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LE CHATEAU ET LES FORTIFICATIONS DE LA VILLE DE CLISSON

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Historique.

C'est par une belle journée d'été que la ville de Clisson doit être vue. Le visiteur prendra alors plaisir à faire revivre dans sa pensée les temps anciens et les faits les plus arides de notre histoire lui suggéreront des scènes précises et poétiques.

Clisson, cette petite localité pittoresque de la Loire-Inférieure, a son étymologie vraisemblable dans le mot Clisse (treillis de branches) qui aurait désigné une fortification primitive entourée de buissons entrelacés.

Anciennement compris dans le pays des Pictones, c'est-à-dire dans l'Aquitania Secunda, la région clissonnaise fut unie à la Bretagne en 850. L'origine féodale de la ville semble probable.

Cependant, situé au confluent de la Sèvre et de la Moine, le coteau qui domine ces rivières constitua de tous temps un point stratégique et il est possible que le château, tel que nous l'imaginons d'après ses ruines, ait remplacé une tour gallo-romaine. Quoi qu'il en fut, les premiers seigneurs que mentionne l'Histoire sont Gaudin et Gui de « Clichon » vers l'an 1040. L'origine réelle de Clisson et de ses seigneurs nous est donc inconnue.

Toutefois, cependant, on peut s'imaginer ce que fut le château au XIème siècle. Il consistait vraisemblablement en quelques tours de bois au sommet du coteau et dépendait sans doute d'une paroisse voisine : celle de Gorges. Dans la dite paroisse qui comprenait encore, en 1933, une partie de Clisson, on peut voir, en effet, aujourd'hui les débris d'une demeure féodale très ancienne : la Bâtardière.

Quelles qu'en aient été les origines, il faut arriver à l'année 1217 pour trouver des documents relatifs au château. Ces documents sont dus à Guillaume de Clisson, dit le Jeune, qui combattit avec son père à la bataille de Bouvines en 1214.

En effet, au début du XIIIème siècle, Guillaume fit construire un château neuf et un acte en faisant foi existe encore dans les archives. Les seigneurs de Clisson furent peu nombreux Nous avons déjà parlé de Guillaume le Jeune et de son père dit « le Vieux ». Au XIVème siècle, le château appartenait à Olivier IV (par sa femme, seigneur de Belleville et de Chateaumur). Ce seigneur, dont le fils devait avoir une renommée européenne, passa sa vie à batailler. Sous sa direction, le château de Clisson fut remanié et le donjon édifié. Cependant, accusé d'entente avec les Anglais et de trahison, Olivier IV fut appelé sournoisement à Paris et décapité de façon arbitraire. Cet événement eut une importance capitale pour l'histoire de Clisson.

Dès qu'elle apprit la mort de son mari, Jeanne de Belleville entra en guerre contre la France. Elle vendit ses bijoux, arma une troupe d'hommes résolus et, accompagnée de ses tout jeunes enfants, elle parcourut les campagnes, entrant par surprise dans les châteaux, massacrant les garnisons, et, finalement, se réfugia sur mer où elle combattit avec une énergie qui la rendit célèbre. Enfin, sa vengeance satisfaite, cette femme audacieuse et cruelle gagna l'Angleterre, suivie du jeune Olivier, le futur connétable, et l'on éprouve une certaine surprise à constater que l'un des plus grands capitaines de France fut élevé parmi ceux qu'il devait combattre avec tant d'acharnement [Note : Nous croyons devoir rappeler que les de Montfort aspiraient au duché de Bretagne ainsi que les de Blois. Ces premiers étaient soutenus par l'Angleterre et les seconds par le roi de France].

En Angleterre, Olivier fit la connaissance du jeune Jean IV qu'il devait aider plus tard à monter sur le trône de Bretagne.

Pendant ce temps que devenait Clisson ?

Confisqué par le roi de France, il ne tarda vraisemblablement pas à passer entre les mains des Anglais. Le traité de Brétigny (8 mai 1360) rend en effet à Olivier les terres et places de son héritage, mais il n'est pas question, alors, du château de Clisson. Il est donc permis de supposer que la région resta un assez long temps sous le joug de l'étranger. Plus tard, ayant passé au service de la France, Olivier rentra en possession de son château, mais on ne possède aucun document précis à ce sujet. Là encore on en est réduit à échafauder des hypothèses et les véritables historiens avouent eux-mêmes leur ignorance.

Fait curieux : pendant toute la vie du connétable, l'histoire de Clisson paraît banale ; il semble que le grand capitaine ne se soit pas beaucoup intéressé à la résidence de ses ancêtres. Comme le fait remarquer judicieusement M. de Berthou, Josselin et Champtoceau l'attirèrent davantage. Il faut noter, cependant, la construction des murailles de la ville qui (à l'exception de celles du Sud) fut effectuée pendant sa vie et d'après ses ordres. Quoi qu'il en soit, en présence des ruines du vieux château, le visiteur peut évoquer l'image d'Olivier V, grand homme de guerre, connétable de France en 1380, ami de Du Guesclin, qu'il combattit d'ailleurs au cours de sa vie mouvementée et fantasque, et penser que ses premières années se déroulèrent, sans doute, dans la petite enceinte qui domine la rivière.

A la mort du Connétable, le château devint la propriété de sa fille, Marguerite, qui, par sa félonie, devait entraîner la chute de sa maison. Cette châtelaine astucieuse, qui avait toujours manifesté contre le duc de Bretagne une antipathie calculée, réussit, en effet, à attirer son suzerain dans un guet-apens et le fit prisonnier. Mais, délivré bientôt par le zèle de ses fidèles sujets, Jean V confisqua les biens de Marguerite et vint mettre le siège devant Clisson. Le vieux château ne résista guère et dut se rendre. Certains auteurs prétendent même que le duc négocia avec la garnison. C'est à cette époque que la fière famille des seigneurs de Clisson, dont la devise « pour ce qui me plaist » était célèbre dans l'Europe entière, fut dispersée et que leur demeure féodale devint la propriété des riches ducs de Bretagne.

***

Ce fut d'abord le frère de Jean V, Richard, qui en fut le possesseur, le prince ayant voulu récompenser, par ce fief, son fidèle compagnon de captivité. A sa mort, le château se trouva inféodé au duché de Bretagne et, ici, commence une période étonnante dans l'histoire de Clisson.

Le nouveau seigneur du château, François II, grand constructeur de forteresses, fit bâtir, autour de l'ancien domaine du Connétable, une enceinte très fortifiée et, dans cette splendide résidence, les fêtes les plus somptueuses succèdent à d'autres fêtes.

« C'est, dit un auteur, un véritable palais de féeries. Tout ce que la France renferme de plus élégant accourt dans ces murs. Il n'y a pas de cour plus recherchée que celle qui vient prendre ici ses esbattements ». Pas une heure n'est abandonnée à l'ennui, au désœuvrement ».

Clisson devient, en effet, la résidence favorite du duc de Bretagne, l'endroit où il oublie les affaires d'Etat et les combats au milieu des plaisirs. Tant est grand son amour pour Clisson qu'il tient à y célébrer son mariage avec la belle Marguerite de Foix en 1471.

Puis les années passent. La mort a terrassé le riche duc de Bretagne qui a donné sa demeure de prédilection à son fils naturel, le bâtard d'Avaugour. Cependant, la guerre avait de nouveau déchiré la région. En effet, d'Avaugour, homme d'intrigues, a toujours favorisé les Français contre la Bretagne ; à la mort de son père, il passe nettement au service de la France.

Par bonheur, le mariage de la duchesse Anne avec Charles VIII amène enfin une paix durable. Le 4 décembre 1534, un arrêt du Parlement de Paris maintenait François II, baron d'Avaugour, dans la chatellenie de Clisson. Ainsi, pendant de longues années, le château appartiendra aux bâtards de Bretagne et une barre, en signe d'illégitimité, chargera les armes des seigneurs de notre ville.

Durant les guerres de religion qui déchirent la France, le château va jouer un rôle de quelque importance. Le baron, Charles d'Avaugour, est alors du parti des Ligueurs et il résiste aux calvinistes de Montaigu qui tentent de s'emparer du château.

Le 18 septembre 1588, les calvinistes sont repoussés après une tentative de siège assez bénigne, mais la contrée reste dans un état d'alertes perpétuelles. Quelques jours plus tard, le roi de Navarre, le futur Henri IV, venant de Montaigu, mit lui-même le siège devant Clisson ; mais il trouva la place beaucoup plus forte qu'il ne l'avait pensé et, changeant d'avis, il alla livrer bataille vers Machecoul.

