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SAINT MELAINE, ancien évêque de Rennes au début du VIème siècle.

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A quelques lieues de Redon, autour des maisons du village de la Blandinaye, en la commune de Brain, s'étend une assez vaste propriété jonchée de briques romaines. Elle était située naguère dans le diocèse de Vannes et appartient aujourd'hui à celui de Rennes. Ce fut là, dans le manoir de Plaz — ancien nom de Brain qui répond au Placium de son premier biographe (Acta sanctorum I, p. 328) — que vint au monde, le 6 Janvier de l'an 442 ou 456, Melanus, en breton Melan, quelquefois appelé aussi Méléan, Melen, Melani.

En passant, cueillons une légende. Un jour qu'il gardait ses troupeaux, il alla sans permission prier pendant plusieurs heures dans un oratoire voisin. On s'aperçut de cette fugue, aussi, quand revint le pieux pastour, sa mère s'empressa-t-elle de le fustiger avec une poignée de genêts. Ce châtiment, mérité peut-être et sans doute douloureux, eut un résultat inattendu. Depuis cette époque, alors que les genêts foisonnent aux alentours, il n'en a plus jamais poussé sur le territoire de Brain.

Melaine joignait à une figure agréable une douce affabilité, une prudence rare, et une tempérance qui faisaient l'admiration de tous ceux qui le connaissaient. Son cœur était dévoré de zèle, et il dompta de bonne heure par de dures austérités sa chair qu'il rendit obéissante à son esprit. Cette vie tout angélique le fit entrer, vers l'âge de dix-huit ans, dans le monastère qu'il avait fondé sur son domaine patrimonial, où, après avoir étudié la théologie, il fut ordonné prêtre, et dont il devint l'Abbé.

Il continuait là son existence cachée en Dieu, quand Amand, évêque de Rennes, accablé d'une maladie grave, l'appela auprès de lui. Melaine obéit, et en sa présence, quand les principaux du clergé et du peuple furent réunis, il déclara que, comme le Seigneur le lui avait manifesté, il devrait être son successeur. Aussi, lorsque les obsèques du saint pasteur furent célébrées, un grand nombre d'ecclésiastiques allèrent trouver Melaine dans sa retraite et, malgré sa résistance, l'élurent par acclamations pour leur évêque.

Parvenu à cette haute dignité qu'il n'avait acceptée qu'en tremblant, le nouveau prélat, loin de rien retrancher aux austérités de sa vie claustrale, se crut obligé, pour représenter en sa personne le Dieu crucifié qu'il prêchait, de redoubler ses veilles et ses macérations. Il passait une partie de ses nuits en prières et ses jours dans l'exercice des bonnes œuvres. Mais, tout en observant ses pratiques habituelles, il fut obligé, à son grand regret, de modifier sa manière de vivre : « Autrefois, disait-il avec une certaine amertume, je n'avais presque à songer qu'à moi-même, maintenant il faut que je travaille au salut des autres ». En effet, après avoir évité soigneusement la société des hommes, il se voyait mêlé à une multitude d'affaires qui le mettaient en rapport continuel avec son peuple. Autant d'épreuves à subir, autant de croix à porter. Les Actes de sa vie, écrits peu de temps après sa mort, relatent un grand nombre de miracles qu'il opéra. La plupart sont demeurés inconnus par suite de l'humilité du pieux évêque. Pour éviter les atteintes de l'orgueil, il avait soin, lorsqu'il entreprenait quelque guérison miraculeuse, de faire usage d'eau, ou d'huile bénite, afin qu'on attribuât à la vertu de ces objets consacrés ce qui n'était en réalité dû qu'à sa sainteté personnelle. Nous nous bornerons à n'en citer que quelques-uns.

