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ÉLISA - NAPOLÉON, princesse BACIOCCHI.

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Napoleone (ou Napoléon) Elisa Baciocchi (née à Lucques, le 3 juin 1806 - morte à Colpo, le 3 février 1869), dite « Madame Napoléone », fut nommée princesse de Lucques et Piombino par Napoléon Ier (son oncle) le 27 juin 1808. Napoleone Elisa qui est née dans le nord de la Toscane en Italie, est la fille de Félix Baciocchi et d'Élisa Bonaparte, sœur de Napoléon Ier, princesse de Piombino et de Lucques, et grande-duchesse de Toscane. Le 27 novembre 1824 elle épouse le comte Filippo Camerata-Passionei di Mazzoleni (1805-1882) à Florence, qui lui donne un fils, Charles Félix Jean-Baptiste Camerata-Passionei di Mazzoleni, né en 1826 (et qui se suicide en 1853), mais le couple se sépare peu après. Déprimée, elle quitta la Cour et s’installe définitivement en Bretagne, créant une ferme moderne, encouragée en cela par son cousin Napoléon III. L'Empereur Napoléon III et l’Impératrice Eugénie lui rendent visite le  18 août 1858. Elle avait fait construire le château de Korn-er-Hoüet à Colpo, où elle est morte en 1869 à l’âge de 63 ans.

Napoleone Elisa Baciocchi et sa mère (par François Gérard, 1811).

Elisa avec sa mère.

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Sous le règne de Louis XV, un mendiant allait, la besace sur l'épaule, parcourant la campagne bretonne. On l'avait surnommé « le Roi Stéphan ». On l'accueillait avec joie, à chacun de ses passages ; on l'espérait même, car il racontait de belles histoires, il allait parfois jusqu'à prédire l'avenir. Ces prédictions étaient bien étranges : n'annonçait-il pas qu'un jour circuleraient des voitures à feu qui rendraient les routes impraticables aux troupeaux ; ne prétendait-il pas que dans cette région où pins et sapins étaient inconnus, on verrait des arbres restant verts tout l'hiver.

Et le soir à la veillée, les imaginations travaillaient parce que le Roi Stéphan avait annoncé l'arrivée d'une princesse, au lieu dit Colpo, où elle bâtirait église et château, et édifierait un bourg qui prendrait ce nom.

Devant les prédictions, les esprits forts s'esclafaient. Et ils ont cru avoir raison, car ils ont disparu avant qu'elles fussent réalisées. Mais aujourd'hui les bois de pins couvrent des milliers d'hectares de la terre bretonne ; sur les routes, automobiles et goudron ont remplacé les troupeaux et la jolie poussière blanche. Et si le roi Stéphan revient hanter les landes, s'il entend des chauffards pressés traiter les vaches de « sales bêtes », il doit se dire que les humains se connaissent bien mal.

La Princesse aussi est venue. A Colpo, elle a bâti le château, l'église et le bourg ; elle y a vécu, y a fait le bien, y est morte, et je suis allé m'incliner devant son tombeau.

Elle s'appelait Elisa-Napoléon, Princesse de Piombino, Comtesse Camerata, Princesse Baciocchi.

J'ai entrepris de vous conter son histoire, histoire fabuleuse comme celle de Napoléon, et qui ne peut se comprendre que si on place dans leur cadre, tous les personnages qui y ont été mêlés.

Et ne soyez pas surpris si cette histoire commence à la manière d'un roman d'aventures.

Napoleone (ou Napoléon) Elisa Baciocchi.

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Le 13 juin 1793, un jeune homme de 18 ans, Lucien Bonaparte, arpente mélancoliquement les quais de Toulon. Plein de confiance en soi, convaincu, comme tant de jeunes gens, qu'il suffit de n'avoir rien appris pour tout savoir, répudiant toujours les conseils de ses aînés, il n'en est pas moins inquiet, car il vient de faire une grosse sottise.

Parti de Corse quelques mois auparavant, à la suite de M. de Semonville, ambassadeur en Turquie, que les croisières anglaises ont empêché de rejoindre son poste, il a échoué à Toulon. — La famille Bonaparte est restée en Corse. Elle a pris résolument parti pour la France et sent monter autour d'elle les intrigues antifrançaises de Paoli. Tout est à craindre si l'insurrection éclate avant l'arrivée des renforts républicains réclamés à Paris. Napoléon, profitant d'une ancienne amitié avec Paoli, fait de son mieux pour retarder l'explosion. — Mais Lucien, avec la fougue de son inexpérience, passe outre aux conseils prudents de son frère. Au Club de Toulon, dans un discours ardent, il dénonce les menées de Paoli et envoie à la Convention un acte d'accusation contre lui.

Aussitôt l'insurrection éclate. La maison Bonaparte est brûlée, la famille, dispersée, erre dans le maquis. Parviendrat-elle à Toulon ?

