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VILLE DE BOHARS AU DEBUT DU XXème SIECLE

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Au temps où le roi Morvan bravait l'empereur Louis le Débonnaire, du haut du donjon du château de la Roche, une immense forêt aux chênes séculaires, peuplée de monstres, d'enchanteurs et de fées couvrait tout le pays compris entre Landivisiau et Brest ; elle franchissait même la Penfeld, noyant dans la profondeur de ses ombres la région de Quilbignon et allant confondre ses ramures avec celles de la forêt où saint Ronan avait établi son ermitage primitif. (Voir les cartes de Tasin XVIIème siècle).

Mais les siècles et les hommes ont fait leur œuvre, les monstres ont été détruits par les saints de Bretagne, les enchanteurs et les fées se sont envolés ; des villes peuplées et tumultueuses, des routes bordées d'auberges, et parcourues par les véhicules les plus variés, des champs cultivés, des fermes, des maisons de campagne et beaucoup de cabarets ont remplacé presque partout la solitude des bois.

Quelques rares épaves de verdure ont seules échappé au déboisement. Elles forment, au milieu des côteaux et des vallons civilisés comme des îlots au sein d'une vaste mer, lointains et pâles souvenirs des forêts ancestrales.

Bohars est un de ces îlots verdoyants, nid perdu dans le feuillage. Il semble vouloir justifier encore de nos jours son antique dénomination de Bot gars, l'habitation au milieu des bois, suivant l'habile étymologie fournie par M. Jourdan de la Passardiere.

Une église neuve, un cimetière, une mairie et quelqueues maisons, voilà aujourd'hui le cœur de Bohars ; mais, tout autour, se déroulent des routes en pente, encadrées de jardins, de vertes prairies et de bois superbes, aboutissant à de riants étangs dans lesquels se mirent des moulins et des minoteries.

Sur les côteaux, on admire des champs verdoyants ou fleuris, surmontés d'épais massifs, que traversent de belles avenues majestueuses et opulentes conduisant à des parcs ou à des châteaux.

Par-ci, par-là, quelques maisons, quelques ateliers semblent émerger de la verdure dans laquelle ils sont à moitié enfouis, pour montrer timidement que l'homme n'a pas déserté totalement ces beaux lieux sauvages.

Le dimanche, les Brestois viennent en foule, dans les beaux jours, s'ébattre au bord des ruisseaux babillards, admirer les écluses ou déjeuner sous les grands arbres. Ils troublent par leur joie bruyante la paix silencieuse des bois ou profanent la fraîcheur des prés par les traces de leurs festins ou de leurs fritures improvisées.

Mais, dans la semaine, toute cette joie et toute cette foule disparaissent ; les bocages retrouvent leur mystère, les fées des futaies et des prés restent seules maîtresses de leurs doux asiles. On est bien loin des villes et des auberges, loin du tumulte des routes poudreuses. C'est le calme, l'ombre et le silence, la paix et l'harmonie des champs bretons, si chers au doux poète Brizeux :

« Mais, ô calme riant des bois,
Revenez dans mes vers, adoucissez ma voix ;
Faites aimer ce que je vois.
C'est là de tous mes vers la pieuse demande,
Esprits des champs et de la lande,
Versez en moi la paix pour que je la répande ! »
.

Le patron actuel de ce joli petit village est saint Pierre ès-Liens ; avant la Révolution, Bohars était une trêve de Guilers, trêve dont l'église consacrée au saint Rozaire était bâtie sur les terres de Kerguiziau, devenues par alliance la propriété du seigneur de Coatzunval.

Cette chapelle vénérée était fort ancienne ; elle datait du XVIème siècle et portait sur ses murs l'inscription suivante, relevée par M. de Kerdanet : « Facet du temps de Mescam, Beillou et Kaer 1559 ».

On dut en 1669 en reconstruire le clocher qui menaçait ruine, et on le réédifia sans goût, avec une simplicité extrême et sans aucune élégance.

L'église elle-même, devenue insuffisante en 1835, fut élargie à cette époque par le recul des murs latéraux. Cette modification malheureuse lui fit perdre le peu de caractère qui lui restait.

