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Nouveaux troubles à Saint-Aubin-du-Cormier.

Éloquence « zéminante » de l'accusateur Defiennes.

Vingt-six exécutions en trois jours. Cris de rage de Brutus Magnier contre ses victimes.

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Nouveaux troubles à Saint-Aubin-du-Cormier. Éloquence « zéminante » de l'accusateur Defiennes. Vingt-six exécutions en trois jours. Cris de rage de Brutus Magnier contre ses victimes.

On se rappelle que la Commission avait, le 21 frimaire, rendu à Montagne-la-Forêt (Saint-Aubin-du-Cormier) un jugement qui avait, croyait-elle, contenté tout le monde ; ce contentement ne devait guère durer, et au bout d'un mois il lui fallut de nouveau faire comparaître devant elle les autorités de Saint-Aubin.

Anger, juge de paix du canton et président de la société populaire, était fort patriote ; c'était même lui qui avait pris l'initiative du changement de nom de Saint-Aubin ; mais il avait pour ennemi un nommé Dubal, agent commissionné des représentants, qui, désirant faire nommer juge de paix, à sa place, un de ses parents, essaya de trouver Anger en faute. Il avait paru plus commode et plus économique à celui-ci de réunir chez lui la société populaire, bien que les séances dussent se tenir à l'église ; Dubal l'accusa de chercher par là à dissoudre la société. La veille de Noël, Leprince, officier municipal, fit annoncer par le tambour de ville que le curé constitutionnel de Liffré allait venir dire la messe de minuit ; il y eut grand émoi chez les patriotes ardents qui virent là une manœuvre fanatique, dans laquelle ils accusèrent Anger d'avoir trempé. Chose plus grave, on prétendit qu'il parlait mal de Marat.

Anger établit de la façon la plus claire qu'il était innocent des deux dernières accusations ; il reconnut avoir réuni chez lui la société populaire, mais seulement dans un but d'économie ; chez lui ces réunions ne coûtaient rien, à l'église elles eussent nécessité des frais d'éclairage auxquels les ressources dont on disposait n'eussent pu suffire. Il fut acquitté.

Defiennes, qui avait vigoureusement soutenu l'accusation, en fut mécontent ; et il inscrivit tout au long son réquisitoire sur le registre des jugements. Son étendue ne permet pas de le citer tout entier, et c'est dommage ; son exorde mérite au moins d'être connu. On y verra que le bon sens et la langue française ne recevaient pas de Defiennes un meilleur traitement que les accusés.

« Des juges intègres et révolutionnaires, dont le titre des fonctions est d'abréger les formes, doivent s'attacher seulement à découvrir la vérité ; jugez d'après elle, et écartez enfin tout discours métaphorique ; la vertu doit être dépouillée de toutes astuces, autrement ce n'est que perfidie. L'expérience ne nous a que trop démontré que des hommes, à qui on a prodigué le titre de vertueux, n'ont été que des monstres organisés.

La Révolution ne nous a-t-elle pas produit dans ce genre Pétion, maire de Paris ? Roland, ministre ? qui tous deux sont hors la loi ......

A l'aspect du tableau zéminant (sic) de la liberté et de l'égalité, ces hommes, avec des moyens, s'emploient en tous sens, pour prouver au peuple qu'ils ne veulent que son bonheur, tandis que l'expérience nous a prouvé qu'ils ne voulaient que l'asservir et lui redonner les mêmes fers...... ».

Cette éloquence zéminante toucha le juge Rémacly ; car, après ce réquisitoire, il écrit sur le registre qu'il a jugé conformément aux conclusions de l'accusateur.

Brutus Magnier tomba malade le lendemain de ce jugement. Atteint d'une fièvre putride et maligne, il resta, du 26 nivôse au 4 germinal , dans l'impossibilité de remplir ses fonctions de président ; il fut remplacé par Lefébure qu'on nomma vice-président.

Defiennes avait conseillé à ses collègues d'écarter tout discours métaphorique, de juger sans phrases ; mais le Tribunal qui faisait imprimer, afficher et distribuer ses jugements, pensait obtenir de grands résultats par la manifestation de ses sentiments ultra-révolutionnaires ; il continua donc à en faire grand étalage. Du 26 au 29 vingt-six Vendéens ou Chouans de Fougères furent exécutés ; les jugements, qui les condamnent marquent comme une recrudescence d'exaltation et de fièvre révolutionnaire. En voici quelques extraits :

« Trop longtemps les scélérats brigands de la Vendée ont fait couler le sang de nos braves frères d'armes et les pleurs de nos parents ; il est temps enfin que leur infâme sang coule ignominieusement sur l'échafaud ...... Vengeance contre les perfides qui ont levé l'étendard de la révolte contre la République ! Tels sont les cris de tous les amis de la liberté et de l'égalité, qui abjurent à jamais la horde affreuse de pareils monstres, qui souillant de leurs crimes la terre sur laquelle ils marchent, n'ont cherché qu'à rétablir la Royauté ». (26 nivôse).