Telle est la cause des inquiétudes de l'imprudent Lucien. Mais la Providence veille. Elle a jeté ses vues sur les Bonaparte, et voici qu'un navire paraît, d'où débarque heureusement toute la famille, fugitive et sans ressources.

Mme Bonaparte, 3 de ses fils, Lucien (18 ans), Louis (15 ans), Jérôme (9 ans), et ses 3 filles Marie-Anne (16 ans), Marie-Paoletta (13 ans), Marie-Annonciade (11 ans), s'installent à la Valette, près de Toulon. Il en seront chassés au bout d'un mois par la révolte de la ville et l'occupation anglaise. Ils s'installeront à Marseille dans l'hôtel Cipières réquisitionné pour eux.

Des deux autres fils, l'un Joseph (25 ans), part pour Paris afin d'y solliciter des subsides. L'autre Napoléon, rejoint à Nice le 4ème d'Artillerie, où il compte comme capitaine.

Telle est la situation de la famille Bonaparte, en Juin 1793.

Moins de 4 ans plus tard, en Mai 1797, voici les changements qu'aura imposés au destin le prodigieux génie du futur Empereur.

Napoléon a épousé Joséphine de Beauharnais. Il est général en chef de l'Armée d'Italie et vient de conclure avec l'Autriche les Préliminaires de Leoben.

Mme Bonaparte est toujours à Marseille avec ses filles, Marie-Anne, devenue Elisa, et Marie-Annonciade, devenue Caroline.

Joseph a épousé Julie Clary, fille d'un riche négociant de Marseille. Il vient d'être envoyé par la Corse au Conseil des Cinq Cents, et est nommé ambassadeur à Rome.

Lucien a épousé Catherine dite Christine Boyer, une excellente femme, fille d'un commerçant de Saint-Maximin. Il est commissaire-ordonnateur à Bastia, et autorisé à se présenter aux élections prochaines.

Louis est capitaine de hussards à l'Armée d'Italie.

Jérôme est en pension à Saint-Germain, dans l'institution Mac-Dermott, la plus élégante de France.

Marie-Paoletta, devenue Pauline, voyage en Italie avec son oncle Fesch, pour se consoler d'un mariage manqué. Napoléon l'appelle à son quartier général et la fiance d'office avec l'adjudant général Leclerc.

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A ce moment se produit un événement qui nous permet d'entrer dans le vif de notre sujet. Elisa tombe éperdument amoureuse du capitaine Baciocchi, en garnison à Marseille, et malgré l'opposition de Napoléon, l'épouse le 1er Mai 1797.

Elisa, aînée des sœurs de Napoléon, n'était, en véritable Corse, pas facile à contraindre. « Dès son enfance, a dit Napoléon (Antommarchi) elle fut fière, indépendante. Elle tenait tête à chacun de nous ». Son grand ami était ce jeune présomptueux de Lucien qui encourageait son entêtement. — Elle avait passé 10 ans à Saint-Cyr. Qu'y avait-elle appris ? Sans doute quelque peu de littérature et d'art, mais certes pas l'écriture, car après sa sortie, elle dut « étudier pour écrire lisiblement ».« Elle était vive, sensible et facilement émue, dit encore Napoléon, et avait la passion de dominer ». — Et cela suffit à expliquer son mariage.

Car Baciocchi est beau, peu intelligent et de caractère faible. — Bien que fils de colonel, il a mis 15 ans à devenir capitaine ; il a 35 ans, mais il a l'expérience amoureuse ; il joue agréablement du violon et Elisa est vite conquise. — Toutefois, avec son esprit vif, elle se rend bien compte des difficultés de la situation. Baciocchi lui convient. Napoléon, certes, ne pourra admettre pour beau-frère un officier médiocre, sans fortune et favorable à la faction ennemie des Paoli et des Pozzo di Borgo. Mais le jour où le mariage sera fait, le jour où Baciocchi sera entré dans le clan des Bonaparte, il faudra bien qu'il participe à l'ascension de la famille. Le tout est de savoir s'y prendre.

Elle saura. — Le 1 juin, Elisa, traînant Baciocchi, Mme Bonaparte, Caroline et Jérôme, débarque à Gênes et gagne le château de Mombello, près de Milan, où le général en chef s'est établi. — Joséphine, Joseph, Pauline, Fesch, y sont déjà. En un instant tout s'arrange. Le ménage Baciocchi est marié religieusement, le 14 Juin, dans la Chapelle du Château. Baciocchi est nommé chef de Bataillon. C'est le premier pas dans une carrière qui le fera, en 1799, adjudant général, en 1801, colonel du 26ème Léger, en 1803, Chevalier de la Légion d'Honneur, en 1804, officier du même ordre, général et sénateur, en 1805, Prince de Lucques et de Piombino, Grand-Aigle de la Légion d'Honneur, et bientôt Général de Division.