Vers la fin du Vème siècle, ou au commencement du VIème, un vieillard du pays de Vannes, ayant perdu son fils unique, dit à ses amis : « Portez le corps de mon enfant au bienheureux Melaine ; j'ai confiance que lui qui prêche le Dieu vivant pourra le rendre à la vie ». Le cadavre est présenté à l'évêque, le père vient lui-même, criant avec larmes et sanglots : « Homme de Dieu, je crois que tu as le pouvoir de ressusciter mon fils d'entre les morts ». Autour du groupe composé de Melaine, du défunt et de son père, une grande foule, haletante d'émotion et de curiosité, s'était amassée qui demandait, elle aussi, un miracle. Melaine se tourne vers elle et lui dit : « O Vénètes, à quoi bon faire des miracles devant vous au nom du Christ, puisque vous refusez obstinément de recevoir la foi ? ». La foule interpellée répond : « Si tu ressuscites cet enfant, sois sûr que nous croirons tous au Dieu que tu prêches ». Alors l'évêque dit une prière, posa une croix sur la poitrine du mort, et l'enfant revint à la vie. Et la foule stupéfaite de s'écrier : « C'est assez ; nous croyons tous au Dieu de Melaine ». En effet, peu de temps après, presque tous les témoins de cette scène furent baptisés par le pontife (DE LA BORDERIE. — Loc. cit. I, p. 265).

Un paralytique qui languissait depuis de longues années, et dont la confiance en Dieu était demeurée entière, avait perdu toute foi dans l'habileté des hommes. On le présente à Melaine qui verse sur son corps de l'huile bénite. Aussitôt le malade sent circuler dans ses veines une vigueur nouvelle et il est complètement guéri. La reconnaissance l'attacha à son bienfaiteur dont il ne voulut plus se séparer ; renonçant au monde qui l'avait délaissé dans son infortune, il embrassa la vie religieuse. — Vers le même temps, on déposa aux pieds de l'évêque un homme, porté sur les épaules de ses amis, dont une infirmité cruelle nouait les deux jambes. Touché de compassion, Melaine lava la partie malade de ce malheureux avec de l'eau chaude, et celui-ci, se levant, se mit à marcher d'un pas assuré. Lui aussi, comme le paralytique, offrit pour une telle faveur toute sa personne à l'évêque de Rennes, et se fit son serviteur pour le reste de ses jours. Ses descendants continuèrent à payer après lui la dette de sa gratitude. A l'époque où vivait le biographe qui rapporte ce fait, l'un d'eux s'était établi auprès du sépulcre du saint, dont la garde lui avait été confiée (Roumain DE LA RALLAYE. — Vies des Saints de Bretagne, p. 8).

En sa qualité d'évêque, Melaine crut de son devoir de s'occuper des affaires publiques, des questions qui troublaient le monde. Parmi ses supérieurs, ses inférieurs, ses égaux, personne ne savait aussi bien que lui gagner par son éloquence tous ceux avec qui il s'entretenait. Ces précieuses qualités, ce charme d'esprit et de parole le firent connaître de Clovis, le séduisirent, et il trouva en lui un utile conseiller, un habile négociateur, quand il voulut unir sous son sceptre, pour le plus grand bien de l'Eglise et de la Gaule, les Gallo-Armoricains et les Franks. Le roi lui en garda une telle reconnaissance et reconnut si bien ses services que, pendant tout son règne, il continua, surtout dans les questions religieuses, de demander et de suivre ses avis : « Par les conseils de Melaine, dit son biographe, Clovis construisit beaucoup d'églises nouvelles, releva celles qui étaient en ruines, érigea nombre de monastères, combla d'honneurs les serviteurs de Dieu de quelque ordre qu'ils fussent, et travailla constamment à développer le culte. Par ses conseils aussi et ses exhortations, il soulagea très abondamment la misère des pauvres, et rendit exactement la justice à ses peuples ».

Enfin, en l'an 511, quand Clovis, maître de la Gaule, au faîte de sa gloire, voulut couronner son œuvre en consacrant dans une assemblée solennelle l'alliance intime de l'Eglise catholique et de la monarchie des Franks ; quand il convoqua dans ce but tous les évêques de son royaume — trente-deux — en un synode à Orléans pour réfuter les objections des Ariens et proclamer les véritables maximes de la foi catholique, ce fut l'ami, le conseiller toujours écouté de Clovis qui s'imposa comme le directeur, l'inspirateur, l'âme de ce grand concile national, et qui y brilla, comme la lumière, comme le vaillant porte-étendard de toute l'Assemblée (DE LA BORDERIE. — Loc. Cit. I, p. 330). Ce Concile d'Orléans fut un triomphe: « Le trône et l'autel ne furent plus séparés, les deux pouvoirs marchèrent d'accord vers le même but et réglèrent de concert les intérêts moraux et matériels des peuples » (PETIGNY. — Etudes sur l'époque mérovingienne, II, p. 552). Cette œuvre politique, historique, dans laquelle Melaine eut un rôle essentiel et capital, cet accord entre l'Eglise catholique et le peuple Gallo-Frank, ce fut en toute vérité la création de la France.