Cependant, en 1904, comme elle était redevenue trop petite, elle fut abattue et remplacée par la gracieuse église actuelle, construite dans le style de transition du début du XIIIème siècle, par M. Vally, architecte à Landerneau.

Eglise de Bohars (Bretagne).

Le devis en avait été dressé sur le prix primitif de 65.000 francs. C'était beaucoup pour les ressources de la commune.

« Les dons généreux des paroissiens, parmi lesquels une magnifique offrande de 5.000 francs, spécialement consacrée à la construction de la flèche, vinrent en aide au dévouement du recteur, M. l'abbé Mével, qui vit ses efforts couronnés de succès. Le 17 octobre 1905, Mgr Dubillard, évêque de Quimper et de Léon, assisté d'un nombreux clergé, consacrait solennellement la nouvelle église, en présence de la presque totalité des habitants de la paroisse, et de nombreuses personnes venues de Brest et des communes environnantes » (G. Toscer. Finistère pittoresque).

Cette église, suivant la coutume bretonne, est dans l'enceinte sacrée formée par les murs du cimetière. Elle en occupe l'angle le plus élevé, et sa flèche élégante domine les modestes tombes et le gracieux calvaire encadrés par des massifs de verdure.

La façade, dont la décoration est l'exacte traduction de la construction, est parfaitement comprise.

On y arrive par une porte ajourée, en fer forgé, fixée entre deux pilastres en granit à assises saillantes. Les pilastres sont les extrémités de deux murtins concaves de même style, qui encadrent un perron circulaire.

La tour forme avant-corps sur la nef. Elle s'ouvre à sa partie inférieure par le porche principal dont l'ébrasement ogival est encadré par un triple rang de colonnettes ébauchées. Celles-ci supportent trois arceaux en tiers-point que couronne un gable aigu dont les rampants sont ornés de croches et la pointe fleuronnée.

En avant et sur le côté, des contreforts en équerre fortifient les angles de la tour. Ils sont à échelons, entièrement en pierre de taille. Ils diminuent ainsi de saillie à chaque étage jusqu'à la naissance de la chambre des cloches.

Au-dessus de la frise des contreforts inférieurs s'ouvre une vaste baie ogivale à colonnettes, encadrant une croisée maîtresse divisée par des meneaux en deux lancettes géminées et tréflées surmontée d'une rosace curviligne à six feuilles.

Cette baie éclaire à la fois le premier étage du clocher et les voûtes de la nef.

Elle est surmontée en façade par l'horloge circulaire qu'abrite une moulure saillante horizontale accostée de deux redans rectangulaires.

Cette partie de la tour s'amortit par un triple rang d'assises inclinées fuyantes, formant le socle sur lequel se dresse la chambre des cloches.

Celle-ci est éclairée sur chacune des faces de la tour par deux baies algues géminées et à lancettes, dont l'ouverture est garnie d'abats-sons.

Les quatre arêtes de la partie de la tour consacrée aux cloches sont raidies par d'élégantes colonnettes au gracieux chapiteau.

Cet étage de la tour est couronné par une riche corniche denticulaire qui sert de soubassement à la flèche.

Celle-ci est octogonale, aux arêtes aigues ornées de crochets fleuris ; ses quatre faces normales sont percées d'une lucarne ogivale élancée et d'ouvertures rectangulaires ou étoilées. Les quatre faces obliques sont ajourées par des trèfles à quatre feuilles et la pointe du clocher se termine par un gracieux fleuron dans lequel est implantée la croix.

« Les trois cloches de l'ancienne église ont été installées dans ce nouveau clocher. La moyenne cloche porte la date de 1841, la petite celle de 1850. Elles furent exécutées dans les ateliers de messieurs Viel fondeurs brestois, dont l'usine était située à Penfeld. La grosse cloche porte l'inscription suivante :

J'ai été fondue à Brest en septembre 1815, du temps de Monsieur Jean Pochard, recteur de la paroisse de Bohars, dédiée à saint Pierre és-Liens ; parrain et marraine ont été Monsieur Alexandre-Michel Huon de Kermadec, enseigne des vaisseaux du Roy et Pétronille-Louise de la Place, dame Hoffait ; Monsieur Jean-André Hoffait, chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis étant Maire, Messieurs Pierre Migadel, trésorier, et Jean Colin, marguilier » (Toscer. Finistère pittoresque).

