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LES BONNETS ROUGES

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Sommaire. - Troisième sédition à Rennes, le 17 juillet 1675. - Suite de cette sédition ; anecdote du chat pourri. - Nouvelles explosions de révolte dans la province, notamment dans les pays de Fougères et de Lamballe, et dans les quatre évêchés de Basse-Bretagne ; sédition de Pontivy ; incendie du château du Kergoët. - Inaction de M. de Chaulnes.

Le duc de Chaulnes était parti de Rennes, le 4 juillet, pour se rendre en Basse-Bretagne, sans prendre aucune précaution, aucune mesure sérieuse capable d'empêcher le retour de la sédition dans la ville d'où il sortait ; il aurait fallu pour cela en remettre de nouveau la garde à la milice bourgeoise, et c'est justement, comme on l'a vu, ce que le gouverneur ne voulait pas. Il se contenta seulement, cinq jours avant son départ (le 29 juin), de faire afficher à Rennes une nouvelle proclamation en date de la veille, où il démentait derechef les bruits qui avaient couru touchant la gabelle et l'impôt des blés, bruits dont l'influence fâcheuse, très considérable en Basse-Bretagne, s'était d'ailleurs à peine fait sentir dans la Haute. Au reste, il paraissait être si sûr du calme de Rennes qu'il ne craignit point d'y laisser sa femme avec deux de ses gardes, un page et quelques laquais pour toute escorte (Journal de La Courneuve).

Tout alla bien, en effet, la première semaine, et la seconde était déjà près de s'achever sans troubles, quand tout à coup, le mardi 16 juillet, les employés du papier timbré, qui, depuis le 20 mai, avaient rétabli leur bureau sous les basses voûtes du Palais, se prirent de querelle avec un clerc de procureur, et après quelques paroles se jetèrent sur lui et le battirent outrageusement. C'était là une véritable provocation ; le public en jugea ainsi, et les commis du timbre, de leur côté, le comprirent si bien, qu'aussitôt après cet exploit, ils enlevèrent de leur bureau leur argent, leurs effets de quelque valeur, et se tinrent eux-mêmes à l'écart pour voir venir l'événement. L'événement vint dès le lendemain (mercredi 17 juillet), sous la forme d'une émeute, qui, entre onze heures et midi envahit d'abord la place du Palais, puis fit irruption dans le Palais même, en hurlant contre le papier timbré. Cette émeute avait d'ailleurs un caractère fort particulier ; la foule qui la composait était sans armes ; seulement, en tête s'avançait un petit groupe d'hommes munis d'épées et de fusils - sept individus, suivant les uns (Journal de René de la Monneraye), dix à douze, suivant les autres (Journal de René de la Courneuve) - qui paraissaient moins encore les chefs de la sédition que les exécuteurs d'un arrêt préalablement rendu par cette multitude, accourue elle-même, non pour combattre, non pour agir, mais pour surveiller et pour assurer par sa présence la fidèle exécution de ses volontés. Aussi, quoique la foule eût envahi le rez-de-chaussée du Palais (que l'on appelait alors les basses voûtes), il n'y eut pourtant que le petit groupe d'hommes armés à assaillir le bureau du papier timbré. Le premier coup de hache fut porté, dit-on, par un joueur de violon de la rue Haute, appelé Pierre Daligault. Le bureau fut facilement enfoncé ; non seulement personne ne le défendit, mais personne ne s'y trouva, les commis (comme on l'a dit) ayant eu la précaution de s'absenter. Comme au jour de la première sédition, tout ce que renfermait le bureau, presse, timbres, machines, papier ordinaire ou papier timbré, tout fut pillé, dispersé, brisé, anéanti.

Pendant qu'une dizaine d'hommes accomplissaient sans obstacle cette exécution sous les yeux d'une foule nombreuse mais désarmée, qui se bornait à encourager et à applaudir, quelques bourgeois de la milice, s'étant armés à la hâte, assaillirent impétueusement cette grosse multitude avec une décharge de coups de fusils qui tua un des séditieux et en blessa trois ou quatre ; cela suffit à chasser les émeutiers de la place du Palais, mais non pas à dissiper l'émeute. C'est pourquoi les capitaines de la milice bourgeoise s'en allèrent immédiatement chez le gouverneur de la ville, M. de Coëtlogon, lui offrir de rassembler leurs compagnies pour écraser les mutins. A leur surprise, le gouverneur refusa, les remercia froidement, et dit qu'il n'était besoin de rien faire.

