspiration de leur neveu prêtre, à faire à Pouldouran l’importante fondation d’une messe hebdomadaire, à dire tous les vendredis de l’année].

Cette croix est en même temps une preuve irrécusable de la pureté de la foi dans la famille Bodiou-Le Cozannet.

L’on sait, en effet, que la dévotion au Sacré-Coeur fut le remède providentiel et comme le contrepoison opposé par la divine Bonté au venin du Jansénisme qui s’efforçait, par ses erreurs, de fermer à la faiblesse humaine les sources de la divine miséricorde. Se faire l’apôtre du Sacré-Coeur, cette dévotion si bafouée par les Jansénistes, c’était donc, à cette époque surtout, se donner à soi-même un certificat bien authentique de foi intègre et de particulière intelli­gence des choses divines.

Et d’où venait donc à François Bodiou et à son épouse l’idée d’un pareil monument ?

En 1684 Maudez-René avait dix-huit ans. Il poursuivait alors ses études à Tréguier, où il dût souvent entendre parler des apparitions du Sacré-Coeur qui commençaient à occuper les âmes pieuses. Peut-être aussi rencontra-t-il, à l’occasion d’une retraite, quelque Père Eudiste qui, à l’exemple du Bienheureux Eudes, ne manqua pas de pousser ses auditeurs à la double dévotion au Sacré-Coeur de Jésus et au saint Coeur de Marie. Selon toute vraisemblance, ce modèle inédit de croix, qu’un paysan sans instruction pouvait difficilement concevoir, est donc dû principalement à l’inspiration de Maudez Le Cozannet.

Ce monument, dont on voit ici le dessin, est une simple croix en granit, sans Christ, mais bien différente des croix XVIIIème siècle, sans Christ également, que nos paysans appellent parfois des croix protestantes.

D’un côté est représenté le Sacré-Coeur entouré d’une couronne d’épines et portant encore visible la trace du coup de lance.

Sur le revers de la croix, est un autre coeur transpercé de trois lances, dont les pointes ressortent en-dessous. Le monogramme du Christ, dont ce dernier coeur est surmonté semble indiquer qu’il s’agit encore du Coeur de Jésus. Rien n’interdit pourtant d’y voir le Coeur de Marie : en ce cas, le double emblème, Coeur de Marie transpercé et monogramme du Christ, rappellerait la Vierge douloureuse, avec son divin Fils sur les genoux, telle qu’on avait coutume de la représenter sur les Calvaires antiques dont la Bretagne est encore toute pleine.

A quelques centaines de pas du Gernévez se trouve le manoir de Trolong souvent appelé dans les vieux registres Trolong-Kermouster, sans doute parce qu’il fut originairement bâti sur l’emplacement de l’un de ces monastères qui fourmillaient, en quelque sorte, dans la Bretagne des premiers siècles. Cette antique demeure mérite encore une spéciale mention. C’est, en effet, de là qu’est sortie toute la branche aînée des Cozannet. Lorsque, dans les dernières années du XVIIème siècle, les de Trolong, comme la plupart des membres de la noblesse à cette époque, songèrent à déserter la campagne, ils cherchèrent une famille aisée, bonne et chrétienne, qui pût leur inspirer toute confiance, afin de lui laisser, à titre de convenant [Note : Le convenant ou domaine congéable était, en Bretagne, une forme de contrat suivant laquelle le propriétaire pouvait congédier le fermier moyennant le remboursement des améliorations que celui-ci était libre de faire à volonté], leur manoir avec toutes ses terres et dépendances. Leurs vues se portèrent immédiatement sur les Bodiou leurs voisins. François Bodiou, époux de Mauricette Le Coail, mourut, le 21 mars 1702, non au Gernévez, mais « en la méthérie noble de Trolong ». C’est à la suite de cette mort que le frère aîné de Maudez-René, Pierre Le Cozannet, marié depuis longtemps et établi à Kervôt, en Langoat, auprès de la maison paternelle, fut appelé à occuper cette situation avantageuse de Trolong. De lui sont issus tous les Cozannet de Hengoat, de Ploëzal, de Trédarzec, de Pleudaniel, de Penvénan, de Plouguernével, etc. [Note : Cette branche est la seule qui ait conservé le nom des Cozannet. Mais très nombreuses sont par ailleurs les familles du pays qui sont, par les femmes, issues de la famille de notre saint prêtre].