A droite de la tour et appuyée contre elle se dresse une tourelle polygonale renfermant l'escalier qui conduit aux étages supérieurs. Elle est coiffée par un toit pyramidal en pierres de taille emboitées et couronnée par un fleuron.

La nef et les bas-côtés sont extérieurement très simples ; chacune de leurs travées est éclairée par une fenêtre aigue à lancette, et les retombées des voûtes s'appuient sur des contreforts en granit faisant saillie au-dehors du mur.

La sacristie du même style fait transept du côté de l'épître ; un chevet plat sépare la nef de l’abside polygonale qu'éclairent des croisées à lancettes de plus grande dimension, illuminées par des vitraux modernes.

La nef se subdivise en cinq travées voûtées en croisées d'ogive. Elle communique à droite et à gauche avec les collatéraux par autant d'arcades ogivales. Celles-ci sont séparées les unes des autres par des colonnes à soubassement polygonal à fût tronconique surmonté d'un riche chapiteau. Sur le tailloir du chapiteau retombent latéralement les arceaux des arcades ; en arrière ces tailloirs reçoivent les retombées, des arcs doubleaux et forment des voûtes collatérales et en avant ils portent un corbellet saillant d'où jaillit une svelte colonnette dont le chapiteau élevé reçoit les nervures des voûtes supérieures.

Comme on vient de le voir, chacun des collatéraux est divisé en un même nombre de travées que celles de la nef, dont elles sont le prolongement.

Le mur du bas de la nef s'ouvre en façade sur le pronaos de la tour. Une loggia à balcon permet à la grande fenêtre du clôcher de jeter sa lumière dans l'église ; au-dessous, abritée par une moulure saillante, est une plaque destinée aux inscriptions commémoratives.

Le chœur est voûté dans le même style que la nef. Il est éclairé par trois grandes fenêtres ; à son centre est dressé un autel gracieux et élégant. Les statues de saint Pierre et de saint Paul en décorent l'entrée.

On peut y ajouter d'autres statues, notamment celles de sainte Anne et de saint Antoine de Padoue du côté du chapitre et celle de saint Joseph du côté de l'Evangile.

A droite et à gauche de la porte principale on a placé deux intéressantes statues provenant de la première église, toutes les deux sont en bois. La première représente saint Elar dans l'attitude mouvementée du XVIIIème siècle ; l'autre montre un moine vêtu du costume dominicain, et portant le rabat ; sur le piédestal se trouve écrit, sans que rien le justifie en quoi que ce soit, le nom de saint Herbot. Ce dernier saint est en général représenté en ermite, vêtu d'une robe monacale, avec livre et bâton.

La sacristie doit posséder un ancien Christ et une statuette de la Sainte-Vierge en bois, qui se porte processionnellement.

Quant au mobilier, il n'en existe pas. Il devait être refait à neuf en même temps que l'église, l'ancien mobilier tombant en ruine. Malheureusement, la loi de séparation est venue alors arrêter tous les travaux. Il reste en tout et pour tout les débris de la chaire à prêcher qui décorait l'ancienne église et qui datait de 1670. Cette chaire provenait de l'église du Bourg-Blanc.

Le Cuve est constituée et ornée par une architecture rudimentaire, inspirée par le souvenir de modèles appartenant à l'époque de la Renaissance.

On a placé, je ne sais où, l'abat-voix dont la corniche polygonale portait l'intéressante insçription ci-jointe : F : PAR : M : YVES : COUR-LAY : RECTE-UR : SAN : LEO-N ; DE : TRIFF-LE : GOUVERNEUR : LAN 167

Trois autels modernes, assez gracieux et appropriés au style, décorent l'église : au centre du chœur, le maître-autel ; au chevet du bas-côté droit, l'autel de l'Immaculée Conception, et au chevet du bas-côté gauche, l'autel du Sacré-Cœur de Jésus.

