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PROSPERITE DE L'ABBAYE DE BLANCHE-COURONNE.

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La plus belle époque pour nos abbayes fondées depuis les invasions normandes, a été celle qui s'étend du XIème siècle à la seconde moitié du XIIIème.

Au lendemain de ces invasions qui ont couvert la France de ruines, la société se ressaisit. Désormais pleine de confiance dans l'avenir, animée par une foi ardente, elle multiplie sur son sol ces établissements religieux dont elle espère le plus grand secours pour sa restauration.

C'est le temps où nos belles cathédrales s'agenouillent dans leur robe de pierre, entonnant l'Hosannah des peuples nouveaux nés.

Les villes ne sont pas seules à élever, dans les siècles que l'ignorance traite de barbares, ces édifices qui feront l'admiration des siècles. Les solitudes les plus profondes attirent les âmes avides de paix, de silence, de repos et qui, ne pouvant trouver ces biens dans le monde, le fuient pour venir les chercher près de Dieu.

Des bois impénétrables s'abattent, des marais malsains se dessèchent, des terrains abandonnés se cultivent, des déserts se peuplent. Des moines donnent un coup de pioche dans un endroit jusque-là improductif, et sous ce coup, sort une source de vie qui répandra dans toute la contrée la fertilité, la richesse et tous les avantages qu'une exploitation agricole, conduite par une administration habile, peut apporter à tout un pays.

Pour cette exploitation, il faut des hommes. L'abbaye en a. Elle est même dotée d'un personnel comme aucune administration n'en possède jamais. Elle a elle-même formé toutes ces compétences qui se consacrent jusqu'à la mort à son service. Ses écoles ouvertes à tous ceux qui désirent s'instruire lui ont permis de développer toutes les intelligences selon leurs aptitudes. Elle a ses artistes, elle a ses hommes de métier. Aux uns elle confie la conception et la direction des travaux, aux autres, leur exécution. Elle trouve dans son personnel des architectes, des ingénieurs, des entrepreneurs, des maçons, des forgerons, des charpentiers, des menuisiers, en un mot toute la gamme des artisans requis pour de grandes constructions.

Pour ces constructions, elle emploie une main-d'oeuvre incomparable. Ce personnel, recruté parmi les moines, est laborieux et consciencieux. Les moines ignorent la journée de huit heures, la grève même perlée, les gros salaires prohibitifs de travaux importants. Leur vie se partage entre la prière et ce travail. Il est même parmi eux un adage qui met les deux choses sur le même pied d'égalité, Qui laborat, orat, « travailler c'est prier », c'est peut-être par horreur de la prière sous toutes ses formes et par un laïcisme exagéré que l'on trouve de plus en plus, de nos jours, des ouvriers qui s'ingénient à faire peu de chose et à le faire mal en beaucoup de temps.

Avec les méthodes de travail actuelles, avec la journée de huit heures, nos grandes cathédrales commencées au XIIème ou au XIIIème siècle ne seraient pas encore finies.

Nos moines sont des ouvriers conscients, mais conscients de leurs devoirs, et non pas de leurs droits. Ils travaillent sous le regard de Dieu et seulement pour lui. Chacune de leur journées passées sous l'oeil d'un tel Maître, apporte à l'entreprise le plus grand rendement possible. Pour eux, pas de sabotage. Ils veillent sur le matériel de la communauté comme s'il leur appartenait en propre ; en leur âme et conscience, c'est pécher contre leur règlement que de perdre un instant, que de laisser détériorer ce matériel par leur faute. Pour tout salaire, ils se contentent de leur nourriture et de leur entretien : ils réalisent à la lettre la parole de l'Apôtre : Habentes alimenta et quibus legamur, his contenti sumus. Le reste, ils l'abandonnent à la masse qui s'en augmente, n'escomptant pour toute gratification personnelle que celle dont Dieu récompense leurs travaux.