Ce rôle étrange de l'autorité, intervenant uniquement pour assurer un champ libre au développement de l'émeute, est propre, il faut bien l'avouer, à inspirer les plus vifs soupçons. Quand on le rapproche ensuite du rôle des commis du timbre, excitant comme à plaisir la colère du peuple, et prenant immédiatement leurs mesures pour échapper à l'orage ; quand on sait, en outre, comme nous le verrons plus tard, que plusieurs des séditieux du 17 juillet, et ce Daligault entre autres, déclarèrent dans les tortures et jusqu'au dernier moment qui précéda leur supplice, avoir reçu de l'argent des commis pour attaquer leur bureau, on ne peut guère s'empêcher de voir dans cette troisième sédition de Rennes le résultat d'une provocation organisée et d'une sorte de complot. Dans cette ville, tout le monde le crut (Voir le Journal de René du Chemin et celui de La Courneuve). L'intérêt des employés du timbre était fort clair : grâce à ce pillage de leur bureau, ils se trouvaient dispensés de rendre compte des deniers par eux perçus ; et si pourtant ces deniers, comme il paraît, avaient été préalablement soustraits à ce pillage, il en résultait pour eux un bénéfice net, qui n'était pas à dédaigner. Quant à l'intérêt que pouvait prendre l'autorité supérieure au développement de cette émeute, quoiqu'il fût sans doute d'une autre nature, il ne me semble pas non plus malaisé à pénétrer. M. de Chaulnes, dès le 12 juin, comme on l'a vu par sa lettre de ce jour à Colbert, était déjà résolu à frapper la ville de Rennes d'un châtiment exemplaire, d'un châtiment, disons-le, hors de toute proportion avec sa faute ; pour justifier quelque peu ce châtiment terrible et pour le faire accepter, je ne dis pas par l'opinion publique, mais seulement par le ministre et par le Roi, il était donc désirable que la faute s'accrût et devînt irrémissible. De là peut-être l'absence de toute mesure de précaution au moment du départ de M. de Chaulnes ; de là surtout le refus étrange opposé par M. de Coëtlogon à la requête des officiers de la milice bourgeoise.

Quoiqu'il en soit, cette tactique n'eut pas d'abord tout le succès qu’on en aurait pu attendre. L'émeute livrée à elle-même parcourut quelque temps les rues de la ville sans but déterminé : il n'y avait plus de bureau du tabac ni de la vaisselle d'étain, ces deux impôts se trouvant suspendus à Rennes jusqu'à la tenue des Etats. Dans cette promenade vagabonde, les mutins, on peut le croire, firent entendre plus d'une menace, mais n'y donnèrent nulle suite ; bientôt, lassés d'une agitation dénuée de but et d'obstacle, ils se dispersèrent d'eux-mêmes et rentrèrent dans leurs demeures sans autre violence à leur charge que le sac du bureau du timbre. Les relations contemporaines ne mentionnent qu'un seul homme tué dans toute cette journée, et c'est celui qui périt sur la place du Palais, comme nous l'avons dit plus haut.

Le Parlement, aussitôt après cette troisième émeute, envoya un député en cour pour attester sa fidélité et celle de la ville de Rennes ; sur quoi le Roi se contenta de dire qu'en peu tout seroit fort réglé : réponse, comme celle des oracles, susceptible des plus diverses interprétations.

Cependant l'impunité, la complète absence de répression octroyée à l'émeute du 17 juillet eut pour conséquence fort grave d'inspirer aux mutins une confiance et une audace qu'ils n'avaient jamais eues jusque-là. Nul ne s'étant présenté pour leur barrer le passage, ils se crurent maîtres de la situation et prirent décidément le haut du pavé. Aussi vit-on, presque tous les jours, se former de nouveaux attroupements, qui, sans prendre toutes les allures d'une sédition, parcouraient la ville en bandes bruyantes, hurlant des injures, des menaces, des vociférations de toute espèce, mettant sans cesse en péril la tranquillité publique, et finalement effrayant la grande masse de la population qui détestait sincèrement tous ces désordres. Quatre lignes d'un contemporain nous peignent parfaitement la vraie physionomie de Rennes durant cette période d'agitation : « Les bons habitants, dit-il, sont tellement dans la crainte des tumultuaires, qu'ils n'osent sortir de leurs maisons, menacés qu'ils sont par une cohorte séditieuse de populace vagabonde et libertine » (Relation de Morel). Les tumultuaires ne s'en tenaient pas toujours à de simples menaces. Un jour, par exemple, que l'équipage de M. de Tonquédec (René de Quengo, comte de Tonquédec) passait dans la rue Haute, la populace mutinée se jeta dessus, je ne sais pourquoi, et tua tous ses chevaux (Journal de Toudoux).