Enfin le presbytère possède un curieux plat gallo-romain trouvé en 1841 dans les fouilles du retranchement de Bohars-ar-C'hoat, à 500 mètres du bourg. Ces fouilles furent pratiquées par M. de la Jonchère, alors maire de Bohars.

« Ce plat long, de forme rectangulaire, terminé par deux demi cercles, ayant 0 m 32 de long sur 0 m 22 de large est en cuivre jaune recouvert d'étain, à fond creux et à larges rebords. Les rebords sont terminés par une petite moulure, le fond est décoré de canaux dont les côtés viennent se perdre au milieu du plat » (Bulletin diocésain d'archéologie, 3ème volume).

Tel est dans son état actuel l'église neuve de Bohars, qui remplace fort avantageusement l'ancienne église, grossièrement déformée par de maladroites restaurations.

Cette nouvelle église ne rappelle en rien les églises bretonnes du XVème au XVIIème siècles. Elle s'inspire entièrement de l'architecture ogivale française à son début. L'architecte de talent qui l'a construite appartient à la nouvelle école régionale. Guidée par les leçons des Viollet le Duc, des Lassus et de leurs disciples, cette école est parvenue à construire sans lourdeur des églises voûtées en pierre. On a su ainsi alléger les lourds matériaux granitiques et conserver en même temps le pittoresque antique.

Comme leurs devanciers, tout en changeant de procédé, nos jeunes architectes ont trouvé une note qui s'harmonise parfaitement avec les paysages bretons encadrant leurs œuvres et ils ont pu leur donner, comme l'auraient fait leurs ancêtres, cette saveur particulière si frappante pour l'étranger.

L'église paroissiale de Saint-Pierre-ès-Liens est le seul édifice de Bohars qui mérite une description. Nous n'avons pas à citer la Mairie, simple maison à un étage de la structure la plus simple. Elle est précédée sur sa façade principale d'un avant-corps extérieur porté par quatre pilastres sur soubassement et s'ouvrant au centre par un portique cintré.

Le tympan de cet avant-corps est escaladé à droite et à gauche par deux escaliers symétriques à balustres et à double volée. Ces escaliers viennent aboutir à un palier central formant balcon et donnant accès à la porte principale du premier étage. Au rez-de-chaussée sont les bureaux et les dépendances.

La vraie et la plus brillante parure de Bohars, celle dont il tire tout son charme, sont les bois, les prés, les côteaux et les ruisseaux qui l'entourent. Dans la profondeur de leurs allées et à l'ombre de leurs vertes frondaisons s'épanouissent au milieu des pelouses et des parterres fleuris de nombreuses maisons de campagne et même quelques beaux châteaux.

C'est aussi dans une verte prairie traversée par un frais et riant ruisseau aux eaux claires et limpides et encadrée par des côteaux boisés et pittoresques que se dresse au bas du bourg la chapelle de Loquillau qui mérite une mention particulière.

Chapelle de Bohars (Bretagne).

Cette chapelle tient la place d'un antique sanctuaire jadis dédié à saint Guiziau, saint assez peu connu qui a donné son nom au manoir voisin de Kerguyiau, devenu de nos jours le château de Kerguillau. Le saint a dû habiter jadis les bois de Bohars, ainsi que semble l'indiquer le nom de Loc-Guiziau donné à la chapelle primitive par les premiers châtelains du château de Kerguiziau qui la firent édifier.

Le culte de saint Guiziau existait encore à Loquillau en 1650. Ce ne fut que dans les premières années du XIXème siècle que le culte fut remplacé par celui de la Vierge et que la chapelle prit le nom de Notre-Dame de Loquillau ou Notre-Dame de Grâce. Elle était célèbre alors par la statue de la Vierge Marie portant dans ses bras l'enfant Jésus et foulant aux pieds notre mère Eve, sous la figure d'un démon femelle, au corps tigré et tenant dans sa main la pomme funeste.