C'est ainsi que, dans les abbayes, l'individu travaille pour la collectivité qui lui assure simplement ses moyens d'existence. C'est, dira-t-on, du pur communisme. D'accord : mais il y a communisme et communisme. L'un consiste dans le sacrifice, dans le désintéressement de l'individu qui, pour un motif qui lui sourit, abandonne à la communauté tout ce qui n'est pas indispensable à son existence. L'autre procède de l'égoïsme de l'individu qui n'apporte à la masse que sa volonté de ne rien faire avec celle de jouir de ce que les autres lui apportent par leurs travaux : double disposition dont la communauté ne tire aucun profit. De ces deux communismes, le plus rare et le moins à craindre pourrait bien être le premier.

Le communisme est le régime social qui demande le plus de vertus. Des expériences contemporaines établissent plutôt que c'est celui qui en fait naître le moins.

Avec la main-d'oeuvre, pour la construction de ces abbayes, pour leur entretien, pour le succès de ces grandes exploitations agricoles, il a fallu des ressources abondantes. Ceux qui, de nos jours, sont à la tête d'usines ou d'entreprises analogues savent ce qu'il faut avoir de fonds à sa disposition.

A l'origine, les ressources de l'Abbaye lui sont venues d'offrandes volontaires. Un seigneur offre à des moines un terrain pour la construction d'un monastère ainsi qu'un pourpris qui, grâce à leur travail, suffira pour les faire vivre eux et leurs successeurs, la générosité du seigneur en suscite d'autres et de nombreux dons de terrains ne tardent pas à créer autour du nouvel établissement un domaine important.

De nombreux motifs inspirent ces charités. Tantôt la piété du seigneur se propose la gloire de Dieu et l'augmentation de son culte. Tantôt des remords de conscience le poussent sans relâche à réparer des fautes commises, à faire des restitutions dont la crainte et l'approche de la mort lui montrent mieux la nécessité urgente. Quand le diable se fait vieux, il se fait ermite. Plus d'une fois on vit alors de puissants seigneurs demander humblement à mourir sous l'habit de moine, dans une abbaye dont, dans leur jeunesse, ils ne s'étaient pas gênés de piller les biens.

D'autres fois, un seigneur veut assurer à ses vassaux tous les avantages que des habitants de la campagne pouvaient tirer de la fréquentation des moines qui les initiaient à leurs méthodes de travail. Ils voyaient dans cet établissement, un élément de civilisation pour une population qui vivait loin des villes. Cette population accueille avec empressement ces étrangers qui viennent à eux dans ces dispositions charitables. Elle ne tarde pas à éprouver qu'il vaut mieux vivre sous sa crosse que sous l'épée. Elle aime son abbaye et fait tout pour sa prospérité, et des habitants qui possèdent un champ, une vigne, une prairie donnent spontanément leur bien aux moines, pour avoir droit à leurs prières, et même quelquefois, pour s'assurer le pain de leurs vieux jours.

C'est ainsi que l'abbaye de Blanche-Couronne, fondée dans la première moitié du XIIème siècle par des seigneurs de Pontchâteau et agrandie par les libéralités des seigneurs de Donges, de la Roche-Bernard, de Lavau, de Mareuil et autres qui figurent dans la liste de ses bienfaiteurs publiée par ailleurs, possédait dès la fin du XIIIème siècle presque tous les biens qu'elle conserva jusqu'à la Révolution.

Dans la bulle accordée à Blanche-Couronne en 1239 le pape Grégoire IX prenait sous sa protection « le lieu lui-même où est situé ledit monastère avec ses granges ».

Ce serait beaucoup trop restreindre le sens de ce dernier mot que de l'appliquer exclusivement aux dépendances qui pouvaient se trouver dans l'enceinte du monastère, et où l'on entassait les récoltes suffisantes pour la consommation de tout son personnel, et pour l'alimentation des animaux à son service et à son usage.

L'abbaye s'élevait au milieu de grandes terres qu'elle pouvait faire exploiter par un personnel résidant continuellement dans ses murs. Mais elle en possédait encore d'autres parfois très éloignées, et dont la culture réclamait un personnel résidant sur place. C'étaient autant de centres d'exploitation que, le plus souvent, on qualifiait du nom de : grange. La grange était un établissement où l'on serrait toutes les récoltes du domaine éloigné de l'abbaye. Quand ce domaine était important la grange finissait par reproduire en petit l'abbaye elle-même. On y voyait une modeste maison pour la colonie agricole, des dépendances comprenant : greniers, étables, celliers, hangards et, quand le personnel était assez nombreux, une chapelle : le tout donnant sur une grande cour d'où émergeait la margelle d'un puits, et dans laquelle on entrait par un grand portail, à l'usage des charrettes, flanqué d'un petit à l'usage des piétons.