Quelque brillant qu'ait été son avancement, Baciocchi ne se fait aucune illusion. Les honneurs s'adressent en réalité à sa femme, il n'est que l'époux « à la suite ». Elisa tient à Paris, dans son hôtel de la rue de la Chaise (actuellement clinique bien connue), une cour brillante d'artistes et de littérateurs, où figurent Fontanes, Legouvé, Chateaubriand, La Harpe et tant d'autres. Baciocchi n'y paraît guère. — Plus tard, à Lucques, après avoir été couronné à côté de sa femme, il s'efface volontairement et laisse à Elisa les charges d'une administration qui lui vaut le surnom de « Semiramis de Lucques ».

En 1808, la subordination du mari à la femme est officiellement consacrée. Elisa est nommée Grande Duchesse de Toscane ; elle réside dans son palais de Florence, tandis que le prince époux se fait aménager, rue de la Pergola, une maison de plaisance où il s'occupe du commandement de sa division et se livre à des distractions sur lesquelles je n'insiste pas.

Aux parades militaires, le Prince défile devant sa souveraine et la salue de l'épée ; dans les fêtes officielles, il paraît à son côté et lui parle avec le plus gracieux sourire. On dirait le ménage le plus uni.

Et de fait, il n'est pas désuni, puisque de cette union naissent, en plus de quelques enfants morts en bas-âge, un fils né en 1814, mort vers vingt ans, et une fille qui, née près de Lucques, est morte à Colpo, à l'âge de 62 ans.

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Elle naquit le 3 Juin 1806 au Château de Marlia, paroisse de Cappanori. Elle reçut comme premier prénom, Elisa, et comme deuxième Napoléone ou Napoléon. — Lequel des deux ? Je n'ai pu voir l'acte de naissance ; mais l'acte de décès et l'inscription de son tombeau portent « Napoléon ». De même, les annuaires impériaux la désignent sous le nom d'Elisa-Napoléon, Princesse de Piombino. — Et vraiment, Napoléon lui va mieux, car son caractère viril et son physique identique à celui de son oncle, appellent plutôt un prénom masculin.

Un témoin oculaire (Ida Saint Elme), qui l'a vue souvent à la cour de Florence, a laissé d'elle le portrait suivant : « C'était une petite fille charmante. Une pétulance, une vivacité inconcevables animaient tous ses mouvements. Un orgueil très original lui faisait parfois crier dans l'expression de sa colère ou de sa joie : Je suis la petite Napoléon ». Les plus heureuses qualités de l'âme semblaient devoir embellir dans cette enfant les plus heureux dons de la nature. Je me rappelle l'avoir vue un jour courir vers une petite fille qui demandait l'aumône et que le suisse chassait assez durement de l'Avenue du Poggio impérial. Elle se mit à pleurer à la vue de la misère de la jeune mendiante, la prit par-dessous le bras pour forcer la consigne, exigea avec un ton impérieux qui était charmant qu'on lui donnât à manger, de l'argent, surtout des bas et des souliers, car sa protégée, disait-elle, devait bien souffrir des cailloux. La sous-gouvernante avait beau représenté que c'était trop que Son Altesse s'occupât elle-même de ces détails, la petite Altesse répondait avec une mine à croquer : « Mais puisque je suis la petite Napoléon, je dois être meilleure que les autres enfants ».

Mais si elle avait un cœur d'or, elle avait aussi la répartie prompte. Témoin cette anecdote (C. Aubry, « Le Roi de Rome ») : Un matin, elle avait été conviée au petit déjeuner de l'Empereur. Dans sa plus belle robe, elle était assise bien droite en face de lui. L'Empereur, qui était très taquin, s'amusa à lui dire : « Mademoiselle, j'ai appris de belles choses. Vous avez mouillé votre lit cette nuit ! ». — La petite se lève aussitôt : « Mon oncle, si vous n'avez que des bêtises à dire, je m'en vais ». — l'Empereur eut toutes les peines du monde à la faire rasseoir et à l'apaiser.

Bref, ce n'était pas une petite fille modèle, mais plutôt un bon petit diable. Ses parents n'avaient rien fait pour modifier son caractère impétueux. Son père, « le bon et rebon Baciocchi », comme l'appelait Lucien Bonaparte, n'était pas fait pour élever des enfants. Sa mère, qui l'adorait, mais que les soucis du pouvoir absorbaient, la laissait croître à sa guise et s'amusait de ses saillies.

Parvenait-elle à échapper à ses gouvernantes, on était sûr de la retrouver à l'écurie à califourchon sur un cheval, faisant enrager cochers et palefreniers qui se pliaient à tous ses caprices.

Nullement éblouie par les grandeurs, elle ne souffrit pas de la chute de l'Empire. Au contraire, la première notion qu'elle en eut fut une admirable aventure. Partie d'Italie, quinze jours avant la première abdication, pour rentrer à Paris, la famille Baciocchi fut obligée de faire demi-tour à Chambéry, par suite de l'avance des armées alliées. Elle chercha refuge à Montpellier où elle loua le château de la Piscine. — Or voici que le 15 Avril, la population se porte à l'attaque du château. Il faut fuir sous un déguisement ! Quelle joie pour une petite fille aventureuse. Par Marseille, on parvient à Bologne. On s'y installe et tandis qu'Elisa se rend en Autriche pour obtenir de l'Empereur François la levée de son séquestre, la petite Napoléon livrée à elle-même devient plus indépendante que jamais.