Yvon Le Cozannet, père de notre saint prêtre, resta lui-même quelque temps à Pouldouran après son mariage : c’est là que naquit vers 1661 son fils aîné Pierre. Il vint ensuite s’établir définitivement à Kervôt où virent le jour ses quatre derniers enfants : Yves, le cadet, en 1664 ; Maudez-René, en 1666 ; Yvon, en 1669 [Note : Ce dernier mourut jeune] ; enfin, Isabeau ou Elisabeth en 1675.

Pierre, Yves et Isabeau se marièrent et ont laissé une postérité nombreuse dont les rejetons peuplent encore aujourd’hui nombre de paroisses du pays trécorrois.

Le village de Kervôt est situé dans un endroit détourné, à quelques centaines de mètres de l’ancien manoir de Lézéven et de la chapelle de Saint-Trémeur, à droite de la grand'route qui va de La Roche-Derrien à Comfort, et presque à égale distance, (environ trois kilomètres), de Langoat, de La Roche et de Quemperven. Le village a été transformé, et la plupart des maisons ont été rebâties ou détruites, depuis l’époque de Dom Maudez, de sorte qu’il est désormais assez difficile de fixer la position exacte de l’habitation paternelle du saint prêtre.

Nous savons que le champ appelé Parc-ar-Skalier, près du ruisseau « Goaz-an-Gac », appartenait à la famille, et même faisait partie de la part d’héritage échue à Dom Maudez lui-même. Nous serions donc portés à croire que la demeure de Yvon Le Cozannet et de Françoise Bodiou était située aux environs de la ferme dite « Ty-Glas » dont dépend actuellement Parc-ar-Skalier, et probablement sur l’emplacement même de cette ferme [Note : Il est probable également que deux autres convenants tenus par les Cozannet à Kervôt, étaient situés sur l’emplacement des maisons où habitent vers 1924 les Buzullier et les héritiers de François Roudot. En effet des Buzullier et des Roudot étaient alliés à la famille, et possédaient des biens à Kervôt. Pendant tout le dix-huitième siècle, les Cozannet, ou leurs descendants, ont tenu trois, peut-être quatre convenants différents, à Kervôt même ou dans les environs. On peut se rendre compte de ce fait en consultant les papiers de famille, et les anciens registres. Dans ces derniers, à propos des Baptêmes des enfants, il est rappelé le plus souvent en quels villages habitaient les parents].

Une opinion, qui ne paraît pas dénuée de fondements, prétend que l’aspect des lieux où s’est écoulée l’enfance et la première jeunesse, exerce une action mystérieuse sur le tempérament et les facultés de l’enfant ; toujours est-il que le village natal de Dom Maudez cadrait admirablement avec les dispositions de son âme mystique, toute tournée verts les austérités de la pénitence et vers la contemplation des choses célestes.

Au centre du village une croix en granit fort ancienne, au socle décoré de lettres archaïques, semblables à des hiéroglyphes, représentait assez bien l’âme de ces paysans Bretons, où les enseignements de la foi, gravés en traits mystérieux et indélébiles, s’épanouissaient en une vie chrétienne aussi simple et aussi indestructible que le granit de leurs calvaires. Tout autour, des chemins creux ferment l’horizon au regard, hormis du côté du ciel : l’âme y recherche, comme tout naturellement, la contemplation du ciel visible, figure de celui qui doit, après une existence laborieuse, mais non dépourvue de charme, récompenser magnifiquement les efforts d’une vie empreinte du plus pur christianisme. Cependant au loin quelques clochers, disparaissant à demi dans le gris du ciel, rappelaient à ces âmes ce qui faisait ici-bas leur principale force et leur plus douce consolation, à savoir la sainte Eglise de Dieu, la sainte Eglise leur mère qui, du berceau à la tombe, veillait attentivement sur eux, et leur tenait continuellement ouvertes les sources de la lumière, de la grâce et du pardon.

