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SAINT GUÉNOLÉ, fondateur de l'abbaye de Landévennec.

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Vers le milieu du Vème siècle, un homme illustre, appelé Fracan, qui était cousin d'un roi breton très fameux, accompagné de ses deux fils Guethenoc et Jacut, d'une fille Clervie et de leur mère Alba, traversa avec une suite peu nombreuse l'Océan Britannique et vint aborder en Armorique. Cherchant un lieu agréable et commode pour y fixer sa demeure, il s'établit sur la rivière du Gouët, à l'endroit où est aujourd'hui située la paroisse de Ploufragan, qui, en souvenir de lui, porte son nom. Ce fut là qu'il devint, en 461, père d'un troisième fils qu'il nomma Guénolé.

Fracan et Alba avaient fait vœu de donner à Dieu ce dernier de leurs enfants, mais il possédait tant de qualités aimables qu'ils ne pouvaient se résoudre à s'en séparer et ils remettaient sans cesse l'exécution de leur promesse. Un jour que Fracan était en train de surveiller des travaux agricoles qu'il faisait exécuter, il fut surpris par un terrible orage : le tonnerre grondait, les éclairs se succédaient sans interruption. Tout à coup, frappé par le feu du ciel, il tomba foudroyé. On se précipita à son secours et on l'entendit s'écrier : « Seigneur, ils sont tous à vous, sans exception je vous les consacre. Vous qui me les avez donnés, recevez-les et acceptez l'humble sacrifice que je vous en fais. Non seulement Guénolé, Seigneur, mais encore ses deux aînés et leur sœur, non seulement les enfants, mais aussi leur père et leur mère » (Dom LOBINEAU. — Loc. cit., I, p. 88).

Or, il y avait à 250 mètres de la côte Est de l'île de Bréhat, dans l'ilot de Lavré, un monastère qu'avait fondé un religieux, nommé Budoc, et dont il reste encore des ruines très reconnaissables et caractéristiques. Ce saint homme chassé, lui aussi, de la Bretagne insulaire par la persécution des Saxons, s'était réfugié là avec quelques compagnons qu'il avait assemblés. Il y avait en outre créé une sorte de séminaire, où il élevait avec beaucoup de soin et de succès dans l'étude des lettres un certain nombre d'enfants consacrés au service de Dieu. Sa réputation était grande dans tout le pays, et son mérite encore plus grand. Ce fut à ce maître éminent que Fracan conduisit lui-même son jeune fils, à peine âgé de sept ans, et il lui confia son éducation.

Guénolé resta dans le monastère de Budoc jusqu'à sa vingt-et-unième année, c'est-à-dire jusqu'en l'an 482. En ce temps-là la renommée de Patrice, le grand apôtre de l'Irlande, remplissait de son éclat le monde celtique. Ayant entendu un jour raconter ses vertus et ses miracles, Guénolé, enthousiasmé, eut l'idée d'aller vénérer ses reliques, car il était mort depuis quinze ans. Ne voulant pas remettre à plus tard son expédition, il décida de partir dès le lendemain matin avec des marchands dont le navire était mouillé à Bréhat. Mais, avant la fin de la nuit, la figure de Patrice illumina son sommeil de sa radieuse auréole, et le saint prescrivit à Guénolé de rester sur le continent pour se préparer à fonder bientôt une nouvelle colonie monastique. Budoc vit dans ce songe une manifestation de la volonté divine, et malgré la douleur que lui causait le départ de son jeune disciple, il lui donna onze de ses moines avec d'utiles et touchantes exhortations, bénit d'une main tremblante cet essaim sorti de sa ruche, et la séparation s'accomplit.

De l'embouchure du Trieu, Guénolé et ses compagnons, allant à l'aventure et cherchant pour s'établir un lieu commode, se dirigèrent vers le Sud-Ouest. Descendant de plus en plus vers la mer, ils finirent par la rencontrer à l'embouchure de la rivière du Faou, où ils aperçurent un îlot, qu'on appelle aujourd'hui Tibidi. Ne concevant la vie monastique que si elle était protégée contre le contact du monde par la barrière des flots, ils se jettent sur cet îlot, y bâtissent un oratoire et alentour des logettes, bêchent et retournent le sol pour faire un jardin.

Le sol... il n'était qu'une roche à peine couverte de terre, trop étroite pour nourrir les douze cénobites, et l'îlot n'était qu'une table rase sans protection contre le vent. Mal abrités, presque sans pain, ne vivant que du produit de leur pêche, ils passèrent là trois années très dures. Enfin, exténués de fatigue, ils se décidèrent à quitter pour jamais ce terrain ingrat.