Survint ensuite l'assassinat du duc de Guise qui opposa nettement le roi contre la Sainte Ligue. A ce moment, d'Avaugour prit le parti du roi et Clisson restera, plus tard, fidèle à Henri IV comme il l'avait été à Henri III. Entre 1592 et 1596, des bastions furent construits au château et ces fortifications fournissent la preuve de l'activité de d'Avaugour contre les Ligueurs. Quand la guerre religieuse s'éteignit, la contrée reprit son calme pour quelque temps.

Bientôt, en effet, des combats assez bénins recommencèrent sous Louis XIII. Mais ils n'eurent pas de conséquences bien graves. Il en fut de même sous Mazarin où les troubles de la Fronde contribuèrent, seulement, à faire prendre à la région nantaise « quelques mesures de précaution ».

Enfin, la période des guerres semblait terminée et l'on peut dire que Clisson perdait de jour en jour sa valeur militaire. Mais, un siècle plus tard, une autre guerre plus effroyable que toutes les autres devait encore déchirer la contrée et laisser à tout jamais dans la mémoire des hommes une impression d'horreur. En 1793, la région clissonnaise devenait un des théâtres les plus tragiques de la Révolution.

***

En 1789, Clisson comprenait 2.400 habitants répartis dans cinq paroisses. Ces paroisses s'appelaient : Notre-Dame, la Trinité, Saint-Jacques, Saint-Gilles et la Madeleine. Le château, propriété des de Rohan par héritage, était « afféagé » à quelque famille qui en habitait les logis seigneuriaux.

Notons, ici, que les meubles du château avaient été vendus vers 1750 et dispersés dans la région. Les archives étaient déjà, en grande partie, détruites.

Ce fut le 18 mai 1793 que le sang commença à couler à Clisson. Un détachement de Bleus entra dans la ville : les soldats tuèrent quelques personnes signalées comme royalistes, parmi lesquelles une certaine Mme de Goyon et trois autres femmes. Ils brûlèrent aussi quelques maisons et, en particulier, celle du Minage, près du château ; puis ils quittèrent la région.

En septembre 1793, Kléber et Canclaux, ayant chassé les royalistes de la plupart des villes voisines, vinrent à Clisson. Ils y entrèrent sans combat et installèrent leur quartier général au château. Les hommes campèrent près de Toutes-joies sur la route actuelle de Nantes à Poitiers.

Le 19 septembre eut lieu le grand choc de Torfou et Kléber, battu, se replia vers la place de Clisson. Forcés d'abandonner la ville, le 22 septembre, les Mayençais mirent le feu au château. De l'avis de la plupart des historiens, Kléber ne fut pour rien dans ce vandalisme qui constitue, malheureusement, un des actes habituels des guerres de tous les temps. Depuis cette époque, écrit Lemot, et jusqu'à la fin de la Révolution, les troupes des deux partis qui passèrent à Clisson brûlèrent quelques maisons ; aussi, à l'exception des Halles servant à abriter les hommes de troupes, la ville ne fut-elle plus bientôt qu'un monceau de ruines.

Enfin, en 1794, une guerre terrible fut déclarée où des actes de sauvagerie furent commis, de part et d'autre, avec un sang froid épouvantable.

On cite, en particulier, parmi les terroristes un nommé Cordelier, ami de Carrier, qui, à la tête d'une colonne infernale, massacrait tout sur son passage. Le château connut alors des scènes d'épouvante dont le souvenir reste attaché à la région. Après la Révolution, le silence et la mort régnèrent sur les ruines de Clisson et la bourgade ne fut plus que le domaine des chiens sauvages et des loups qui venaient en bandes se disputer les restes des cadavres mal ensevelis sous les décombres.

Pendant deux ans, dit-on, la contrée resta déserte et ce fut un diplomate de l'Empire, l'ambassadeur Cacault, qui, aidé, plus tard, par son ami Le mot, releva les ruines et refit Clisson tel qu'on le voit aujourd'hui.

Devenu propriété d'Etat, le château fut acheté par le sculpteur Lemot qui sauva ainsi d'une destruction certaine ces ruines si pittoresques.

Le château, monument historique depuis quelques années, appartient encore vers 1936 à la famille Lemot.

Aussi, depuis lors, les Clissonnais ont-ils toujours associé dans leur souvenir les noms de Cacault et Lemot, ces deux hommes généreux qui confondirent leur activité dans une même œuvre d'art et de poésie.

 

Le Château de Clisson.

Le château de Clisson (Bretagne).

PORTE D'ENTRÉE.

Située en Loire-Inférieure à moins d'un kilomètre de la Vendée, la petite ville de Clisson comprend, actuellement, 2.700 habitants. Elle a été reconstruite dans le style italien par les soins de Cacault et de Lemot. Nous n'avons pas ici à forcer l'admiration des touristes qui viendront contempler les rives de la Sèvre et de la Moine, mais nous croyons devoir cependant leur rappeler que Clisson a souvent été comparé à Tivoli et que les peintres de l'Europe entière se sont plu à reproduire l'aspect célèbre du château.

Arrêtons-nous un instant devant ces ruines si pittoresques ; on a peine à se figurer que ces vestiges, en partie cachés par une végétation robuste, dressant vers le ciel leurs tours découvertes et leurs cheminées délabrées, ont servi de résidence à des seigneurs opulents et que des fêtes, dignes des palais les plus luxueux, ont embrasé jadis ces fenêtres sombres et lézardées.

La porte d'entrée devant laquelle nous arrivons par une rue étroite est, contrairement à ce qu'ont afirmé des guides, plus épris de littérature que de documentalion archéologique, relativement récente. Elle fait partie de cette enceinte que François II annexa au XVème siècle au château des Sires de Clisson, pour en protéger les parties vulnérables.

Cette entrée comprenait un pont-levis à deux bras, dont on voit les glissières longues et verticales sous la forme de deux lignes bien régulières au-dessus du portail. A droite, la petite porte ou poterne était desservie par un pont-levis à un seul bras, ainsi qu'en témoigne une nouvelle glissière parallèle aux précédentes.

Au-dessus du portail, six mâchicoulis protégeaient l'entrée du château, mâchicoulis auxquels on accédait des courtines voisines par deux petits escaliers latéraux, invisibles aux touristes. Quant aux courtines elles-mêmes, elles n'étaient desservies que par des échelles.

Portons maintenant notre regard un peu à droite de ce portail monumental. A une distance médiocre du dit portail, le mur présente, à sa partie supérieure, une échauguette qui permettait de défendre jadis une petite porte aujourd'hui murée et s'ouvrant dans la douve même. Cette ouverture constituait, en cas de siège, un moyen de communication avec l'extérieur. Enfin, remarquons deux petites figures sculptées à la base des derniers machicoulis des courtines voisines. Ce sont ces sculptures très discrètes qui ont sans doute suggéré à certains visiteurs l'idée que le château de Clisson avait été construit dans le style sarrasin.

Pour compléter notre exposé au sujet du portail, nous dirons qu'un cadre, élevé entre les deux glissières principales, portait jadis les armes de Bretagne.

Entrons maintenant dans le château.

LA BARBACANE.

Après avoir passé devant la maison du gardien située à droite, nous arrivons dans une vaste cour rectangulaire où quelques boulets de canons ont été disséminés çà et là sur la pelouse.

Sans nous attarder à un examen sur lequel nous reviendrons plus tard, dirigeons nos pas vers la gauche, jusqu'à ce que nous soyons arrêtés par un fossé assez profond. Cette douve intérieure mérite explication.

Nous avons dit, au début de ce travail, que le château des Seigneurs de Clisson ne comprenait que quelques tours situées à l'extrémité d'un plateau dominant la rivière. Or, le fossé en question marque la limite du dit château. Il est facile, en effet, de comprendre comment la douve que nous avons devant les yeux isolait une sorte « d'îlot » à l'extrémité du plateau. Sur cet îlot reposent les murs du vieux château, c'est-à-dire la demeure des seigneurs de Clisson. Il existe donc dans notre ville deux châteaux séparés l'un de l'autre par le fossé qui nous arrête. Le premier a été construit pour la guerre d'arbalètes, le second, dont nous venons de traverser la cour, est celui des ducs de Bretagne ; il a été édifié pour la guerre de canons.

Ceci posé, continuons notre étude.

A gauche, une nouvelle porte du XVème siècle, munie autrefois d'un pont-levis, se présente à nos yeux. Un autre fossé rejoignant le premier nous en sépare encore. Franchissons-le.

Nous arrivons dans une cour irrégulière où ont poussé quelques ormes centenaires réduits à leur seule écorce. Nous sommes à ce moment à l'entrée d'un nouveau pont à l'autre extrémité duquel on aperçoit un passage étroit, sombre, dont la voûte en forme de lancette semble avoir été édifiée aux temps les plus mystérieux de la féodalité.