En 1822, cette chapelle était la propriété du chevalier Fleurine de la Garde, qui abandonna par un acte régulier ses droits à la paroisse, à la condition que le culte y serait régulièrement exercé.

Cependant la chapelle vendue bientôt après fut désaffectée par son nouveau propriétaire et transformée en pressoir. Mais cet état d'abandon dura peu ; au milieu du XIXème siècle elle fut reconstruite, agrandie et rendue au culte, et son propriétaire actuel M. le comte de Trolong du Rumain, a complété de la façon la plus heureuse sa décoration.

Ce gracieux petit édifice, bâti à l'angle supérieur de la prairie, reflète son chevet dans le bassin qui reçoit les eaux de la source de Saint-Maudez, jaillissant de la colline dont les arbres magnifiques l'entourent et l’ombragent.

La façade de la chapelle est garnie d'une porte ogivale de style flamboyant, son tympan aigu orné de crochets se couronne par un fleuron.

Les murs latéraux sont éclairés par des fenêtres de même style. L'une d'elles, très ancienne, est surmontée d'un écusson en bannière chargé d'un fascé, caractérisant d'après M. Jourdan de la Passardière les Perrancoat de Kerouazle. A droite et à gauche de cette même fenêtre sont deux écussons frustes.

Une flèche légère aigue et ajourée se dresse à la tête du chevet de l'église, se détachant élégamment du fond de verdure qui l'encadre.

A côté de la statue vénérée de Notre-Dame de Grâce, on a conservé dans la nef deux très anciennes statues de bois, l'une de saint Joseph, l'autre d'une sainte inconnue, dont le front est surmonté de la couronne royale.

Plusieurs fois par an, une procession vient visiter la chapelle. A la Saint-Marc, aux jours des Rogations, à la Fête-Dieu, à l'Assomption et à l'époque du Rosaire, le clergé, les bannières, la croix d'argent et les longues théories des jeunes filles et des paroissiens de Bohars, se déploient le long des sentiers et des bois pour porter l'hommage de leurs chants et de leurs prières à la Vierge de Loquillau.

La fontaine de Saint-Maudez qui baigne les pieds de la chapelle de Loquillau, a aussi sa célébrité, car saint Maudez est un des nombreux saints guérisseurs invoqués en Armorique.

Albert Le Grand raconte dans la vie de ce saint que la terre de l'île où il bâtit son oratoire, au pays de Tréguier, était un remède souverain aux morsures venimeuses.

Cette tradition, quelque peu modifiée, s'est conservée à Bohars. On croit que la terre de la fontaine, délayée dans de l'eau, est un spécifique réputé contre les douleurs rhumatismales et aussi contre l'enfle des bestiaux.

On y venait autrefois de très loin, dit M. Jourdan de la Passardière, et si l'on pouvait se procurer un ver de terre recueilli aux abords de la source, et l'appliquer contre le membre malade, la mort de l'animal était le signe assuré d'une prompte guérison.

... Si l'on poursuit la route qui, de la chapelle de Loquillau conduit directement à Brest, l'on cotoie longtemps les bords riants du ruisseau de Bohars, si bien qu'on en perd rarement de vue les eaux scintillantes et qu'on en a sans cesse dans les oreilles le bruit plus ou moins éclatant. A droite et à gauche, ce ne sont qu'arbres et buissons que neige au printemps l'aubépine en fleurs.

A un moment donné, la vallée semble s'élargir, les collines boisées se reculent comme pour former un cirque de grands arbres et l'on aperçoit les étangs dont l'eau s'illumine au soleil et étincelle au milieu des prés et de la verdure.

Sur les bords opposés se dressent plusieurs minoteries dont les toits ardoisés s'argentent sous les feux du jour, et au-dessus desquels s'épanouissent les grands bois escaladant la colline.

En poursuivant quelque temps encore le cours du ruisseau de Bohars, on atteint le bel étang sous Lannoc, voisin du Quijac et de la Villeneuve.