En regardant vers le Sud-Ouest, ils aperçurent alors une côte couverte de bois. C'était une Chersonèse en miniature, baignée au Nord par la rade de Brest, à l'Est par la rivière du Faou, au Sud par l'Aune. Un isthme étroit reliait du côté de l'Ouest à la grande péninsule de Crozon cette presqu'île « lieu très doux et très agréable, le premier dans le pays à voir chaque année les fleurs s'ouvrir, le dernier à voir les feuilles tomber, beau jardin émaillé de fleurs de toutes les couleurs » (Wrdisten). Dans cette calme solitude, excellent abri pour un nid monastique, Guénolé s'installa en 485 avec ses disciples. Pour exprimer la paix profonde de ce séjour, il appela son monastère « le monastère bien abrité — Lann Tevennec » ; nous disons par euphonie Landévennec. Tout le pays était inhabité, inculte, couvert de bois, une vaste forêt. Les moines s'armèrent de cognées pour jeter bas les grands arbres. Puis de bûcherons devenus charpentiers, les uns équarrirent les troncs abattus dont ils firent les murailles de leur église et de leurs cellules monacales, pendant que d'autres cultivaient le sol nettoyé et le préparaient à recevoir la semence (DE LA BORDERIE. — Loc. cit. I, p. 316 et 317).

Dans les deux ou trois années qui suivirent cette fondation, la haute vertu de Guénolé, l'ardeur de sa charité, les nombreuses guérisons obtenues par ses prières répandirent son nom dans toute l'Armorique. Il parvint vite, à neuf lieues de là, à Quimper et au roi Gradlon. Celui-ci, curieux de voir ce moine tant vanté, se rendit, vers 485 ou 487, à Landévennec et se présenta à l'Abbé. Voici comment son ancien biographe raconte cette scène :

« Gradlon s'avance en tremblant et tombe prosterné devant lui. " Quels présents pourraient t'être agréables? lui dit-il. J'ai de grands biens, une grande puissance, de vastes territoires, des coffres remplis d'or et d'argent. Ce que je te donnerai, nul n'y touchera, nul ne pourra rien changer à mes dispositions ; tu jouiras à tout jamais de mes dons comme s'ils étaient émanés du ciel même ». Le saint, lui tendant la main, le relève et lui répond en souriant : « O roi, est-ce un piège que tu veux me tendre avec tes dons ? Si j'attachais quelque prix à toutes ces vanités, serais-je venu m'ensevelir dans ce désert ? N'aurais-je pas beaucoup mieux fait de vivre sur les domaines de mon père, plutôt que de déchirer, le corps plié en deux, le sol avec la houe pour en tirer une maigre pitance ? Je ne me laisserai pas séduire par ces richesses périssables, car celui qui s'y attache court grand risque d'être exclu des richesses éternelles ». Puis il lui adresse un beau sermon, dans lequel il dit au roi que toute sa puissance n'est rien, que toutes ses richesses l'aideront beaucoup à aller en enfer, qu'il y ira certainement s'il fait le mal, et n'évitera sa perte qu'en s'humiliant et se convertissant au bien. Ce fier désintéressement, la hauteur de cette morale et la hardiesse de cette parole renversèrent et conquirent l'âme de Gradlon ; tout ému, d'une voix entrecoupée, à peine put-il répondre : « Ami du Christ qui est Dieu, ordonne tout ce qu'il te plaira pour le service du Très-Haut, je suis prêt à l'exécuter ». Et depuis lors, devenu très doux, grâce aux bons conseils de Guénolé, il exerça sa puissance avec la plus exacte justice (WRDISTEN. — Vie de S. Guénolé, II, 17).

Un autre de ses biographes exprime ainsi, en quelques mots, le changement accompli dans l'âme du roi sous la douce et forte influence du fils de Fracan : « Dans les premières années de son règne, Gradlon exerçait la royauté d'un cœur farouche, mais, étant venu chercher les enseignements de Guénolé et ayant reçu sa bénédiction, il s'adoucit et gouverna très pieusement son royaume terrestre » (Bollandistes). Le principal résultat de cette influence fut la propagande du Christianisme en Cornouaille et l'organisation religieuse de tout le pays.