Ce couloir, compris entre deux bâtiments qui le limitent, constituait l'entrée du château au XIIIème siècle. Il reste, à l'heure actuelle, une des parties les plus anciennes des constructions qui font l'objet de çet ouvrage.

Nous avons vu, en effet, qu'en 1217, Guillaume le Jeune faisait construire un château neuf. Le document sur lequel s'appuie cette affirmation existe encore à l'heure actuelle. Il consiste en un acte par lequel Guillaume échangeait des terrains avec les hospitaliers pour faire construire les douves et fossés de son château.

Aucune erreur ne peut donc, à notre avis, exister au sujet de la date de construction de l'entrée du château primitif. Le passage voûté, flanqué à gauche d'une tour de forme ancienne et à droite d'une cage d'escalier étroite, est du début du XIIIème siècle.

L'ensemble de ces trois bâtiments s'appelle une barbacane, autrement dit premier ouvrage de défense d'un château féodal.

A noter que la partie de droite fut agrandie ultérieurement (au XIVème siècle), ainsi qu'il est facile de le constater par l'examen de la muraille (on distingue, en effet, très nettement, la ligne de séparation des deux logis qui se font suite).

Mais étudions d'abord l'entrée du vieux château.

Une douve sèche nous en sépare encore. Un pont mobile permettait jadis d'arriver jusqu'à la herse dont nous verrons dans quelques instants les marques dans la muraille. Plus tard, le pont volant fut remplacé par un pont-levis primitif, ainsi qu'en témoignent deux gros piliers flanquant l'entrée du passage voûté.

En effet, ces deux piliers, visiblement construits après la barbacane, portent la marque des charnières du pont-levis à leur partie interne. Fait curieux, les marques se trouvent un peu au-dessus du sol et laissent supposer un mécanisme sur la nature duquel les archéologues n'osent pas encore se prononcer. Deux chaînes fixées aux poutres permettaient sans doute de lever ou de baisser le pont par la fenêtre de la barbacane.

Un autre fait digne de remarque est celui-ci : dans la paroi de gauche du passage voûté qui nous occupe, on peut voir, à la hauteur du coude, le reste d'une archère qui permettait de « flanquer » le bâtiment voisin. Elle devint inutilisable quand le pilier du côté droit fut élevé. Cette archère, comblée alors dans sa partie inférieure, ne servit plus qu'à surveiller le couloir. En revanche, on ouvrit une étroite meurtrière dans le pilier de gauche afin de pouvoir défendre une fenêtre aujourd'hui condamnée de la tour voisine. L'archer posté à cette meurtrière, c'est-à-dire à l'entrée du couloir, était lui-même protégé par le tablier du pont-levis relevé (M. de Berthou).

Pénétrons maintenant dans le passage voûté. En levant les yeux, nous voyons deux ouvertures de défense, qui permettaient de lancer des projectiles sur les assaillants. La seconde ouverture, un peu moins élevée que la première, dont elle est séparée par un doubleau, pouvait servir aussi à l'usage d'armes plus directes et on conçoit que, placés devant la herse dont on aperçoit les glissières dans les parois des deux murailles, les mâchicoulis, malgré leurs formes primitives, contribuaient, en cas de siège, à rendre très difficile l'accès du vieux château.

Derrière la herse, nous voyons un doubleau destiné, jadis, à recevoir une porte munie de fermetures extérieures et intérieures.

Voici, à ce sujet, l'opinion qu'émet M. de Berthou :

En 1560, vivait dans le château un seigneur d'Avaugour, marié à une fort jolie femme. Ce seigneur, gros et court, était jaloux et peut-être faut-il voir dans les fermetures extérieures du château une modification apportée au XVIIème siècle, pour permettre au châtelain de s'absenter en toute sécurité.

Derrière le doubleau se trouve, à droite, une porte basse condamnée, construite en même temps que la barbacane, ainsi que le prouve son linteau sur consoles, autrement dit une pierre placée à la partie supérieure de l'ouverture et soutenue à ses extrémités par deux autres pierres taillées. La porte située dans la paroi de gauche et en face de la précédente a été construite ultérieurement.

Nous arrivons maintenant dans une petite cour d'où l'on voit, du côté droit, le portail du donjon.

A gauche nous trouvons facilement une autre porte (ou plutôt deux portes formant un angle droit). Elle conduit dans la vieille tour de 1217. Cette tour, destinée à la défense, comprenait un étage et des mansardes. Au XIIIème siècle, il n'existait pas d'escalier dans ce logis et l'on ne pouvait gagner le premier étage qu'en franchissant le couloir voûté que nous venons de visiter. Du côté du Sud et à la hauteur de ce premier étage, une porte-fenêtre, visible de l'intérieur de la tour, desservait le chemin de ronde d'une courtine aujourd'hui disparue. Cette porte-fenêtre est très visible sur un tableau représentant Clisson et le château avant 1789.

Au moment de la Révolution, la tour qui nous occupe était couverte d'un toit assez bas et logeait les archives. On l'appelait tour Bureau-Robinière.

Revenons maintenant dans la cour précédant le donjon. Nous pénétrerons dans la partie des bâtiments qui flanque le couloir du côté opposé et pour cela nous franchirons une porte que nous trouvons à droite en cheminant vers le donjon.

Le logis dans lequel nous venons d'entrer était celui du corps de garde, sorte de conciergerie du XIVème siècle. Il fut annexé, nous l'avons dit, à la cage d'escalier limitant le passage voûté. Cette cage d'escalier se trouve, bien entendu, à droite en entrant dans le logis, et nous engageons le visiteur à jeter un coup d'œil par la petite porte qui la dessert. Inutile de gravir les marches du petit escalier ; il n'existe, à sa partie supérieure que les débris de l'ancienne salle de surveillance du château primitif.

En face de cette porte, dans la paroi du sud, on voit un petit cabinet muni d'une archère destinée à défendre le donjon du côté de l'Ouest. Le donjon a été, en effet, construit en même temps que le logis dans lequel nous nous trouvons, c'est-à-dire au XIVème siècle. Ajoutons, pour compléter cet exposé, que les différentes cheminées de la barbacane servaient, d'après la tradition, à faire bouillir l'huile et la poix destinées à ébouillanter les assiégeants.

DONJON.

Revenus dans la cour qui fait suite à la barbacane, nous nous trouvons en présence d'un portail à ouverture ogivale, portail qui donne accès aux ruines du vieux donjon. A ce moment, nous avons, à notre droite, la porte du logis que nous venons de visiter, à notre gauche se trouve un bastion élevé au XVIème siècle et en face de nous le donjon qui nous occupe.

Devant ce donjon existait jadis un fossé de défense, ainsi qu'en témoignent les marques d'un pont mobile, marques situées à la hauteur du coude et consistant en dépressions visibles sur les jambages du grand portail.

Un peu plus haut que ces dépressions et du côté droit seulement, remarquez un trou rond dans la muraille, trou circulaire, qui logeait sans doute le tuyau d'une forge destinée à réparer les armes en cas de siège. A gauche du grand portail, une poterne destinée au service permettait d'entrer dans le donjon et d'en sortir sans avoir à utiliser la porte principale.

Après avoir franchi la porte, nous nous trouvons d'abord dans une cour assez curieuse à l'extrémité de laquelle on aperçoit une sorte de tunnel un peu coudé. En réalité, cette surface faisait autrefois partie du donjon ainsi que l'examen des murs nous en fournit la preuve. D'ailleurs, une cheminée se reconnaît à une distance moyenne de la grande porte. Aucune erreur n'est donc possible à ce sujet ; le donjon était une immense tour carrée de 18 mètres de côté et dont une petite partie seulement, celle qui correspond au passage coudé, était voûtée.

Avant de pénétrer dans ce couloir, notons la présence d'un cabinet d'aisances dans le mur qui se trouve à notre droite et à une distance médiocre de l'angle Nord-ouest du bâtiment. Ce cabinet, muni d'une archère, constituait un grave défaut de construction, car la muraille, à ce niveau, était extrêmement mince. Il suffisait d'un coup de bélier pour constituer une brèche dans le donjon ; comme celui-ci n'était pas voûté, l'ennemi, en allumant quelques fagots, pouvait faire brûler tout l'édifice (M. de Berthou).

Comment expliquer maintenant cette construction irrégulière et atypique qui fait l'objet de notre étude ?

Le donjon fut construit au XIVème siècle sur un châtelet analogue à la barbacane et datant, comme elle, du commencement du XIIIème siècle. Le couloir voûté que nous voyons est un reste de ce châtelet. Il existe donc, dans le donjon, des parties très anciennes et des parties plus récentes. Chose curieuse, les parties les plus anciennes se retrouvent aujourd'hui relativement bien conservées tandis que les constructions du XIVème siècle se sont écroulées spontanément. L'édifice qui nous occupe a, en effet, été construit par le père du Connétable, dans une période de guerre, avec une précipitation qu'il est aisé de constater.