Ce n'était pas seulement contre les bons habitants que cette cohorte séditieuse dirigeait ses menaces et ses injures, elle les adressait plus haut encore à tous les représentants de l'autorité, et surtout, avec une âpreté toute spéciale, à Mme de Chaulnes elle-même : « Mme de Chaulnes est à demi-morte des menaces qu'on lui fait tous les jours écrit Mme de Sévigné, le 24 juillet ; - on me dît hier qu'elle était arrêtée, et que même les plus sages l'ont retenue et ont mandé à M. de Chaulnes, qui est au Fort-Louis, que si les troupes qu'il a demandées font un pas dans la province, Mme de Chaulnes court risque d'être mise en pièces ». Deux jours après, l'illustre marquise ajoutait un correctif, mais assez peu rassurant et ainsi conçu : « La Bretagne est plus enflammée que jamais ; Mme de Chaulnes n’est pas prisonnière en forme ; mais une de ses amies voudroit de tout son coeur qu'elle ne fût pas à Rennes, d'où elle ne peut sortir à cause des désordres 8 » [Note :Il faut noter que ces deux lettres, du 24 et du 26 juillet 1675, sont écrites de Paris et adressées à Mme de Grignan]. Il est certain que la duchesse de Chaulnes n'avait nullement su gagner l'affection des Rennais ; elle passait généralement pour provoquer son mari à la sévérité, et cette croyance, vraie ou fausse, répandue d'ailleurs dans tous les rangs de la population, excitait contre elle au plus haut point le courroux de la multitude, qui souvent le lui témoigna de la plus cruelle façon. Un jour, entre autres, la duchesse traversait dans son carrosse le faubourg de la rue Haute ; tout à coup une troupe de peuple entoure sa voiture et l'empêche d'avancer ; la duchesse, surprise, met la tête à la portière et demande ce que cela signifie et ce que l'on désire : - Nous venons, Madame, vous demander une grâce, lui répondent les personnes les plus proches d'elle ; nous venons vous prier de vouloir bien nommer un enfant. - Très volontiers, répond la duchesse, qui aussitôt ouvre la portière. Et immédiatement une puante charogne de chat crevé et pourri, lancée du milieu du groupe par une main vigoureuse, vient tomber sur les genoux de Mme de Chaulnes. La populace, en même temps, lui crie au milieu des huées : - Tiens, vilaine bossue, voilà l'enfant qu'on veut te donner à nommer ! Le voilà ! - A la vue de cette insolence, les gens de la duchesse se mettent en posture de la défendre contre de nouvelles insultes ; la populace s'imagine qu'on va l'attaquer, et un coup de fusil, parti de ses rangs, va briser l'épaule du page de Mme de Chaulnes.

Cet épisode, dont la mémoire s'est gardée longtemps dans la tradition locale, doit, pour cette raison même, être regardé comme le plus violent affront qu'ait eu à subir Mme de Chaulnes ; mais il n'en est pas moins propre à bien caractériser la situation de Rennes après l'émeute du 17 juillet, et à donner une idée de l'audace des mutins. Quant à la duchesse, elle demeura exposée à leurs insolences pendant tout un mois, c'est-à-dire, jusqu'au 17 du mois d'août, jour où elle partit de Rennes de très grand matin et comme en cachette, pour aller à Dinan attendre les Etats, dont l'ouverture était alors annoncée pour le 25 du même mois.