Comme il arrive d'ordinaire pour les personnages qui qui ont joué dans le monde un rôle important, il s'est formé autour du nom de Gradlon un cycle légendaire. La plus ancienne branche de ce cycle est la légende représentée par le lai de Graelent Meur de Marie de France au XIIème siècle. Cette légende, moins vieille peut-être qu'on ne le croit, raconte la jeunesse de Gradlon, les débordements de sa fille Dahut, l'histoire de la ville d'Is et la submersion de la cité par une punition du ciel. Nous ne la raconterons pas ici, car, à nos yeux, elle n'a rien d'historique (DE LA BORDERIE. — Loct cit. I, p. 323).

L'abbaye de Landévenec première et principale source des institutions monastiques de Bretagne, étendait sa renommée dans toute la péninsule. Elle était devenue, par le travail de ses moines, par les dons qu'elle avait reçus, fort riche, non en trésors monétaires, car Guénolé disait : « L'or ne convient pas aux moines », mais en trésors agricoles : beaux champs, belles prairies, beau bétail, surtout en luxuriantes moissons, dont les récoltes annuelles faisaient de cette maison un grenier d'abondance. Qu'on en juge par le trait suivant.

A la pointe de la presqu'île de Crozon, existait un nid de brigands habité par quatre frères, très bons marins et meilleurs larrons, pillant sur terre et sur mer. Ayant souvent ouï parler de la richesse des moines de Landévenec et croyant qu'il s'agissait d'or et d'argent, vers minuit ils arrivent en barque devant le monastère pour le voler. L'un reste pour garder le bateau, les autres escaladent les clôtures, forcent la porte des magasins, furètent partout, bien étonnés de ne trouver que du blé, et surtout des monceaux d'orge qu'on venait de récolter. A défaut de mieux ils en remplissent leurs sacs jusqu'à la gorge, et veulent pour se rembarquer regagner le rivage. Mais le premier, trop chargé, tombe sous le faix et se casse la jambe ; un autre s'enfonce dans un bourbier, et n'en peut sortir ; le troisième, perdu dans la nuit, tourne le dos au rivage et, au lieu de gagner la barque, va se heurter contre la porte du monastère. Le quatrième, resté dans le bateau, ne voyant pas revenir ses frères, et croyant qu'ils l'ont abandonné pour se partager sans lui tout le trésor, crie et maugrée à tue-tête.

Le jour arrive. Guénolé, en inspectant les magasins, avait deviné le vol, et voulut voir s'il découvrirait trace des voleurs. Après l'office de Prime, il fait avec quelques-uns de ses religieux une promenade vers la grève. Il trouve les trois misérables tombés sous leurs sacs, accablés, c'est le cas de le dire, sous le poids de leur crime. Après les avoir remis sur pied, le bon Abbé les gronde un peu : « Pourquoi avoir agi si sottement? Pourquoi n'être pas venus de bonne amitié demander à nos frères une part des fruits de leur travail ? Ils vous auraient donné ce qu'il vous fallait, vous l'auriez emporté de leur consentement. Au lieu de cela vous avez préféré violer la clôture de notre maison et vous rendre coupables de vol, en dépit de la loi de Dieu qui dit : " Tu ne voleras point ". Mais pourquoi s'en étonner ? A qui écoute le diable, tout péché semble agréable ». Et comme les voleurs confus ne répondaient rien : « Allons, leur dit-il, retournez chez vous, emportez vos sacs et ce qu'ils contiennent et, quand vous aurez quelque besoin, adressez-vous à nous, avec l'aide de Dieu nous y satisferons sur-le-champ ». Les trois brigands se convertirent, devinrent moines de Landévenec, et donnèrent à cette abbaye leur domaine de Ros-Catmaël, aujourd'hui Roscanvel. Donc, non pas seulement greniers d'abondance, mais magasins généraux de la charité, à ces monastères tous dans la nécessité pouvaient puiser, nul n'était repoussé et refusé, pas même le larron (DE LA BORDERIE. — Loc. cit. I, p. 376 et 377).

L'exemple que nous venons de raconter et beaucoup d'autres que l'on pourrait citer montrent que le caractère propre de la sainteté de Guénolé fut d'être attrayante et communicative. Il exerça tout d'abord un grand ascendant sur ses parents qui lui avaient donné une première éducation empreinte d'un caractère si religieux, puisqu'il fit de son père et de sa mère un saint et une sainte que vénère l'Eglise de Bretagne, ainsi que de ses frères saint Jacut et saint Guéthenoc, et de sa sœur sainte Clervie. En outre, parmi ses disciples formés à l'école de celui qu'on appelait « le père des moines », et qui fondèrent des monastères dans tout le pays environnant, on trouve toute une pléiade de saints : à Châteaulin saint Idunet, à Beuzit près de Landerneau saint Conogan, à Lanriec saint Rioc et saint Guenaël, saint Balay, saint They, saint Gozien, Saint Harnul, saint Morbret, saint Ratian, saint Vignon, etc... (Albert LE GRAND. — Loc. cit. Annotations p. 73).