Examinons l'entrée du couloir voûté.

Ce couloir constituait une partie de l'enceinte du château au XIIIème siècle, ainsi que le prouvent des archères visibles à gauche et à droite dans l'épaisseur des deux murailles. Peu visibles de l'intérieur du passage voûté, ces archères nous apparaissent comme deux meurtrières assez larges si on les examine de l'extérieur (en restant cependant dans le donjon).

Il est bien évident que le couloir qui nous occupe était jadis relié à la barbacane par deux courtines limitant un étroit passage, courtines détruites au XIVème siècle.

L'intérieur du couloir voûté constituant une partie du donjon actuel retiendra peu notre attention. Nous y trouvons, comme dans la barbacane, les marques d'une herse et de portes aujourd'hui disparues. A droite, une ouverture étroite nous conduit, par un petit escalier du XIIIème siècle, à une sorte de terrasse, reste du premier étage du donjon.

De cette terrasse, notre regard embrasse un gracieux panorama. Au point de vue archéologique, nous remarquons qu'un grand nombre d'ouvertures ont été pratiquées dans le mur de l'édifice et nous attirerons l'attention du visiteur sur deux belles archères superposées situées auprès de l'escalier. Dans le même mur, nous pouvons voir les marches d'un escalier élevé et auquel on ne peut accéder que par une échelle. Cet escalier desservait un cabinet d'aisances visible de l'extérieur et ressemblant à une échauguette. Quant aux cinq étages du donjon, ils n'étaient reliés entre eux que par des échelles de meunier.

En effet, dans l'angle sud-ouest du bâtiment, le plancher du cinquième étage présentait une solution de continuité, ainsi qu'on peut le constater par l'examen du mur. Autrement dit, le plancher ne s'étendait pas jusqu'à l'angle du donjon. Il existait donc là un escalier de bois, escalier évidemment mobile et susceptible d'être retiré en cas de besoin. Le donjon, malgré ses dimensions, était une construction médiocre qui s'est écroulée tout d'un coup, vers le milieu du XVIIème siècle. La tradition rapporte que l'accident se produisit pendant une nuit de Noël. Les habitants du château étaient réunis à la chapelle pour y entendre la messe de minuit et il n'y eut pas de victimes à déplorer.

COUR CENTRALE.

Mais reprenons notre excursion.

Le passage voûté du donjon conduit le visiteur dans la cour intérieure du château.

C'est ici surtout que les souvenirs historiques affluent dans la mémoire.

C'est, en effet, dans cette cour que les sires de Clisson ont joué étant enfants. C'est dans cette enceinte que se sont déroulés les fêtes somptueuses de François II.

Enfin, c'est sur ce sol, foulé jadis par tous les rois de France depuis Philippe-Auguste jusqu'à Henri IV, que Cordelier, en 1794, est venu porter la mort et que des victimes de la Révolution ont souffert une longue et affreuse agonie.

Aussi ne peut-on se garder d'une émotion profonde en présence de ces murs fissurés et de ces sombres tours ravagées par le temps !

L'examen du bâtiment que nous venons de parcourir nous montre que son sommet est garni de mâchicoulis bien maçonnés, mais différents, cependant, de ceux que nous avons trouvés au-dessus de la porte d'entrée du XVème siècle. Le chemin de ronde du donjon a été construit, en effet, ne l'oublions pas, à une époque où les mâchicoulis venaient d'être inventés. L'archéologue a donc devant les yeux un des premiers types de mâchicoulis connus.

A droite du portail, en regardant le donjon, nous découvrons les restes d'un mur parallèle au dit donjon. Ce mur, d'une hauteur de deux mètres environ, s'appuyait par son extrémité contre celui de la chapelle auquel il était perpendiculaire.

Examinons, maintenant, à quelques pas du grand portail, la façade du donjon. Nous découvrons des gonds indiquant l'existence d'une porte dont le bord libre devait venir butter contre le mur qui nous occupe.

Il existait donc là une sorte de petite enceinte limitée au nord par le donjon, au sud par le mur aujourd'hui délabré, à l'est par le pignon de la chapelle et à l'ouest par une porte à verrou extérieur.

Au fond de cette enceinte rectangulaire qui constituait jadis un véritable puits, deux ouvertures établissaient une communication entre le donjon et le sous-sol de la chapelle.

Cette singulière disposition se conçoit aisément.

Le sous-sol de la chapelle constituait, en effet, un vaste magasin auquel les soldats du donjon pouvaient avoir recours en cas de siège ; mais la prudence exigeait cependant de prendre des dispositions pour empêcher l'ennemi d'entrer dans la cour intérieure du château. Or, on conçoit que cet ennemi, maître des étages inférieurs du donjon, ne pouvait pas utiliser, pour pénétrer dans cette cour, le passage qui nous occupe. Il se serait, en effet, trouvé dans une sorte de cage située directement sous les mâchicoulis. Ajoutons qu'un pont volant jeté sur le sommet du mur constituait une autre communication possible avec l'extérieur. Ce pont volant a, en effet, laissé des traces de chaque côté d'une porte-fenêtre du premier étage.

***

Ayant étudié cette curieuse disposition défensive, le visiteur fera sans doute quelques pas dans la cour et son regard sera bientôt attiré par un arbre gigantesque dont la haute cime domine les tours les plus élevées. Cet arbre indique l'emplacement d'un puits central aujourd'hui légendaire.

En voici l'histoire en quelques mots :

En 1794, dans les ruines de la cuisine quelques habitants de Clisson avaient cherché refuge et s'ingéniaient à préparer des aliments grossiers. Mais Cordelier veillait. De son camp, situé près de Toutes-joies, il vit la fumée s'élever du château et, aigri par une récente défaite, y accourut avec ses hommes.

Les malheureux réfugiés, bientôt découverts, furent traînés sur le sol et exécutés les uns après les autres. Deux femmes s'enfuirent en utilisant le passage souterrain tandis qu'une autre, sautant par la fenêtre du logis seigneurial, restait blessée aux pieds des tours.

Seize personnes, dont un seul homme, furent alors précipitées mortes ou vives dans le puits central autour duquel les assassins dansèrent de joie [Note : Trois ou quatre personnes trouvèrent grâce devant leurs bourreaux. Quant à la femme blessée aux pieds des tours, elle devait être sauvée le soir par un soldat].

Cette scène de sauvagerie est restée tristement célèbre dans la contrée et la sève rouge du vieux sapin symbolise le sang des victimes [Note : L'arbre dont il est question appartient, en effet, à une espèce de sapin à sève rouge, couleur de sang].

Mais revenons maintenant à des détails moins sinistres. La cour que nous avons devant les yeux se présente comme une enceinte irrégulière entourée de bâtiments en ruines. Pour la commodité de l'étude, nous commencerons par ceux que nous avons à notre droite (en sortant du donjon), c'est-à-dire par ceux de l'Ouest.

LA TOUR DE L'OUEST ET LES LOGIS VOISINS.

La tour que nous avons à notre droite, en sortant du donjon, est, comme les deux tours jumelles du sud, de la fin du XIIIème siècle. La pièce située au rez-de-chaussée de cette enceinte n'offre rien d'intéressant à signaler et, actuellement, elle sert de cave au gardien du château.

Pour arriver au premier étage de cette tour, il est nécessaire de contourner un mur assez élevé constituant autrefois le pignon d'un logis aujourd'hui délabré. Un plan incliné et quelques marches nous conduisent alors dans une salle remaniée au XVIIème siècle.

En effet, ainsi qu'il est facile de s'en rendre compte, une voûte de tuffeau semble avoir modifié la disposition de l'étage et l'explication de cette singularité est la suivante :

A une période que nous situons vers 1650, on divisa le premier étage par un plancher. La partie supérieure de la pièce fut alors annexée au second étage, tandis que sa partie inférieure augmentait la hauteur du rez-de-chaussée. En conséquence, une fenêtre devint une porte, celle par laquelle nous sommes entrés, pendant que les autres ouvertures étaient allongées vers le bas pour venir à hauteur convenable.

La base de la tour, munie d'archères, était desservie du côté du sud par une porte surmontée d'une échauguette (XVème siècle), porte dont l'ouverture, aujourd'hui condamnée, constituait, jadis, un moyen de communication stratégique avec le bâtiment voisin.

La tour clans laquelle nous nous trouvons était agréable à habiter, et la tradition rapporte que, pendant une nuit, elle servit de résidence à Blanche de Castille et à Saint Louis [Note : Si le fait est exact, la tour a, évidemment, été construite avant la fin du treizième siècle].