Au reste, les conséquences de l'émeute du 17 juillet ne demeurèrent point bornées dans l'enceinte de Rennes. Cette troisième sédition de la vieille capitale bretonne retentit dans la Bretagne entière comme un tocsin auquel, de tous côtés, répondirent des explosions formidables [Note : L'influence exercée par l'exemple de Rennes sur toute la province, y compris la Basse-Bretagne, est un fait incontestable, particulièrement en cette circonstance ; aussi, le 23 juillet 1675, l'évêque de Saint-Malo écrivait à Colbert : « Comme Rennes donne le mouvement à tout le reste de la province, et que vous aurez su ce qui s'y passa mercredi dernier (17 juillet) en plein midi au sujet du papier timbré, qui y fut encore pillé pour la seconde fois, cette entreprise ne manqua pas d'enfler le coeur tout de nouveau à ces misérables paysans de Basse-Bretagne, etc. » (Correspondance administrative sous Louis XIV, t. III, p. 264)]. « La fureur qui agite notre province augmente tous les jours ; ces démons sont venus piller et brûler jusqu'auprès de Fougères » écrit de Paris à sa fille Mme de Sévigné, le 24 juillet ; ce qui fait remonter au moins au 20 de ce mois les troubles du pays de Fougères. Dans le même temps, des employés au tabac étaient tués sous les ombrages des bois de la Hunaudaye, au pays de Lamballe ; l'évêché de Tréguier voyait des bandes de mutins, connus sous le nom de Bonnets rouges, courir ses campagnes et menacer encore une fois la ville de Guingamp (Ropartz, Histoire de Guingamp, 2ème édit., t. II, pp. 130 et 133). Le dimanche 21 juillet, deux mille paysans du duché de Rohan faisaient irruption en plein midi dans la ville de Pontivy ; où ils brûlaient et saccageaient le bureau du papier timbré, ainsi que la maison d'un fermier des devoirs, appelé La Pierre [Note : Lettre de l'évêque de Saint-Malo à Colbert, du 23 juillet 1675, dans la Correspondance administrative, t. III, p.264].

Chose bien curieuse, d'ailleurs, et qui mérite d'être notée : les séditieux de l'évêché de Tréguier, ceux-là même qu'on désignait sous le nom de Bonnets rouges, sont aussi ceux sur qui tombe directement l'imputation de communisme dont j'ai parlé par ailleurs. C'est, en effet, le curé de Plestin (Plestin-les-Grèves), près de Lannion, qui inscrivait sur le registre de sa paroisse la note suivante : « En l’an 1675, une sédition s'éleva dans presque toute la Bretagne... Les paysans se croyaient tout permis, réputaient tous biens communs, et ne respectaient même plus leurs prêtres : en certains lieux ils voulaient les égorger, en d'autres, les expulser de leurs paroisses. Ô temps ! ô moeurs ! Puissent Dieu et le Roi nous épargner le retour de pareils malheurs ! Cette paroisse de Plestin n’a pas été à l'abri de ces troubles, qui m'ont contraint à de nombreuses pérégrinations, et dont je pourrais rapporter ici beaucoup de particularités que j’aime mieux passer sous silence » [Note : Ce n'est ici qu'une traduction, car la note du curé de Plestin est écrite en latin]. Ainsi les folies de notre siècle XIXème, celles-là même que des sectaires emphatiques nous donnent pour le dernier mot du progrès social, ne sont que de vieilles folies ; les noms mêmes qui les désignent, et que nous croyons avoir inventés, ne sont que de vieilles étiquettes usées, fanées, honnies, depuis longtemps, et depuis longtemps, hélas ! tachées de sang et de boue ! - Poursuivons donc le, récit des hardies applications de la science sociale, tentées dès 1675, par nos communistes, rouges de Basse Bretagne.