Pourtant, les leçons ne cessent pas. Les professeurs ne sont pas rares à Bologne. Un nouvel événement va survenir qui délivrera l'enfant des fastidieuses études. Peu de jours après le retour de l'Ile d'Elbe, un lieutenant autrichien se présente : « Ordre de l'Empereur François, il faut partir pour Brünn, en Moravie, où la famille sera internée ». — Les parents partent emmenant leur fille. On s'installe à l'auberge, puis on loue un appartement. Un appartement pour une enfant comme la petite Napoléon ! — Pauvres voisins ! — Heureusement, il y a aussi une écurie, car Elisa, sa mère, monte à cheval tous les matins. Et si, à Brünn, on trouve cochers et palefreniers, on n'y trouve pas de professeurs ! — Quelle aubaine ! — « L'enfant, écrit Elisa ne peut suivre son éducation ; elle apprend l'allemand, et c'est tout ». Les gouvernantes chargées de cet office se succèdent, rapidement lassées et chaque fois les ambassadeurs échangent gravement des notes diplomatiques. — Enfin on trouve un précepteur, M. Lauer. La petite Napoléon a tôt fait de le mettre dans sa poche. Elle l'appelle Lauerken, « mon petit Lauer » ; et le précepteur tout en constatant l'absolue indiscipline de son élève, se console en déclarant qu'elle a très bon cœur.

A ce moment, Napoléon est une petite fille de neuf ans, dont le physique et le moral rappellent beaucoup celui de l'Empereur. Dans un portrait que nous avons vu à l'Exposition du Roi de Rome, la ressemblance est déjà frappante. Elle s'accentuera encore avec l'âge. Quant au moral, il n'est pas mauvais comme certains ont voulu le dire. Elle est brusque, indépendante, autoritaire, mais elle n'est pas méchante. Comme l'Empereur son oncle, elle sait, quand elle veut, être charmante. Sa tante Caroline Murat qui, sous le nom de Comtesse de Lipona, habite le château de Hainbourg, à l'est de Vienne, vient parfois à Brünn ; les enfants des deux sœurs font de fréquents séjours les uns chez les autres. Caroline qui connaît bien sa nièce la déclare « la plus jolie petite espiègle que je connaisse ». Croyons-le et pensons simplement que l'enfant aurait eu besoin d'être guidée par une main ferme, qu'à aucun moment elle n'a rencontrée.

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Brusquement, en Mars 1816, la situation change. Metternich donne aux Baciocchi l'autorisation d'aller habiter Trieste. La seule condition est de renoncer aux titres donnés par Napoléon. Qu'à cela ne tienne. Ils s'appelleront désormais Comte et Comtesse de Compignano du nom d'un château situé près de Lucques, dont l'Empereur d'Autriche leur maintient la propriété.

Aussitôt, achat à Trieste d'une splendide maison, Campomarzo, et dans les environs d'une maison de campagne, San Andréa. — San Andréa, trop mesquine, sera remplacée en 1818 par la belle propriété de Villa Vicentina, et on songe à acquérir alentour, près d'Aquilée, des biens immenses, valant des millions.

C'est qu'Elisa est à son aise. Elle a comme on dit, mis de l'argent de côté. Elle vient de vendre à l'ex-reine d'Etrurie sa villa de Borsena, sise aux bains de Lucques. — Elle est riche. — Elle mène une existence large. — Pendant quatre ans, c'est une vie délicieuse. Entre sa mère qu'elle adore et ses chevaux qu'elle monte à califourchon, Napoléon est heureuse.

Tout à coup, pendant l'été de 1820, catastrophe. Elisa qui jusqu'alors avait été chaque année prendre les eaux de Baden ou de Carlsbad, décide de faire une cure non loin de Trieste, à Monfalcone. Elle s'y rend tous les jours en voiture, à travers les marais. Elle prend froid, une fièvre pernicieuse se déclare, et le 7 août 1820, Elisa meurt. — Sa fille, restée à Trieste pendant la maladie, pense mourir de désespoir. Elle veut se jeter par la fenêtre et on a grand peine à l'en empêcher.

Voilà donc Napoléon orpheline à 14 ans. Pour terminer son éducation, il ne faut guère compter sur son père. Ni ses enfants, ni le souvenir de sa femme ne le préoccupent. Il passe la moitié de son temps à Bologne, se dégoûte de Villa Vicentina, achète Canale, près de Goritz, vend aussi son Château de Compignano dont il renonce à porter le titre et devenu, par faveur du Pape, le Prince Baciocchi, il finit par renoncer à la campagne.