C’est en cette paisible solitude que la divine Providence fit naître et grandir le vertueux enfant dont nous retraçons l’existence.

Essayons de découvrir au moins quelque chose de cet intérieur de famille où vécut Maudez-René Le Cozannet. Nous reposerons ainsi nos regards sur une belle vision du passé qu’il ne tient qu’à nous, par un christianisme plus intense, de reconstituer dans le présent.

Si le luxe seul procurait la félicité, certes il ne faudrait point la chercher en cette habitation des Cozannet qui, aujourd’hui, paraîtrait à peine adaptée aux goûts des plus pauvres. Et pourtant, l’air de paix et de bonheur peint sur toutes les figures vous avertit, dès votre entrée, que tous ici sont heureux, aussi heureux, semble-t-il, qu’on peut l’être en cette vallée de larmes.

La maison extérieurement ressemble à toutes les autres du village ou même de la contrée : un toit en chaume ou en genêt [Note : Le pays abondait en genêt, et les papiers de l’époque nous font connaître que beaucoup de maisons, même relativement riches, se contentaient alors d’une chaude couverture de genêt, qui permettait de réserver pour la litière et le fumier, la paille dont on n’était jamais assez abondamment pourvu] ; sur la façade, une porte en arceau, et une ou deux fenêtres étroites éclairant le rez-de-chaussée, qui constitue à lui seul tout l’espace habitable de la maison. Sous le toit, un grenier à blé, avec plancher en torchis, éclairé par quelques lucarnes ménagées sur le devant de l’habitation ; autour de la maison, et contiguës à elle, quelques granges, des écuries, des étables, et au centre du tout une basse-cour ; plus loin enfin une vaste aire, où, durant les mois d’août et de septembre, vous entendriez résonner la musique des fléaux S’abattant en cadence sur le blé dont on extrait patiemment le grain, en attendant le jour appelé « ar wastel » (le gâteau), à cause du festin de réjouissance qui se donne à la clôture du battage, et dont la pièce la plus succulente est un immense gâteau cuit au four banal, lequel, trempé dans le cidre ou l'hydromel, mettra en liesse les petits et les grands.

Après ce coup d’oeil sur l’extérieur de l’habitation, entrons maintenant dans la maison. Vous n’aurez pas la peine de frapper, car la maison est constamment grande ouverte, été et hiver, depuis le lever du jour jusqu’au coucher du soleil. On n’y a guère le souci des courants d’air, qui n’impressionnent même pas légèrement les robustes tempéraments des habitants de cette patriarcale demeure. Cette porte ouverte symbolise d’ailleurs assez bien le coeur des braves gens qui habitent ici, toujours si accueillants pour les pauvres et les visiteurs.

La maîtresse vous reçoit avec un gracieux sourire et vous prie de vous asseoir auprès du vaste coffre dont le dessus, bien propre et bien lavé, sert de table à manger, tandis que l’intérieur aménagé en forme de lit clos, offre aux petits enfants une chaude couchette pour la nuit. Immédiatement, elle donne l’ordre de vous servir du cidre : car vous êtes ici dans une maison riche, où le vin est encore à peu près inconnu, mais où il y a toujours du bon cidre, qu’on boit les jours de fêtes dans des écuelles, mais qu’on sert aux étrangers dans des verres, l’un des objets rares qui distinguent à cette époque les ménages aisés. Ne craignez pas d’accepter : vous feriez, en refusant, presque injure à la maîtresse. Et maintenant, tout en causant, regardez autour de vous. Au-dessus de votre tête d’immenses poutres en chêne, noircies par le temps et la fumée, auxquelles sont suspendues une certaine quantité de viande salée et séchée, et deux formidables pièces de lard salé, grande ressource de la ménagère les jours de semaine, où, à la place de la bouillie d’avoine, il est d’usage de servir à la maisonnée un savoureux régal de pommes de terre et de viandes assorties [Note : Des recherches plus approfondies m’ont convaincu que ce bien-être relatif n’existait, à l’époque dont il s’agit, qu’en un petit nombre de familles paysannes. Dom Morice, dans son Histoire Générale de Bretagne (tome XIII, p. 60), rapporte qu’en 1689 le Comte La Magnane, Ligueur, fit du côté de Quimper, parmi les paysans « un butin inestimable en meubles, en vivres et en vaisselle d’argent ». — Le pays trécorrois, tout aussi riche, fut également pillé et ruiné par les guerres de la Ligue. L’aisance commençait à revenir, quand les guerres de Louis XIV firent de nouveau renaître la misère dans les campagnes. — Une déposition d’un témoin synodal de Trébeurden, 1718, est pour nous une révélation de l’état d’indigence de la plupart des gens de la campagne, même à cette époque. Ce témoin dépose qu’un mauvais sujet nommé Le Crenn « interrompit un dimanche le sr. Curé preschant en luy disant que, s’il ne finissait pas, tous ses auditeurs iront manger leurs bouillies ». Donc, au moins beaucoup de familles, même le dimanche, mangeaient à midi de la bouillie. Tout le monde, dans la région trécorroise, sait que le repas de bouillie excluait la viande, ce qui montre que la plupart, au temps dont nous parlons, n’en mangeaient guère].

