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ARTHUR DE RICHEMONT

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Arthur (ou Artur) de Richemont ou Arthur III 

né le 24 août 1393 à Suscinio (près de Vannes), et décédé à Nantes le 26 décembre 1458

duc de Bretagne (1457-1458), connétable de France (1425-1458). 

 Marié à trois reprises, mais n'eut pas de postérité :

le 10 octobre 1423 à Dijon, à Marguerite de Bourgogne, fille de Jean sans Peur.

le 29 août 1442 à Nérac, à Jeanne d'Albret  (1425-1445), fille de Charles II d'Albret et d'Anne d'Armagnac.

le 2 juillet 1446, à Catherine (décédée en † 1492), fille de Pierre Ier de Luxembourg, comte de Saint-Pol et de Brienne, et de Marguerite des Baux.

Il fut l'un des meilleurs généraux de Charles VII.

Tout le monde sait qu'au XIVème et au XVème siècle, en moins de cent ans, les Anglais se rendirent par deux fois maîtres de presque tout le pays de France. Repoussés d'abord par l'épée de du Guesclin, ils revinrent à la chargé ; la seconde invasion fut plus terrible, plus complète que la première : un miracle seul put l'arrêter et Dieu suscita Jeanne d'Arc pour rendre confiance et enthousiasme à l'âme française, faire reprendre au pauvre roi de Bourges la conscience de soi-même et de sa dignité qu'il semblait avoir perdue. 

Pourtant, à l'époque où tous désespéraient encore du salut, après que les défaites successives de Crevant et de Verneuil avaient anéanti les dernières ressources de Charles, à ce moment où, suivant l'expression du biographe Gruel (Note : Guillaume Gruel, écuyer d'Artur de Richemont. Il a écrit l'Histoire d'Artur III, duc de Bretagne, comte de Richemont), le royaume était « le plus au bas que jamais », un homme s'était rencontré assez audacieux pour ramasser l'épée si lourde à tenir du connétable de France que la main défaillante de Buchan venait de laisser échapper. 

Cet homme de trente ans qui assumait sur lui le « soing, curançon et charge des plus haulx affaires pour le bien du Roy et la cessacion de tous maulx » (Note : Lettres par lesquelles Charles VII institue le comte de Richemont connétable de France, 7 mars 1425), s'appelait Artur, comte de Richemont, cadet de la maison de Bretagne. 

La besogne était formidable ; d'aucuns auraient trouvé présomptueux de la mesurer. Balayer le Maine et l'Anjou en partie occupés, reconquérir entièrement Paris avec l'Ile-de-France, la Normandie, la Picardie, la Champagne, la Gascogne et la Guienne sur un ennemi nombreux, discipliné, commandé par des hommes comme Bedford, Talbot, Suffolk dont la renommée doublait la force, et, pour ce faire, n'avoir ni troupes organisées, ni argent pour en lever ; tirer parti des débris échappés aux dernières batailles, remettre au rang des bandes de coupeurs de route pour qui la solde absente était un heureux prétexte à « pilleries et roberies » sans fin, cela pouvait sembler quelque chose ! 

Cela n'était rien. Atteindre le but en dépit des mauvais vouloirs et des jalousies de toutes sortes, lutter contre les courtisans, contre le favori du jour, contre le roi lui-même, voilà ce qui rendait la tâche inabordable. Fort de sa seule opiniâtreté, Richemont l'aborda. 

L'Angleterre n'avait pas seulement conquis à Charles VII des territoires, elle l'avait isolé au centre de la France, lui enlevant l'appui de ses plus grands vassaux. Soutenue à droite par la Bretagne, à gauche par la Bourgogne, elle poussait à grands coups le coin de ses armées vers le Berry devenu coeur du Royaume. Pour la gêner dans sa besogne, il fallait lui découvrir les flancs. 

Le connétable eut le mérite de le comprendre et le bonheur de rendre presque de suite son frère (Jean V duc de Bretagne) à l'alliance française. 

Restait la Bourgogne, puissance redoutable. Lié particulièrement avec le duc dont il avait épousé la soeur, Richemont pouvait mieux que personne se flatter d'amener une rupture entre celui-ci et Glocester (Note : Il était régent d'Angleterre pendant la minorité d'Henri VI) déjà aigris l'un contre l'autre pour des motifs personnels. 

Mais la vendetta avait été proclamée entre Bourguignons et Armagnacs et le dernier cadavre était celui de Jean sans Peur. Tout au souvenir de son père, Philippe le Bon oubliait son bisaïeul Jean II de France, et la rancune qu'il gardait à son cousin Charles devenait plus profonde devant l'obstination du roi de Bourges à conserver près de lui les hommes accusés d'avoir conseillé et exécuté l'assassinat. 