Cet étang reflète dans ses eaux des bouquets d'arbres et quelques blanches maisons, en arrière desquels s'étage sur la colline une succession de champs cultivés parsemés de haies verdoyantes, de maisonnettes et de hameaux que couronne au milieu des bois l'opulent château de Kerguillau.

Fièrement campé sur la hauteur, il domine la vallée et tous les terrains environnants de ses deux donjons jumeaux aux toits aigus et fleuronnés.

Cette belle habitation a été construite de nos jours sur l'emplacement de l'antique manoir de Kerguiziau et de la chapelle du XVème siècle qui lui était jusxtaposée.

La ferme de Kerguillau a utilisé dans ses constructions quelques-uns des matériaux du château disparu. Elle est en effet ornée d'un certain nombre de fenêtres dans le style du XIVème siècle. Dans le jardin se trouvent des fragments sculptés, débris de la chapelle.

La famille de Kerguiziau était de longue date dans le pays. Elle portait d'azur à trois têtes d'aigle, alias d'épervier, arrachée d'or et la devise Spes in Deo.

La dernière héritière de la branche aînée, Jeanne, épousa, vers 1530, Olivier du Louet, sire de Coatzunval, et elle lui apporta en dot la terre de Kerguiziau pour laquelle il rendit aveu au Roi le 11 juillet 1541, comme père et garde naturel de François du Louet, seigneur de Kerguiziau.

Les du Louet avaient, déjà, à cette époque, quitté leurs armes personnelles pour prendre depuis le commencement du XVIème siècle, celles des Coëtmenech qui sont fascé de vair et de gueules.

Enfin, d'alliances en alliances, la terre de Kerguiziau devint en dernier lieu la propriété de Christian de Montmorency, chevalier de Luxembourg et prince de Tingry.

Les armes des Montmorency sont : d'or à la croix de gueules cantonnée de seize alérions d'azur ; devise : Dieu aide au premier baron chrétien.

Ce fut l'époque la plus brillante de l'histoire du château de Kerguiziau. Les fières beautés de Versailles s'unirent alors aux grâces rustiques des Bretonnes. Diane chasseresse y tendit la main à Valléda et les nymphes échappées des bocages du Trianon folâtrèrent dans les taillis bretons avec les fées de la lande et des bruyères.

Christian de Luxembourg fut créé maréchal de France en 1734. Il servit dans les armées du Roy Louis XV pendant la guerre pour la succession d'Autriche et mourut en 1746. A sa mort, le manoir délaissé tomba en ruines et fut détruit pour faire place de nos jours au château de Kerguillau. Cette terre appartient vers 1908 à M. le baron Didelot.

Plus rapprochés de Bohars que le château de Kerguilliau sont les deux châteaux modernes de Keranouez et de Kerampir, à M. de Trolong du Rumain.

Le château de Keranouez a appartenu successivement, depuis la Révolution, aux familles Fleurine de la Garde, du Marc'hallac'h, Le Gars, de Dieuleveult et de Trolong du Rumain.

Le château de Kerampir fut d'abord la propriété du contre-amiral Lavaud ; il appartient vers 1908, comme son voisin. à M. de Trolong du Rumain.

Les Trolong portent : Ecartelé aux 1 et 4 : d'argent à 5 tourteaux de sable en sautoir ; aux 2 et 3 : d'azur au château d'argent ; devise : Raktaal (Sur le champ).

On arrive au château de Kerampir par le prolongement de la route qui conduit de la station à l'église de Bohars. Cette route est aussi pittoresque et aussi ombragée que les précédentes. A deux cents mètres environ au delà de l'église débouche à gauche de la route une avenue magnifique, plantée de grands arbres et d'aspect vraiment seigneurial.

Elle gravit le flanc d'une colline boisée dont les pieds se baignent dans le ruisseau de Bohars et elle arrive ainsi au château qui se dresse majestueusement sur la colline au milieu des pelouses fleuries.

Ce château moderne, vaste, élégant, n'a d'autres prétentions architecturales que quelques lucarnes ouvragées qui dressent leurs frontons aigus au-dessus de sa toiture.