Ces granges étaient à l'origine sous la direction et la surveillance d'un moine désigné par l'abbé, d'après ses qualités et ses aptitudes. Il représentait l'abbé pour tout le personnel de la colonie ; par ailleurs il restait dépendant de lui et restait soumis à son égard à certains devoirs destinés à rappeler cette dépendance. On lui donnait le nom de prieur ; d'où plusieurs de ces granges ont fini par être appelées « prieurés ».

Parfois la grange, grâce à un accroissement de domaine dû à des donations et acquisitions diverses, devenait si importante que cette succursale de l'abbaye était érigée en une autre abbaye. C'est ainsi que la Grange de Villeneuve donnée à l'abbaye de Buzay en 1150 fut enfin détachée de Buzay pour devenir en 1201 l'abbaye de Villeneuve.

Le nom de grange est assez répandu parmi les noms de lieu. On peut dire que très souvent ce nom désigne un ancien centre d'exploitation monastique. Du XIème au XIIIème siècle les titres de diverses abbayes parlent souvent de ces granges. Les moines y ont laissé leur souvenir dans des travaux utiles : puits, fosses, étangs avec écluses, etc ; travaux dont toutes les générations ont continué de jouir.

Il est regrettable que la Bulle de 1239, en plaçant sous la protection du Saint-Siège « les granges » de Blanche-Couronne, ne fasse pas connaître les noms de ces granges. D'ordinaire, au XIIème siècle surtout, les privilèges pontificaux sont plus explicites, et l'on peut y relever la liste de la plupart des biens possédés par le monastère auquel ces biens sont confirmés. C'est même dans ces documents que nous trouvons la plus ancienne mention de la plus grande partie des paroisses du diocèse. Souvent on ignore comment telle abbaye lointaine est venue en la possession de telle paroisse, mais le fait même de cette possession est indéniable : le privilège pontifical est un bordereau officiel de toutes les propriétés qui appartenaient à cette abbaye à l'époque où il a été rédigé.

Toutefois, si la bulle de Grégoire IX omet de donner les noms des granges de Blanche-Couronne, des documents postérieurs permettent de combler cette lacune. Cette abbaye a possédé cinq bénéfices dans le diocèse, savoir : les prieurés de Langle-Chaillou, en Saint-Donatien ; du Tertre, en Lavau ; de la Madeleine d'If, en Plessé, près du Gâvre ; du Portau, en Sainte-Marie, et l'aumônerie de Saint-Julien, à Bouin.

Sans entrer, pour le moment, en plus de détails sur chacun de ces bénéfices, bornons-nous à dire que, à part ce dernier fondé et donné à Blanche-Couronne au XVème siècle, ils existaient tous dès XIIIème. Les actes relatifs à leur fondation ont été détruits probablement en même temps que ceux de la fondation de l'abbaye, et par la même cause ; mais différentes indications, tirées de çà et de là, supposent leur existence non seulement au XIIIème siècle, mais même au XIIème. Aussi n'hésitons-nous pas à croire que ce sont ces quatre prieurés qui sont désignés sous le nom général de « granges » dans la bulle de Grégoire IX.

Ainsi, l'abbaye fondée au XIIème siècle était dans toute sa prospérité au plus tard au XIIIème. Elle voyait graviter autour d'elle les quatre satellites qui s'en étaient détachés et qui, cependant, continuaient de vivre dans son orbite. Cette dépendance demeura entière tant que ces prieurés furent desservis par des moines nommés à leur administration par l'abbé de Blanche-Couronne. Mais quand ces prieurés furent tombés en commende, les prieurs commendataires, souvent étrangers au pays, ne cherchèrent qu'à dégager de plus en plus leurs prieurés de toute sujétion à l'égard de l'abbaye-mère qui finit par n'avoir plus sur eux que quelques droits vagues dont l'exercice lui procurait encore quelque honneur mais peu de profit. (G. Durville).

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