Il s'agissait pour Richemont de supplanter ces favoris. La fortune lui sourit d'abord. Il se trouvait parmi les courtisans incriminés un compatriote d'Artur, le Breton Tanguy du Chastel. Sur lui pesait la plus grosse responsabilité du meurtre de Montereau, mais c'était une âme loyale : par fidélité à son maître, il consentit à l'exil pour lui-même et « aida à mettre hors ceux qui s'en devaient aller » (Gruel). 

Les Louvet, les Frotier, les d'Avangour chassés, tout fut de la peine perdue. D'autres suivirent, les favoris se succédèrent, véritable dynastie ; le faible Charles ne pouvait s'en passer. En vain Richemont les choisissait-il lui-même, il avait la main malheureuse. A peine admise dans l'intimité du Roi, la créature se retournait contre son bienfaiteur. Le connétable fut impitoyable et poussa jusqu'à la cruauté. Que l'on songe aux graves intérêts qui étaient en jeu avant de le juger. 

De Giac avait remplacé Louvet, ses exactions ne se comptaient plus. Une nuit, Richemont le fait saisir dans son lit. « Sa femme se leva lors toute nue, dit le chroniqueur, et ce fut pour sauver la vesselle ». La comédie chevauche toujours le drame. 

On fit un procès sommaire. Giac avoua tout ce qu'on voulut et même d'avoir vendu l'une de ses mains au diable. On ne lui en demandait pas tant pour le lier dans un sac et le jeter en rivière. Giac s'était maintenu plus d'une année. Camus de Beaulieu dura quatre mois. Comme il « faisait encore pis », le seigneur de Boussac, sans doute avec l'assentiment de Richemont, le fit, en plein jour et sous les fenêtres du roi, assaillir à coups d'épée. Charles supportait ces exécutions si humiliantes pour son autorité. Comme l'enfant auquel on casse un jouet, il prenait une violente colère qui s'apaisait par l'offre d'un jouet nouveau. Tels étaient la légèreté et le pauvre caractère de ce monarque. 

Après Beaulieu, La Trémoïlle entre en scène. Le roi, l'acceptant des mains du connétable, dit non sans malice : « Beau cousin, vous me le baillez mais vous en repentirez, car je le congnois mieux que vous ». Charles voyait juste. Habile et corrompu autant qu'ambitieux, rendu méfiant par l'exemple de ses prédécesseurs, La Trémoïlle allait comme eux tromper le choix de Richemont et prendre sur lui avantage. 

Malgré son activité inlassable, le connétable n'avait pu dompter le sort des armes. Ayant obtenu de son frère la mise sur pied des gens des communes de Bretagne, il avait recruté parmi ses compatriotes le noyau de la nouvelle armée. Les Dinan, les Beaumanoir, les Coëtquen, les Mauny se groupaient autour de lui ; tout faisait espérer un succès quand une panique survint au siège de Saint-James ; ce fut la déroute complète. 

Richemont s'était placé par le travers des fuyards dont sa masse d'armes dut fêler plus d'une tête. Vains efforts : le flot grossit, monte, le désarçonne ; sans le dévouement de quelques fidèles, il était foulé aux pieds. 

Les conséquences de cette défaite furent graves : le duc de Bretagne fit sa paix avec l'Angleterre. Le connétable, auquel on n'avait rien à reprocher, fut rendu responsable. On oublia le siège de Montargis levé par ses soins et, sur les instances de la Trémoille, le roi lui interdit l'accès de la cour et lui supprima sa pension. Cependant il avait mis pour 10.000 écus de ses joyaux en gage afin de solder les troupes. 

L'exil de Richemont devait durer six années, (1427-1433), durant lesquelles il ne fit qu'une courte apparition sur le théâtre de la guerre. Pendant qu'il se desséchait de rage dans l'inaction, à Parthenay, la Providence accomplissait le miracle qui devait lui rendre possible de mener à bonne fin son oeuvre. 

En 1425, au moment même où Arthur de Bretagne acceptait l'épée illustrée par Duguesclin, les voix d'en haut avaient pour la première fois parlé dans la campagne de Domrémy. 

La mission de Jeanne d'Arc s'accomplit loin des yeux du connétable. Dieu jugea sans doute que « le seul homme qui avait eu à coeur les intérêts de la monarchie et songé à sa défense » (Sismondi) n'avait pas besoin d'être témoin des prodiges d'Orléans pour prendre foi dans le secours du ciel. 

Heureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru. Il ne voulut pas toutefois lui refuser la consolation d'avoir approché l'héroïne, chevauché avec elle, cuissard à cuissard à la poursuite de l'Anglais. 

En dépit de la défense du roi, Richemont joint la Pucelle à Beaugency. Ici se place une scène curieuse : le duc d'Alençon veut exécuter les ordres de son maître, il presse Jeanne de combattre le connétable ; celle-ci hésite, elle va céder quand d'aucuns s'écrient : « que, si elle y allait, elle trouverait bien à qui parler et qu'il y  en avait à la compaignie qui seroient plustôt à luy qu'à elle et qu'ils aimeraient mieux luy et sa compaignie que toutes les pucelles du royaume »

En aucune circonstance, l'on n'avait tenu à l'héroïne langage si peu courtois et cet exemple montre de quelle manière, malgré sa réputation de dureté, Richemont avait su se faire estimer par beaucoup. 

Jeanne se décida à recevoir le connétable, son esprit de voyante ne pouvait longtemps mettre en doute les intentions loyales du Breton. Ecoutez les fières paroles dont il la salue : « Jeanne, on m'a dit que vous me voulez combattre ; je ne sçay si vous estes de par Dieu ou non. Si vous estes de par Dieu, je ne vous crains en rien, car Dieu sait mon bon vouloir ; si vous estes de par le diable, je vous crains encore moins »

A la suite de cet incident, Richemont prit une part glorieuse à la bataille de Patay. Mais, après la victoire, tandis que s'accomplissait la marche triomphante vers Reims, il dut connaître encore le chemin de l'exil. Les supplications de Jeanne elle-même, de Jeanne à qui l'on devait tant, ne purent réussir à toucher le coeur du roi et, seul de ceux qui avaient été à la peine, le connétable ne fut pas à l'honneur. D'autres le remplacèrent qui avaient moins bien besogné que lui. 

A ce moment, l'influence de la Trémoille devient de jour en jour plus pernicieuse. Non content d'avoir sacrifié Richemont, il va sacrifier la Pucelle. Tant cet homme de boue craignait toute influence capable d'arracher le roi à son existence molle et vide, à la torpeur grâce à laquelle il avait su prendre sur ce caractère sans consistance un si funeste ascendant ! 

Si la voix du roi de France ne s'est pas élevée une fois durant le long procès de Jeanne, c'est à La Trémoille qu'il faut imputer ce silence, de même que l'abandon du siège de Paris et peut-être aussi l'affaire de Compiègne (Note : Jeanne d'Arc fut prise devant Compiègne dont Guillaume de Flavy fit fermer les portes au moment même où elle allait se jeter dans la ville. La trahison de Flavy n'a du reste jamais été prouvée, bien qu'il fut lieutenant de La Trémoille). 

La reprise de Montargis par les Anglais fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase. Le mauvais vouloir du courtisan apparut si clair que l'indignation générale éclata. Un complot s'ourdit : la belle-mère du roi, la reine Yolande en était l'âme. La Trémoille fut enlevé dans son lit un beau matin. Richemont toujours éloigné de la Cour se fit représenter à la cérémonie ; son écuyer Jean de Rosnivinen porta sa dague au ventre du favori ; la graisse amortit le coup. La fortune ne s'éloignait de La Trémoille qu'à regret et comme à reculons. 

Charles d'Anjou occupa la place vacante et le connétable ne tarda pas à rentrer dans l'exercice de sa charge. 

Il n'allait pas trouver une situation beaucoup plus brillante qu'au moment de son départ. Cependant la Pucelle avait paru : si les progrès matériels accomplis depuis le siège d'Orléans étaient peu de chose comparés à ce qui restait à faire, le résultat moral s'accusait immense. Avant la venue de Jeanne, Richemont avait tenté des efforts vains, il s'était raidi contre des obstacles qui une fois renversés lui avaient laissé seulement la fatigue de la lutte, comme ces fougueux coursiers qui franchissent des barrières élevées sur une piste circulaire pour se retrouver haletants au point même d'où ils se sont élancés. 

Maintenant la route s'ouvre devant lui toute droite, encombrée encore certes, mais à chaque pas en avant le terrain demeure acquis. Puis l'âme de la nation s'est éveillée. Richemont sent tout le peuple de France derrière lui, prêt à l'étayer aux épaules. Enfin le roi ouvre les yeux. Il n'aimera jamais le connétable mais, touché par la grâce, il aura la sagesse de comprendre qu'il est l'homme nécessaire et il le soutiendra. 