Sortant de cette tour vénérable, le visiteur parcourt les débris d'un vieux logis dont la façade sur la cour est réduite à quelques pierres. Dans ce logis du XIVème siècle, reconstruit plus tard par d'Avaugour, existait, sans doute, un escalier desservant les étages de la tour que nous venons de visiter.

Dans la muraille extérieure, située maintenant à notre droite, quelques ouvertures (dont deux géminées) ont résisté au temps.

A l'extrémité du chemin de ronde qui le surmonte, nous pouvons voir une petite guérite contemporaine de la grande tour du sud à laquelle elle adhère.

Cette guérite, qui a servi vraisemblablement autrefois à abriter les hommes de garde, a été transformée ultérieurement en cabinet d'aisances. On retrouve du reste, à l'extérieur du mur qui supporte la guérite, un bâtiment rectangulaire comprenant deux étages de latrines, auquel on accédait par une ouverture entourée de tuffeau. En se hissant jusqu'à cette ouverture, le visiteur pourra, non sans danger, constater qu'un tuyau de briques relie la partie inférieure de la guérite au fond du bâtiment (XVIIème siècle).

Nous sommes arrivés maintenant à l'extrémité du logis en ruines dont quelques pierres indiquent la limite vers le sud. Nous avons toujours à notre droite le mur constituant la courtine. A notre gauche, nous voyons, tout près de nous, le pignon d'un nouveau bâtiment.

Ce pignon forme un angle droit avec celui du logis que nous venons de parcourir. Il existait donc, entre les pignons dont nous parlons et le mur extérieur de l'enceinte, une très petite cour couverte, jadis, en partie, par un balcon de pierres. Ce balcon, dont on voit encore les traces dans la muraille de gauche, reliait le premier étage du logis seigneurial à l'ouverture entourée de tuffeau du mur de droite.

Devant nous, à l'extrémité de la petite cour, s'élève la grande tour du sud.

Pour étudier les détails de ce bâtiment intéressant, il est nécessaire de revenir sur nos pas. De l'endroit où nous sommes arrivés, nous ne voyons, en effet, que la porte d'entrée de la grande tour et, plus haut, à quatre mètres environ au-dessus du sol, une autre ouverture desservant un escalier de cinquante-huit marches interdit, et pour cause, au visiteur !

LES TOURS JUMELLES DU SUD.

Du milieu de la cour, nous voyons les tours jumelles du sud qui ont été élevées simultanément vers 1300. Le sommet de ces tours était muni d'ouvertures de défense assez curieuses. Chaque fenêtre, en effet, présente à ses angles supérieurs des saillies de pierres destinées à soutenir un tablier métallique. Ce tablier, qui pouvait être écarté du mur de la tour, permettait de lancer des projectiles assez volumineux. Sans doute, ce moyen de défense ne remplaçait pas les véritables mâchicoulis, mais il était cependant supérieur aux anciens trous de hourds. Notons, d'ailleurs, que les saillies de pierre ne sont bien visibles actuellement que de l'extérieur du château.

Un fait digne d'être remarqué est celui-ci : les tours étaient munies d'ouvertures de défense, même du côté de la cour centrale. On peut donc en conclure que ces constructions constituaient un donjon primitif, celui d'Olivier II. Les trois fenêtres de défense que nous avons devant les yeux furent condamnées au XIVème siècle quand le donjon définitif fut édifié. Quant au vide laissé, intentionnellement, sous chacune des cinq fenêtres de la grande tour, il était destiné à permettre le tassement de la maçonnerie supportant les palâtres du toit.

Approchons-nous maintenant d'un escalier de pierres dont l'aspect monumental a vraisemblablement attiré depuis longtemps déjà l'attention du visiteur. Cet escalier a remplacé, sous d'Avaugour, un escalier du XIVème siècle, sans doute plus remarquable encore. A sa partie supérieure, un petit couloir nous permet d'explorer l'intérieur des deux tours.

Celle de droite (la grande) comprenait quelques fenêtres latérales défendues par les constructions voisines. En face de nous, deux ouvertures n'étaient protégées que par leur grande élévation, ce qui explique la solidité des grilles dont elles étaient munies (remarquons, du reste, que la fenêtre la moins élevée était la plus étroite). Enfin, dans les parois de la même tour, notons l'existence de trois archères du XIIIème ou XIVème siècle et d'une embrasure de canon datant de François II.

Ainsi qu'il est facile de le constater, les tours comprenaient cinq étages assez élevés, la plupart desservis par un escalier de pierres situé dans la muraille, escalier étroit dont nous avons déjà parlé. On ne pouvait accéder aux étages inférieurs que par des échelles de meunier.

La petite tour, où certains auteurs ont voulu voir des oubliettes, était composée de salles superposées auxquelles on accédait par celles de la tour voisine.

Autrefois, c'est-à-dire avant le XVIIème siècle, on ne pouvait entrer dans les deux tours que par une seule porte située à l'extrémité de la petite cour que nous avons étudiée précédemment.

L'escalier monumental que nous venons d'utiliser se divise en deux parties au niveau d'un palier ; la partie située à la gauche du visiteur était en bois et donnait accès aux étages du logis seigneurial.

C'est ce logis qui fera maintenant l'objet de notre étude.

LE LOGIS SEIGNEURIAL ET LES CUISINES.

Entre les tours jumelles que nous venons de visiter et une tour carrée située beaucoup plus loin à gauche, nous trouvons des bâtiments en ruines, dont l'un, celui qui est devant nous, est réduit à sa plus simple expression. La façade du logis seigneurial a, en effet, été détruite, ce que nous ne pouvons regretter beaucoup, comme le dit M. de Berthou, car elle constituait une des constructions du fameux d'Avaugour, l'homme d'un goût plutôt douteux, qui fit modifier au XVIIème siècle la splendide demeure des seigneurs de Clisson. Les autres murs à l'exception de celui qui soutient la cage de l'escalier, sont du XIVème siècle.

Celui que nous avons devant les yeux et qui constitue la limite de l'enceinte nous présente une magnifique fenêtre d'où nous découvrons un panorama très reposant. Cette fenêtre, qui répondait sans doute à la salle principale du château, servait sous François II à assister aux tournois que le duc de Bretagne donnait sur les bords de la rivière pour sa belle maîtresse : Antoinette de Magnelais.

A une période plus reculée, les bancs de l'embrasure étaient probablement utilisés par les musiciens dont les seigneurs aimaient à s'entourer pendant les festins.

Un peu à droite de cette ouverture, se trouve une petite porte à destination moins poétique, car elle indique l'entrée d'un cabinet d'aisances. Ce réduit du XIVème siècle est muni d'une prise d'air, ce qui constitue un raffinement assez curieux pour l'époque, raffinement cependant expliqué par le voisinage de la grande salle (M. de Berthou).

Au-dessus de la pièce du rez-de-chaussée et munie elle-même d'une belle fenêtre, se trouvait une chambre à coucher ayant pour annexe une petite salle située dans l'épaisseur de la muraille au-dessus du cabinet d'aisances. Cette petite salle, dont les limites extérieures débordent légèrement l'enceinte du XIVème siècle, a été, vraisemblablement, la chambre du duc de Bretagne au XVème siècle. Un couloir permettait d'y accéder de la tour voisine.

Au-dessus du premier étage, une fenêtre dans le pignon de la cuisine indique un second étage sur la nature duquel nous n'avons aucune donnée.

Pour terminer l'étude du logis seigneurial, ajoutons que le chemin de ronde dominant la muraille a été refait sous François II, ainsi qu'en témoignent ses mâchicoulis, semblables à ceux de la porte d'entrée.

***

Après nous être arrêtés quelques instants devant les ruines si suggestives du logis seigneurial, nous conduirons le visiteur aux cuisines. Ne soyez pas choqué, elles méritent d'être vues !

Faisant suite au logis seigneurial, nous en trouvons la porte sans difficulté. Comme elles semblent abandonnées ! On a peine à se figurer l'activité qui régnait jadis autour de ce foyer aujourd'hui si désert.

A droite, en entrant dans le logis, une cheminée où un bœuf pouvait cuire tout entier se présente à nos yeux. Dans la partie voisine de la porte, cette cheminée a été fermée par un petit four construit sans doute au XVème siècle. Ne cherchez pas l'âge exact de la vieille cheminée ; vous ne le trouveriez pas. Viollet-Leduc en attribue la construction à la première moitié du XIVème siècle.