A côté du feu, un lit clos à un seul étage, avec un marchepied qui sert de banc pour se chauffer, « ar bank tossel » en breton ; à l’autre bout de l’âtre un second banc, à dossier et accoudoir, où l’on vient s’asseoir pour entendre les contes dont on égaie très agréablement les longues veillées d’hiver ; puis, tout autour de la maison, serrés les uns contre les autres, et montant du sol, qui forme le plancher, jusqu’aux poutres, une suite de lits clos à plusieurs étages, et d’armoires à quatre battants, en vieux chêne superbement sculpté. Les lits-clos sont ceux des femmes et des enfants : les garçons de ferme, eux, logent à l’écurie, ou dans un grenier, d’où ils peuvent, même au milieu de la nuit, fournir aux chevaux le foin qui leur est nécessaire.

Dans un coin, vous apercevez plusieurs rouets : les grosses quenouilles de lin dont ils sont flanqués vous avertissent assez que ces instruments ne chôment guère. En effet, l’industrie du lin et du fil est une des principales du pays. La toile ou le berlinge, que fabriquent les nombreux tisserands de la contrée, se vend aux foires de Tréguier, et sert à faire, pour les paysans eux-mêmes, de solides vêtements, qui ne manquent pas d’une certaine élégance, quand ils sont portés par les vigoureux gars et les gracieuses jeunes filles du pays.

Ce qui fait le principal charme de ce milieu patriarcal, c’est l’ordre qui y règne. Le père et la mère sont comme la tête et le coeur de la famille. Le père lui, c’est l’autorité respectée, vénérée, s’exerçant avec force et suavité, et faisant régner autour d’elle la paix et l’ordre. Personne d’ailleurs ne peut guère songer à se plaindre : le maître, même riche, vit comme ses domestiques. Les calculs dictés par l’égoïsme et l’avarice sordide n’interviennent point dans son gouvernement. L’on vit au jour le jour, et quand, toutes les dépenses payées, il reste un peu d’argent, on le met de côté jusqu’au jour où une bonne occasion permettra l’acquisition de quelque champ ou même de quelque nouveau convenant.

Quant à la mère, elle est bien le coeur de la famille. Comme le coeur, elle se livre à un travail fécond et continuel, accompli, pour le bonheur des siens, dans une entière obscurité. Ses nombreux enfants sont au paradis quand ils sont auprès d’elle. Elle est, en effet, pour tous, si douce, si aimante, que chacun d’entre eux peut se croire, de sa part, l’objet d’un amour de prédilection.