Plus rustique et plus ancien est le manoir dit Le Tromeur ou mieux encore Le Traonmeur, appartenant vers 1908 à la famille de Bergevin.

Les seigneurs de Traon ou du Val figuraient déjà aux montres de 1534, 1544 et 1577.

Cette famille se fondit dans celle de Lesguen vers 1560 ; puis le château passe aux Huon de Kermadec vers 1710, aux Bihannic de Trornenec pendant les premières années du XIXème siècle, époque à laquelle elle devint la propriété de M. de Bergevin.

La chapelle du manoir du Traonmeur a été, pendant bien longtemps, vénérée et fréquentée dans le pays de Bohars. Autrefois, on s'y rendait processionnellement le jour de la Fête-Dieu.

Les Bergevin portent de gueules au chevron d'or, accompagné en chef de 2 grappes de raisin et en pointe d'un croissant aussi d'or.

C'est également dans un site pittoresque et boisé, embelli par de magnifiques futaies, que se blottit la belle propriété de Keramezec, ancien manoir possédé au début du XXème siècle par les familles de Parscau du Plessis et Saget de la Jonchère.

Les Parscau (Bâr Scao, la Montagne de sureau), portaient pour armes : de sable à 3 quintefeuilles d'argent et pour devise : Amseri (Temporiser).

Les Saget de la Jonchère portent de gueules à 3 flèches empennées d'argent, posées en pal, accompagnées de 3 annelets d'or, ou encore au chef d'argent chargé de 3 bandes de sable.

A côté de l'austère et antique manoir se dresse de nos jours, dans cette vaste propriété, le riant cottage aux toits pittoresques, connu sous le nom gracieux de Monplaisir.

Là, comme partout, le confort, l'élégance et la légèreté modernes ont remplacé dans les constructions de plaisance, l'imposante et souvent incommode gravité des siècles passés.

Mais le temps n'a pu modifier les grâces un peu sauvages des bois et des champs de Bohars, la verdeur de ses prés, la fraîcheur de ses ruisseaux ; et, comme jadis, ces vallons ombragés attirent dans leurs riantes solitudes les châtelains épris de la nature et qui savent en goûter les charmes, la douceur, la poésie et la paix.

De nos jours, à côté des artistes, des poètes ou des simples touristes, les archéologues sont appelés à Bohars par les ruines d'un poste retranché remontant à l'époque de l'occupation militaire de l'Armorique par les Romains.

A l'extrémité d'une crête saillante, dépendant de la ferme de Bohars-ar-C'hoat, se dressent au milieu des cultures et des arbres les restes de la forteresse romaine. Elle était une des défenses de la grande voie militaire qui joignait en ligne droite la ville d'Is à celle de Tolente, près de l'Aberwrach, en passant par Brest.

Ces ruines ont été étudiées et décrites à fond par Jourdan de la Passardière et nous ne pouvons mieux faire que de reproduire à ce sujet l'article paru sous son inspiration dans le bulletin de la Commission diocésaine d'archéologie.

« La position de Castellou-Izella, au bas du bourg de Bohars, ne présente aujourd'hui rien de particulier, si ce n'est que son nom suppose l'existence d'un Castellou-Huella, situé sur un point voisin, vraisemblablement d'altitude supérieure au bourg.

Le retranchement de Bohars-ar-C'hoat, à 500 mètres du bourg, s'élève à l'extrémité du grand taillis de Bohars-ar-C'hoat, vestige d'un bois qui rejoignait sans doute jadis les bois de Traonmeur, à quelques centaines de mètres de distance.

C'est un ouvrage octogonal, dont les saillants se sont éboulés, formant des sortes de quarts de cônes. Il a 32 à 33 mètres de diamètre inscrit jusqu'aux crêtes d'escarpe, et un commandement de 6m 20 à 7 mètres sur le fond des fossés et de 3m 50 à 4 mètres sur les terrains avoisinants. Les fossés ont une profondeur de 3 mètres ; leur largeur est de 4 mètres au fond et de 6m 70 à la crête de la contrescarpe.