Pour posséder une telle influence, si forte et si impérieuse, la vertu de Guénolé devait être un foyer intense et rayonnant. Ce foyer fut alimenté par des pénitences continuelles et des mortifications extraordinaires. Depuis qu'il avait quitté la maison de son père, il ne portait ni toile, ni habits de laine, et, quand il fut devenu moine, il n'était vêtu que de peaux de chèvres qui cachaient un rude cilice. Il n'avait pas d'autre lit que le sable ou la cendre, avec pour oreiller une pierre. Sa nourriture consistait en quelques herbes ou quelques racines cuites, mêlées avec un peu de farine d'orge, sans aucun autre assaisonnement que du fromage bouilli. Il ne buvait que de l'eau. Pendant le carême, il ne mangeait dans toute la semaine que deux fois, et passait ses jours et ses nuits en oraison. Outre l'office commun dont il ne se dispensait jamais, il récitait chaque jour tout le Psautier. Quelque âgé ou quelque infirme qu'il fût, on ne le vit jamais s'asseoir dans l'église et, debout ou à genoux, toute son attitude était empreinte de piété et d'un recueillement profond. Cette vie, si pénitente et si solitaire, et le silence qu'il gardait habituellement ne diminuaient pourtant en rien à l'égard de tous sa douceur et son affabilité ; les rigueurs qu'il exerçait sur lui-même ne l'empêchaient pas d'être toujours gai et, comme cette joie prenait sa source dans sa charité, elle ne nuisait ni à sa retenue, ni à sa modestie.

Il mourut le 3 Mars 532. La nuit précédente, durant son sommeil, une voix d'En-Haut l'avait averti de sa mort prochaine. Dès le matin, il réunit tous ses moines et leur fit ses adieux. Ceux-ci, à travers leurs larmes, se plaignant de l'abandon où son départ allait les laisser, il leur indiqua l'un d'eux pour lui succéder, mais simplement à titre de conseil, sans vouloir contraindre leur libre choix, puis il ajouta : « Préparez-vous, car aujourd'hui même, quand j'aurai chanté la messe, le Seigneur me rappellera à lui ». Et il continua de leur donner ses suprêmes instructions jusqu'à neuf heures du matin. Alors tous vont à l'église pour l'office ; le vénérable Abbé célèbre la messe et reçoit ensuite solennellement le corps du Christ. Puis, debout devant l'autel, appuyé sur deux de ses moines, il entonne le spaume d'actions de grâces, le Te Deum, et avec ce chant son âme, prenant son essor, s'envole vers Dieu.

L'abbaye de Landévenec fut détruite en 914 par les Normands qui la saccagèrent de fond en comble. Les moines, ayant pu soustraire à leurs profanations les restes de leur saint fondateur, les portèrent à Montreuil, dont plus tard les religieux ne voulurent pas se dessaisir. M. de la Borderie écrivit, dit-il, au curé de Montreuil sans recevoir de réponse. Dans la suite il répondit ceci : « La plupart de nos reliques ont été brûlées en 1793 ; une partie de ce qui a été sauvé est pêle-mêle. Pour saint Guénolé, il y a un os certain de dimensions moyennes ». Landévenec a donc perdu son trésor en perdant son abbaye. On possède pourtant quelques parcelles des reliques du saint Abbé, notamment : à Locquénolé, dans un buste du XIV ou XVème siècle, des fragments de son chef et d'un bras ; à la cathédrale de Quimper une dent ; chez les religieuses Ursulines de Quimperlé une partie de son chef, que Mgr Lamarche, évêque de Quimper, authentifia et permit d'exposer à la vénération des fidèles.

Saint Guénolé est le patron, en Bretagne : de Pierric, Batz, Landevarzec, Concarneau, île de Sein, Saint-Frégant, Locquénolé et Landévenec ; en Picardie : de Montreuil-sur-Mer, la Beaumerie et Cavron. Il y a des chapelles qui lui sont consacrées à Crozon, Ouessant, Scaër, Quimper-Guézennec, Quéménéven, Plourach, Ploumiliau, Pleyben, Penmarc'h, Bréhat, Tonquédec, Collorec, Pluguffan, Gourin, Quistinic, Priziac, Carantec, Plogoff, Plouguin, etc...

(A. Millon).

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