Du reste, cette autorité du père, et cette douce affection de la mère, sont d’autant plus vraies et solides qu’elles sont entièrement fondées sur les profondes convictions religieuses dont sont pénétrées toutes ces âmes foncièrement chrétiennes. Tout, dans ces familles, respirait la foi et le respect des choses saintes : et le crucifix et les nombreuses images pieuses qui ornaient les murs ; et l’attention des parents à éloigner de la maison tout blasphème, tout mauvais exemple ; et leur application à instruire de bonne heure leurs enfants de leurs devoirs religieux ; et leur scrupuleuse exactitude à faire matin et soir en commun les prières, accompagnées d’ordinaire, le soir, de quelque lecture pieuse ; et leur fidélité en quelque sorte sacrée à assister tous les dimanches et jours de fêtes, même non chômées, non seulement à la grand'messe, mais encore à vêpres ; et leur assiduité à aller s’agenouiller sur les tombes de leurs morts chaque fois que les offices les appelaient au bourg.

Dans ce milieu d’une austérité tempérée par la plus douce affection, et tout pénétré en quelque sorte d’une atmosphère de foi, l’âme de notre pieux enfant se porta, dès les premières années, à la vertu, semblable à cet arbre dont parle la sainte Ecriture, lequel planté au bord d’un courant ne tarde pas à révéler, par ses fruits abondants, l’excellence du terrain où plongent ses racines.

Le Père Madez-René Le Cozannet fait ses études au collège, puis au grand séminaire de Tréguier. L’abbé Maurice Le Gac, de Quemperven, devait, à plus d’un titre, être l’ami de Monsieur Le Cozannet : il avait été son condisciple au collège de Tréguier, il était entré au grand Séminaire en même temps que lui ; de plus, il était son plus proche voisin, animé comme lui d’une remarquable piété. Or ce jeune homme fut ordonné prêtre deux ans avant son compatriote et ami, à Noël 1691, à l’âge de 24 ans, Maudez-René avait 27 ans et 6 mois au moment de son ordination sacerdotale.

Il est ordonné prêtre à Tréguier en mai 1693 et célèbre sa première messe à Langoat quelques jours plus tard. Il exerce son ministère à Langoat (1693-1698), Lanmérin (1699-1701), Cavan-Caouënnec (1701-1708), Gurunhuel (1709-1711) et Quemperven (1712-1720)

Dom Maudez s'absentait au temps du carême et souvent pendant le reste de l'année pour des prédications, des retraites ou des missions dans d'autres paroisses du Trégor et de la Cornouaille. Ceci explique qu'il était vicaire dans les paroisses où il a exercé et jamais recteur afin de rester disponible.

Dans son testament il demandait à être enterré au cimetière de Quemperven près de la croix. La croix dont il s'agit est celle qu'on peut voir actuellement à Pen ar Roc'ho

Le jour de l'inhumation, malgré la volonté du défunt, la famille, soutenue sans doute par l'opinion de ses compatriotes pris des dispositions pour ramener la dépouille mortelle dans sa paroisse natale. La tradition rapporte que le cercueil fut mis sur une charrette, et qu'à la frontière de Langoat (ty devet) le cheval refusa de poursuivre son chemin contraignant ainsi la famille à renoncer à son projet.

Dès sa mort, et pendant environ 150 ans, sa tombe fut visitée et les offrandes des pèlerins ont beaucoup contribué à l'entretien de l'église. De nombreuses guérisons furent attribuées à son intercession. 47 furent consignées par M. Yves Le Coz (notaire) dans l'intervalle 1730-1735, 14 entre 1803 et 1805. Les guérisons concernent des pèlerins venant de Loguivy-Plougras, Locquirec, Lanmodez, Plouguiel, Tramain, Langonnet, Plouaret, ... Les quempervenois l'appelaient : " Ar zant " (Le saint).

Le samedi 23 mai 1914, en présence de Monsieur le Pennec vicaire général délégué de Monseigneur Morelle évêque de Saint-Brieuc et Tréguier, Monsieur René-François Chapelle, recteur de Quemperven, Monsieur Pierre-Marie Savidan, maire de Quemperven, le père François-Marie Henry, mariste, quelques prêtres et de nombreux fidèles, il a été procédé à l'inhumation des restes de Dom Maudez - René Le Cozannet, afin de conserver les reliques. Celles-ci furent déposées dans une boîte vitrée (en bois de châtaignier). Cette boîte est actuellement conservée à l'église paroissiale Saint-Hervé (extrait de l'ouvrage de F. M. Henry). 

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