La position militaire est parfaitement choisie. Les vues sur les revers du côté de Brest sont étendues, et cependant le poste est dérobé aux regards et se confond avec les reliefs environnants. Il domine un ruisseau assez important, qui coule à ses pieds et dont les eaux remplissent les fossés de ses ouvrages avancés. Ce ruisseau est coupé par une chaussée et quelques travaux insignifiants suffisaient jadis et suffiraient encore aujourd'hui pour inonder en peu d'heures toute la vallée supérieure à l'extrémité du poste ; un espace de plus d'un hectare, bordant le ruisseau, défendu par des fossés de 5 mètres de largeur, en partie comblés, et des parapets de 2m 50 de hauteur, servait sans doute de parc à bestiaux. Il est traversé par un chemin creux de 70 mètres de longueur, encavé dans le terrain naturel, parfaitement dissimulé, et qui devait l'être encore davantage autrefois par la verdure des bois formant voûte au-dessus de ses berges.

A l'intérieur, il existe des traces de murailles dans la partie voisine du chemin couvert, dont on vient de parler. On y pratiqua des fouilles du temps où M. de la Jonchère était maire de Bohars, et l'on y trouva divers objets en cuivre et, entre autres, le plat déjà décrit comme se trouvant au presbytère de Bohars.

Enfin, et à quelques centaines de mètres de distance, sur la rive opposée du ruisseau, dans un champ situé derrière la gare de Bohars, et appartenant à M. Castrec, maire de cette commune, on a trouvé depuis dix ans six coins en bronze, et l'on voit à fleur de terre des débris de poteries noires et rouges et des fragments de charbons. On trouve encore des débris analogues un peu plus haut, dans un champ qui appartient au même propriétaire et qui borde la route de Bohars à côté de sa maison ».

Ajoutons que depuis la publication de cette notice, les fouilles continuées ont sans cesse donné des résultats intéressants et fructueux. Notamment en 1905, M. Castec découvrit dans le même champ, une cachette de fondeur contenant plus de trois cents hachettes gallo-romaines en bronze, à anneau et toutes très bien conservées. Certaines d'entre elles sont ornementées ; quelques-unes laissent voir sur le milieu d'une des faces une sorte d'ornement composé d'une ligne presque droite aboutissant à un cercle vers le centre de l'objet. Les recherches vont sans doute continuer et il y a lieu de croire qu'en les menant à fond on aboutira à de nouvelles trouvailles.

Cependant, cette antique redoute n'offre plus rien de belliqueux à l'œil qui la contemple. La nature a jeté sur ces ruines guerrières son opulent manteau et sa radieuse parure. Au printemps les saillants de l'ouvrage et ses courtines s'illuminent de l'or des genêts ou des blancheurs de l'aubépine en fleurs ; les pâquerettes et les boutons d'or émaillent les fossés verdoyants. Le lierre, les ronces et les taillis grimpent sur les parapets éboulés ; de paisibles bestiaux pâturent dans les chemins couverts, de grands arbres masquent les approches ou ornent les côteaux voisins et la nuit le chant harmonieux du rossignol remplace les cris aigus et réguliers des sentinelles.

Dans le jour, c'est le calme ; tout reste en paix, et les bœufs ruminent lentement ; de loin en loin un train rapide et bruyant passe en sifflant et trouble un instant les oiseaux effarouchés. Plus rarement encore quelques promeneurs viennent pour visiter les ruines et contempler la vue.

Elle en vaut la peine. Du sommet du fortin, point culminant de la crête qu'il occupe, on domine les vallons d'alentour ; l'œil suit avec délices les sinuosités du ruisseau, la vallée verdoyante et les reliefs environnants.

Il voit apparaître par-dessus les arbres qui couronnent les hauteurs voisines, quelques toits isolés, les bâtiments de la ferme de Bohars-ar-Choat, la flèche aigue de l'église et les lointains pignons des châteaux environnants, demeure des hommes tranquilles qui ont remplacé de nos jours, les indigènes farouches, les rudes guerriers et les bruyants légionnaires disparus depuis tant de siècles.

(A. De Lorme).

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