En face de cette cheminée, aussi curieuse que fissurée, vous apercevrez une tour carrée qui fut construite au XIIIème siècle, contre le mur de l'enceinte, c'est-à-dire en dehors du château. Quand (au XIVème siècle), on agrandit la dite enceinte, la tour carrée se trouva comprise dans la cuisine et une de ses fenêtres, destinée, jadis, à surveiller l'extérieur, ne servit plus qu'à contempler la cheminée monumentale dont nous venons de parler. Cette tour contient dans sa base un escalier, sorte de souterrain, dont nous étudierons l'entrée plus tard.

En examinant les murs du logis de la cuisine, nous voyons qu'il existait un étage au-dessus de la pièce où nous nous trouvons. Un oratoire, sorte de chapelle seigneuriale à l'usage des châtelains, y fut aménagé au XVème siècle et, à ce moment, la chapelle située dans la cour et datant du siècle précédent fut supprimée. On accédait à cet oratoire de la chambre seigneuriale voisine par deux couloirs à l'extrémité desquels on peut voir encore aujourd’hui des bénitiers de pierre scellés dans la muraille. Celui qui se trouve dans l'angle sud-ouest est assez bien conservé.

La chapelle Sainte-Barbe, ainsi que l'appelaient les vieux Clissonnais, était éclairée par une belle fenêtre, entourée de tuffeau au XVIIème siècle. En 1789, un chapelain vivait dans le château ; il habitait la chambre supérieure du logis seigneurial.

LA TOUR DU XVIIème SIÈCLE ET LE LOGIS DE LA CHAPELLE.

Continuant notre promenade autour de la cour centrale, nous voyons, du côté droit en sortant des cuisimes, un escalier en ruines desservant jadis les étages des bâtiments voisins. Traversons la cage de cet escalier. Sous nos pieds, nous trouvons quelques marches qui nous conduisent dans une tour carrée d'où l'on jouit d'une vue très agréable sur la Sèvre. Cette tour du XVIIème siècle, construite en grande partie avec de la pierre blanche, comprenait trois étages, car le rez-de-chaussée repose sur l'esplanade située en contre-bas. La salle où nous sommes arrêtés se trouve donc au premier étage du bâtiment. Le visiteur s'attardera sans doute un instant à contempler l'église Notre-Dame par la fenêtre ronde exposée au nord-ouest.

D'après les vieux Clissonnais, cette tour aurait servi jadis de domicile aux derniers habitants du château et l'aménagement en était alors luxueux.

On dit, encore aujourd'hui que deux salles étaient tendues de velours et qu'elles présentaient un aspect bizarre. L'une aurait été noire avec des traînées d'argent et l'autre rouge avec des filets d'or.

On ne peut gagner aujourd'hui les étages supérieurs qu'à l'aide d'une échelle placée hors du logis.

Les deux tours carrées, qui constituent une des principales beautés du château, menacent malheureusement de s'écrouler, faute de toitures.

***

Mais nous sommes revenus dans la cour centrale.

Un dernier bâtiment nous reste à visiter : le logis de la chapelle. Cette construction est située entre les tours carrées (maintenant à notre droite) et le donjon. Dans la partie la plus voisine des tours carrées, nous trouvons sans peine l'entrée d'un escalier souterrain auquel nous avons fait allusion précédemment. Le passage en question conduisait au moulin situé au bord de la rivière. En cas de siège, ce moulin, très fortifié, et constituant un véritable châtelet indépendant, restait donc en relation avec le bâtiment voisin de la cuisine, disposition stratégique qui permettait d'approvisionner la garnison.

Toujours dans le logis qui fait l'objet de notre étude et tout près de l'entrée du souterrain, nous pouvons voir les restes d'une jolie cheminée sculptée du XIVème siècle. Cette cheminée était destinée à chauffer un logement sur la nature duquel nous ne sommes pas très bien fixé. D'après M. de Berthou, cette partie du bâtiment aurait été occupée par la salle d'armes et l'hypothèse nous paraît assez vraisemblable, car on aurait, en effet, trouvé sur le sol une grande quantité de morceaux de fer et de fragments d'armes.

Ainsi donc, la présence de cette cheminée semble bien indiquer que la chapelle ne s'étendait pas jusqu'à l'extrémité du bâtiment.

Examinons maintenant la partie du logis située près du donjon.

La façade donnant sur la cour nous présente un grand nombre d'ouvertures, dont une porte ogivale surmontée d'une petite croix. Cette porte donnait évidemment accès à la chapelle du château primitif.

L'intérieur de la dite chapelle (quand on l'examine du seuil de la porte ogivale) nous offre à considérer, du côté gauche, une embrasure occupée autrefois par un petit autel. Dans le même mur, mais à une hauteur plus considérable, nous voyons une niche rectangulaire en pierres bien ajustées dont le linteau a été percé verticalement à sa partie moyenne Il est probable qu'une statue surmontée d'une couronne a occupé cette petite niche au XIVème siècle.

Quant à l'embrasure du rez de-chaussée, elle ne contenait certainement pas l'autel principal de la chapelle ; celui où on officiait était, en effet, orienté vers l'est ou vers le nord suivant l'usage du moyen âge. Dans le premier cas, il se trouvait appuyé contre le mur divisant le logis ; dans le second, il était en face de la porte d'entrée, disposition qui nous paraît la plus vraisemblable.

L'intérieur du bâtiment fut divisé en étages au XVème siècle, quand la chapelle fut transférée au-dessus de la cuisine. Le sous-sol constituant un magasin spacieux a sans doute existé depuis la construction du vieux logis, c'est-à-dire depuis le XIVème siècle.

Avant de terminer cette étude, remarquons que l'angle du donjon, ainsi que nous l'avons fait observer en étudiant cette construction, a été édifié sur le mur extérieur de la chapelle qui constitue, à ce niveau, un reste du château de Guillaume le Jeune.

La chapelle était petite, mais quelles qu'en aient été les dimensions, elle a reçu dans son enceinte des hôtes remarquables. Sans doute, plusieurs seigneurs de Clisson (dont le Connétable de France) y ont été baptisés ; les rois les plus illustres sont venus s'incliner devant son autel. Elle commande donc le respect et l'attention du visiteur.

L'ESPLANADE DU CHATEAU.

Nous devons maintenant quitter la cour centrale du vieux château.

Après avoir traversé le donjon et la petite cour qui lui fait suite, nous voyons devant nous un escalier voûté. Laissant la barbacane à notre gauche, nous descendrons alors une dizaine de marches à l'extrémité desquelles nous trouverons une porte fermée à clef. Cette porte, que le gardien nous ouvrira sans difficultés, conduit le visiteur sur une terrasse transformée en jardin. On dit que, pendant la Révolution, cette terrasse servait à fusiller des paysans et elle constituerait, actuellement, un véritable cimetière. En ce qui me concerne, je n'ai jamais entendu dire que des ossements y aient été découverts ; il serait intéressant de pratiquer des fouilles à ce sujet.

L'esplanade qui nous occupe, et d'où l'on jouit d'un admirable panorama, ne soulève pas de problèmes archéologiques. Construite au XVème siècle, elle nous offre à visiter une salle basse à laquelle on accède par un escalier très sombre et assez long. Cet escalier est situé à l'extrémité de la terrasse et à la gauche du visiteur.

La salle basse où nous arrivons, non sans difficultés, ne constituait jadis qu'un local de défense muni-d'ouvertures pour les canons ; on peut y voir encore des cheminées étroites destinées à laisser échapper la fumée des armes à feu.

La tradition plaçait dans ce local le cachot de Jean V, ce qui était vraiment un peu téméraire, puisque le réduit en question ne fut construit que fort longtemps après la mort du prisonnier.

L'infortuné duc de Bretagne, lors de son séjour à Clisson, resta sans doute enfermé dans le donjon ou dans la tour du sud. Mais pendant de longues années encore les vieux Clissonnais continueront à rester fidèles aux récits qu'ils tiennent de leurs parents.

LA COUR D'ENTRÉE ET LES ECURIES.

Mais nous voici revenus dans la cour d'entrée, c'est-à-dire dans la partie récente du château. Cette partie, à l'exception de quelques bâtiments, fut construite sous François II.

Le visiteur a sans doute remarqué que la forteresse qui fait l'objet de notre étude est composée d'enceintes successives constituant, suivant l'heureuse comparaison de M. le Commandant Mollat, comme les cloisons étanches d'un navire. Au point de vue stratégique, cette série d'enceintes rendait le château pratiquement imprenable.

Pour continuer notre excursion, plaçons-nous au milieu de la cour en tournant le dos aux parties que nous venons de visiter.

A droite, nous voyons la porte par laquelle nous avons commencé notre étude ; à gauche, une autre porte dans le mur du sud est comprise entre deux bastions assez épais. Ces bastions, construits au temps de la Ligue, augmentaient la résistance du mur incapable de résister dès cette époque aux gros canons.