Napoléon et son frère grandissent comme ils peuvent, tantôt à Trieste ou à Schonau chez Jérôme, tantôt à Frohsdorf chez Caroline Murat. Qui pourrait reprocher à Napoléon de n'avoir pas l'éducation la plus raffinée ? Qui pourrait lui faire grief de fumer, de porter des vêtements quasi masculins, de monter à califourchon, de faire de l'escrime, de tirer au pistolet ? C'est un garçon manqué ? Plus que cela. C'est un vrai garçon. — Et pourtant, il y a, dans çette sportive infatigable, un coin d'idéal qui chaque jour se développe, grandit et finit par l'envahir toute. C'est la passion Napoléonienne. Pas un instant elle n'oublie qu'elle est « la petite Napoléon », la nièce de l'Empereur et constamment sa pensée va vers son cousin, le Fils de l'Homme, qui, orphelin comme elle, mais moins heureux, vit à Vienne une vie attristée par l'étiquette et par les souvenirs de sa petite enfance.

En dehors de son sport et de son rêve. Napoléon ne veut rien connaître. Elle vit libre, cédant toujours au premier mouvement, commettant des incartades inouïes qui valent à sa famille les pires ennuis.

Un jour, en 1828 (Bourgoing : « Le fils de Napoléon ») étant en séjour à Frohsdorf chez sa tante Murat, elle sort en voiture avec Mlle de Braye, la lectrice. Tout à coup sur la route on aperçoit un jeune homme vêtu d'un uniforme blanc. C'est lui, c'est l'Aiglon. D'un bond, Napoléon est debout. Elle se penche ; elle crie : « Tu n'as pas honte de porter l'uniforme autrichien ! ». — La lectrice est affolée. Que va-t-il arriver ? Rien. Le Prince a-t-il seulement entendu ?

En 1829, pendant un séjour chez son oncle Jérôme, qui habite maintenant à Porto di Fermo, au sud d’ Ancône, elle monte à cheval chaque matin, suivie par deux laquais en livrée. Elle chevauche ainsi jusqu'à la frontière Napolitaine et s'arrêtant en face des douaniers, leur envoie les pires invectives à l'adresse du Roi de Naples, qui a ravi le trône de son oncle Murat. — Elle fait tant qu'un beau jour le Roi Jérôme est prié de vendre sa propriété et de se retirer plus loin des frontières de Naples.

Telle est la vie de la princesse, pardon, de la comtesse, car, j'ai oublié de vous le dire, en Octobre 1824, Napoléon s'est mariée. Elle a épousé le comte Camerata, gentilhomme fort riche de la province d'Ancone. Mais cet événement a si peu d'importance dans la vie d'une femme comme Napoléon, qu'il méritait à peine d'être signalé. Mentionnons ce mari en passant, parce qu'il explique l'existence d'un fils ; notons la rapide désunion du ménage et l'inévitable séparation de 1830. Dans la vie de Napoléon, il n'y avait pas place pour un mari.

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1830. C'est l'époque où, dans une grande partie de l'Europe la révolution libérale gronde, les têtes s'échauffent. Le cerveau bouillonnant de la Comtesse Camerata ne pouvait pas échapper à la contagion. Ses amis de Paris la tiennent au courant de l'agitation et des espoirs. Les émeutes quotidiennes, après avoir renversé Charles X, assaillent à son tour Louis-Philippe. L'heure va-t-elle sonner où la France rappellera l'héritier du Grand Empereur ? Cet appel, l'Aiglon l'entendra-t-il ? Le comprendra-t-il ? Dans sa prison dorée, que voit-il du monde extérieur ?

Autant de questions qui doivent être éclaircies. La Comtesse Camerata n'hésite pas. Elle partira pour Vienne, elle verra son cousin. Elle saura. [Note : L'épisode qui va suivre est emprunté au livre du Baron de Bourgoing].

Elle demande des passeports. Le Gouvernement Autrichien, qui ne voit en elle qu'une illuminée sans importance, les accorde aussitôt. — Le 22 Octobre 1830, elle est à Vienne, descend à l'hôtel et dès le lendemain elle est en campagne. Elle apprend que l'impératrice Marie-Louise part pour l'Italie, accompagnée jusqu’à la frontière par son fils. La comtesse les attend sur la route, leur parle. L'Aiglon sait maintenant qu'une amie est là.

Pendant quelques jours, au théâtre, à la chasse, sur les bastions où manœuvre le Prince, elle le poursuit, tente de lui parler. Elle achète des complicités et le 11 novembre, comme il entre avec son précepteur dans la maison de ce dernier, elle y pénètre avec lui, lui saisit la main et la baise. « Que faites-vous ? » s'écrie le précepteur. — « Qui me refusera de baiser la main du fils de mon Souverain ? » — Le Prince passe.

