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ABBAYE DE BLANCHE-COURONNE.

S'est-elle appelée Font-Douce ou Coët-Quen ?

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Le recours que nous avons fait aux archives de l'abbaye de la Grenetière nous a révélé un nom que l'abbé Travers a également trouvé dans les documents relatifs aux commencements de Blanche-Couronne : celui de « Font-Douce », « Fons dulcis ».

Exilé chez les Cordeliers de Savenay, à cause de son jansénisme, l'historien nantais se trouvait trop près de Blanche-Couronne pour ne pas céder à son honorable passion pour les vieux parchemins et a consulté largement les archives de l'abbaye. Il a eu la bonne pensée d'y copier plusieurs chartes anciennes dont les originaux ont péri depuis. Il en a utilisé d'autres dont nous ne connaissons plus la teneur que par ce qu'il nous en a transmis. Dans le fonds de Blanche-Couronne, conservé aux Archives départementales, on trouve plusieurs documents, inventaires ou analyses, d'une écriture qui se rapproche de bien près de la sienne. Que ces transcriptions soient ou non de sa main, on peut dire que Travers pour se distraire dans son exil de Savenay, a consulté toutes les archives de Blanche-Couronne et qu'il a vu bien des titres anéantis à l'époque de la Révolution.

C'est vraisemblablement dans ces titres qui n'existent plus qu'il a rencontré le nom de « Douce Fontaine » : rencontre qui lui a fait émettre une opinion que ce que nous avons dit plus haut nous permettra de rectifier.

Parlant du nom de Blanche-Couronne voici ce qu'il en dit : « On a, autrefois, donné le nom de Coët-Quen à cette abbaye, à cause du beau bois dont elle était ceinte. Le mot Coët, en celtique, signifie bois, et celui de quen ou guen signifie beau et blanc. On l'a aussi appelée, d'une excellente source qui y coule, l'abbaye de " Douce Fontaine " et on la trouve sous ce nom dans son ancien martyrologe ou obituaire ; enfin, " Blanche-Couronne ", à cause du bois dont elle était environnée en forme de couronne ».

Ainsi, d'après Travers, les noms de Douce-Fontaine, Fonte dulci, et de Blanche-Couronne n'auraient désigné, autrefois, qu'un seul et même monastère ; et la preuve qu'il nous en donne, c'est que c'est sous le nom de « Douce Fontaine » que Blanche-Couronne paraît « dans son ancien martyrologe ou obituaire ».

Il est bon de faire remarquer que le martyrologe ou obituaire d'une abbaye ne mentionne pas exclusivement les noms de ses abbés. On y trouve couramment les noms des membres des autres abbayes avec lesquelles un monastère se trouvait en relations plus étroites et qui suivaient la même règle.

Ceci posé, la rencontre du nom de Douce Fontaine ou Font-Douce dans le matyrologe de Blanche-Couronne n'a rien qui surprenne. Ces deux abbayes appartenaient au même ordre. Le document collectif de 1180 environ, qui mentionne à la fois les abbés de Font-Douce et de Blanche-Couronne, abbates de Fonte Dulci, de Alba Corona, nous révèle expressément ce détail dont nous tirerons tout à l'heure une autre conclusion. Les messes fondées par les cinq abbés seront célébrées, disent-ils, « dans chaque abbaye de notre Ordre », in unaquaque abbatia ordinis nostri. De là à conclure qu'il y avait entre Font-Douce et Blanche-Couronne une union de prières, il n'y a qu'un pas. Or, cette union de prières assurait à l'abbé de l'un des monastères le bénéfice des prières de l'autre, et ces obituaires étaient les Memento des défunts même étrangers pour lesquel les abbayes de même famille avaient des raisons de prier.

Même la rencontre à Blanche-Couronne d'une « excellente source » assez remarquable pour mériter de donner son nom à une abbaye, ne nous convertirait pas à l'opinion de Travers. On rencontre trop souvent des traditions posthumes introduites quelquefois très tardivement dans l'histoire par l'imagination féconde des auteurs. L'opinion de Travers, vulgarisée par Ogée, a très bien pu faire baptiser du nom de « Douce Fontaine » une fontaine quelconque des environs. Mais cette appellation n'aurait par elle-même aucune force probante. Il faudrait prouver qu'elle remonte aux temps les plus anciens.

Travers n'a pas eu le moindre soupçon des rapports lointains qui ont existé entre Blanche-Couronne et l'abbaye saintongeoise de Font-Douce. Rencontrant le nom de « Font-Douce » dans un obituaire de l'abbaye nantaise, il a attribué à Blanche-Couronne ce qui concernait Font-Douce et en a conclu que notre abbaye avait porté les deux noms.