Dirigeons nos pas vers la partie du château que nous ne connaissons pas et, pour cela, suivons le bastion que nous avons à notre gauche. Nous voyons d'abord, que la cour d'entrée a été surélevée devant un bâtiment garni de tuffeau et datant visiblement du XVIIème siècle. Ce bâtiment constituait autrefois les écuries de d'Avaugour.

Les écuries, dit-on, étaient fort bien comprises : on affirme même que le seigneur de Clisson, grand amateur de chevaux, les avait fait parqueter.

D'après certains auteurs, cependant, le logis dont nous parlons n'était pas destiné entièrement à loger les chevaux ; la partie du bâtiment située au nord aurait constitué une orangerie. Malheureusement, les débris que nous avons devant les yeux ne peuvent nous renseigner à ce sujet.

Laissant les écuries à sa droite, le visiteur arrive bientôt dans une cour rectangulaire construite probablement d'après les plans de Mathelin-Rodiez. Cette cour devait être, en effet, fort belle. Les constructions qui la limitent, à l'exception des écuries déjà citées, sont du XVème siècle. On voit aisément que ces bâtiments étaient destinés à défendre l'entrée du vieux château, entrée, qui, autrefois, n'était pas protégée.

LES PRISONS.

Le visiteur, en arrivant dans la cour rectangulaire qui nous occupe, se trouve en présence d'un bâtiment dont la façade est ornée d'une jolie gargouille gothique.

Peut-être éprouvera-t-on quelque suprise en apprenant que cette construction est une énorme tour dont les murs ont une épaisseur moyenne de six mètres !

Il est possible de descendre à l'intérieur de la tour si l’on désire l'étudier en détail, mais cette gymnastique est inutile, car l'examen peut être pratiqué de la cour et d'ailleurs il n'existe là rien de particulièrement intéressant à découvrir. On voit, en effet, que l'intérieur du bâtiment était occupé par une salle et par un sous-sol, pièces dans les parois desquelles on aperçoit un grand nombre d'ouvertures. La salle était destinée sans doute à la garnison, ainsi que semble le prouver une gigantesque cheminée située à droite. Quant aux ouvertures pratiquées dans les murs, elles desservaient des embrasures d'armes à feu précédées d'étroits couloirs. Ces couloirs permettaient aux hommes d'armes d'éviter les coups de l'ennemi.

L'intérieur de la tour a servi de prison à une époque assez récente. On voit, à la partie la plus élevée de la voûte, un crochet de fer qui, dit-on, aurait été employé pour pendre des prisonniers. Cette hypothèse est difficilement acceptable, les ducs de Bretagne faisant, en effet, exécuter publiquement les criminels. Le crochet ne servit vraisemblablement qu'à suspendre une lanterne ou des provisions : il est sans doute aussi vieux que la tour.

Le logis que nous venons d'examiner aurait été autrefois la prison des femmes.

***

A l'extrémité de la cour, un dernier bâtimen nous reste à visiter.

D'un aspect pittoresque, il donne à l'enceinte où nous nous trouvons un caractère assez spécial. La porte de ce logis nous montre bien qu'elle fermait autrefois une prison. Située à la base d'un petit escalier, elle est munie, en effet, d'un guichet dont les ferrures sont à peu près intactes.

La plupart des remarques que nous avons faites au sujet de la prison des femmes doivent être rappelées ici au visiteur. Le bâtiment que nous avons devant nous constitue, en effet, une tour immense dont les murs ont une épaisseur considérable. L'intérieur de cette tour comprenait autrefois deux pièces, ainsi que l'indiquent des consoles de pierres destinées à soutenir l'étage.

A droite, nous apercevons des embrasures de canons en partie condamnées, et un petit local qui mérite d'être étudié attentivement. Ce local, situé à deux mètres environ du sol, est visible de l'escalier qui desservait jadis l'intérieur du logis. Entièrement situé dans le mur et communiquant largement avec la grande salle dont il n'est qu'une dépendance, il se présente comme une petite pièce en forme de trapèze à la partie supérieure de laquelle on voit une ouverture munie de solides barreaux.

Ce réduit était autrefois divisé par une porte dont on aperçoit les gonds dans la muraille. Cette porte (surmontée elle-même d'une grille) fermait donc un tout petit cachot servant peut-être de salle de police à la garnison du château.

Quant à la grande salle, elle devint la prison des hommes dès que la forteresse eut perdu sa valeur militaire. On distingue encore aujourd'hui les dessins que les prisonniers ont tracés au XVIIIème siècle sur la muraille.

A la base de l'escalier qui desservait, jadis, les étages, on trouve un petit couloir qui conduisait à un cabinet d'aisances.

Cette prison, comme la précédente, présentait autrefois un crochet dont je me rappelle fort bien la forme [Note : Il s'agissait, en réalité, de deux crochets dirigés en sens inverse, mais dont les tiges inégales étaient soudées l'une à l'autre].

***

En sortant de cette sombre prison, le visiteur poussera sans doute un soupir de satisfaction et éprouvera le besoin de voir de grands espaces. C'est pourquoi nous lui conseillerons, dès qu'il sera dans la cour, de gravir les marches qu'il trouvera à sa droite.

Attention ! Il existe au sommet des tours un certain nombre de mâchicoulis cachés par l'herbe et à travers lesquels un enfant pourrait facilement tomber ; le promeneur ne devra donc avancer qu'avec précautions.

La partie que nous avons à notre droite répond à la tour d'où nous sortons et consiste surtout en logis délabrés ayant servi sans doute aux officiers de François II.

Cependant, la première porte que nous trouvons, nous conduit dans une enceinte aux murs relativement bien conservés, éclairée par une magnifique fenêtre à croisillon de pierres qui aura sans doute attiré, depuis quelques instants déjà, l'attention du visiteur. Cette salle, surmontée autrefois d'un étage, était le tribunal des affaires criminelles. Malheureusement, nous ne possédons pas de documents à ce sujet et il nous est impossible, en conséquence, de satisfaire la légitime curiosité de nos lecteurs.

Le local que nous avons devant les yeux est assez vaste, mais, à l'exception des sièges de pierres voisins de la fenêtre, nous ignorons la façon dont la salle était aménagée.

Ayant parcouru le chemin de ronde dans toute sa partie droite, le visiteur reviendra à son point de départ, c'est-à-dire aux premières marches de l'escalier qui conduit à la cour.

Ne descendez pas cet escalier ; gagnez le chemin qui surmonte la prison des femmes et, pour cela, suivez le sommet du mur qui limite la dite cour.

La partie supérieure du bâtiment où nous arrivons est entourée d'un parapet élevé dans lequel ont été disposées cinq embrasures de canons.

Examinez de près ces embrasures ; vous verrez, à leur origine et au niveau du sol, deux dépressions latérales destinées à loger un poutre résistante.

Cette poutre constituait la base d'un cadre de bois dans lequel le canon était fixé, ce qui évitait le recul de la pièce. Les boulets étaient vraiment petits si l'on en juge par le diamètre des ouvertures qui leur livraient passage et on conçoit que ces canons, fixés dans des cadres inamovibles, ne devaient pas être commodes à diriger. Mais le nombre des pièces dont la muraille était comme hérissée suppléait, sans doute, à leur médiocrité.

Pour en terminer avec l'étude du chemin de ronde de la prison des femmes, faisons remarquer au visiteur l'existence d'une gargouille qui deversait son contenu près des embrasures, sur le chemin même. La partie de la tour où circulaient les hommes de garde était donc exposée à la pluie et recevait même l'égout des toits voisins. Cette disposition n'est pas spéciale à Clisson ; elle se retrouve au château de Nantes, logis bien conservé des ducs de Bretagne.

Enfin, après avoir conduit le visiteur dans une dernière salle délabrée munie de cheminées assez curieuses et d'un escalier tournant, dissimulé dans la muraille, nous avons devant nous l'extrémité du chemin de ronde que nous venons de parcourir et d'où nous descendrons aisément dans la cour.

 

Les fortifications de la ville de Clisson.

La ville et les fortifications de Clisson (Bretagne).

Nous ne croyons pas devoir terminer notre étude sans expliquer rapidement l'ensemble des fortifications qui contribuaient à protéger les abords du château et à en rendre le siège plus difficile.

Les fortifications dont nous parlons ont été édifiées à différentes époques et répondaient, évidemment, à des nécessités militaires assez complexes.

Etudions-les d'après leur âge.

Au XIVème siècle, Clisson fut entouré d'une première enceinte assez irrégulière qui, partant de la barbacane, rejoignait le moulin du château en protégeant l'ouest et le nord des bâtiments.