Alors la comtesse écrit. Deux lettres tombent entre les mains de la police. La troisième arrive. Mais comme elle commence par ces mots : « Je vous écris pour la troisième fois », le Prince croit à une machination. Pourtant il est ému et, en vérité, le ton de la lettre est pathétique : « Au nom des horribles tourments auxquels les Rois de l'Europe ont condamné votre Père, en pensant à cette agonie du banni par laquelle ils lui ont fait expier le crime d'avoir été trop généreux envers eux, songez que vous êtes Son Fils, que Ses regards mourants se sont arrêtés sur votre image ; pénétrez-vous de tant d'horreurs et ne leurs imposez d'autre supplice que celui de vous voir assis sur le trône de France ». Le Prince appelle à son aide son fidèle ami, Prokesch. Ils lisent et relisent cette lettre, puis une autre qui arrive encore, et toujours convaincus qu'il s'agit d'un piège de la police, ils rédigent une réponse qui se termine ainsi : « Je vous prie, madame, de ne plus m'adresser de vos lignes ». — Et la lettre est signée : « Le Duc de Reichstadt ».

La Comtesse s'effondre sous ce coup et sous cette signature autrichienne. Pourtant, le lendemain, Prokesch vient la voir. Il lui explique que le Prince sait tout de la vie et de la mort de son Père, que son âme est purement française, mais que la situation en France ne lui paraît pas de nature à justifier une tentative. La Comtesse se calme et, quelques jours après, sur les instances d'ailleurs de la police, elle repart, pour Prague d'abord, puis pour son domaine de Canale.

C'est là qu'elle apprend la maladie, puis la mort de l'Aiglon. Elle part pour Rome, pleurer la fin de son rêve auprès de sa Grand'Mère, Madame Letitia, Mère de rois. Elle se retire ensuite dans ses terres, cachant sa tristesse sous la folie du sport.

Mais voici qu'un jour, une nouvelle surprenante l'atteint : l'échauffourée de Strasbourg ! Il y a donc encore un Napoléon qui pense à la Gloire passée. Quelle joie ! Désormais la vie a pour elle un but nouveau. Elle va, tendue vers le rêve d'un Empire restauré. Qu'importent les échecs, la condamnation, l'exil du nouveau prétendant. Où il y a de la vie, il y a de l'espoir, et le 10 Décembre 1848, le Prince Louis Napoléon est nommé Président de la République Française !

La Comtesse Camerata accourt à Paris avec son fils. Mais la vie de Cour n'est pas faite pour elle. Tandis que le jeune homme reçoit une place au Conseil d'Etat, elle se retire à la campagne, dans l'ancienne résidence royale de Vivier-en-Brie, entre Chaumes et Trésigny. Elle y continue sa vie de plein air. Mais lorsqu'elle revient à Paris pour assister à la proclamation de l'Empire, au mariage de Napoléon III, au baptême du Prince Impérial, elle est saluée de son nouveau titre : S. A. la Princesse Baciocchi, cousine de l'Empereur.

Pourtant, au milieu de cette splendeur retrouvée, un deuil vient de la frapper, la mort subite de son fils, décédé en pleine jeunesse en 1853. Elle ne s'en consolera jamais. — Dès lors, sans cesser de briser son corps par les exercices physiques, elle ne tendra plus son âme que vers un but unique : faire le bien.

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Or voici qu'une occasion se présente. En 1857, son ami, le Comte de la Bourdonnaye de Coet-Candec, chambellan de l'Empereur et adjoint au Maire de Grandchamp (Morbihan), la pousse à un voyage en Bretagne au cours duquel il lui montre l'extrême misère des paysans vivant entre Vannes et Locminé, dans les landes incultes de Lanvaux.

Dans cette région et particulièrement près de Colpo, les paysans sont très malheureux. Ignorant les engrais, pleins de méfiance envers la culture chère, ils ne vivent que de misérables champs de seigle et de blé noir.

La Princesse voit aussitôt une bonne œuvre à faire et un exemple à donner. A Korn-er-Houët, dans les landes boisées, vivent aux dépens des paysans environ 80 familles de bohémiens, terreur du pays. Elles sont sous la tutelle d'un chef à qui elles allouent une liste civile d'un sou par famille et par mois.

La Princesse, au lieu de chasser ces indésirables, préfère leur faire de splendides offres d'achat qui sont aussitôt acceptées. Les malheureux, largement indemnisés, partent enchantés.

Avec leur terres et les terres voisines, la Princesse se constitue un domaine de 525 hectares à peu près incultes, se fait bâtir à la hâte un chalet et commence aussitôt les travaux de drainage et de défrichement. Sa présence constante donne un tel zèle aux ouvriers que le 16 Août 1858, quand l'Empereur et l'Impératrice, au cours d'un voyage en Bretagne, viennent visiter les lieux, au milieu d'un concours immense de populations, une partie du domaine est déjà en exploitation. Au bout de 2 ans, un tiers de la propriété est clos, défriché et drainé ou irrigué. — Quatre kilomètres de routes, des maisons, des étables on été construites. Des bois ont été plantés. Au bout de 10 ans, plus de la moitié de la terre est en plein rendement.