Il est certain que, au XIIème siècle, le nom de Font-Douce, Fons dulcis, était porté par une abbaye du diocèse de Saintes. Ce nom, d'après ce qu'en rapporte D. Mabillon, lui avait été donné non pas tant à cause de la douceur des eaux qui s'y trouvaient qu'à cause de la douceur que la vie religieuse réserve à ceux qui y puisent. Il est invraisemblable qu'un même nom ait été donné à deux abbayes fondées à la même époque. L'abbaye saintongeoise avait la priorité de l'appellation : ses relations avec Blanche‑Couronne expliquent suffisamment la rencontre de son nom dans l'obituaire de cette dernière abbaye.

D'après le passage précité de Travers, avec le nom limpide et rafraîchissant de « Douce Fontaine » l'abbaye de Blanche-Couronne aurait encore porté le nom de « Coët-quen » en breton « Bois Blanc » ou « Beau Bois ». Nous n'avons trouvé cette appellation dans aucun des documents actuellement conservés soit aux Archives départementales, soit dans le fonds des Blancs-Manteaux, à la Bibliothèque Nationale. Aussi bien, nous semble-t-il que Travers l'a tirée d'un titre de Marmoutier, relatif au prieuré de Pontchâteau.

Dans les quelques notes manuscrites conservées avec les archives de Blanche-Couronne, et dont l'écriture rappelle celle de l'abbé Travers, nous en relevons une dont voici la traduction : « Cet endroit s'est appelé autrefois Coigien, d'après une charte de 1198, par laquelle les moines de Blanche-Couronne et les moines de Marmoutier à Pontchâteau font un accord au sujet des dîmes de terres situées à la Chapelle-Launay, parmi lesquelles terres se trouvent " Coigien ", actuellement Blanche-Couronne. En breton, Coi signifie " bois " et " guen " signifie " blanc " : nom qui vient de ce que le monastère de ladite abbaye était de tous côtés entouré d'un bois ».

Rapprochons de cette note marginale manuscrite ce que nous lisons dans l'ouvrage imprimé de l'abbé Travers. « On a donné autrefois le nom de Coët-quen à cette abbaye, à cause du beau bois dont elle était ceinte. Le mot Goa, en celtique, signifie « bois » et celui de quen ou guen signifie " beau " et " blanc " ».

Ces deux passages offrent trop de ressemblances pour ne pas provenir d'une même origine. Travers, ici, semble avoir utilisé, dans son Histoire de Nantes, la note manuscrite latine que nous venons de traduire.

Cette observation nous amène aux deux conclusions suivantes : 1° Le nom de Coët-quen est, pour Travers, l'équivalent du mot Coigien qu'il trouve dans un document de 1198 ; 2° Ce mot est tiré non pas d'un titre de Blanche-Couronne, mais d'un titre du prieuré de Pontchâteau. Nous avouons ne voir aucun rapport philologique entre « Coigien » et « Coët-guen » ou « Coët-quen » : le second nom nous semble une interprétation fort fantastique du premier. Par ailleurs, il est étrange que dans tous les titres si nombreux de Blanche-Couronne, il ne s'en trouve aucun à donner à l'abbaye le nom de « Coigien » ; et qu'un titre du prieuré de Pontchâteau soit le seul à mentionner ce nom.

Nous ne nous attarderons pas, avec d'autres auteurs, à rechercher la nature de ce bois blanc ; s'il était, par exemple, de bouleaux ou d'autres essences. Nous voulons simplement faire remarquer que l'opinion d'après laquelle l'abbaye de Blanche-Couronne se serait appelée primitivement Coët-quen, repose uniquement sur l'interprétation d'un auteur en mal d'étymologie. Dans toutes ses chartes du XIIème et du XIIIème siècles, l'abbaye est appelée Alba Corona, Sancta Maria de Alba Corona, Blanche-Couronne, Sainte-Marie ou Notre-Dame de Blanche-Couronne.

D'où pouvait venir ce nom ? On en a donné plusieurs explications. Si l'on voulait tirer à ce sujet une indication des armes de l'abbaye, ces armes représentant une couronne royale, on pourrait admettre que le nom de Blanche-Couronne est une allusion au couronnement de la Vierge : mais ces armes ne nous semblent pas assez anciennes pour qu'on en puisse sûrement tirer pareille conclusion.

Quant à l'opinion qui tire le nom de Blanche-Couronne d'un bois qui l'entourait comme d'une couronne, elle nous semble plus naturelle et satisfaisante que d'autres, mais il ne faudrait pas adopter en sa faveur la transformation inadmissible de « Coigien » en « Coët-quen » et prendre Blanche-Couronne pour un succédané étymologique de « Bois-Blanc ».

En 1122 fut fondée, dans le diocèse d'Angoulême, une abbaye nommée « la Couronne », d'une couronne de côteaux qui l'entouraient. C'est cette abbaye que conserve ce que dit saint Bernard quand, dans sa lettre 218 au pape Eugène III, il parle « des saints frères de la Couronne », sanctorum fratrum de Corona.

Cette abbaye s'est trouvée, elle aussi en rapport avec celle de Font-Douce. Nous en rappelons le souvenir simplement pour qu'une similitude de nom n'apporte pas de la confusion dans l'histoire de chacun de ces établissements (G. Durville).

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