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LE DERNIER ACTE DE FRANÇOIS 1ER, DUC DE BRETAGNE (17 Juillet 1450)

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François Ier de Bretagne aussi connu sous le nom de François le Bien-Aimé est né le 11 mai 1414 à Vannes et mort le 19 juillet 1450 au manoir de Plaisance à Saint-Avé. Il est le fils de Jean V le Sage, duc de Bretagne, et de Jeanne de France, fille de Charles VI de France. A la mort de son père, le 29 août 1442, il devient comte de Montfort et duc de Bretagne.

Sceau de François Ier, duc de Bretagne.

Sceau de François Ier, duc de Bretagne.

La charte inédite, que nous donnons ci-après, étant vraisemblablement le dernier acte de François Ier, duc de Bretagne, nous reporte au chevet de mort du prince fratricide et semble un écho de la fin tragique de sa victime, de son frère Gilles. A ce double titre, ce document emprunte une certaine valeur. Qu'on nous permette une courte digression sur les circonstances qui en ont amené la rédaction.

Nous ne comptons pas revenir sur cette histoire, encore mal éclaircie, de Gilles de Bretagne et de ses démêlés avec François Ier ; toujours est-il qu'à partir du moment où, revenant du siège d'Avranches et traversant la grève du Mont-Saint-Michel, sur laquelle le mystérieux. Cordelier, confesseur de Gilles, vint lui apprendre la mort cruelle de ce dernier et l'ajourner au tribunal de Dieu, François tomba dans une sombre mélancolie qui le conduisit rapidement au tombeau. Les derniers instants du duc ont été dramatisés par les romanciers, sans doute pour faire pendant aux angoisses de l'agonie de Gilles. Peut-être a-t-on exagéré. Cependant, ce ne dut être qu'après avoir expié son crime par les tourments du remords, le repentir et de pieuses fondations, qu'un calme relatif permit au duc de régler, avec une parfaite lucidité, du reste, ses dernières volontés.

L'un de ces actes in-extremis, daté de son manoir de Plaisance, près de Vannes, le 16 juillet 1450, sous forme de codicille à son testament du 22 janvier 1449, est à bon droit regardé comme un monument de sagesse et de prévoyance. Le prince mourant y règle nettement le droit et l'ordre de succession au trône de Bretagne. Ne laissant que deux filles, il entendit maintenir dans son intégrité le principe établi par le traité de Guérande en faveur des mâles de la maison ducale. Il spécifia donc que Pierre, comte de Guingamp, son frère, devait lui succéder ; qu'à défaut d'héritier de ce dernier, la couronne revenait au Connétable de Richemont, Artur de Bretagne, leur oncle paternel, et qu'après lui, toujours à défaut de postérité masculine, le duché appartenait à François de Bretagne, fils du Comte d'Etampes, cousin germain du testateur, et auquel il donnait en mariage Marguerite, l'aînée de ses deux filles [Note : Le duc avait marié la cadette à Jean II, vicomte de Rohan]. C'était là une véritable prévision dés événements à venir, et le duc François, ainsi qu'on l'a remarqué, écrivait d'avance l'histoire chronologique de ses successeurs à la couronne de Bretagne, pendant trois règnes.

Le lendemain de cet acte, le 17 juillet 1450, nouveau codicille du duc, nouvelles fondations pour soulaiger sa conscience : « Item. Ordonnons que en l'abbaye de Bosquen (où Gilles avait été inhumé) soit faicte fondation solennelle, à l'ordonnance desdits exécuteurs, pour beau frère Gilles que Dieu pardoint, et services telz qu'ils adviseront » (D. Lobineau. Histoire de Bretagne, Pr. col. 1122). [Note : Le Musée de la Ville de Saint-Brieuc possède la statue tumulaire du prince Gilles. Cette effigie, fouillée assez grossièrement dans l'épaisseur d'un chêne pris sens doute dans la forêt de Bosquen, représente Gilles en chevalier armé en harnois blanc, c'est-à-dire avec l'armure à plates d'acier poli, le haubert couvert d'une cotte à manches courtes semée d'hermines, l'épée sur la jambe gauche tête nue à longs cheveux plats, mains jointes (absentes), les pieds chaussés de solerets à poulaines et appuyés sur un levrier. Ce monument qui mesure (avec son couronnement en forme de dais gothique protégeant la tête), environ deux mètres de longueur sur soixante centimètres de largeur, est en fort mauvais état en 1886].

Enfin, à mesure que les lueurs de l'autre monde font voir plus clairement au duc François l'énormité de son crime, sa soif d'expiation augmente. C'est de son vivant [Note : V. Charte inédite du XVIIème juillet 1450, ci-dessous] qu'il veut qu'on exécute ses dernières dispositions pieuses, et, ne songeant plus qu'au salut de son âme, à l'expiation de ses péchéz, à la descharge de sa conscience [Note : V. Charte inédite du XVIIème juillet 1450, ci-dessous], il dicte la charte suivante que n'ont point connue nos historiens bretons :