En Cornouaille, où M. de Chaulnes signalait, le 9 juillet, une sorte de relâche dans la révolte, l'incendie se réveilla plus furieux que jamais. Tout à coup, de Scaër au Huelgoet, vingt paroisses se levèrent ensemble comme un seul homme et formèrent une véritable armée, qui pour son premier exploit s’en fut assiéger le château du Kergoët, en Saint Hernin, un peu au sud de Carhaix. M. Le Moyne de Trévigny, seigneur du Kergoa, passait aux yeux de mutins pour être trop grand ami des gens qui avaient amené en Bretagne les impôts du timbre et du tabac et se préparaient encore, croyait-on, à y introduire la gabelle. Quant au château, c'était une somptueuse demeure, construite avec soin, meublée avec luxe, et pourvue, en outre, de murailles et de défenses très suffisantes, semblait-il, pour résister avec avantage aux efforts d'une attaque irrégulière D. Pourtant, les paysans l'emportèrent, le livrèrent au feu et au pillage et s'ils ne le ruinèrent de fond en comble, ce ne fut certes pas leur faute. Les vingt paroisses associées dans cette expédition étaient Scaër, Guiscriff, Leuhan, Gourin et Le Saint, Motref, Tréogan, Plévin, Saint-Hernin, Spézet, Landeleau, Cléden-Poher, Kergloff, Plouguer-Carhaix, Plounévezel, Plounevez-du-Faou, Lannédern, Loqueffret, Plouyé, Poullaouen et Le Huelgoët [Note : Après la fin de la révolte, le seigneur du Kergoët ayant élevé des réclamations contre ces vingt paroisses, afin d'être indemnisé par elles des pertes qu'il avait subies dans l'incendie et le pillage de son château, une transaction intervint, aux termes de laquelle les vingt paroisses s'obligèrent à payer à M. de Trévigny la somme de 64.800 livres, qui furent réduites à 49.800, attendu qu'on rapporta audit château une partie du mobilier pillé jusqu'à la valeur de 15.000 livres. Cette transaction fut définitivement arrêtée le 23 juin 1678, entre M. Henri Barin, curateur du sieur de Trévigny, et Mgr. François de Coëtlogon, évêque de Quimper, mandataire des vingt paroisses susdites. L'année suivante, cette transaction fut approuvée par le Conseil d'Etat (20 juillet 1679), par les Etats de la province (30 octobre 1679) et rendue exécutoire par une ordonnance du duc de Chaulnes du 17 octobre 1679. Voici, d'après cette transaction, la part afférente à chaque paroisse dans le paiement de cette indemnité de 49;800 livres : Gourin et ses trèves (5.500 livres), Guiscriff (3.000 livres), Scaër (2.000 livres), Leuhan (800 livres), Tréogan (400 livres), Motreff (1.450 livres), Plévin (1.450 livres), Cléden-Poher (1.400 livres), Kergloff (1.800) livres), Landeleau (2.000), Lannédern (600 livres), Loqueffret (1.400 livres), Huelgoat (800 livres), Plouyé (2.500 livres), Carhaix-Plouguer (1.500 livres), Poullaouen (3.600 livres), Saint-Hernin (4.000 livres), Spézet (5.000 livres), Plounéverzel (1.600 livres), Plounévez-du-Faou (9. 000 livres)].

La prise et l'exécution du Kergoët jetèrent dans toute la Basse-Bretagne un effroi indicible. Tout ce qui restait encore de gentilshommes et de bourgeois aisés séjournant à la campagne, rentra précipitamment dans les principales villes, avec leurs meubles, leurs papiers, leurs effets les plus précieux, et tout ce qu'ils voulaient sauver de la destruction. A ce moment, on peut le dire, la révolte coulait à pleins bords et grondait comme un torrent près de rompre sa dernière digue et de submerger toute la province. « La plupart des villes sont encore dans leur devoir, écrivait en cet instant même un témoin bien informé : mais il n'y en a quasi plus aucune que ces paysans ne fassent trembler » (L'évêque de Saint-Malo à Colbert, Correspondance administrative, t. III, p. 265).

Toute la Basse-Bretagne était en feu ; ce n'était plus seulement les pays de Châteaulin, de Carhaix, et les alentours de Landerneau ; c'était la Cornouaille entière et les deux tiers du Léon ; dans l'évêché de Tréguier, les pays de Morlaix, de Lannion, de Guingamp ; dans le diocèse de Vannes, ceux d'Auray, d'Hennebont, de Pontivy, presque tout le duché de Rohan : voilà sur quelle étendue dominait la révolte.

D'ailleurs elle se propageait, marchait, agissait, sans trouver devant elle aucun obstacle. M. de Chaulnes, toujours enfermé dans son Fort-Louis, semblait résolu à ne pas faire contre les rebelles le moindre effort ni la plus minime démonstration avant l'arrivée des nouvelles troupes qu'il avait demandées au Roi (A. de la Borderie).

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