Nous n'avons pas la prétention d'accompagner Richemont dans toutes ses courses ; il suffit de noter les principaux résultats de son activité ; quand l'arbre est touffu, l'on ne s'arrête pas à compter les rameaux avant de reposer à son ombre. Aussi bien, le plus infatiguable se lasserait à galoper derrière ce chevaucheur de fer guerroyant par tous pays, au nord, au sud, à l'est, à l'ouest, au centre. Campagnes du Maine, de Picardie, de Champagne, du Barrois se succèdent. Il revient soumettre Paris, enlever quelques places de l'Ile-de-France, assiste le roi sous Montereau, s'empare de Meaux où il se montre grand général, va se faire battre devant Avranches mais prend sa revanche à Creil et à Pontoise. 

Le voici aux pieds des Pyrénées, à Dax, à Saint-Sever où ses Bretons emportent la ville qu'allaient laisser échapper les gens du roi. A quelque temps de là, nous le retrouvons en Lorraine et dans le pays Messin. Enfin la campagne de Basse-Normandie et la bataille de Formigny viennent couronner sa carrière. 

L'on a voulu retirer à Richemont l'honneur de cette victoire pour le reporter au comte de Clermont. Cette opinion manque d'impartialité. Clermont avait engagé étourdiment l'action contre un ennemi de nombre double et supérieurement retranché. Après trois heures de lutte, en dépit de ses efforts et de la valeur de Brézé, il allait succomber, quand le connétable parut, prit la direction du combat et ordonna la manoeuvre qui assura le gain de la journée. Elle était décisive : Formigny fut la dernière bataille de la guerre dans le nord de la France. 

Tout cela n'est qu'une partie de l'oeuvre de Richemont et peut-être la moindre. Le général se doublait du politique et de l'administrateur. A chaque instant entre deux campagnes, parfois entre deux sièges dans une même campagne, il part, traverse la moitié du royaume pour une entrevue avec Philippe ou François Ier (les ducs de Bourgogne et de Bretagne), tombe dans une piquée rapide, sur une bande d'écorcheurs qu'il juge, condamne et fait brancher sans quitter la selle, va trouver une bonne ville afin d'obtenir des Subsides ; et, pendant qu'il court tout le long des routes, médite sur cette grande réforme de l'armée qu'il eut le mérite de concevoir le premier, de faire adopter malgré l'opposition de beaucoup de seigneurs et de capitaines et d'appliquer heureusement au milieu de difficultés de toutes sortes. 

Parmi toutes ses négociations, il faut souligner celles qui aboutirent au traité d'Arras (1485). L'honneur de la paix entre la Bourgogne et la France doit revenir pour la plus grande part au connétable. On se rappelle que cette paix avait été sa première préoccupation lors de son entrée aux affaires. Pour l'obtenir, il s'employa sans ménager sa peine et les conséquences heureuses du traité pourtant payé fort cher sont là pour donner raison à l'instinct politique qui l'avait guidé dès ses premiers pas. 

De tout les services qu'il rendit à la France celui-là doit être inscrit en première ligne avec le licenciement des routiers. Du Guesclin acquit de même son plus beau titre à la reconnaissance du peuple en le délivrant des grandes compagnies. 

Grandes compagnies, routiers, écorcheurs, fléaux du pays plus redouté que l'étranger ! Le tableau des « Escorcheurs » brossé par Monstrelet donne une idée de la terreur que ces bandes de pillards inspiraient sur leur passage : « Et la cause pourquoy ils avaient ce nom, si estait pour tant que toutes gens qui étaient rencontrés d'eulx tant de leur parti comme d'aultre estoient devestus de leurs habillements tout au net jusques à la chemise »

Maintenant, l'on pourra se demander pourquoi, après tant de services rendus à la France et particulièrement au peuple envers lequel il se montra toujours plein de mansuétude, la mémoire de Richemont n'est pas restée populaire comme celle du grand Bertrand ? 

L'antipathie instinctive du roi, la jalousie de beaucoup de courtisans ne suffisent pas à expliquer cette impopularité. Duguesclin aussi avait eu à essuyer la bave de l'envie, d'autant qu'il était un peu un parvenu, écuyer de petite noblesse, n'ayant gagné qu'à grande sueur le cimier à pennon, la bannière et le fourreau fleurdelisé. 