« Ces montres ne devaient-ils pas bien s'imaginer qu'il leur était impossible de résister aux forces invincibles des Français qui connaissent le prix de la liberté, sans oublier celui de cette douce égalité ! Ne pensaient-ils pas se persuader que s'ils échappaient à une mort prochaine, que devaient leur donner si justement nos frères d'armes, qu'ils sauraient la trouver, soit en tombant sous le glaive vengeur de la loi, soit en périssant dans les bois et forêts, seul endroit qui leur convenait pour cacher leur honte !

Tous ces traîtres sont aux abois...... Ils ont affaire à des juges intègres qui ont autant de plaisir à faire couler sur l'échafaud leur sang impur qu'ils avaient de satisfaction à teindre la terre de celui des braves défenseurs de notre patrie (28 nivôse).

Il faut que tous les traîtres périssent, et que, les noms de ces scélérats voués pour toujours à l'infamie, leurs têtes le soient à l'échafaud.

… Il est urgent de délivrer le sol de la liberté et de l'égalité de pareils monstres, pour ne le voir à l'avenir que fréquenté par un peuple de frères et d'amis » (30 nivôse).

Ces injures jetées par des juges à ceux qui comparaissaient devant eux, ces cris de rage furieuse, comme on en entendait dans les clubs les plus violents, se peuvent-ils nommer des jugements ?

Ici finit ce qu'on peut appeler la série vendéenne des accusés ; tous les contre-révolutionnaires qui comparaîtront devant la Commission à partir de ce moment, appartiendront presque exclusivement à l'Ille-et-Vilaine. Il y eut, du 27 nivôse au 17 pluviôse, un moment de répit pour les contre-révolutionnaires ; la Commission acquitta tous ceux qui comparurent devant elle.

Du 1er au 10 pluviôse le Tribunal ne jugea guère que des militaires ; il s'agissait toujours de vols, de rapines dont se rendaient si souvent coupables ces troupes indisciplinées. Les peines appliquées étaient sévères. La Commission condamne à cinq ans de fers un soldat coupable d'avoir volé un mouton, et à trois mois de prison deux de ses camarades « qui avaient participé à la manducation du mouton ». Elle ajoute ces excellents conseils :

« Il ne suffit pas pour un bon républicain de combattre l'ennemi de la patrie, il faut encore qu'il sache respecter les propriétés de l'habitant des villes et des campagnes et les lois de son pays ; et c'est là où gît l'intrépide valeur et les vertus qui constituent le fier soldat de la République…

Si le défenseur de la liberté et de l'égalité croit qu'il a parfaitement rempli son devoir, quand il a terrassé le vil esclave qui veut s'opposer à l'accomplissement de son bonheur, il se trompe ; car il en existe un prescrit au véritable républicain, qui est celui de savoir respecter le droit de l'hospitalité et la propriété des citoyens ».

Le dernier paragraphe s'adresse à un soldat républicain accusé de tentative de viol. Si le style est faible, les idées sont excellentes. Le Tribunal ne pouvait conserver longtemps ce ton juste et simple ; il lui fallait des phrases plus bruyantes, des périodes plus sonores. Il condamne à deux ans de fers deux officiers qui avaient volé des indemnités de route, et fait précéder cette condamnation de cette sorte d'élégie :

« Liberté sainte ! Égalité sacrée ! Sont-ils encore éloignés ces jours heureux, où vous ne compterez parmi vos défenseurs que des fiers et vertueux républicains !

O chère patrie ! Que d'ennemis tu as à combattre ! Que de traîtres tu as à punir ! Que de dilapidateurs tu as à réprimer ! Mais rassure-toi, tous tes ennemis seront vaincus ; tous les traîtres périront sous la hache de la loi ; et les concussionnaires et les dilapidateurs de tous les genres, couverts de vols et de rapines, recevront le prix de leurs forfaits.

Déjà tes armées victorieuses et invincibles marchent de victoire en victoire, anéantissent le despotisme et les satellites des brigands couronnés ; la hache de la loi fait tous les jours justice des traîtres et des restes épars des brigands de la Vendée ; des juges révolutionnaires, la loi à la main, sauront débarrasser le sol de la liberté des vampires qui la rongent et montrer à l'Europe entière et aux tyrans qui l'oppriment et qui nous ont tant calomniés, qu'au milieu d'un gouvernement révolutionnaire, jusqu'à nos jours inconnu, tout se fait par les lois, et que c'est par elles que le crime est puni et la vertu récompensée ! ».

(Hippolyte de la Grimaudière).

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