Au début du VIème siècle, un dignitaire du nom d'Eusebius sortit de Vannes avec son armée et se rendit en la paroisse de Comblessac. Là, fort irrité, on ne sait pour quel motif, il fit arracher les yeux et couper les mains à de nombreux habitants. La nuit suivante, il fut pris de douleurs atroces qui mirent ses jours en danger, et sa fille, Aspasie, qui l'accompagnait dans cette expédition, en proie à des crises nerveuses qu'elle n'avait jamais subies, se mit à écumer et à se rouler à terre comme possédée du démon. Les médecins déployèrent toute leur science sans leur donner aucun soulagement. Désespéré, ne sachant où trouver secours, Eusebius apprend que tout près de lui, à six lieues de là, dans le monastère de Plaz où il aimait à venir se délasser de ses fatigues, résidait en ce moment un homme merveilleux, grand serviteur et grand favori de Dieu, le pieux évêque de Rennes. Eusebius l'envoie fort humblement supplier, au nom de la charité, de venir le visiter, et lui fait préparer un logement dans la meilleure villa de la bourgade. Peu de temps après, avec quelques-uns de ses moines, Melaine arrive, s'approche du lit d'Eusebius, reçoit sa confession, lui impose une forte pénitence et, le frictionnant trois fois avec de l'huile bénite, le guérit ainsi que sa fille. Puis, à la sollicitation de celle-ci, pour témoigner sa reconnaissance à son sauveur, il lui donna par une charte scellée toute la paroisse de Comblessac (DE LA BORDERIE. — Loc. Cit. p. 332).

Melaine fut ravi à la vénération universelle de ses diocésains et de tous les chrétiens de la région armoricaine dans son monastère de Plaz, où il venait si souvent se reposer des tracas de sa charge épiscopale. Il eut un pressentiment certain du jour de sa fin et, pour disposer ses disciples à la pensée de ne plus le voir, il leur annonça de bonne heure le moment où ils devaient le perdre. Ce jour fut célui qu'à l'avance il avait désigné, le 6 Novembre 530. Le bruit de sa mort, promptement répandu, amena aussitôt à Plaz les évêques des diocèses voisins liés avec le défunt, tels Aubin d'Angers, Lô de Coutances, Victurius du Mans, et une foule de prêtres du diocèse de Rennes. Après la veillée funèbre, on déposa le lendemain matin dans une grande barque, où entrèrent les évêques, le corps du pieux pontife. D'autres barques suivaient, chargées de peuple, de prêtres, de moines, chantant des psaumes et des litanies. Tout ce cortège funèbre qui aurait bien dû inspirer le talent d'un peintre, remonta la Vilaine jusqu'à Rennes, et vint prendre terre au sud de l'agglomération que formait alors la ville, vers le point aujourd'hui occupé par l'escalier du Carthage, ou le bas de la rue de Rohan actuelle.

Là, contre la muraille, se dressait une tour où douze voleurs se lamentaient en attendant la mort. Au bruit des chants et de la procession funèbre, informés que cette pompe se déploie autour du corps du bon évêque, ces malheureux lui adressent une fervente prière, et sollicitent de sa miséricorde — en ce jour où il triomphait au ciel — leur délivrance sur la terre. Tout à coup un bruit sourd et fort comme un coup de tonnerre se fait entendre, le mur de la tour se fend du haut en bas, par cette brèche les voleurs sautent vivement, et sans doute vont grossir le cortège funèbre de leur libérateur. La procession contournant l'enceinte murale de la ville, se rendit au cimetière public situé sur le terrain occupé aujourd'hui par la partie de la promenade du Thabor, dite carré Du Guesclin, la place Saint-Melaine et le jardin de la Préfecture. Le corps du grand évêque fut inhumé au lieu où se dresse actuellement l'église qui naguère encore portait son nom.