« FRANÇOIS, par la grace de Dieu, duc de Bretaigne, comte de Montfort et Richemont, à nos thésauriers, receveurs généraulx et particuliers présens et à venir, et à touz nos justiciers et officiers à qui de ce appartiendra, SALUT : Comme par nostre testament et derrène volunté Nous avons ordonné plusieurs fondations, tant à l'esglise de Vennes, Rhedon que ailleurs, pôr la dotaôn desquelz nous soit besoing promptement recouvrer finances, et que lesdictes fondaôns soient dottées et perpétuées, comme de tout nostre cueur faire le désirons, et aussy nostre dict testament acomplir en nostre vivant, por le salut de nostre âme, l'expiation de nos péchez et la descharge de nostre conscience. Sçavoir faisons que, nous confians à plein ès sens et loiaulté de nostre bien amé et féal Conseiller Maistre Jéhan Loret, iceluy avons commis et commettons par les présentes quant à recepvoir touz et chacune les deniers de nostre comté de Nantes, par luy et ses suffisanz commis pour lesquelz il respondra, à ce que d'iceux deniers il puisse acquitter les dotaôns desd. fondations et aultrement, selon nostre ordonnance accomplir nostre dict testament, lesquelz deniers de nostre dict comté, au tems à venir, avons ordonné et ordonnons par ces présentes à lad. exécution, sans qu'ils soient emploïez en aultre usaige. Si nous mandons, etc. Donné « en nostre manoir de Plaisance, le XVIIème iour de juillet, l'an M.CCCC.L. — Par le Duc et de son commandement et en son Conseil auquel Monseigneur Pierre, les évêques de Dol, Cornouaille, Sainct Malo et Sainct Brieuc, le Président, l'Aumosnier, Henry de Villeblanche, le Controlleur général et plusieurs aultres estoient ». Signé : P. Saoullet, et Scellé.

Peu après (car les auteurs sont partagés sur la date exacte du 17 ou du 19 juillet comme celle de la mort du Duc) [Note : Le 17, Jacob. de Guingamp et Le Baud ; le 19, Cr. ms. — (Voy. Hist. de bret., Dom Lobineau p. 646)], François Ier s'éteignait. Notre rigide historien, dom Lobineau, nous a laissé sur les derniers moments de ce prince une page empreinte à la fois de modération et de vérité :

« Le Duc, après avoir mis ordre de cette sorte à ses affaires, fit promettre avec serment à tous les seigneurs qui se trouvèrent auprès de lui, surtout à son frère, qu'ils exécuteroient fidellement toutes ses dernières volontés. Adressant ensuite la parole à son frère, il lui dit qu'il lui recommandoit la Duchesse sa femme, et ses filles, et tous ses serviteurs, dont la plupart avoient esté à leur père, ce qui estoit encore une raison pour les considérer d'avantage. Il l'exhorta à traiter ses sujets avec douceur, et à ne pas suivre son humeur sombre, qui le portoit à se cacher, lui représentant que les Bretons aimoient à voir leurs Princes, et que l'affabilité est le moyen le plus sûr de les gagner. Quand il eut cessé de parler, tous ces seigneurs fondant en larmes se retirèrent, de peur de lui estre incommodes. Le duc passa dans une autre chambre plus spacieuse, et pria l'Evêque de Landes, son confesseur, de lui apporter l'Eucharistie. Il voulut en mesme terms aller trouver la duchesse pour lui dire le dernier adieu, mais en aïant esté avertie, elle vint à sa rencontre à la porte de ceste chambre. Le Duc l'embrassa et lui dit : " M’ amie, je suis très fort malade ; j'ai ordonné à beau frère vostre estat et celui de vos filles ; je crois qu'il ne vous fauldra pas ; et vous prie que vous gouvernez saigement ; et adieu ". Il l'embrassa de nouveau et rentra dans sa chambre. Quand il eut fait sa confession, on apporta le corps de Nostre Seigneur. Le Duc se mit à genoux, sans permettre qu'on l'aidast, adora son Sauveur et se releva. Il aperçut dans ce moment que sa chambre estoit pleine de ses officiers et serviteurs ; il leur demanda pardon de ce qu'il ne les avoit pas aussi bien récompensés qu'il l'auroit souhaité, les assurant que c'estoit le seul regret qu'il avoit en mourant ; mais qu'il avoit ordonné à son frère d'avoir soin d'eux, et qu'il ne doutoit point qu'il les récompensast. Après cela il se remit à genoux, et reçut la Communion avec une dévotion touchante. Ensuite il demanda pardon de nouveau à ses gens et leur dit en s'attendrissant : " Mes amis, que l'estat où je suis vous serve d'exemple, j'ai esté vostre Prince et maintenant je ne suis plus rien ". Aïant dit ces mots, il fut dépouillé et mis dans son lit, où il reçut l'extrême-Onction. Aussitost, aïant pris une croix dans une main et un cierge dans l'autre, il entra en agonie, où il fut un ou deux jours, et décéda le 17 ou le 19 de juillet. Ainsi mourut dans la fleur de son âge, François Ier de ce nom, duc de Bretagne, Prince libéral et vaillant ; mais d'un esprit facile à prévenir contre ses plus proches, comme il ne paroist que trop par la mort déplorable de Gilles de Bretaigne son frère, qui est une tache ineffaçable pour la mémoire de celui qui tenant les oreilles fermées à la voix de la nature et du sang, ne les ouvrit qu'à celle de l'ambition et de la haine de quelques favoris » (D. Lobineau. Histoire de Bretagne. Edit. MDCCVII, p. 646).

Voir aussi   Seigneurs et familles de Bretagne "La famille Loret"

(M. Arthur du Bois de la Villerabel).

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