Cette enceinte, due à Olivier V lui-même, consistait en un mur assez élevé reliant entre elles un certain nombre de tours dont voici la situation :

1re tour : rue Lemot (tour détruite aujourd'hui) ;
2ème tour : école des garçons (cette tour existe encore en partie) ;
3ème tour : cour du patronage (la base de cette tour supporte quelques arbres verts) ;
4ème tour : passage Durville (tour détruite) ;
5ème tour : angle d'une pièce d'eau aujourd'hui desséchée et appelée le Grenouillet (détruite) ;
6ème tour : à Cuchaud, près de la rivière (cette tour existe encore).

Toutes ces tours, à l'exception des deux dernières, étaient reliées les unes aux autres par des murs rectilignes.

Entre le Grenouillet et la rivière, l'enceinte de la ville présentait une porte dont on peut voir encore quelques vestiges rue des Halles, à vingt mètres environ du champ de foire. A partir de cette porte, la muraille contournait les rochers du coteau et, en conséquence, son trajet devenait irrégulier et capricieux.

De la tour de Cuchaud jusqu'au moulin, le mur d'enceinte reprend sa forme rectiligne en suivant la rivière.

Notez que l'extrémité du pont dit « de la ville » devait être constituée par une passerelle susceptible d'être retirée, mais nous ne possédons aucune donnée à ce sujet, car le pont actuel, muni encore en 1789 d'un pont-levis, fut édifié au XVème siècle.

Comme le visiteur l'a sans doute remarqué, les fortifications primitives laissaient toute une partie du château en dehors de l'enceinte. Cette disposition stratégique, fort explicable en raison de la hauteur des tours dominant la rivière, ne trouva plus sa justification quand le château fut agrandi. Au XVème siècle, on construisit donc un mur épais et bas destiné à compléter l'enceinte du Connétable et à protéger les bâtiments exposés au sud-est.

Ce mur, qui divisait les douves dans le sens de la longueur, existe encore aujourd'hui. Il s'étend de la rue des Halles au moulin du château. Désignée sous le nom de fausse-braie, cette construction n'était accessible qu'à l'aide d'un pont-levis situé à sa partie moyenne.

Le dit pont-levis était bien entendu situé en face de celui de la porte du château qui, du côté du sud, se trouvait relié ainsi à l'extérieur. Plus tard, d'ailleurs, la fausse-braie fut jugée elle-même insuffisante et, pendant les guerres de la Ligue, on la protégea par trois bastions, dont deux existent encore à l'heure actuelle.

Ces trois bastions, destinés à résister aux canons, étaient bas et massifs, caractère qui devait s'accentuer plus tard et établit un étrange contraste avec les tours des siècles précédents.

Nous avons dit que deux des bastions construits au XVIème siècle étaient encore visibles. L'un d'eux, en effet, se trouve situé à côté de la montée de l'Eperon et supporte des jardins potagers. Le second, situé à l'extrémité de la rue des Halles, sert de terrasse à une société de tir (en 1936). Quant au troisième, qui s'étendait vers la gare dans la région occupée actuellement par la rue Lemot, il a été détruit de fond en comble.

Les deux derniers bastions étaient reliés par une porte de ville très élégante, dont on voit encore les ruines près du boulevard de la Vendée.

Enfin, pour terminer l'étude des fortifications qui nous occupent, signalons l'existence de deux forts construits sans doute au XVIème siècle. L'un était situé devant l'entrée de la rue Saint-Jacques, sur le champ de foire (en 1936), et était destiné à protéger la porte de la ville. L'autre, évidemment édifié pour la défense de l'entrée du château, occupait près de l'église l'emplacement d'une maison habitée en 1936 par le Dr Doussain. La grande cave de cette maison, telle qu'elle existe encore en 1936, était autrefois une partie de la base du petit fort [Note : La cave voûtée présente à sa partie supérieure une tige de fer analogue à celles des prisons du château].

Comme on le voit les fortifications étaient très importantes et justifient, jusqu'à un certain point, le vieux dicton régional : « Le château de Clisson comprenait toute la ville ! ».

Conclusions.

Les lecteurs qui ont bien voulu nous suivre avec bienveillance se rendront compte, sans doute, de la complexité du château de Clisson et de la difficulté que l'on peut éprouver à l'étudier attentivement.

Pour notre part, nous serions satisfaits si, vulgarisant les travaux des archéologues et, en particulier, ceux de M. de Berthou, nous avions laissé entrevoir, à quelques esprits curieux, une partie de la vérité et si cette vérité leur paraissait digne d'intérêt. Quoi qu'il en soit, nous espérons que le visiteur, en quittant Clisson, emportera l'impression que ses monuments méritent d'être visités et que peu de ruines évoquent des souvenirs aussi variés dans un décor plus poétique.

 

NOTES.

Voici maintenant quelques observations personnelles et inédites au sujet du château.

1° Entre la porte d'entrée et la prison des hommes, on voit, de la place du Minage, une porte basse aujourd'hui murée et s'ouvrant, autrefois, dans la douve même. Cette porte, dont le seuil est situé à 2 m. 80 au-dessous du niveau du sol, n'est pas protégée par une échauguette. Elle devait desservir la courtine par l'intermédiaire d'un escalier étroit, situé vraisemblablement dans une tour demi-ronde voisine. Cette tour, en effet, était creuse, à en juger par une meurtrière assez élevée de sa paroi. L'étroitesse de l'escalier rendait inutile une échauguette de protection ;

2° Il existait à l'intérieur du château, au-dessus du portail du Nord, un cadran solaire dont les vestiges se confondent, aujourd'hui, avec les pierres de la muraille ;

3° Dans le bastion des Ormes, on voit les traces d'un mur perpendiculaire à l'enceinte et situé à l'entrée du passage conduisant à la barbacane. Ce mur n'existait que du côté gauche ;

4° La fenêtre de la barbacane était autrefois munie de barres de fer, ce qui devait gêner la manœuvre du pont-levis. Il est vrai que ces barres ont pu être supprimées au XIVème siècle ;

5° Pour entrer dans la tour qui constitue la barbacane du côté gauche on franchit d'abord une porte du XVIème siècle. Autrefois, il existait une autre porte située un peu en arrière de celle à laquelle nous faisons allusion et faisant, comme elle, un angle-droit avec la seconde porte. Il se trouvait là probablement une espèce de guérite ;

6° Dans le couloir du donjon, on peut voir, dans la muraille de droite, au-dessus de la petite porte, des pierres indiquant une ouverture détruite à une époque que nous ne pouvons pas déterminer ;

7° Dans le fond de la grande tour du Sud, on peut constater que l'embrasure du canon a été divisée par un étage. Il existait, sans doute autrefois, une ouverture d'observation dans la paroi de cette embrasure, à en juger par une reprise de maçonnerie. Cette ouverture a été fermée au XVIIème siècle lors de la construction du bâtiment rectangulaire situé à l'extérieur ;

8° La courtine entre les tours du sud et la tour carrée a bien été surélevée au XVème siècle comme le pensait M. de Berthou. Avant cette époque, en effet, il existait une porte faisant communiquer de plain-pied un palier de la tour ronde avec la courtine. Cette porte est devenue une fenêtre quand le chemin de ronde fut modifié. A noter l'existence d'une prise d'air d'un cabinet d'aisances de la petite tour, prise d'air située au niveau du sol de la courtine actuelle. (Il est assez dangereux de se promener, en 1936, sur ce chemin de ronde en raison du conduit d'une cheminée caché par l'herbe) ;

9° Dans le mur extérieur du château, au-dessous des cuisines, on peut voir, à environ 2 m. 50 du sol, une large meurtrière. Le conduit, d'abord horizontal, se continue par une sorte de cheminée verticale mesurant 1 m. 20 x 0 m. 92. La hauteur de cette seconde partie est de 10 mètres environ. Nous avons trouvé, dans la poussière qui le comblait, des débris de coquillages. Peut-être faut-il voir, dans ce conduit, un ancien évier, muré à sa partie supérieure au XVIIème siècle. Les dimensions du dit conduit ont été prises grâce à l'amabilité d'un jeune homme qui a pu s'introduire dans la partie horizontale ;

10° Tout récemment, les maçons ont trouvé, sous l'angle du logis des cuisines, une sorte de voûte semblant indiquer l'existence de salles basses ;

11° Au second étage de la tour carrée du XVIIème siècle, on trouve un cabinet d'aisances avec un siège de bois ;

12° Dans la prison des hommes, on peut voir, à l'entrée du couloir qui conduit au cabinet situé au bas de l'escalier, une porte murée qui desservait probablement une embrasure de canon symétrique de celle de la prison des femmes. Un enfant que l'on tenait évidemment au cou a laissé l'empreinte de ses doigts dans la chaux encore molle. La porte a, sans doute, été murée au XVIIIème siècle.

(Dr. Doussain).

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