Pour mieux s'initier aux méthodes de culture, la Princesse parcourt la France, du Pas-de-Calais aux Landes, étudie ici le desséchement des marais, là, la production de la résine, et chaque fois ce sont des transformations, des améliorations. Elle invente un rouleau à disques coupants destiné à défricher la terre et le met aussitôt en application. Pour ses chers bretons, aucune peine, aucune dépense ne lui coûte.

Mais voici que son châlet, hâtivement construit, fait eau de toutes parts, Elle construit un château, d'ailleurs sans prétention. Mais, comme elle pense plus aux autres qu'à elle-même, elle fait aussi bâtir un village neuf, dont les bâtiments publics et quatre maisons modèles sont payés sur la cassette de l'Empereur. Ce village c'est le nouveau Colpo, érigé en paroisse le 4 Juin 1864 et en commune le 21 février 1866.

L'Empereur s'intéressa à ces travaux et vint les visiter parfois. A vrai dire je n'ai trouvé, dans les journaux, trace que d'un seul de ces voyages. Mais un vieux prêtre, natif de Colpo, que j'ai vu récemment, m'a affirmé qu'il y avait eu plusieurs visites. Il s'en souvient bien, car il était à l'école, et chaque fois, il y avait congé. Or les congés, c'est quelque chose qu'on se rappelle !

Que ces séjours aient été réels ou seulement projetés, ils ont eu un résultat tangible : la construction à Vannes d'une fort belle préfecture, dont le fronton est encore décoré de l'Aigle impériale.

Mais l'Empereur n'y a pas logé. Quand il est venu, le 11 Novembre 1865, c'est au château de Colpo qu'il est descendu. Et au cours d'une longue visite, il s'est déclaré satisfait, a félicité les principaux collaborateurs de la Princesse, et décoré de Sa main M. Chartier, chef de culture. Une lettre en date du 12, confirme d'ailleurs cette excellente impression.

La Princesse décide alors d'augmenter son rayon d'action. Elle crée à Korn-er-Houet un concours agricole où les exposants affluent. Des spécialistes viennent des autres provinces et même d'Angleterre pour initier les bretons à la science agricole et à l'art des jardins. Des banquets, des bals où joue la musique militaire, accompagnent ces manifestations où sont distribuées de nombreuses récompenses accordées par la Princesse et par la Famille Impériale.

Voulant faire connaître au loin les produits bretons, la Princesse participe à de nombreux concours en Vendée et en Anjou. Elle aide les paysans à y participer aussi et n'hésite pas à subventionner leurs entreprises.

Tout le pays bénéficie de ses initiatives. Elle fait planter des pins dans la presqu'ile de Quiberon, introduit l'élevage des huîtres dans la rivière d'Auray, et les Morbihannais ignorent trop que c'est à elle qu'est dûe l'admirable industrie ostréicole qui fait aujourd'hui la richesse du département.

Elle fait d'autres tentatives. Elle obtient, pour l'élevage des poissons, la cession et la fermeture d'une baie, et y installe le domaine de Celino, devenu aujourd'hui Toulvern. Elle conseille, subventionne ses voisins, tel M. Bonnement, du domaine de Treulan, en Sainte-Anne d'Auray. — Elle favorise à tel point l'artisanat local, qu'elle exige, dans tous les bâtiments construits par elle — et ils sont nombreux — l'emploi de chevilles en bois à tête de diamant, fabriquées par un ouvrier de Saint-Goustan, faubourg d'Auray.

Elle crée enfin en 1867, pour l'arrondissement de Vannes, une section de la Société du Prince Impérial, destinée à acheter de l'outillage aux agriculteurs et artisans qui veulent s'installer.

Tout cela, elle le surveille à cheval, toujours en route, suivie d'un seul domestique, couchant dans les auberges, partageant le repas des paysans, adorée de tous.

Telle fut, dans le pays de Vannes, l'œuvre agricole de celle que je n'hésite pas à appeler la Bonne Princesse. Elle était autoritaire, elle montait à califourchon ; elle fumait ; elle portait des manteaux et des chapeaux d'homme. Je connais bien des femmes aujourd'hui qui en font autant, sans rendre à leur pays les mêmes services.

Elle a, pendant dix ans, représenté la bonté intelligente et aussi l'Empire, car rien ne s'accorde mieux.

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Avec ponctualité, avec dévouement, quoique probablement sans joie, car elle abhorrait le faste, elle accomplit son métier de princesse.

Le 18 Décembre 1864, elle inaugure dignement la ligne de chemin de fer Auray-Napoléonville, à laquelle elle avait tenté sans succès de substituer une ligne Vannes-Napoléonville, passant par Colpo. Mais sous l'Empire, le désir d'un membre de la Famille Impériale n'était pas un ordre.

Le 24 Décembre 1864, à Lorient, le 10 Novembre 1866 à Arzon, elle distribue des secours et des consolations aux victimes de graves épidémies.