Pendant longtemps le tombeau, entouré de la vénération publique et des incessantes prières du peuple, ne fut recouvert d'aucune construction. A la fin du VIème siècle, les fidèles élevèrent au-dessus un édicule d'une prodigieuse hauteur, mais tout en bois, avec une toiture de tuiles. Un jour, le feu prit, on ne sait comment, dans la charpente qui, tout embrasée, s'abattit sur le sol avec un grand fracas. Une des poutres en flammes tomba sur le sépulcre de saint Melaine qui n'était recouvert que d'un voile de lin. Sous un tel choc ce voile aurait dû être dix fois brûlé, pulvérisé. Cependant, dit un contemporain, « quand l'incendie s'apaisa, le peuple, jetant de grands cris, courut au sépulcre, on écarta un amas de tisons enflammés, et on trouva, à la stupéfaction universelle, le voile de lin intact » (GRÉGOIRE DE TOURS. — Gloria confessorum, cap. 55). Après un tel prodige, l'église plus solide qu'auparavant fut bien vite relevée, on y mit des clercs, des moines pour la garder, et bientôt il y eut là un monastère qui s'appela naturellement l'abbaye de Saint-Melaine.

Cette église, qui présente tous les caractères de l'architecture bénédictine, est un vaste édifice, où l'on trouve réunis les styles du XIème, XIIème, et XIIIème siècles. En effet, la partie principale, le bas de la nef et le transept sont de 1032 et de 1054. La nef et le chœur ont été bâtis au XIIIème siècle. La tour, romane à sa base, fut continuée au XIVème siècle et terminée en 1672. Elle est surmontée d'une statue de la Sainte Vierge, car, en 1844, sur les instances et par une fantaisie personnelle et regrettable du curé, M. l'abbé Meslé, c'est à elle que l'église fut dédiée. La très sainte Mère de Dieu ne nous en voudra pas de penser que, dans une ville où elle possédait déjà deux sanctuaires célèbres, elle n'avait nullement besoin de cette substitution, si contraire à la vraie piété, et qu'un chanoine de Quimper qualifie de « tripotage liturgique » (Albert LE GRAND. — Loc. cit., annotations p. 574). Ainsi saint Melaine, ce grand homme, ce grand saint, un des principaux apôtres de la contrée qui lui doit l'inappréciable bienfait de la foi, n'a plus pour perpétuer son souvenir que les restes branlants de l'abbaye, qu'une place et une rue qui portent son nom — jusqu'à quand ? Dieu le sait — et qu'une pauvre statue dans l'église construite sur sa tombe, église qui lui fut consacrée pendant des siècles, et qui ne fut rebâtie qu'avec des dons faits à sa mémoire ! « C'est une scandaleuse ingratitude » (DE LA BORDERIE. — Loc. cit. I, p. 331. Note).

Le corps de saint Melaine, lors de l'invasion de Normands, fut porté, en 853, à Bourges. Plus tard on le transporta à Preuilly, en Touraine, où l'archevêque de Tours en fit la levée avec les cérémonies d'usage pour le placer dans une châsse d'argent. L'abbaye de Saint-Melaine recouvra ensuite la plus grande partie des reliques de son saint patron qu'en 1679, l'Abbé de cette abbaye, Jean d'Estrades, déposa dans un reliquaire neuf. Plusieurs de ses ossements sont conservés à Redon et à la cathédrale de Rennes, l'église Notre-Dame en Saint-Melaine ne possède plus de lui qu'un morceau de tibia.

Les églises qui l'ont gardé pour patron sont : en Ille-et-Vilaine, Thorigné, Pacé, Châtillon-sur-Seiche, Andouilé, Mouazé, Cintré, Brain, Moigné, Montours, Cornillé, Domalain, Saint-Melaine, La Chapelle-Saint-Melaine et Lieuron. Dans le Morbihan : Meslan, Plumelin et Rieux. Dans le Finistère : Saint-Melaine de Morlaix et Moëlan. Des chapelles ont été élevées en son honneur ; en Ille-et-Vilaine : à Brain et à Maure ; dans le Morbihan : à Lignol et à Lanvénégen ; dans le Finistère : à Plobannalec ; dans les Côtes-du-Nord : à Plélauff et à Plufur.

(A. Millon).

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