Richemont était né grand seigneur. De caractère rude, de mine rébarbative, il conserva toujours une certaine morgue, manqua de cette bonhomie particulière au héros de Broons. Tous deux furent très aumôniers, mais leurs largesses durent être différentes et, quand Bertrand vidait sa bourse dans la main d'un pauvre hère, Richemont jetait les écus du haut de son destrier. 

Duguesclin fut toujours soutenu par Charles V qui lui ouvrit largement ses coffres. Richemont, que la cour laissa maintes fois sans argent, dût se tirer d'affaires tout seul, il fut souvent obligé de grever la population de lourds impôts pour soutenir la guerre. Le peuple se souvient de ce qu'il a payé. 

Et puis, il manqua surtout à Artur (Arthur) de Bretagne d'avoir été un héros de roman, d'avoir accompli par la seule force de son bras de ces exploits quasi fabuleux qu'on raconte le soir aux veillées : duels à outrance, surprises de castels, ravitaillements de place exécutés avec une audace inouïe et qui ont fait de la jeunesse de Bertrand un poème de la Table Ronde

Richemont avait le courage impassible. Instruit par les revers, il assista et fut pris à la bataille d'Azincourt, — il éprouvait comme une répugnance à tenter des coups de fortune et préféra souvent refuser le combat que de risquer une défaite. Le Français comprend mal ce genre de bravoure. 

Enfin, il n'eut jamais un de ces mots à la Henri IV nécessaires chez nous pour consacrer une renommée. Pour tout dire : il était triste. Le seul portrait de lui qui nous soit parvenu le représente armé de toutes pièces, hormis la défense de tête, son bâton de commandement à la main, coiffé d'un chapeau rond de velours. Œil dur, nez proéminent, lèvre chagrine, c'est bien l'homme qui signait ses lettres au duc d'Orléans : « Vostre vielle lype ». L'on goûte peu les caractères moroses. 

S'il fallait encore trouver une raison à l'effacement dans lequel l'histoire plus perspicace que le peuple a laissé Arthur de Bretagne, je dirais ceci : certains souvenirs suffisent à eux seuls pour auréoler une époque. Le XVème siècle s'appelle et doit s'appeler le siècle de Jeanne d'Arc ; à côté de ce nom, tout autre pâlit, il n'y a pas deux soleils. 

Quoi qu'il en soit et pour reprendre la conclusion par laquelle M. Cosneau a couronné son bel ouvrage sur Arthur de Bretagne : « Parmi les hommes célèbres du règne de Charles VII, le Bien Servi, s'il en est un qui mérite d'occuper à côté de Jeanne d'Arc le premier rang, on peut affirmer, tout bien pesé, que c'est le connétable de Richemont » (Le Connétable de Richemont, par E. Cosneau). 

Il fallait rendre justice à celui qu'on a surnommé le Justicier et montrer suivant la parole de Michelet que de tous temps « la meilleure arme de la France contre la Grande Bretagne avait été la Bretagne ». Que serait-il arrivé si, au lieu d'épouser successivement deux rois de France, la duchesse Anne eut choisi un mari de sang breton, Rieux, Rohan ou Laval ? Elle le pouvait sans déchoir ; les héritiers de ces maisons illustres marchaient de pair avec la fille des Dreux ? 

L'Armorique conservait alors son indépendance et qui sait ? 

Au moment de la tourmente révolutionnaire, si au lieu de s'user en luttes stériles, de combattre par bandes isolées et manquant de cohésion contre les armées de la République, la Bretagne marchant à la suite d'un chef avait pu unifier son effort, donner la main à la Vendée et s'avancer sur Paris ? La défaite du Mans n'eut pas eu lieu, la Capitale pouvait être reconquise. Pour la troisième fois, la petite Bretagne aurait sauvé la France, non plus de l'étranger mais d'elle-même ! 

Il ne devait pas en être ainsi : Richemont vint l'avant-dernier de la lignée s'asseoir sur le trône des ducs. 

La Bretagne, devenue française, se vit peu à peu enlever par les Francs ses vieilles franchises, mutiler en cinq départements, englober dans le système de centralisation à outrance. 

La langue kymrique s'éteint et dans les bancs-coffres des fermes les riches costumes ne s'entassent plus. 

De tout le passé, il ne subsiste plus qu'une chose les vieux calvaires que les Bretons têtus s'entêtent à relever à mesure que les gens de l'est font efforts pour les démolir. A chaque carrefour une croix s'élève, de, nouvelles viennent grossir le nombre des anciennes et les descendants des connétables bretons qui sauvèrent la France enseignent encore par là aux Français qui foulent leur sol quels sont leurs arbres de salut. 

J. Urvoy de Closmadeuc

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