Le 16 Août 1867 elle accueille à Sainte-Anne d'Auray le pèlerinage des marins de l'Amiral La Roncière Lenoury.

A chaque dîner à la Préfecture elle est présente, et porte la santé de Leurs Majestés.

Le Dimanche, elle va à la messe dans sa calèche escortée par des gendarmes à cheval.

Autant de gestes auxquels sa simplicité répugne, mais auxquels sa conscience du devoir l'oblige et qu'elle accomplit avec dignité.

Elle n'en est pas toujours récompensée, Un matin, elle constate que le drapeau blanc a été hissé sur un bâtiment du château. Plaisanterie évidente, mais dont elle est fort affectée. Elle aimerait tant se concilier l'affection de tous ! Et certes le plus grand nombre l'aime ; la Bretagne s'attache de plus en plus à l'Empire, confirmant l'enthousiasme qui en 1858 avait accueilli les Souverains. A tel point qu'il avait été question de donner au Prince Impérial le titre de Duc de Bretagne. — Et il n'a pas tenu à la princesse que ce projet n'ait abouti.

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Mais à mener à la fois la vie de Princesse et l'existence d'agriculteur, les forces s'usent vite. En janvier 1867, la nouvelle se répand que la Princesse est tombée malade, gravement malade. L'émotion est grande et l'Evêque se rend à Colpo pour donner à l'agonisante la dernière communion. Spectacle touchant de voir ce Prince de l'Eglise, à pied dans la neige, portant le Bon Dieu de l'Eglise de Colpo au Château de Korner-Houet.

Un mieux inattendu se produit : C'est la convalescence, mais jamais la guérison complète. Il faut à la Princesse une énergie surhumaine pour continuer la tâche qu'elle s'est assignée. Aidée par son neveu, le lieutenant Baciocchi, quel'Empereur lui a donné comme secrétaire des commandements, on la voit encore veillant à tout sur son domaine.

En Janvier 1868, pendant un court séjour à Rennes chez son amie la Marquise de Piré, elle glisse en montant en voiture et se fracture la cuisse. Dans cette maison froide, sans luxe et sans sonnettes, où pour se faire servir la Princesse tire des coups de pistolet, la maladie devient immédiatement très grave. L'Impératrice, puis le Prince Napoléon viennent la voir, pensant lui faire leurs adieux. Elle se remet encore, mais la fracture, mal réduite, la laisse impotente.

En Janvier 1869, elle est de nouveau sérieusement atteinte. Son ami le Dr Le Diberder la soigne avec le plus grand dévouement. On espère que des soins donnés à Paris pourront la guérir, un train spécial vient la chercher à Vannes. Il est trop tard. La malade est intransportable et le 3 Février au matin, elle meurt dans les bras de son neveu.

L'Empereur lui fait faire de superbes funérailles. Six voitures de la Cour, envoyées exprès de Paris, emportent de Vannes à Colpo les personnalités venues à la Cérémonie. Ce sont, pour la famille, le Colonel Prince Murat, Commandant les Guides, et le Comte Clary, Officier d'ordonnance de l'Empereur ; puis le Maréchal Vaillant, représentant le Souverain, le Colonel Ragon, représentant le Prince Napoléon, et toutes les autorités de la région.

Le 11 Février, à 12 h. 30, on se réunit au Château de Korn-er-Houet, tendu d'un immense voile noir. Le corps, porté par douze paysans, est mis sur un char à panaches et à dôme, traîné par quatre chevaux. Le 10ème de ligne fait la haie, et le cortège, accompagné par un clergé immense, se met en route vers l'Eglise de Colpo. L'intérieur de l'édifice est entièrement tendu de noir, et porte des écussons aux armes impériales et au chiffre de Son Altesse. Mgr Bécel monte en chaire et prononce un admirable discours sur ce texte : « Qui s'abaisse sera élevé ». Il donne l'absoute et le cercueil est descendu dans le tombeau qu'elle s'est fait construire dans le transept, du côté de l'Epître.

Ainsi finit une Princesse dont la vie agitée a donné lieu à trop de calomnies et dont je suis heureux d'avoir pu montrer la bienfaisante activité.

La fortune qu'elle légua au Prince Impérial était fort modeste. Elle comprenait des terres et des souvenirs. Mais parmi ceux-ci il en était quelques-uns qu'elle tenait de son oncle, le Grand Empereur et dont je ne puis résister à vous donner la liste :

Quelques volumes annotés par l'Empereur.
Des tabatières, y compris celles de Louis XVIII, laissées aux Tuileries et trouvées aux Cent Jours.
Un fusil de chasse de Sainte-Hélène.
Les éperons des Pyramides.
La ceinture tricolore de Jaffa.
La redingote grise de Sainte-Hélène.

Tous ces objets sont pieusement conservés à Bruxelles par le Prince Napoléon, dernier héritier mâle de la Dynastie Napoléonienne.

(M. KŒCHLIN-SCHWARTZ).

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